L’exceptionnel Cedric tire sa révérence
À dix-neuf ans, le temps est venu pour Cedric de faire ses adieux à la scène et à la compétition. Cet incroyable Holsteiner a accompagné Laura Kraut dans une large part de ses plus grands exploits entre 2008 et 2015, dont son titre olympique par équipes à Hong Kong en 2008. Le gris fera ses adieux ce vendredi à Wellington en lever de rideau de la Coupe des nations du CSIO 4* disputé dans le cadre du Winter Equestrian Festival (WEF).
Ayant effectué ses débuts internationaux à huit ans en 2006, Cedric a gagné le Grand Prix CSI 3* de Hachenburg en Allemagne dès l’année suivante. Devenant rapidement un pilier de l’équipe américaine, le couple qu’il forme avec Laura a explosé aux yeux du monde entier en remportant la médaille d’or par équipes aux Jeux olympiques de Hong Kong en 2008. En 2009, ils ont réussi une saison pleine, remportant les Coupes des nations de Rome et Saint-Gall et terminant troisièmes du Grand Prix CSIO 4* de Barcelone et quatrièmes de ceux des CSIO 5* de Saint-Gall et CSIO 4* de Wellington.
L’année 2010 restera comme la plus prolifique pour le duo, victorieux de la Coupe des nations de Rotterdam ainsi que des Grands Prix CSIO 4* de Wellington et CSI 5* de Chantilly et Valkenswaard. À ce jour, il reste d’ailleurs le seul à avoir gagné coup sur coup deux étapes du Global Champions Tour! Cette même saison, il a aussi terminé troisième des épreuves reines des CSI 5* de Hambourg, Rotterdam et Maubeuge. En 2011, Laura et Cedric se sont imposés dans trois Grands Prix du WEF, dont un CSI 5* et un CSI 3*-W étape de la Coupe du monde. En 2012, après avoir été écartés de manière injuste des sélections pour les Jeux olympiques de Londres malgré deux belles deuxièmes places à Wellington et Rotterdam, ils ont pris leur revanche en triomphant magistralement dans le premier Grand Prix CSI 5* de Lausanne.
« Cedric est le cheval de ma vie », Laura Kraut
En 2013, le couple magique n’a guère levé le pied, gagnant le Grand Prix CSI 5* de Wiesbaden et la Coupe des nations de Wellington, pour ne citer que ses victoires. L’année suivante, il a ajouté à son palmarès une nouvelle victoire en Coupe du monde, toujours à Wellington. En 2015, le Grand Prix CSIO 4* d’Ocala est tombé son escarcelle. Sa dernière victoire, tout comme sa dernière apparition en date, remonte au CSIO 5* de Rotterdam, en juin dernier. À dix-huit ans, il s’est alors imposé dans une épreuve plus modeste à 1,45m. Au cours de sa carrière, le crack aura accumulé plus de 2 millions d’euros de gains!À moins de deux jours d’adieux qui s’annoncent particulièrement émouvants, Laura Kraut rend un homme appuyé à ce compagnon qui a marqué à jamais sa carrière de cavalière. "Cedric est le cheval de ma vie. Il a été incroyable tout au long de ces années. Avec lui, j’ai appris à ne pas abandonner et à persévérer. En effet, il m’a fallu du temps pour l’imposer comme un cheval de Grand Prix parce qu’il a été un peu plus lent que d’autres à se développer. Sincèrement, je pense que je ne rencontrerai jamais un autre cheval comme lui. Pour moi, l’un des moments majeurs de notre carrière a été de remporter toutes ces étapes du Grand Prix Global Champions Tour. Gagner des épreuves aussi gigantesques que celles-là rendait hommage à son talent."
Ancien entraîneur et sélectionneur de l’équipe américaine, le légendaire George H. Morris se souvient très bien des débuts prometteurs du couple, lesquels l’avaient convaincu de miser sur lui pour les JO de 2008. "Je voulais y aller avec Cedric, parce que c’est un cheval respectueux et compétitif. Je ne sous-estime jamais un petit cheval, quant à Laura – personne ne monte mieux que Laura! Cedric est le cheval de sang par excellence, si rapide… Bref, il a toutes les qualités qui font un exceptionnel sauteur."
Une histoire pas banale
L’histoire de Cedric dépasse aussi le stricte cadre du sport. En effet, avant d’être acquis début 2012 par Margaret Duprey, le petit hongre gris qui a fait rêver tant et tant de fans de saut d’obstacles à travers le monde a connu plusieurs changements de main, ce qu’avait rappelé avec émotion Laura Kraut dans un entretien accordé à GP International en juillet 2013 : "Ses premiers propriétaires (dont Peter Wetherill, ndlr) étaient de très bons amis américains (qui vivaient en France, ndlr), qui m’avaient déjà aidée à acheter Anthem et possédaient d’autres très bons chevaux. Quand je leur ai demandé d’acheter Cédric, ils ont accepté. J’en ai, pour ma part, acheté un quart. Malheureusement, ils sont décédés tous les deux juste après les Jeux olympiques. Ils ont heureusement pu savourer un peu notre victoire à Hong Kong. Cedric a été récupéré par le frère d’un des deux garçons, qui l’a beaucoup apprécié. J’ai probablement eu plus de succès que jamais, à ce moment-là. Quelque temps plus tard, ne voyant plus trop l’intérêt de le garder, il a voulu le vendre. Ça été une déchirure pour moi. Vendre Cedric me semblait aussi impensable que de vendre mon fils Bobby ! Je ne pouvais pas le supporter, mais je n’avais pas vraiment le choix. Puis Jane Clark est arrivée de nulle part. Je n’avais aucune idée de qui elle était. Elle est venue me voir et a pris en charge toutes les démarches. Lorsque l’argent a été transféré sur mon compte, un après-midi, elle m’a demandé de passer chez elle. C’est ainsi que j’ai rencontré ma nouvelle propriétaire, Margaret Duprey. Je parle d’elle comme d’une marraine, parce que non seulement elle a racheté Cedric, mais en plus, elle m’a rendu mon quart, parce qu’elle tenait à ce que je m’en sente toujours copropriétaire. Elle est extraordinaire. Lorsque j’ai su que nous n’étions pas sélectionnés dans l’équipe olympique en 2012, j’étais plus dévastée pour elle que pour moi. C’était le cours des choses, mais je pensais vraiment qu’elle méritait de voir son cheval sauter aux Jeux."Il se trouve aussi que Margaret Duprey est une amie d’enfance du regretté Peter Wetherill. "Racheter Cedric représentait à la fois une excellente occasion de m’impliquer dans le monde du saut, qui plus est avec l’un des meilleurs couples, mais aussi de pouvoir faire perdurer l’amour de Peter pour ce cheval", se rappelle la propriétaire. "Posséder un cheval comme lui a été un privilège. Je suis reconnaissante envers tous ceux qui ont joué un rôle dans sa vie, maréchaux-ferrants, grooms, vétérinaires. Ses succès sont avant tout le fruit de l’engagement d’un collectif dont je suis honorée d’avoir fait partie", conclut-elle.
Tous les passionnés réunis à Wellington sont invités à honorer ce crack pas comme les autres ce vendredi avant le coup d’envoi de la Coupe des nations du CSIO 4*.