Katharina Hemmer envoûte le temple du dressage de Francfort, où Juan Matute Guímon met en lumière son nouveau complice
Dans la superbe ambiance que le public du CHI de Francfort sait réserver aux cavaliers de dressage, Katharina Hemmer a remporté, hier, le Grand Prix Spécial du dernier CDI 5* de l’année avec Denoix. En s’offrant au passage un record personnel, la jeune trentenaire a devancé ses compatriotes Isabell Werth et Dorothee Schneider. Dans la Libre, Juan Matute Guímon a imposé Lexus au son de Life is Life ce dimanche midi, alors que Dorothee Schneider et Carina Harnisch ont mené Maxi Kraft’s Barcelo et Sheldon Cooper à la victoire dans les très importantes finales nationales également disputées dans la capitale économique allemande.
En Allemagne, le dressage est une institution, et le CHI de Francfort, l’un de ses temples. Le mythique CHIO d’Aix-la-Chapelle est souvent - et à juste titre - évoqué en ces termes, et a sans conteste une portée internationale bien plus large que le concours tenu dans la plus que centenaire halle des fêtes de la capitale économique germanique. Pourtant, outre-Rhin, celui-ci revêt également une importance majeure en accueillant, bien sûr, un CDI 5*, mais aussi les finales des circuits du Nürnberger Burg-Pokal et du Prix Louisdor, réservés aux meilleurs espoirs quadrupèdes du dressage âgés de sept à dix ans. Cette année, le CDI 5*, qui est l’un des douze seuls concours au monde à porter ce label, s’est ouvert avec la victoire d’Isabell Werth et Quantaz dans le Grand Prix. Comme la cavalière la plus médaillée de tous les temps, trois des quatre autres athlètes ayant intégré le Top cinq de cette épreuve d’ouverture ont choisi de s’élancer ensuite dans le Grand Prix Spécial. Bien volontiers considérée comme la reprise la plus difficile au monde, cette épreuve est très appréciée du public germanique, même lorsqu’elle est programmée à huit heures pour laisser la part belle aux épreuves nationales, comme c’est le cas à Francfort.
Katharina Hemmer frappe très fort dans le Spécial
Tout derniers à y prendre part, tôt hier matin, Katharina Hemmer et son excellent Denoix y ont brillé et envoûté le public présent dès huit heures pour assister à cette compétition. Non contente de s’imposer comme elle l’avait déjà fait l’an passé, l’élève de Hubertus Schmidt s’est offert un nouveau record personnel à 77,745%. Cette moyenne est venue récompenser une prestation où son alezan a semblé utiliser l’ensemble de son corps pour transporter son énergie en permanence ou presque, et a notamment livré deux grands appuyers au trot d’une amplitude, élasticité et facilité rares. Peut-être très légèrement trop fermé et un peu instable dans son attitude en début d’exercice, ce qui a bien vite été corrigé par sa cavalière, le fils de Destano, qui s’est montré beaucoup plus à l’aise au sein de l’impressionnante arène francfortoise ce samedi que la veille, a été présenté dans un contact semblant plutôt agréable tout au long de sa reprise. “Denoix est vraiment génial”, s’est exclamée Katharina Hemmer après sa prestation. “Il était vraiment avec moi aujourd’hui. Le sentiment qu’il m’a donné était grandiose, et indescriptible.” Bien sûr, ni l’enjeu, ni la concurrence, ni même les conditions de compétition ne sont comparables, mais pour donner un ordre d’idée, avec la même moyenne, la jeune trentenaire aurait pu prétendre à une sixième place dans le Grand Prix Spécial olympique à Versailles. Autant dire qu’après une saison extérieure marquée par des apparitions où son partenaire s’était montré très tendu à Compiègne et Aix-la-Chapelle, sa performance de ce week-end devrait la replacer en très bonne position sur l’échiquier du dressage germanique.
Véritable patronne de celui-ci, Isabell Werth a cette fois dû se contenter du deuxième rang avec son fils de Quaterback, qui a présenté une ligne de changements de pied aux deux temps fautive et a, comme souvent, perdu des points au pas allongé. Évalué à 73,766%, le hongre a tout de même permis à sa cavalière de devancer Dorothee Schneider. Cette dernière avait misé sur First Romance, qui disputait là son premier concours après un arrêt d’un an et demi pour blessure et a obtenu 72,851%.
