À Genève, Kent Farrington remet les pendules Rolex à l’heure américaine

Kent Farrington a remporté le Grand Prix Rolex du CHI de Genève cet après-midi en Suisse. En selle sur sa merveilleuse et vive Greya, le numéro un mondial a signé le plus rapide des cinq doubles sans-faute, repoussant à plus d’une seconde l’Irlandais Shane Sweetnam, deuxième sur le prodigieux James Kann Cruz, et à plus de deux secondes le Belge Thibeau Spits, beau troisième avec Impress-K van’t Kattenheye. Fautif en début de barrage sur son fidèle Arioto du Gèvres, Marc Dilasser n’en a pas moins réussi un magnifique Grand Prix, terminant sixième.



Résilience. Le mot est à la mode. Partout on l’use; souvent on en abuse. Qu’on nous pardonne ici de l’invoquer, mais il semble si bien coller à la peau de Kent Farrington… Vendredi soir, plus d’un cavalier se serait satisfait d’une deuxième place en finale du Top Ten Rolex IJRC. Plus d’un, mais pas lui. Habité d’un esprit de compétition d’une rare intensité, le numéro un mondial est sorti frustré de cette épreuve de prestige. Pire, l’Étatsunien n’est pas rentré à l’hôtel vexé d’avoir été battu par plus fort que lui, mais déçu de sa propre stratégie. Rageux d’avoir objectivement laissé passer sa chance avec Toulayna, tout à fait capable de lui offrir une seconde manche plus rapide que celle de Scott Brash et Hello Chadora Lady PS. Tout ce que le “Kid de Chicago” déteste.

C’est ici qu’intervient la résilience, qualité indispensable à tout athlète, quel que soit son rapport à la défaite. Après une nuit qu’on imagine maussade, Kent Farrington est revenu hier à Palexpo pour une journée en mode service minimal, afin de monter Toulayna et Greya (Contina 47, OS, Colestus x Contender) sur le plat, sans les engager dans la moindre épreuve. Après une seconde nuit sans doute plus sereine, il s’est regonflé à bloc et a enfilé sa tenue favorite de gladiateur, bien décidé à remporter le Grand Prix Rolex de Genève pour la deuxième fois de sa carrière après sa flamboyante victoire en 2017 avec Gazelle Ter Elzen. “Je me suis remis en selle avec le corps frais et l’esprit clair”, a-t-il résumé ce soir en conférence de presse, livrant une limpide leçon de préparation mentale. Et comme dans ses rêves – ou ses visualisations matinales –, il s’est adjugé ce dernier sommet sportif de l’année, sans tergiverser sur le plan tactique ni laisser la moindre chance à ses rivaux. Quoi que l’on perçoive de ce champion, au profil apparement moins romanesque que d’autres, ce cheminement a forcément quelque chose d’inspirant.

Des quarante couples au départ de cette étape suisse du Grand Chelem Rolex, celui formé par Kent Farrington et Greya comptait évidemment parmi les dix favoris. Mais encore fallait-il se qualifier pour le barrage, en produisant dix-huit efforts de haut vol et en déjouant les nombreuses difficultés techniques sorties de leur chapeau par le Suisse Gérard Lachat et son assistant de luxe, le Lorrain Grégory Bodo. Il fallait aussi rentrer dans le temps imparti de 74’’, ce qui fut presque une formalité pour les héros du jour, ainsi que pour Marc Dilasser, qui a offert au public et à ses fans le plus beau parcours de sa carrière, associé à son fidèle et adorable Arioto du Gèvres (SF, Diamant de Semilly x Qualisco III). Neuf, dix, onze, douze et treizième, Simon Delestre, le Suédois Peder Fredricson, le Britannique Ben Maher, l’Irlandais Daniel Coyle et l’Étasunienne Lillie Keenan ne peuvent pas en dire autant, piégés par le chronomètre avec Golden Boy DK (SF, Diamant de Semilly x Cash), Alcapone des Carmille (SF, Diamant de Semilly x Heartbreaker), Enjeu de Grisien (SF, Toulon x Andiamo), Incredible (KWPN, Clinton x Heartbreaker) et Fasther (KWPN, Vigo d’Arsouilles x Farmer). Les deux autres Français en lice, Kevin Staut et Julien Épaillard, sont bien rentrés dans les temps, mais une franche faute de Visconti du Telman a privé le premier de barrage, tandis que le second a encaissé douze points avec Donatello d’Auge, qui n’en demeure pas moins le cheval le plus performant de l’année.



Les dauphins du numéro un ont fière allure

Ouvreur du barrage avec Hantano (KWPN, Quasimodo Z x Numero Uno), Piergiorgio Bucci a fauté sur le vertical 14, puis essuyé un refus sur le vertical 9b, sortie du premier des deux doubles du tour initial, sur lequel le couple a fauté à sa seconde tentative. L’Italien a dû se contenter de la huitième place. Même s’il a n’a pas serré au maximum tous ses virages, Shane Sweetnam a laissé s’exprimer le galop de James Kann Cruz (ISH, Kannan x Cruising), dans une attitude bien plus plaisante que par le passé, et dont le double sans-faute l’a hissé à la troisième place. Surpris dès le vertical 13b, deuxième effort du parcours réduit, Arioto a presque aussi bien sauté qu’au tour initial, et Marc Dilasser a fort bien négocié la fin du tracé, ce qui a offert une très belle sixième place au duo, vainqueur en 2023 du Grand Prix Coupe du monde Longines de Göteborg. Épatants de bout en bout, Jason Smith et Picobello van’t Roosakker (BWP, Kassander van’t Roosakker x Canabis Z), cinquièmes, ont régalé leur public suisse, qui aurait tant aimé voir au barrage les géniaux Steve Guerdat et Dynamix de Bélhème, battus de façon improbable sur le vertical 13a au tour initial…

Sans ciller ni sourciller, Kent Farrington et Greya ont fait ce qu’il fallait pour tuer le match. Thibeau Spits et Sophie Hinners ont tenté de prendre la roue de l’Américain avec Impress-K van’t Kattenheye (Z, Indoktro K van’t Kattenheye x Vagabond de la Pomme) et Singclair*Iron Dames (SWB, Singular LS La Silla x Cardento 933), mais leurs solides doubles sans-faute, accomplis dans des styles tout à fait différents, ne leur ont offert “que” les trois et quatrième places. Quant à Christian Ahlmann, il a fauté sur le 13b et l’oxer 16 avec le très élastique Dourkhan Hero Z (Z, Don’t Touch Tiji Hero x Zandor), huitième. Fort de sa résilience, parmi tant d’autres qualités, Kent Farrington a donc remis les pendules Rolex à l’heure américaine, ce qui n’a déplu ni au public ni aux organisateurs ni au fidèle sponsor de cette épreuve de légende, auquel le jockey de Chicago associe depuis si longtemps son image.

Les résultats
Le plan du parcours

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