'J?AIMERAIS ÊTRE UN JOUR AU COUDE À COUDE AVEC ASTIER NICOLAS DANS LE TOP DIX MONDIAL', THOMAS CARLILE
Le dernier week-end de juin, [Thomas Carlile] a remporté le CCI 2* de Bazoges-en-Pareds, en Vendée. Associé à [Sirocco du Gers], un Selle Français de sept ans très prometteur, le jeune cavalier de vingt-six ans s’était blessé un mois plus tôt chez lui, à l’entraînement. Un accident qui n’a pas eu raison de ses ambitions ! Contacté par GrandPrix-Replay.com, Thomas Carlile raconte et sa mésaventure, et son succès.
GrandPrix-Replay.com : Fin mai, vous vous êtes blessé au cours d’un entraînement à domicile. Que vous est-il arrivé ? Comment allez-vous à présent ?
Thomas Carlile : J’ai eu un accident au montoir avec un jeune cheval. Celui-ci m’a donné un coup de tête en plein visage alors que j’allais monter dessus. Il m’a fait plusieurs fractures au niveau de l’orbite et de l’apophyse. J’ai perdu connaissance et je suis tombé. Cela m’a valu une journée de coma et une hémorragie cérébrale ! Aujourd’hui, j’ai encore quelques vertiges, mais je suis suivi par un kiné pour travailler cela. Je fatigue vite, donc je n’ai pas gardé le même rythme qu’avant l’accident. Mi-juin, j’ai sorti moitié moins de jeunes chevaux qu’habituellement dans les Cycles classiques. À l’international de Bazoges, je n’ai eu qu’un cheval par épreuve. Toutefois, j’espère ne pas avoir de séquelles ! J’aimerais pouvoir retrouver 100 % de mon activité.
GPR. : Quand et comment avez-vous repris l’entraînement ? Pensiez-vous être en mesure de revenir en compétition aussi rapidement ?
T.L. : Je suis resté une bonne semaine à l’hôpital, puis je me suis reposé une autre semaine. En rentrant, je me suis gentiment remis à cheval. J’avais envie de remonter, et je m’y sentais apte. J’ai monté deux chevaux le premier jour, un de plus le lendemain, pour arriver à cinq à la fin de la semaine. Au moment de l’accident, j’ai subi une perte de conscience. En me réveillant à l’hôpital, je ne savais pas du tout ce qu’il m’était arrivé ! Ce sont les chirurgiens qui m’ont expliqué. Je me demandais comment j’allais pouvoir m’en sortir. Mais comme je ne m’en souviens pas, je n’ai pas de crainte ! Bien sûr, je suis plus prudent. Par exemple, cela pouvait m’arriver de monter sans casque lorsqu’il faisait chaud, je ne prends désormais plus ce risque.
GPR. : Vos écuries, Carlile Complet Eventing, sont-elles spécialisées dans la formation de jeunes chevaux ? Ces chevaux sont-ils tous destinés au commerce ?
T.L. : J’ai beaucoup de jeunes montures, en effet, et cela fait quelques années que je suis très bien classé dans les Jeunes chevaux. Nous réalisons de bonnes performances à chaque finale, mais ce n’est pas une spécialisation. Mon idéal est de faire vieillir mon écurie actuelle, et pouvoir un jour être au coude à coude avec [Astier Nicolas] dans le Top dix mondial. J’ai dix-neuf chevaux au travail. Aujourd’hui, les plus vieux sont Sirocco et SRS [Orlando], qui ont sept ans. En 2011, [Popof des Bois] et [Pyromane de Brioux] avaient abordé le haut niveau. J’avais fini deuxième du Grand National, et avais commencé les compétitions trois étoiles. Mais j’étais dans une situation où j’avais besoin de vendre. Sachant que j’avais encore toute ma carrière devant moi, ce moment n’était pas mal choisi. Une bonne entrée d’argent pouvait m’être utile, me permettre d’investir dans d’autres jeunes chevaux, de mieux les préparer dans de meilleures installations, et ainsi pouvoir les garder. Maintenant, j’essaie de les faire vieillir et de les amener au meilleur niveau. Tous les chevaux de mon écurie suivent le même objectif : je ne change pas la formation d’un cheval selon que je souhaite le faire performer ou le vendre. Aujourd’hui, on me proposerait d’en acheter certains que je refuserais : Sirocco, par exemple, mais aussi [Upsilon] et [Tenareze].