Juan Matute Guímon tient un nouveau complice de choix
Dans la Libre, tenue ce dimanche matin et ouverte, elle aussi, à sept couples, Juan Matute Guímon a pris le meilleur sur quatre concurrents germaniques. L’Espagnol, qui vient de fêter ses vingt-sept ans, présentait Lexus, qui se montre extrêmement prometteur à huit ans seulement. À Francfort, le très dynamique fils de Vivaldi, auquel il ressemble beaucoup, disputait son premier concours international depuis juin, et était au départ dans le Grand Tour d’un CDI pour la cinquième fois de sa jeune carrière. Jusqu’alors, il n’avait jamais présenté de Libre en compétition internationale, et son cavalier a fait confiance à deux producteurs de musique ibériques venant de se lancer, Andrea Rodriguez et Sahil Singh, pour lui tailler un accompagnement musical sur mesure. L’épreuve de ce matin tenait donc lieu de double première, et celle-ci a été plus que réussie, puisque porté par des arrangements rythmés, mais jamais lourds, le duo espagnol a su séduire à la fois les juges et le public, qui lui a réservé des applaudissements nourris dès sa dernière ligne présentée sur le planétaire Life is Life d’Opus. Ayant notamment marqué des points grâce à son passage réalisé dans une très bonne cadence et avec beaucoup d’énergie, Lexus, qui a montré quelques signes de tension durant sa reprise et pourrait être présenté dans une attitude parfois un peu plus ouverte, a récolté 76,510%. Juliane Brunkhorst et Laura Strobel ont complété le podium avec des notes de 76,37% et 75,905% aux rênes d’Aperol et Valparaiso.
“Je veux tout: devenir un cavalier de dressage aussi bon et performant que possible, participer à tous les championnats, aux Jeux olympiques!”, a lâché Juan Matute Guímon. “Mon cheval m’impressionne chaque jour et je suis extrêmement fier de lui. Je me suis rendu à Francfort pour la première fois en 2019, j’adore ce concours, et je veux absolument y revenir!”
Du dressage oui, mais dans une ambiance de folie!
Si les organisateurs du CHI de Francfort peuvent compter sur un enthousiasme du public pour le dressage que l’on retrouve, il faut bien le dire, assez peu ou en tout cas pas à cette échelle, dans les pays européens plus méridionaux, ils font aussi de leur mieux pour entretenir cette ferveur. Ainsi, lors des finales du Nürnberger Burg-Pokal et du Prix Louisdor, deux circuits réservés aux meilleurs espoirs quadrupèdes du dressage dont GRANDPRIX a décrit le fonctionnement cet été, un juge très expérimenté commente les reprises dès après qu’elles soient terminées, et les cavaliers se livrent également à une courte interview en sortie de piste. Par ailleurs, les trois meilleurs couples du Burg-Pokal, remporté cette année pour la troisième fois par Dorothee Schneider, qui présentait Maxi Kraft’s Barcelo – âgé de huit ans comme le vainqueur du Grand Prix Libre ! – dans cette compétition d’un niveau légèrement supérieur au Saint-Georges, sont appelés à se produire le samedi soir lors d’un Prix du vainqueur tenu dans une ambiance de folie.
Entre des remixes à la sauce house ou techno - pas dans le sens le plus noble de ces termes - parfois pas du meilleur goût, mais vraisemblablement très efficaces pour embraser le public, le sus-cité Barcelo ainsi que Diamante Negro et le triple vice-champion du monde Vitalos, montés par Juliane Brunkhorst et Leonie Richter, sont revenus devant les spectateurs de la Festhalle pour dérouler chacun une Libre de quatre minutes. Là encore, au-delà de présenter les qualités de leur monture, les cavalières ont eu à cœur de mettre l’ambiance, à l’instar de Leonie Richter, qui a terminé sa reprise au trot allongé à une main, accompagnée du très populaire Sweet Caroline et sous les hourras du public. C’est d’ailleurs à elle et son puissant alezan, pas dérangé pour un sou par cette atmosphère unique alors qu’il n’a que sept ans, qu’est revenue la victoire dans cette épreuve d’exhibition. La bien plus sérieuse finale du Prix Louisdor, disputée ce matin, est, quant à elle, revenue à Carina Harnisch et Sheldon Cooper, neuf ans, qui a obtenu 74,06% pour son premier Grand Prix long.
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