’’Je me positionne davantage dans un deuxième wagon’’, Arnaud Boiteau

Vainqueur de la finale de la Coupe du monde de Cherbourg en 2004, médaillé d’or par équipes aux Jeux olympiques d’Athènes la même année avec son indissociable Expo du Moulin, Arnaud Boiteau fait partie des figures incontournables du concours complet tricolore. L’écuyer, qui peut compter sur l’exceptionnel sauteur qu’est Quoriano*ENE-HN pour briller au plus haut niveau, est bien décidé à tenter d’aller décrocher une deuxième médaille olympique cet été, à Rio. Pour GrandPrix-Replay, le pilote a accepté de se livrer sur ses ambitions avant de disputer la première étape du Grand National à Saumur.



GrandPrix-replay : La semaine dernière, vous étiez en stage de préparation en vue des Jeux olympiques de Rio, comment s’est déroulé ce stage et quels étaient les axes de travail ?
Arnaud Boiteau : Nous étions unanimes pour dire que c’était un stage de qualité. Tout s’est bien passé et tout le monde est particulièrement motivé cette année. Le travail sur le plat s’est déroulé en deux temps, encadré par Serge Cornut et Jean-Pierre Blanco. La première phase était axée sur le travail de locomotion des chevaux afin qu’ils fonctionnent bien dans leur ensemble et qu’ils soient un peu dégrippés en sortie de la saison hivernale. La deuxième phase, elle, était axée sur le travail de présentation de la reprise, afin de mettre musculairement les chevaux dans de meilleures dispositions pour être bien rassemblés sur une carrière olympique et ainsi dérouler une reprise de niveau 4*.
Concernant le saut d’obstacles, nous nous sommes davantage penchés sur l’enchaînement et plus précisément sur un parcours de type Grand National, avec Thierry Pomel. C’était très positif car Thierry se concentre vraiment sur les bases, il utilise des mots simples et a une capacité d’adaptation à chaque cheval, ce qui permet à chacun de trouver ce qu’il a envie d’y trouver. Nous nous sommes intéressés au problème de la qualité du galop, de façon à avoir plus de marge dans le contrôle afin de mieux gérer les situations de compétitions qui peuvent nous amener à allonger ou rassembler la foulée dans une ligne.
Pour le cross, nous avons travaillé sur un parcours de niveau 2*, concocté par Thierry Touzaint. Il a pris soin de mettre à disposition des cavaliers tous les types de difficultés, notamment sur le plan directionnel afin de travailler le contrôle sur des hauteurs qui restaient raisonnables.
 
GPR. : Vous serez à Saumur ce week-end pour la première étape du Grand National. Quoriano*ENE-HN et Sultan de la Motte seront au départ de la Pro Élite tandis que Uéro du Village est engagé dans la Pro 2. Comment abordez-vous ce premier concours de l’année ? Comment se sentent les chevaux ?
A.B. : C’est une rentrée, je l’aborde donc comme telle ! Chaque cavalier s’attache à arriver avec des chevaux assez prêts. Les chevaux sortent de l’hiver mais je pense qu’ils sont prêts à courir. Quoriano est assez aguerri à ce niveau-là, il est en pleine forme et répète bien ses gammes. Il a bien sauté lors du stage et s’est montré assez coopératif sur le dressage. Concernant le cross, il a fait une bonne répétition et a fait preuve de sérénité, c’est qui est positif. Sultan a un peu moins d’expérience mais il a déjà participé à des épreuves de ce type. Il a encore progressé cet hiver, il est plus concentré lors du travail. Uéro, lui, a huit ans. C’est un cheval très tardif mais il évolue très bien. Je pense qu’il a le potentiel pour faire des CCI 3* dans l’avenir, il va donc continuer gentiment à prendre du métier.
 


’’Ce n’est pas utopique d’imaginer une participation olympique’’

Arnaud Boiteau et Quoriano*ENE-HN au CICO 3* de Fontainebleau l'année dernière.

Arnaud Boiteau et Quoriano*ENE-HN au CICO 3* de Fontainebleau l'année dernière.