GPR. : Vous avez remporté le CCI 1* de Jardy le 02 mai, puis le CCI 2* de Bazoges-en-Pareds le week-end dernier, avec Sirocco du Gers. Il s’agit de sa sixième victoire consécutive. Pouvez-vous nous en dire plus sur lui ?
T.L. : Sirocco est un petit cheval au modèle très particulier. Ce n’est pas une gravure ! Son propriétaire, Gérard Brescon, me l’a confié à la fin de ses trois ans afin que je le prépare sur les Cycles classiques. C’est le premier poulain qu’il a fait naître ! Sirocco a une sacré personnalité. C’est un cheval très attachant, intelligent et malin. Il peut, à la maison, être un peu fainéant et coquin. Mais en compétition, il se donne à 200 % ! Il veut vraiment donner le meilleur de lui-même, et se met parfois un peu de pression. En dressage, s’il est chaud en sortant du rectangle des dix minutes, il reste très sérieux devant les juges car il sait qu’il doit l’être. Sur le cross, il a une envie débordante d’aller vite. Il précipite parfois un peu les choses, j’aimerais qu’il prenne un peu plus le temps de sauter. Mais, même lorsqu’il est en difficulté, il ne dit jamais non ! Je crois qu’il n’a pas fait plus d’une ou deux fois des erreurs sur le cross, mais ce sont surtout des accès de générosité de sa part qui l’ont poussé à la faute. Enfin, sur l’hippique, il n’a pas énormément de moyens, mais il dispose d’une très bonne technique et de beaucoup d’énergie. Il est très juste et respectueux, et a toujours envie de gagner. Donc envie d’être sans faute ! C’est là que réside sa force.
GPR. : Quels autres chevaux vous apportent de la satisfaction ? Avez-vous fondé des espoirs de haut niveau dans certains d’entre eux ?
T.L. : J’en ai dix-neuf à l’écurie et dix-neuf qui m’apportent de la satisfaction tous les jours ! J’ai beaucoup d’espoir en Sirocco, Tenareze et Upsilon : ce sont des chevaux qui vont gagner à haut niveau. Ils ne vont pas seulement être aptes à y participer, ils y seront très performants.
GPR. : Qu’avez-vous ressenti lors de cette victoire à Bazoges ?
T.L. : J’avais déjà gagné le CCI 2* de Bazoges-en-Pareds il y a trois ans, avec Popof des Bois. Quand j’ai regardé les engagés cette année, je me suis bien dit que Sirocco était loin d’être le favori ! Les chevaux et cavaliers présents avaient beaucoup plus d’expérience que nous. Je ne visais pas la victoire, je voulais surtout donner un bon travail à mon cheval, le faire progresser sur ce niveau 2* qu’il n’avait encore jamais fait. Il a pris de l’avance sur le dressage. Je passais en fin d’épreuve, et, ayant regardé quelques reprise, je savais qu’il pourrait en dérouler une belle, et se placer ainsi dans le trio de tête. Puis j’ai abordé le cross la tête froide. Le terrain était lourd, je me demandais comment mon cheval allait se comporter sur une distance plus longue et en devant être plus rapide qu’habituellement. Il m’a fallu l’écouter, foulée après foulée. Mais il a donné toute son énergie ! À la fin du tour, j’ai du le calmer, et non le solliciter. J’étais très content de lui. Par ailleurs, cette victoire m’a émue, du fait de mon accident. C’était une belle revanche ! J’étais également ravi pour Sirocco. Il est très généreux, c’est un très bon copain. Quand il me donne autant, et que cela paye, c’est lui qui mérite tous les éloges. Enfin, Gérard, mon propriétaire, me soutient énormément. Chaque victoire que je peux lui offrir est un soulagement !
GPR. : Quels sont vos objectifs pour la suite de la saison ? Envisagez-vous de participer à des compétitions 3* ?
T.L. : Pour le niveau 3*, nous verrons. Je suis actuellement à la recherche d’un cheval qui serait clé en main. Si j’en trouve un, j’aviserais. Sinon, j’attendrais l’année prochaine, quand Sirocco et Orlando seront prêts. Mais ils sont encore jeunes, je vais prendre le temps. Pour la suite de la saison, je vais continuer à former mes quatre, cinq et six ans, afin de préparer au mieux les finales des championnats Jeunes chevaux, qui auront lieu mi-septembre à Pompadour. Il me faut également préparer Sirocco pour le rendre très performant à Le Lion-d’Angers, en octobre. C’est déjà pas mal !
Propos recueillis par Léa Dall'Aglio