L’avenir de la Société hippique nationale de Hennebont s’assombrit

Le comité syndical du Haras national d’Hennebont, programmé le 2 juillet, avait été annoncé comme décisif après la mobilisation populaire et parfois vindicative. Au terme de celui-ci, de nouveaux statuts ont été entérinés, mais la survie de la Société hippique nationale a été placée entre les mains du mandataire judiciaire désigné après la démission du bureau le 26 avril dernier.



En 2007, alors que l’État commençait à se désengager petit à petit de l’étalonnage public et des activités équines, les collectivités locales avaient renforcé leur engagement en faveur du Haras national d’Hennebont en créant le syndicat mixte du Haras national d’Hennebont (SMHNH), réunissant la région Bretagne, le département du Morbihan, Lorient Agglomération et la commune d’Hennebont. Dès 2008, cette entité de gestion avait repris les charges d’entretien patrimonial et la coordination des activités du Haras national, alors propriété de l’État. Elle accompagnait notamment les activités de la Société hippique nationale (SHN) d’Hennebont, l’une des dernières en France, en facilitant son quotidien (tonte, hersage, etc.) et en portant les investissements nécessaires (entretien et réfection des aires équestres et de la voirie, etc.).
 
Accompagné d’un plan global de conservation du cheval sur le site, mais aussi des activités équestres au sens large (bourrellerie, spectacle équestre, muséographie, étalonnage à travers le GIP Cheval Breton, etc.), cet engagement avait été confirmé en 2016, alors que le site avait finalement été mis en vente par l’État. Les collectivités locales s’étaient une nouvelle fois mobilisées. Ainsi, la commune d’Hennebont s’était engagée a` acquérir l’abbaye de la Joie pour y développer un projet économique distinct mais cohérent avec l’image et l’activité équestre du site. De son côté, Lorient Agglomération avait acquis le reste du domaine. La maîtrise foncière ainsi assurée, le syndicat mixte avait conclu une autorisation d’occupation temporaire d’une durée de cinquante ans avec Lorient Agglomération et souhaité s’engager sur un programme de développement ambitieux autour de la thématique du cheval pour faire du Haras un lieu de référence, de renommée nationale. La mise en œuvre de ce projet nécessitait une modification des statut du syndicat mixte, votée à l’unanimité ce 2 juillet.
 
De son côté, la SHN jouit également d’une convention d’occupation précaire d’une durée de dix-huit ans, dont le terme est fixé au 31 décembre 2019 et qui ne sera pas reconduite. “Un travail progressif régulier permet aujourd’hui d’en arriver à ce constat-là. L’engouement médiatique a soulevé d’autres problématiques, souvent transversales, mais qui ne permettent pas à ce jour de remettre en question le projet”, a souligné à juste titre Jean-Rémy Kervarrec, représentant le conseil départemental lors du conseil syndical. La SHN, unique en son genre en 2019, semble avoir manqué de projection au-delà de 2019. “La démission du bureau de l’association, le 26 avril, a considérablement modifié la situation. La complexité de l’arrivée d’un administrateur a engendré une redistribution des cartes.  En confiant l’avenir de la SHN à un administrateur judiciaire, le bureau a, ipso facto, limité les possibilités de poursuite des activités (et provoqué l’annulation des compétitions équestres programmées cette année, ndlr), argue pour sa part André Hartereau, maire d’Hennebont et président du syndicat mixte, doté d’un budget de 650 000 euros.
 


Liquidation ou continuation ?

