HENK NOOREN DIT ADIEU, HENRI PRUDENT DIT NON



À trop tergiverser, à trop hésiter, à trop discuter peut-être, la Fédération française d’équitation est en train de voir se rétrécir considérablement son arbre des possibles quant à la direction de son équipe de saut d’obstacles. Elle n’était déjà pas parvenue à trouver un grand manager des équipes nationales. Après avoir accueilli la démission de Laurent Bousquet dans le complet, elle a reçu ce week-end celle du Néerlandais Henk Nooren, entraîneur et sélectionneur national du jumping. Son remplaçant pressenti, Henri Prudent n’aurait reçu qu’une proposition de contrat à temps partiel. Il notifiera demain son refus à la FFE. Rien ne va plus !
 

 
La tempête succède au grésil et aucune accalmie ne se profile à l’horizon. Tandis que le dressage espère avoir trouvé en Jan Bemelmans son homme providentiel et le concours complet en Thierry Touzaint un pompier pragmatique pour les deux saisons à venir, rien ne va plus dans le saut d’obstacles. Après avoir un temps envisagé son éviction pure et simple, depuis des mois, la Fédération française d’équitation, encouragée en ce sens par la plupart des acteurs consultés, avait décidé de conserver Henk Nooren dans l’organigramme de l’équipe de France, au poste essentiel d’entraîneur, lui dont les capacités techniques sont reconnues dans toute l’Europe et l’apport régulièrement salué par les cavaliers tricolores. Il n’en sera rien. Comme Jean-Maurice Bonneau en décembre, ne ressentant pas de vrai désir d’une majorité de cavaliers à poursuivre l’aventure bleue avec lui et devant l’incapacité de la Fédération à définir clairement un mode de fonctionnement et un organigramme, il claque la porte. Dans une longue interview accordée à cavadeos.com, le Néerlandais fait notamment valoir que l’Allemagne, qui a vécu le même camouflet olympique que la France, s’est remise en ordre de bataille dès le mois d’octobre.
Hésitant depuis quelques semaines, il aurait pris sa décision à la suite d’une réunion tenue le 22 janvier en présence d’une quinzaine de cavaliers concernés par les prochains championnats d’Europe et la Coupe des nations. "Sur les huit cavaliers supposés former le noyau des équipes pour 2013, environ quatre ont fait comprendre à Serge Lecomte qu’ils souhaitaient la nomination d’un chef d’équipe mais qu’ils n’avaient plus réellement besoin que je sois sur place lors des concours comme entraîneur, deux ont toujours fonctionné sans beaucoup d’aide de ma part et deux se disaient d’accord pour continuer avec moi. Mais comme toujours dans ce genre de réunions, ceux qui ont de bons résultats parlent beaucoup et les autres sont beaucoup plus réservés et ne s’expriment pas. Dans les jours qui ont suivi cette réunion, Sophie Dubourg (directrice technique nationale adjointe, ndlr) a été assaillie de coups de téléphone par la grande majorité des cavaliers de l’équipe B qui ne se sont pas exprimés sur le moment et se sont rendus compte trop tard qu’ils n’étaient pas d’accord avec ce qui avait été dit par quelques-uns. En réalité, ils auraient aimé continuer à travailler avec moi mais c’était trop tard. En tout cas, j’ai été prévenu immédiatement du résultat de la réunion par Serge Lecomte. À l’évidence, je ne peux travailler qu’avec des cavaliers qui souhaitent s’entraîner avec moi. Si 65% d’entre eux estiment qu’ils peuvent se débrouiller sans moi, le signal est très clair, il est temps pour moi de me retirer", déclare-t-il à cavadeos.com.

 
Henk Nooren, nouveau mentor de Luciana Diniz

 
Après avoir grandement contribué au couronnement européen de [Kevin Staut] puis aux deux médailles d’argent, continentale et mondiale, conquises par l’équipe de France à Lexington puis à Madrid, en tant qu’entraîneur aux côtés de Laurent Élias puis seul aux manettes, Henk Nooren quitte nécessairement les "Vestes bleues" avec un sentiment d’inachevé. "Je suis déçu parce que j’aurais aimé continué à travailler avec ce petit groupe. Nous avions aussi commencé à travailler avec un groupe plus important. Je suis fier et très heureux du travail que nous avons mené collectivement ces dernières années. Il a permis de grands progrès et de très nombreux succès en Coupe des Nations ainsi qu’aux championnats du monde et d’Europe. Pour préparer 2014, je souhaitais travailler au sein d’un staff renforcé qui fonctionne vraiment en équipe, avec notamment un chef d’équipe et une préparatrice mentale. C’est toujours décevant de ne pas pouvoir finir ce que l’on a commencé."
Henk Nooren reste visiblement sous contrat jusqu’au 1er avril 2013, soit deux ans tout juste après le départ de Laurent Élias et sa nomination au poste de sélectionneur. Entraîneur personnel de longue date de l’Allemand [Marcus Ehning], il officie également, depuis quelques semaines, auprès de la Portugaise [Luciana Diniz]. Vu le déclic qui s’est produit ces dernières semaines, avec ses victoires dans les Grands Prix de Bâle et Zurich, elle devrait lui accorder toute confiance. Il aurait également été contacté par d'autres fédérations nationales.

 
Henri Prudent refuse un contrat... à temps partiel !

 
Ce retrait aurait logiquement dû faire le bonheur d’Henri Prudent, candidat à la succession du Batave, à qui on a tout de même régulièrement reproché ses absences en concours. Le Lorrain souhaite s’imposer en grand chef et s’investir pleinement dans cette mission quasi sacerdotale. Il semble, de plus, être soutenu par la quasi sinon la totalité des cavaliers de haut niveau. Il aurait pourtant dit non, selon un article paru ce soir sur equidia.fr. Joint par Kamel Boudra, l’entraîneur participant actuellement au Winter Equestrian Festival de Wellington avec ses élèves et sa femme, [Katie Prudent] Monahan, aurait en effet refusé une proposition de contrat… à temps partiel ! Ubuesque !
Compte tenu de sa vision du poste, il s’imaginait plutôt – on peut le comprendre – engagé à temps complet. Est-ce une question d’argent ? De ce point de vue, le départ de Henk Nooren devrait pourtant grandement alléger la masse salariale fédérale. Henri Prudent a indiqué ce soir qu’il notifierait son refus demain à Serge Lecomte. Le président lui fera-t-il une autre proposition ? Fera-t-il appel à Éric Levallois, également pressenti ? À Thierry Pomel, adjoint de Henk Nooren ? À Hubert Bourdy ? Serge Lecomte et Pascal Dubois, supposés annoncer en grandes pompes leur projet sportif et leur organigramme, n’ont plus que huit jours et une liste de plus en plus réduite pour se décider.

 
Sébastien Roullier