“Je verrais bien les Irlandais monter sur le podium et les Britanniques lâcher un peu prise”, Grégory Wathelet
S’il n’est pas engagé aux championnats d’Europe Longines de La Corogne ce week-end, le numéro trente-sept mondial Grégory Wathelet suit bien sûr avec attention ce qu’il se déroule en Galice. Cette semaine, le Belge nous offre son éclairage sur chaque étape de l’échéance continentale à travers des analyses. Il revient sur l’acte deux, la première manche de la finale par équipes, qui s’est déroulée hier, et évoque les tendances auxquelles nous pourrions assister cet après-midi :
“En général, le deuxième jour de ce championnat peut s’avérer un peu difficile pour des nations ou des couples au niveau un peu juste, car le niveau monte d’un cran par rapport à la Chasse. Aujourd’hui, cela n’a pas tellement été le cas. J’ai envie de dire que c’est bien, mais il y a tout de même eu trop de parcours sans faute, ce qui est le penchant négatif. Les choses devraient se rééquilibrer demain. Le parcours était-il aussi simple à monter qu’il en avait l’air derrière un écran ? Tout semblait se sauter assez bien, même si le triple a engendré pas mal de fautes, compte-tenu du fait que certains chevaux se freinaient un petit peu sur les deux oxers. Globalement, il y a eu peu de fautes, et c’est plutôt une bonne chose car il n’y a pas eu de dégâts. Je pense que les choses vont se corser demain avec les dix meilleures équipes et les meilleurs individuels.
Concernant les variations de lumières lors d’épreuves aussi longues, il est vrai que le sujet est plusieurs fois revenu sur la table. Nous avons eu le même cas de figure lors de la Coupe des nations d’Aix-la-Chapelle, où le soleil était rasant derrière le triple, ce qui était vraiment désagréable sur le plan visuel, pour nous comme pour les chevaux. Il s’agit d’un paramètre que les chefs de piste doivent maîtriser mais cela est tellement compliqué. Y parvenir pour une épreuve d’une heure et demie est une chose, mais pour une épreuve de cinq heures, c’est bien différent.”
“Les Allemands et les Belges peuvent être plus forts que les Britanniques”
“Concernant les équipes, il n’y a pas eu de bouleversement majeur dans la hiérarchie, mais des indications pertinentes. Comme hier, les quatre meilleures nations (Grande-Bretagne, Allemagne, Belgique et Irlande, ndlr) sont aux avant-postes. L’Irlande est venue recoller au score grâce à trois parcours sans faute après avoir été un peu en-deçà hier. Concernant l’Allemagne, sa performance du jour a été très solide (la Mannschaft a aligné quatre parcours parfaits, ndlr). C’est la classe ! La Belgique a aussi été impressionnante (avec trois sans-faute, ndlr) et ces deux dernières nations sont pour moi au-dessus du lot. Malgré les deux fautes de Pieter Devos (sur Casual DV Z, ndlr), les Belges ont signé trois parcours de haut vol. Demain, Pieter sera capable de signer un sans-faute, ça me semble donc solide. Je dois dire que j’ai en revanche un peu plus de doutes pour les Britanniques. Après ce qu’il s’est passé avec Matthew Sampson (éliminé après deux sorties du triple consécutives à des sauts démesurés de Medoc de Toxandria, ndlr), ils ne s’élanceront pas dans des conditions idéales demain. J’ai l’impression que Matthew va se battre, mais un tel parcours ne donne pas confiance pour affronter la seconde manche, demain. Les Britanniques vont d’une certaine façon partir à trois. Même Scott Brash a connu un parcours moins serein que d’habitude (notamment avec un passage de triple très périlleux sur Hello Folie de Nantuel, ndlr). La jument a évidemment été formidable, mais Scott aussi, car sa réaction a été exemplaire. Bien sûr, les cavaliers d’outre-Manche restent en tête et parmi les favoris, mais je les attendais plus brillant avant que la compétition ne débute, et même après la Chasse.
