Christian Kukuk s’explique après la publication d’une vidéo de travail controversée
Vendredi dernier, Christian Kukuk a tenu une conférence de presse en marge du CHI-W de Stuttgart afin de s’expliquer au sujet d’une vidéo controversée le montrant monter Just Be Gentle en rênes allemandes et sans autres rênes sur la piste d’échauffement du CSI 5*-W de Vérone, la semaine précédente. Le champion olympique a reconnu avoir commis une erreur en agissant tel qu’il le fait dans cette séquence d’une trentaine de secondes, et s’en est excusé.
Ces derniers jours, une vidéo d’une trentaine de secondes (disponible ci-dessous) montrant Christian Kukuk sur la piste d’échauffement du CSI 5*-W de Vérone a suscité de vives réactions. Les images montrent le champion olympique de Paris en train de faire travailler l’une de ses meilleures montures, Just Be Gentle, avec un mors de filet simple, mais sans rênes de filet. Le cavalier allemand n’utilise qu’une paire de rênes allemandes, coulissant dans les anneaux du mors puis fixées aux anneaux latéraux de la sangle — une pratique proscrite par sa fédération nationale. Sur les images, ces rênes allemandes apparaissent nettement tendues pendant que Christian Kukuk fait travailler sa jument, sur un cercle au galop rassemblé.
Vendredi dernier, en marge du CHI-W de Stuttgart, en Allemagne, Christian Kukuk a tenu une conférence de presse pour s’expliquer. Une initiative visant à apaiser la controverse, qui a pris une ampleur considérable dans le pays et dépassé le cadre des réseaux sociaux, d’où la présence d’une chaîne de télévision nationale. “Lors de la séance de travail dont la vidéo est extraite, mon objectif était d’évacuer la tension que je sentais chez Just Be Gentle”, a-t-il déclaré. “Ces trente secondes de vidéo ne reflètent absolument pas ce qui s’est passé durant les trois jours du CSI 5*-W de Vérone, ou même durant les quarante-cinq minutes de ma séance. [...] Sur le moment, mon intuition m’a laissé penser que la meilleure manière de communiquer avec ma jument afin qu’elle évacue sa tension était de la monter seulement en rênes allemandes. En utilisant à la fois des rênes de filet et des rênes allemandes dans une telle situation, j’avais déjà expérimenté que ma connexion avec la bouche de Just Be Gentle était très discontinue. C’est pour éviter cela et afin de donner une meilleure attitude à ma jument que j’ai décidé d’utiliser uniquement des rênes allemandes. Ma tête ne m’a pas dicté qu’il s’agissait d’une mauvaise décision, alors que c’en était une, et je le regrette.”
En compétition internationale, l’utilisation des rênes allemandes est strictement proscrite en piste, sauf pour les remises des prix et parades montées. En revanche, le règlement de la Fédération équestre internationale (FEI) ne stipule pas explicitement d’interdiction d’utiliser des rênes allemandes sans autres rênes sur la piste d’échauffement. L’article 257 dispose seulement que “les rênes doivent être attachés au mors ou directement au filet. Au maximum, deux paires de rênes peuvent être utilisées. Si deux paires de rênes sont utilisées, l’une d’entre elles doit être attachée au mors ou directement au filet.”
Cette règle interdit-elle l’utilisation d’une paire de rênes allemandes seule? La FEI n’a pas répondu clairement. “La FEI est consciente de la circulation de la vidéo [de Christian Kukuk] et est en contact avec les officiels qui étaient présents lors de cet événement”, a déclaré une porte-parole de l’institution. “Pour l’heure, tous les rapports des officiels n’ont pas encore été reçus et un examen formel n’a donc pas pu être entamé.” Le flou entretenu par l’organisation internationale contraste nettement avec la position plus rigoureuse de certaines fédérations nationales, telles que la fédération allemande, qui interdit l’usage de rênes allemandes seules sur ses terrains de concours. Quant à la Fédération suisse des sports équestres, elle a tout simplement proscrit cet enrênement dans sa totalité. Dans ce contexte, il semble étonnant que la FEI n’ait pas harmonisé son règlement avec celui de ces nations.
