“Je n’ai jamais eu un tel piquet de chevaux !”, Marc Dilasser

En 2017, Marc Dilasser a pu à nouveau enfiler la veste bleue de l’équipe de France. Couronné lors du championnat national l’année précédente avec Cliffton Belesbat, le Normand a en effet concouru en Coupes des nations de première division, ce qui lui a valu une sélection pour les championnats d’Europe Longines de Göteborg. À la tête d’une structure solidifiée et grâce à des propriétaires fidèles, le cavalier discret et mesuré nourrit de belles ambitions pour 2018. Formateur hors-pairs de jeunes chevaux pendant de longues années, Marc Dilasser a fait le point pour GRANDPRIX-Replay.com. Entretien.



Marc Dilasser sur la piste de Göteborg, à l'occasion de la warm up des championnats d'Europe.

Marc Dilasser sur la piste de Göteborg, à l'occasion de la warm up des championnats d'Europe.

© Sportfot

GRANDPRIX-Replay.com : Quel bilan tirez-vous de votre année 2017 ? 
Marc Dilasser : 2017 a été pour moi l'année du retour au plus haut niveau, ce qui était un réel objectif. Cliffton a couru les Coupes des nations de Saint Gall, Hickstead et Dublin avec en ligne de mire les championnats d’Europe de Göteborg. Nous avons été sélectionnés, et même si nous avons été réservistes, m’y rendre était quelque chose qui me tenait vraiment à cœur. Il a également été racheté par le haras de Belesbat, c’était vraiment une très bonne nouvelle de voir que mes nouveaux propriétaires confirmaient leur implication.
 
GPR. : Comment avez-vous vécu les championnats d’Europe Longines de Göteborg et quel souvenir en gardez-vous ? 
M.D. : Un championnat, c’est quelque chose de très particulier. L’ambiance y est vraiment différente. Philippe (Guerdat, sélectionneur de l’équipe de France, ndlr) nous a annoncé quel couple serait réserviste au tout dernier moment, après la warm up. Nous nous doutions bien que cela se jouerait entre Mathieu (Billot, ndlr) et moi, sauf blessure des trois autres chevaux. Jusqu’à la veille de la Chasse, j’étais dans les starting-blocks pour m’élancer.
Il ne s’agit pas d’un concours comme les autres, et c’est vraiment une expérience très enrichissante. La tension y est beaucoup plus forte, et les retombées sont bien différentes en fonction de la performance réalisée.
 
GPR. : Vous avez préféré faire l’impasse sur la finale de la Coupe des nations Longines de Barcelone pour vous préserver votre meilleur cheval Cliffton Belesbat. Comment va-t-il ? 
M.D : Cliffton va vraiment très bien, il est vraiment en pleine forme ! Il n’avait jamais couru de CSI 5* avant 2017 et a eu un été chargé. En trois mois, il a pris part à cinq concours d’un tel niveau, même si je l’ai préservé en ne prenant pas le départ des Grands Prix de Dublin et d’Hickstead. J’avais peur que la finale de Barcelone soit le concours de trop. Dans ces concours-là, nous n’avons pas vraiment le choix de nous élancer ou non, même si le cheval n’est pas à cent-pour-cent de sa forme il faut servir l’équipe. En accord avec Philippe, j’ai donc préféré laisser souffler mon cheval. Je ne voulais pas le fatiguer, et à l’issue de cet été, j’ai voulu le laisser souffler.
Je ne voulais pas non plus concourir en indoor avec lui, c’était prévu, et nous n’étions pas vraiment prêts. Aller faire des CSI 2* ou 3* avec un cheval comme cela ne m’intéressait pas, les saisons sont vraiment très longues donc j’ai décidé avec mes propriétaires qu’il ferait sa rentrée en extérieur. Il va recommencer gentiment à Royan, avant d’aller à Cagnes-sur-Mer. Ensuite, nous aviserons avec Philippe en fonction de la forme du cheval.  


“Une grande volonté de rester en équipe de France”

Reconnaissable parmi tous grâce à sa robe pie, Utah van de Rock devrait concourir sur de belles épreuves cette année.

Reconnaissable parmi tous grâce à sa robe pie, Utah van de Rock devrait concourir sur de belles épreuves cette année.

© Scoopdyga

GPR. : L’année a débuté avec une bonne nouvelle puisque le haras de Belesbat, Caroline Bou et vous-même avez racheté Utah van de Rock. Comment se compose votre piquet de chevaux de haut niveau ? 
M.D. : Ça a été une très bonne nouvelle ! Cette année, j’ai vraiment un super lot de chevaux. Il y a aussi Indigo Blue Biolley qui pointe le bout de son nez, et qui était classé dans la finale du Grand National au Mans et a remporté les Six Barres à Paris. Il était encore classé dans le Grand Prix CSI 2* de Nantes il y a deux semaines. Cette année, je pourrais donc compter trois chevaux de Grand Prix qui se sont déjà classés sur 1,50m. Je n’ai jamais eu un tel piquet de chevaux ! J’aborde cette saison avec beaucoup de motivation, de détermination, et une grande volonté de rester en équipe de France en emmenant ces chevaux le plus loin possible.
 
