Pret A Tout, une fierté de l’élevage français couronnée à Aix-la-Chapelle
Hier après-midi, la victoire de Marcus Ehning dans le Grand Prix CSIO 5* d’Aix-la-Chapelle a fait le bonheur d’un éleveur français installé dans le Rhône. Il y a un peu plus de quinze ans à Denicé, Bruno Louchet voyait en effet naître un poulain alezan, qu’il baptisait Pret A Tout. Le fruit du croisement osé entre Gare A Elle Deux et Hiram Chambertin a depuis bien grandi, puisqu’il s’est imposé hier dans l’une des épreuves les plus importantes au monde, trois jours après avoir participé à une deuxième victoire consécutive de l'Allemagne dans la Coupe des nations. Pour GRANDPRIX-Replay.com, son naisseur a accepté de revenir sur ce succès majeur, et de retracer la trajectoire plutôt inattendue de l’alezan.
Pour autant, si cette victoire dans le stade de la Soers est une sacrée ligne de plus dans un palmarès, Bruno Louchet n’oublie pas tous les succès déjà engrangés par Pret A Tout. “Il a déjà couru de très belles épreuves, et notamment remporté la finale de la Coupe des nations il y a deux ans, au terme d’un barrage contre le cheval champion olympique Big Star. La même année, il était déjà le meilleur Selle Français du Grand Prix d’Aix-la-Chapelle (l’alezan avait terminé à la quatrième place du Grand Prix, ndlr).
Bien entendu, l’éleveur installé dans le cœur du Beaujolais est fier qu’un produit de son élevage réalise sa carrière chez l’un des maîtres incontestés du saut d’obstacles mondial. “Marcus Ehning ne monte pas n’importe quels chevaux”, souligne-t-il justement. Et pourtant, si Pret A Tout a aujourd’hui prouvé qu’il faisait partie des meilleurs, tout ne le prédestinait pas à une telle carrière. “Les gens se demandent un peu comment un tel croisement a pu donner ce cheval. La souche de sa mère Gare à Elle Deux est très bonne, en revanche le père Hiram Chambertin a une production plutôt moyenne. C’était un cheval difficile, qui a beaucoup sauté. Étant donné que Gare à Elle Deux était très puissante et costaude, l’accord avec ce cheval-là a finalement très bien fonctionné”, analyse-t-il a posteriori.
Décrit comme “un très beau poulain”, Pret A Tout a donné un peu de fil à retordre à ceux qui l’ont côtoyé à ses débuts, avant de se révéler rapidement. “Il a été assez difficile au débourrage, car il avait beaucoup de sang et de force. Quand il a commencé à sauter, nous avons tout de suite vu qu’il avait de gros moyens. Nous l’avons vendu assez rapidement après ses premiers parcours en Cycles Classiques, lors desquels il avait montré qu’il avait quelque chose en plus. Il avait déjà un superbe passage de dos et troussait bien les antérieurs”, se souvient l’éleveur.
“Pret A Tout sort de l'ordinaire”
Passé par le haras de Sainte-Cécile de monsieur Panetti, l’alezan a ensuite été acquis par Ruth Krech, qui en a confié les rênes à une Jeune Cavalière, Kaya Lüthi. “Avec cette cavalière, il a réalisé de belles choses aux championnats d’Europe, avant d’aller jusqu’en Coupe du monde”, rappelle Bruno Louchet, intarissable sur son produit maison. Lors des championnats continentaux Jeunes Cavaliers, Pret A Tout s’est en effet adjugé trois médailles d’argent, avant de rapidement franchir le cap des CSI 5*.Depuis la vente du hongre, Bruno Louchet n’a eu l’occasion de le recroiser qu’à une seule reprise. “Nous étions allés voir Pret A Tout dans son boxe à Lyon, en 2016, mais il n’avait pas été très en forme dans le Grand Prix de Coupe du monde (son cavalier avait en effet abandonné, ndlr). Il nous avait bien reconnus (rires) ! Nous avions pu discuter un peu avec Marcus Ehning, mais il n’est pas tellement causant. On ne l’a pas revu depuis, car il fait très peu de concours et c’est pour cela qu’il gagne je pense. C’est un cheval très costaud, vraiment pas usé, et qui pourra encore concourir un bon moment s’il continue à être géré de la sorte. Ce cheval-là, c’est du solide ! Nous l’avions vu de près, et il est vraiment en bel état.”
À Denicé, la souche de Pret A Tout est toujours présente dans les prés de Bruno Louchet. “Nous avons encore des chevaux de la même lignée que lui. Sa mère a malheureusement été emportée par une torsion d’intestin, mais nous avons une jument qui a bien réussi en concours, issue du demi-frère de sa mère. Elle est désormais poulinière chez nous”, explique-t-il.
La victoire de Marcus Ehning et Pret A Tout a donc permis de mettre en lumière l’élevage français, que Bruno Louchet et sa famille tentent de faire rayonner depuis plusieurs générations. “Nous élevons des chevaux depuis longtemps dans la famille, puisque c’est mon grand-père qui avait initié cela dans les années 1950. Après avoir pris sa retraite de Général, il avait commencé l’élevage dans la propriété familiale, après la guerre”. Une histoire de famille, dont Pret A Tout est certainement la plus belle réussite. “Nous avons fait naitre beaucoup de chevaux, mais Pret A Tout sort de l’ordinaire”.