Bosty, la victoire d’un mec bien

La victoire de Bosty, qui a remporté à quarante-sept ans son premier grand titre individuel Senior cet après-midi, à Herning, est d’abord celle d’un type bien, apprécié de tous sur les terrains de concours. Porté par Castle Forbes Myrtille Paulois, une jument au tempérament incroyable, Roger-Yves Bost est entré au panthéon d’un sport auquel il dévoue toute son énergie depuis toujours. Retour sur une finale magique.



"Il y a des jours comme ça, des jours où ça marche, où rien ne peut t’arriver." Bosty est d’abord l’incarnation de la simplicité et de la bonne humeur. Toujours le même sourire facétieux et discret. Aujourd’hui, il a conclu en apothéose une semaine magique, au cours de laquelle le couple si singulier qu’il forme Castle Forbes Myrtille Paulois, "ma poupée, ma princesse", est passé de quatrième choix, en balance avec Eugenie Angot et Old Chap Tame, à numéro un. Pas une barre en cinq épreuves. Troisième de la Chasse presque sans avoir l’air d’y toucher, le cavalier de Barbizon a tenu à bouts de bras l’équipe de France en signant un superbe double sans-faute mercredi et jeudi, qui n’a hélas pas suffi. Deuxième au classement individuel avant la finale individuelle d’aujourd’hui, il lui fallait réussir deux nouveaux clear rounds et espérer une défaillance de Ben Maher et Cella, impeccables jusqu’alors.

Après les deux parcours à neuf points d’Aymeric de Ponnat sur Armitages Boy et Patrice Delaveau sur Orient Express*HDC, tous deux piégés par la rivière et le triple, le meilleur Français en course s’attaque à un parcours technique, costaud et piégeux, comme doit l’être une finale de championnat. Puissante, disponible et concentrée sur l’objectif, la fille de Dollar du Mûrier fait surtout preuve d’une incroyable générosité. Tandis que l’abord du double final de verticaux à 1,65m s’annonce compliqué, le cavalier remet sa jument en ordre, semblant presque l’arrêter. Cela lui coûte un point de temps, mais lui rapporte un sans-faute sur les barres.

Juste après lui, Ben Maher voit une partie de ses espoirs s’envoler avec la légère faute de postérieurs de sa fantastique jument sur l’oxer polonais, un des obstacles caractéristiques de Frank Rothenberger.


La belle remontée de Scott Brash

La deuxième manche est moins corsée, mais le triple final reste un sacré juge de paix, au bout d’une intense semaine de compétition. Très vite, Aymeric et Armitages signent leur premier sans-faute de la semaine, une performance qui leur offre une onzième place finale d’excellent augure pour les Jeux équestres mondiaux de Normandie 2014. Quelques minutes plus tard, Patrice et Orient laissent huit points sur la piste. L’heure de ce couple, qui comptait parmi les favoris n’est pas encore venue. Le Normand a sûrement déjà pris date pour 2014, quatre ans après la médaille d’argent de l’équipe de France à laquelle il avait grandement contribué avec Katchina Mail.

Scott Brash, déjà impeccable en première manche, récidive sur Hello Sanctos van Gravenhof, et met la pression sur les derniers concurrents dans le money-time. Acclamé comme une star, le tenant du titre Rolf-Goran Bengtsson, déjà fautif en première manche, voit le podium lui échapper sur le milieu du triple, que Casall Ask ne parvient pas à survoler. Le suspense est à son comble. Steve Guerdat semble parti pour un nouveau sans-faute, qui lui assurerait une nouvelle médaille, un an après son exploit olympique. Il essuie hélas le pire des affronts, un spectaculaire refus de Nino des Buissonnets sur ce même milieu de triple. Terrible. Quant à Ben Maher, il ne faute pas cette fois, et maintient Bosty sous pression.

Le Français a deux points de temps de marge pour l’or, une barre pour l’argent et deux pour le bronze. Mais comme chacun le sait, calculer n’est pas Bosty. Sa jument aussi en a conscience. Elle lui offre douze sauts magiques dans leur style si acrobatique qui ne laisse personne indifférent. Le stade exulte et salue son champion, qui revient malicieux comme un enfant, quelques minutes plus tard sur le podium protocolaire. Ceux qui ont eu la chance d’assister aux championnats d’Europe Jeunes Cavaliers de 1983, à Geesteren aux Pays-Bas, ont sans aucun doute retrouvé le même sourire chez ce champion pas comme les autres. C’était il y a trente ans! Ben Maher était encore un nourrisson, Scott Brash n’était même pas né.

Quatorze ans après Alexandra Ledermann et Rochet M, il succède à Ludger Beerbaum, Christian Ahlmann, Marco Kutscher, Meredith Michaels-Beerbaum, Kevin Staut et Rolf-Goran Bengtsson. Non, Bosty n’est pas un cavalier de vitesse. Non Bosty n’est pas l’homme d’un Grand Prix ni d’un barrage. Bosty est champion d’Europe. Un beau et grand champion d’Europe.



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