Vingt-deux chevaux contaminés par l’artérite virale dans le Calvados

Un foyer d’artérite virale équine a été détecté le mois dernier au centre Equitechnic de Notre-Dame-d’Estrées-Corbon, dans le Calvados, où l’on prélève la semence de nombreux étalons de sport, notamment à cette période de l’année. Selon les données du Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (RESPE), vingt-deux chevaux auraient été contaminés. Si les risques cliniques sont limités pour ces animaux, Marc Spalart, directeur d’Equitechnic, assure que tout est mis en œuvre pour éteindre le foyer et limiter au maximum les risques de contamination du sperme à court, moyen et long termes.



L’artérite virale équine (AVE) est de nouveau présente en Normandie. Ce virus circulant par voies respiratoires et reproductives avait provoqué une épizootie en Normandie durant l’été 2007, comme le rappellent Marie Delerue, Christel Marcillaud-Pitel et Aymeric Hans dans un article de l’encyclopédie Équipédia paru en mars 2020. Il y a une semaine, le Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (RESPE) a fait part sur les réseaux sociaux d’un foyer déclaré dans le Calvados, concernant vingt-deux cas positifs confirmés le 17 octobre. En 2007, les scientifiques estiment que plus de deux cents chevaux avaient été touchés, avec des épisodes de fièvre et des symptômes locaux sur des chevaux adultes, des avortements et des cas de mortalité sur des poulains âgés de moins d’un mois. “À partir de 2008, de nombreux stud-books ont intégré le dépistage de cette maladie chez les étalons”, rappelle le RESPE.

Dans un article paru hier, nos confrères de L’Éperon ont fait le point avec Marc Spalart, directeur du centre Equitechnic, situé à Notre-Dame-d’Estrées-Corbon, où a été détecté ce foyer au moyen de tests sérologiques effectués systématiquement sur les étalons qui lui sont confiés pour que leur semence soit prélevée. “Depuis le 17 octobre, nous avons arrêté tous les mouvements d’étalons et cessé de produire”, assure Marc Spalart. Il estime qu’un cheval aurait pu être contaminé peu avant son arrivée sur le site, si bien qu’il n’aurait pas eu le temps de fabriquer d’anticorps et que sa charge virale aurait été indétectable par sérologie.

“Il existe deux voies de transmission principales pour cette maladie”, décrit l’encyclopédie Équipédia. “Les chevaux s’infectent par inhalation d’aérosols contenant du virus lors d’un contact: avec un équidé (ou ses sécrétions) en phase clinique de la maladie (phase très courte suivant immédiatement la contamination, durant cinq à huit jours). La principale source de contamination est le jetage. Les larmes, l’urine, le sperme par exemple, peuvent être également, mais beaucoup plus rarement, des sources de contamination. Après cette phase clinique, les juments et les hongres éliminent totalement le virus et ne sont donc plus contagieux trente jours après l’infection. Seuls certains chevaux entiers peuvent rester excréteurs du virus dans le sperme au-delà de trente jours.” La contamination par voie respiratoire est également possible “avec les tissus ou sécrétions d’un avorton contaminé”.

Ce virus est également transmissible par voie sexuelle. “La contamination se fait principalement d’un étalon ‘excréteur’ vers les juments qu’il saillit ou qui sont inséminées avec sa semence, qu’elle soit fraîche, réfrigérée ou congelée. Les étalons excréteurs représentent le réservoir du virus. Après guérison clinique, 10 à 70% des étalons restent porteurs du virus dans les glandes annexes de l’appareil génital et excrètent le virus dans le sperme. Cette excrétion peut durer de quelques semaines à plusieurs années. Un étalon porteur sain du virus, utilisé pour la reproduction, peut être à l’origine d’une épidémie, comme ce fut le cas en Normandie en 2007. Chez un étalon porteur sain, des mutations du virus peuvent apparaître au cours du temps, à l’origine de nouvelles souches virales plus virulentes. Une jument saillie (ou inséminée) par un étalon porteur est quasi-systématiquement infectée. De retour à l’élevage, elle transmet ensuite le virus à ses congénères par voie respiratoire. Cela pose notamment problème lors de contacts avec des juments pleines (possibilité d’avortements) ou des poulains (cas de mortalité décrits)”, ajoutent Marie Delerue, Christel Marcillaud-Pitel et Aymeric Hans.