 
Ce changement de situation, qui a ému l’opinion publique locale, a donc mis un coup de frein à la continuité des activités équestres en 2019. “Depuis plusieurs années, il a été demandé à la SHN de préparer l’échéance de 2019 et de s’inscrire, aux côtés du syndicat mixte, dans une prospective positive. Pourtant, on constate depuis cinq ans une dégradation régulière de la qualité des services du club avec, entre autres, le départ de l’instructeur historique et de nombreux adhérents et propriétaires (le club est passé de quatre cents à environ cent quatre-vingts adhérents et de trois à quatre salariés, ndlr), rappelle Jean-Marc Beaumier, directeur du syndicat mixte.
Cette situation inédite bouleverse les équilibres et surtout les activités, aujourd’hui soumises aux décisions d’un mandataire judiciaire. “Il y a déjà quelques mois, nous avons demandé un point financier à la SHN, afin d’entrevoir le futur. Les changements consécutifs de bureau n’ont pas facilité les choses. Il restait énormément de travaux à réaliser. Nous avons sans nul doute perdu du temps pour les gens vus de l’extérieur et il nous faut aujourd’hui construire l’avenir”, souligne Marie-Annick Le Beller, organisatrice de compétitions équestres à Plouay et Languidic, chef de paddock et élue à Lorient Agglomération.
 
À quoi ressemblera cet avenir? Il est encore difficile de répondre à cette question, les tractations entre le syndicat mixte du haras et le mandataire évoluant de jour en jour, voire d’heure en heure… “Pour investir, les collectivités avaient besoin d’un fil conducteur et de grands axes. Là, ce travail de long terme fait face à énormément d’évolutions ces derniers mois”, souligne Karine Bellec, conseillère départementale du Morbihan. Une chose semble néanmoins actée: “L’intégration des activités ne doit pas impacter l’équilibre économique du site et l’on ne peut pas intégrer des activités qui feraient entrer le site en concurrence avec des structures privées.” Quid alors du centre équestre? La réponse semble là encore bien complexe.
 
Le 21 juin, l’administrateur a proposé trois hypothèses. Soit la contractualisation d’une poursuite exceptionnelle des activités de la SHN jusqu’au 1er juillet 2020 pour lui permettre d’organiser de manière sécure la cessation des activités non poursuivies et la cession des activités reprises au profit du syndicat mixte. Soit la reprise par le syndicat mixte, ou une autre structure, des activités dûment valorisées de la SHN et de l’ensemble du personnel. Soit la liquidation judiciaire de la SHN, en cas de défaut de mise en œuvre de l’une ou l’autre de ces alternatives.
 
“C’est dans ce contexte évoluant quotidiennement que se poursuivent les négociations entre le syndicat mixte et l’administrateur. Les enjeux portent à la fois sur les modalités économiques et la sécurisation juridique des conditions d’une reprise ainsi que sur l’urgence du calendrier”, partagent les membres du conseil, qui ont échangé avec le mandataire judiciaire quelques heures avant ce qui devait être un conseil syndical explosif. “Aujourd’hui, aucune décision ne peut donc être prise par le syndicat mixte sans les éléments précis demandés à l’administrateur. Il faut continuer à échanger avec lui. Le SMHNH doit sécuriser juridiquement et économiquement les équilibres, sans risquer de se retrouver dans les mois à venir face à des problèmes juridiques qui pourraient mettre à mal l’institution. Nous devons avoir l’assurance que tout sera claire et viable. L’autre problème majeur est calendaire. En effet, même si les réponses sont apportées, des contraintes de budget, de recrutement et de cavalerie restent à venir. Le dialogue est aujourd’hui ouvert avec l’administrateur, mais il nous faut rester en veille, car il s’agit de l’argent des contribuables”, conclut André Hartereau. Bref, l’été s’annonce chaud!
 
Le haras accueille 60 à 70 000 visiteurs par an, dont 40 000 sur la seule action culturelle. En 2016, la valeur du site avait été estimée par l’État à 5,4 millions d’euros. Il avait cependant été cédé aux collectivités pour 750 000 euros et la promesse d’y effectuer de lourds travaux de modernisation. Une tranche, comprenant la couverture de la cour du puits, va d’ailleurs débuter dans les prochains mois. Les infrastructures et aires équestres (manège, carrière, parking, etc.) doivent également être rénovées dans les années à venir.