À mon sens, les Allemands et les Belges peuvent être plus forts. Je verrais bien les Irlandais monter sur le podium et les Anglais lâcher un peu prise. Nous verrons demain, tout reste ouvert, et le résultat dépendra du parcours imaginé par Santiago Varela. Il faut être clair, ce sont le plus souvent ceux qui débutent la compétition entre le dixième et le douzième rang qui se trouvent finalement en position de médaille individuelle à la fin. Il est désormais rare de voir des championnats où les vainqueurs ont enchaîné les parcours vierges du début à la fin. Tout peut aller vite, comme nous l’avons vu avec Matthew”.

Grégory Wathelet met une pièce sur Gilles Thomas et Ermitage Kalone pour une médaille individuelle.
© HippoFoto
“Nous assistons à une vague de nouveauté très encourageante”
“Je pense qu’il n’a pas grand-chose à dire sur les prestations de Kevin Staut et Julien Épaillard. En fin d’épreuve, ce dernier s’est donné, et a réalisé un parcours remarquable. Kevin est capable de tirer un sans-faute dans des moments compliqués pour l’équipe, ce n’est donc pas une surprise. La petite faute de Nina Mallevaey est dommage car sa jument (Nikka vd Bisschop, ndlr) sautait vraiment bien. Jeanne Sadran a aussi réalisé un superbe tour. Quatre points, ce n’est pas très loin d’être un bon parcours, mais cela coûte cher, en l’occurrence à l’Hexagone. Ce que j’aime en France, par rapport au championnat en général, c’est qu’il y a beaucoup de sang neuf, ce qui n’est d’ailleurs pas spécifique à cette nation. Il s’agit de quelque chose que j’aime particulièrement dans ces championnats-là. Je pense que j’ai toujours été favorable au fait de donner une chance et d’ouvrir les portes, ce qui n’a pas toujours été le cas en France. Là, nous assistons à une vague de nouveauté très encourageante. Il y a des cavaliers de talent, bien équipés, comme Nina, Jeanne, et même Antoine, qui est ici cinquième. Voilà trois nouvelles têtes en championnat, et la France a besoin de ça. C’est en faisant des championnats comme ça qu’ils vont devenir les plus forts et apprendre.
Plusieurs nations ont fait le même choix, y compris la Belgique, qui a fait confiance à Thibeau Spits, mais aussi à Abdel Saïd. Même si ce dernier est moins jeune, il s’agit de son premier championnat pour la Belgique. L’Allemagne a quant à elle envoyé la talentueuse Sophie Hinners. En Irlande, nous voyons Seamus Hughes Kennedy, en Suisse Nadja Peter-Steiner et Géraldine Straumann. Nous voyons de nouvelles têtes dans pas mal d’équipes, ce n’est pas arrivé si souvent en championnat. Outre la présence de nouveaux cavaliers, il y a également de nouveaux chevaux à ce niveau, comme c’est par exemple le cas pour Steve Guerdat, qui a engagé Albführen’s Iashin Sitte, un cheval plus jeune et moins expérimenté. Il en va de même pour Christian Kukuk, qui monte cette jument pour la première fois en championnat, et j’en passe.
Aujourd’hui, United Touch S (le partenaire de Richard Vogel, ndlr) avait l’air encore très en forme et avait l’air très serein. Toutefois, entre le premier et le dixième, les écarts sont infimes, il n’y aura donc pas le droit à l’erreur. Je crois aussi beaucoup en Gilles Thomas, pour l’heure septième. Il reste trois parcours sérieux mais je trouve Ermitage Kalone très impressionnant – une fois de plus – et se montre extraordinaire. Connaissant très bien Gilles, j’aimerais beaucoup que ce soit son année. Une médaille est à leur portée.
Hormis Maikel van der Vleuten (sorti de piste avec vingt points sur Beauville, ndlr), il n’y a pas eu d’énorme surprise dans ce deuxième acte. Martin Fuchs a écopé de seize points mais ne faisait pas vraiment partie de mes favoris pour une médaille. Son cheval a déjà obtenu de super résultat, mais cette année, il a un peu moins concouru.
Pour Donald Whittaker et Millfield Colette (pour l’heure deuxièmes en individuel, ndlr), j’aimerais dire qu’ils pourront aller au bout car il s’agirait d’une chouette histoire, mais je pense que d’autres vont passer devant. Je les imagine enchaîner trois parcours sans faute mais j’espère me tromper.”