La vaccination recommandée pour l’ensemble des mâles reproducteurs

Selon ces scientifiques, “la grande majorité des infections sont inapparentes ou subcliniques et passent inaperçues. Après une période d’incubation de deux à quatorze jours (transmission par voie respiratoire) ou six à huit jours (transmission par voie sexuelle), les équidés peuvent développer des signes cliniques très variés et plus ou moins marqués, notamment en fonction de la virulence de la souche. La phase clinique dure une à deux semaines. Les signes cliniques classiquement décrits peuvent ressembler à un épisode grippal, mais sont le plus souvent moins intenses: hyperthermie modérée (température supérieure à 38,5°C) associée à des signes généraux (fatigue, baisse d’appétit); des signes respiratoires: écoulements nasaux et oculaires séreux, plus rarement de la toux, des difficultés respiratoires; un œdème des zones déclives: membres, fourreau, ventre, scrotum chez l’étalon, mamelle chez la jument; une raideur dans la locomotion; une urticaire. Chez la jument gravide, un avortement peut avoir lieu deux à quatre semaines après la contamination par voie respiratoire. Toutes les juments contaminées n’avortent pas. Elles peuvent avorter sans avoir présenté d’autres signes cliniques préalables.” 

“En revanche, cette infection n’a pas de conséquence à court et long terme sur la fertilité de la jument”, note l’article d’Équipédia. “Chez l’étalon, on peut observer une subfertilité transitoire de six à onze semaines, notamment en raison de l’hyperthermie associée à la maladie et l’augmentation consécutive de la température des testicules. Les étalons chez lesquels on observe une persistance du virus dans l’appareil génital ne présentent pas de symptômes: ils sont porteurs sains. Le portagechronique du virus dans l’appareil génital n’a pas de conséquences sur la qualité du sperme.

On peut également observer des cas de mortalité chez de jeunes poulains, conséquence d’une pneumonie et d’une entérite (inflammation de la muqueuse intestinale). Cinq cas de mortalité ont été décrits chez des foals lors de l’épidémie de 2007 en Normandie, puis un cas en 2011. Du fait des conséquences potentielles de la maladie, notamment des avortements, un portage à long terme du virus dans l’appareil génital des étalons et des cas de mortalité chez les foals, son impact économique peut être important pour la filière équine.”

Pour toutes ces raisons, Marc Spalart assure traiter ce foyer avec un niveau maximal de précaution. “J’ai tout de suite alerté tous les centres avec lesquels je travaille afin qu’ils fassent encore plus attention à l’entrée des étalons. Nous testons tous les éjaculats prélevés sur la période. Les propriétaires des étalons toujours présents pourront récupérer leurs chevaux une fois qu’ils présenteront des virologies négatives dans le nez et le sang. Ils pourront reprendre le sport, mais pas la reproduction. Pour reprendre la monte, ils devront être contrôlés tous les trois mois ou en fin de saison de concours afin de voir s’ils parviennent à se débarrasser de la maladie et ne plus être sexuellement excréteurs. Une fois que nous aurons vidé le haras, nous désinfecterons tout avant le retour des chevaux avec cette fois un test nasopharyngé obligatoire avant l’entrée dans le centre de production”, conclut le directeur d’Equitechnic.

Un vaccin (ArtervacNDV) contre l’artérite virale est commercialisé en France. L’Institut français du cheval et de l’équitation, qui édite l’encyclopédie Équipédia, estime la vaccination “vivement conseillée pour l’ensemble des étalons reproducteurs, en particulier les plus à risque: ceux utilisés en monte naturelle, en contact direct avec des juments extérieures, ceux utilisés en insémination artificielle mais se déplaçant fréquemment hors du centre de reproduction, pour la compétition, par exemple; et ceux hébergés dans des structures mixtes en contact direct ou indirect (personnel, matériel, etc.) avec des chevaux de statut sanitaire inférieur (centres de mise en place de semence, élevages, écuries de compétition, etc.).”