“Je suis vraiment navré de ne pas avoir été digne de ma parole dans cette vidéo”, Christian Kukuk
De son côté, la fédération nationale allemande a livré une réaction plus tranchée. “La courte séquence que nous avons vue est bien sûr quelque peu inhabituelle”, a déclaré Martin Richenhagen, le président de l’organisation, expliquant que ce type de montage d’enrênements n’était pas autorisé en Allemagne et évoquant une réglementation internationale “quelque peu floue” sur le sujet. “Nous avons contacté la FEI et nous devons faire mieux”, a-t-il affirmé auprès de la chaîne de télévision publique allemande ZDF. Le président a également décrit le cavalier comme étant “assis un peu bizarrement” sur les images, estimant qu’à la fin, Just Be Gentle n’est “pas tout à fait régulière dans son rythme”, un détail qu’ont également noté des internautes. “Dans l’ensemble, l’impression n'est pas positive”, a-t-il conclu. “Lors de discussions avec la fédération nationale, Christian Kukuk s’est montré autocritique et conscient de ne pas avoir agi correctement dans cette situation. Nous attendons de lui qu’il fasse mieux à l’avenir. En tant que cavalier de haut niveau et champion olympique, il a un rôle de modèle à jouer”, a déclaré à son tour le président du directoire de la fédération allemande, Dennis Peiler.
À Vérone, “personne ne m’a averti que ma manière de faire n’était pas correcte”, a indiqué Christian Kukuk. Pour autant, le champion olympique a reconnu à plusieurs reprises que la solution qu’il a employée n’était effectivement “pas correcte. Dans le futur, je sais que je devrai adopter d’autres méthodes si une telle situation se renouvelle. C’est un défi comparable à ceux auxquels je me confronte chaque jour.” Interrogé sur le rôle de la vidéo dans sa prise de conscience du caractère “incorrect” de la méthode qu’il employait, Christian Kukuk a expliqué qu’elle “a constitué un déclic qui m’a permis d’initier un processus de réflexion. Et je crois que les choses fonctionnent toujours comme ça dans la vie: il faut qu’un événement particulier se produise pour que l’on s’interroge.”
Le cavalier a également profité de cette conférence de presse pour dénoncer les invectives dont il a été la cible depuis la publication de la vidéo de Vérone sur les réseaux sociaux. “Ce qui s’est produit ces derniers jours a été vraiment effrayant, pour moi comme pour ma famille”, a-t-il déclaré. “Nous avons été insultés et également diffamés. Honnêtement, je trouve qu’il est dangereux de coller une cible sur le dos de quelqu’un et de le stigmatiser en s’appuyant uniquement sur une vidéo de trente secondes. J’aimerais beaucoup que cette situation permette de revenir à une meilleure compréhension mutuelle entre tous”. Si les critiques sur sa méthode relèvent du débat légitime, le cavalier a ainsi tenu à souligner que toute action allant jusqu’à la menace ou n’importe quelle forme d’infraction légale demeure inacceptable.
“Les chevaux sont des êtres vivants avec lesquels nous développons une relation, et comme dans toute relation, il arrive de commettre des erreurs”, a-t-il reconnu. “L’important est d’apprendre de ces erreurs. Aujourd’hui, je peux dire sans le moindre doute qu’utiliser les rênes allemandes sans autres rênes n’a aucun sens. Je ne suis pas sûr que tout doive être régi par des règlements dans notre relation avec les chevaux, mais si cette affaire permet de clarifier la ligne (de la FEI, ndlr), nous aurons déjà effectué un pas en avant. J’ai toujours dit que je souhaitais présenter notre sport de la meilleure manière possible au grand public, et je suis vraiment navré de ne pas avoir été digne de ma parole dans cette vidéo. Je ferai tout pour que cela ne se reproduise plus.”