© Scoopdyga

GPR. : Cette année vous faites équipe avec Thibaut Fournier pour le Grand National. Pouvez-vous nous parler du duo que vous formez tous les deux ?
A.B. : C’est un peu nouveau pour moi. Jusqu’à maintenant, j’ai toujours fait équipe avec des gens de mon âge ! (rires) Je pense notamment à Didier Dhennin et Stanislas de Zuchowicz. Nous avons considéré qu’il serait assez amusant, judicieux et tout à fait d’actualité vis-à-vis de mon employeur, d’associer un élève du Pôle Jeune à un plus vieux. Je suis donc pour la première fois dans la position du plus vieux. Cela ne me déplait pas, mais je prends encore plus conscience du temps qui passe. Mais je trouve cela vraiment sympathique !
 
GPR. : Allez-vous tenter d’aller aux Jeux olympiques cet été ? Que représente cette échéance douze ans après votre médaille d’or obtenue à Athènes ?
A.B. : Dès lors que l’on a un cheval dans le Groupe JO/JEM, cela sous-entend que l’encadrement fédéral considère qu’on y a potentiellement notre place et Quoriano a le potentiel et les qualités pour y prétendre. Mais c’est un cheval assez délicat, et il faut que nous parvenions à bien maîtriser la régularité puisque c’est un peu ce qui a pêché ces deux dernières années. Sultan, lui, n’est pas encore dans le Groupe mais s’il passe bien le test du CCI 3* de Saumur au mois de mai, il pourra faire partie des prétendants, avec comme handicap, le fait d’avoir moins d’expérience. Cependant, en terme de potentiel, ce n’est pas utopique d’imaginer une participation olympique avec les deux, même si, à l’heure où nous parlons, j’ai le sentiment que certains couples ont un peu plus fait leurs preuves ces derniers temps. Le problème d’une sélection olympique, c’est qu’il y a ce que nous faisons et ce que les autres font. En l’occurrence, ce que font les autres depuis quelques temps est très positif, je pense notamment à la médaille européenne (l’équipe de France a décroché une médaille de bronze aux championnats d’Europe de Blair Castle, en mai dernier, ndlr) et au très bon comportement des cavaliers français au CCI 4* de Pau (où Astier Nicolas s’est imposé avec Piaf de B’Neville, tandis que Karim Laghouag est cinquième avec Entebbe de Hus et septième avec Punch de l’Esques, ndlr). Je me positionne davantage dans un deuxième wagon.
Tout sportif résonne en terme d’olympiade, c’est l’objectif absolu tous les quatre ans. Dans une discipline comme la nôtre, qui est assez confidentielle et qui est vraiment mise en lumières lors des événements comme ceux-là, c’est d’autant plus important pour nous d’y participer, au-delà du symbole et de ce que cela représente en tant que compétition tout court. L’ayant connu une fois, j’ai évidemment l’espoir de le revivre, dans un autre contexte. Je suis sportif de haut niveau, et, quand on a goûté une fois aux Jeux olympiques, on a envie d’y goûter une seconde fois.
 
GPR. : Comment vous sentez-vous par rapport à tous ces ’’jeunes’’ qui arrivent en équipe de France ? Parvenez-vous à trouver votre place ?
A.B. : Je pratique ce sport depuis plusieurs années et je trouve que l’on n’a jamais eu, en France, un réservoir aussi intéressant de cavaliers. La jeune génération a bien négocié l’évolution de notre sport. On constate ainsi une diminution des formats et une élévation technique des trois disciplines. Selon moi, ce n’est qu’une première étape car nous nous dirigeons vers une modification de format qui va nous pousser vers des temps de compétition plus courts et ce, pour chaque discipline, de façon à rendre notre sport plus lisible pour le spectateur et plus facile à médiatiser. Je pense que les jeunes sont bien inscrits dans ce schéma-là. Il y a quelques temps en France, on pouvait souffrir d’une conception un peu en dilettante du travail sur le plat, en essayant de compter, en quelque sorte, sur un talent instinctif. La jeune génération s’est inscrite dans un modèle plus germanique avec une rigueur plus importante sur le plat, une méthode de travail plus affirmée et plus précise, servant un talent naturel qui demeure très important. C’est extrêmement bénéfique de tirer tout le monde vers le haut, y compris les plus vieux.