GPR. : Quels vont-être pour vous les objectifs cette année ? 
M.D. : Certains de mes chevaux ont encore besoin de s’aguerrir, ils concourront donc sur le Grand National en début de saison pour accéder rapidement aux CSI 3*. L’objectif à moyen terme est de ramener Cliffton le plus rapidement possible au plus haut niveau, et surtout sur des Coupes des nations. J’ai également de très bons chevaux de huit ans, dont notamment Arioto du Gevres qui était vice-champion de France à sept ans et qui a très bien terminé l’année. J’ai aussi de très bons chevaux de sept ans, mon piquet se renforce petit à petit.
 
GPR. : Après Göteborg, avez-vous dans un coin de la tête les Jeux équestres mondiaux de Tryon ?
M.D. : Si début 2016 vous m’aviez dit que je serai champion de France, je ne vous aurais pas cru. Si début 2017 vous m’aviez dit que je finirais à Göteborg, je ne vous aurais pas cru non plus ! J’écoute mes chevaux, parce qu’on peut faire tous les programmes possibles, à la fin ce sont eux qui nous guident. Bien sûr je veux emmener Cliffton, Indigo et Utah le plus loin possible, mais je les écouterai comme je l’ai toujours fait. Pour le reste, il se passera ce qu’il se passera !
 
GPR. : Quelles seront vos ambitions pour le circuit du Grand National cette année, sur lequel vous ferez équipe avec Edward Levy et Arthur Deuquet ? 
M.D. : J’ai toujours utilisé ce circuit comme un support pour former mes chevaux, je ne vais donc pas courir après une victoire. Je serai à Saint-Lô avec Indigo, qui sera certainement aussi à Royan avec Cliffton. Je vais courir les premières étapes et aviser, mais ce ne sera pas un objectif cette saison. Je compte utiliser les étapes pour aguerrir mes chevaux.
 


“Sauter un Grand Prix avec Dame Blanche, c'était vraiment à part”

Si Marc Dilasser a formé de nombreux jeunes chevaux, Lamm de Fétan, ici sous sa selle à la finale des 4 ans de Fontainebleau, garde une place particulière.

Si Marc Dilasser a formé de nombreux jeunes chevaux, Lamm de Fétan, ici sous sa selle à la finale des 4 ans de Fontainebleau, garde une place particulière.

© Scoopdyga

GPR. : Par le passé, vous avez formé de très nombreux grands cracks à l’image de Qlassic Bois Margot, Jarnac, Lamm de Fetan, Olympique Libellule, Dame Blanche van Arenberg, Rockfeller de Pleville Bois Margot ou encore Rackam’Jo. Quel regard portez-vous sur un tel accomplissement ? 
M.D. : C’est une très grande fierté d’avoir eu tous ces chevaux-là sous ma selle ! Aujourd’hui, c’est surtout une excellente expérience. J’essaye beaucoup de jeunes chevaux car nous en achetons tous les ans avec mes clients, et je me sers de ce que j’ai appris avec tous ces cracks. Je me rappelle de comment ils étaient jeunes pour essayer d’imaginer le futur de mes nouvelles recrues. Tant qu’on n’a pas monté des chevaux de niveau 5* jeunes et qu’on ne les a pas vus évoluer, on peut difficilement imaginer ce que c’est. Un cheval de niveau 5*, ça n’est pas un cheval comme les autres. Beaucoup arrivent à enchainer 1,45m, mais ceux qui sautent les Coupes nations de Dublin, Aix-la-Chapelle ou Calgary sont vraiment à part, ils sont extrêmement rares.
 
GPR. : Parmi cette prestigieuse liste, y a-t-il un cheval qui vous a particulièrement marqué ?
M.D. : Lamm (de Fétan, ndlr), que j’ai monté à quatre ans. La première fois que j’ai sauté une croix avec, je me suis dit “qu’est-ce que c’est que ce cheval ?” Il ne ressemblait pas à grand-chose à cet âge-là, il était grand, pas très harmonieux et avait beaucoup de sang. Il y a aussi eu Dame Blanche (van Arenberg, ndlr). Sauter un Grand Prix avec elle, c’était vraiment à part. C’était beaucoup plus facile, et même si elle ne se laissait pas toujours faire, elle avait une qualité intrinsèque et une force en elle que j’ai retrouvé sur très peu de chevaux.
 
GPR. Que peut-on vous souhaiter pour 2018 ? 
M.D. : Que ma famille se porte bien en premier lieu ! Professionnellement, que mon système continue d’évoluer. Cela fait maintenant cinq ans que je suis installé à Le Merlerault, au haras du Millenium. Mon cavalier Valentin Pacaud se charge de la formation des jeunes chevaux. J’ai aussi un groupe de propriétaires qui me suit, qui investit, et avec lequel on achète des chevaux pour le sport ou le commerce. J’espère que ça continuera et que les chevaux nous donneront tout ce que l’on espère.