Les vétérinaires restent droits dans leurs bottes
Voici les interventions conjointes du Suédois Göran Åkerström et de l’Américain Thomas Timmons, à la suite de l’invraisemblable course d’endurance des Jeux équestres mondiaux de Tryon, tronquée puis annulée mercredi en fin de journée aux États-Unis. Le directeur des affaires vétérinaires de la Fédération équestre internationale et le président de la commission vétérinaire de la course se sont exprimés lors d’une conférence de presse qui s’est tenue en début après-midi.
Durant la course, nous, vétérinaires, avons été témoins des difficultés des chevaux en termes de capacité de récupération, avec des conditions climatiques délicates: chaleur, fort taux d’humidité et manque de vent. Le Wet Bulb Globe Temperature (WBGT ou indice de température au thermomètre-globe mouillé, ndlr) a facilement atteint 31 (on considère que les conditions sont critiques à partir de 26 à 28, ndlr), ce qui s’est manifesté chez les chevaux, soumis à des efforts intenses. Nous avons effectué plus de cinquante mesures mercredi. En début de journée, les données étaient conformes à nos prévisions. Après l’orage, les nuages ont disparu et l’indice WBGT est brusquement passé de 26 ou 27 à 31, ce qui représente un niveau extrême. On pouvait le ressentir sur place, et en voir les effets sur les chevaux. Dans ces conditions, ils ne pouvaient plus récupérer dans de bonnes conditions. Et malgré ce qui a pu être dit, cela ne correspond pas à la normale dans cette région. Dès lors, il était clair pour nous que le moment était venu d’annuler la course. C’est le conseil que nous avons donné aux organisateurs et officiels. Le bien-être des chevaux étant notre priorité, le bien-fondé de cette décision ne faisait aucun doute à nos yeux.
Au vet gate lors duquel l’annulation de la course a été décidée, cinquante-trois chevaux étaient déjà soignés sur place, dont cinquante-deux pour raisons métaboliques, un nombre sans précédent. Trente-deux ont dû être perfusés. Plusieurs souffraient de myosites, ce qui était également lié à des problèmes métaboliques. La plupart d’entre eux ont recouvré un bon état de santé dans les heures qui ont suivi, mais l’un souffrait toujours de problèmes rénaux hier. Malheureusement, nous venons de recevoir l’information que son propriétaire a dû se résoudre, après avoir consulté les vétérinaires de la clinique équestre de Tryon, de l’euthanasier.
“Les conditions sont 10% plus défavorables que la normale”
Il est vrai qu’il y avait des chevaux en bonne santé, mais nous n’avons aucun autre mécanisme pour arrêter ou ralentir les chevaux en difficulté que les paramètres vétérinaires. En ce qui concerne ceux qui étaient peut-être encore en mesure de continuer, les conditions étaient suffisamment extrêmes pour que l’on considère le risque, et ce risque n’en valait pas la peine.
Avant d’allouer ces Jeux équestres mondiaux à Tryon, nous avons effectué une étude de climat. C’est d’ailleurs pourquoi nous avons décidé de les décaler de deux semaines par rapport à la date initiale (ces JEM devaient alors se tenir à Bromont, au Canada, ndlr). Par la suite, nous avons continué à surveiller les données climatiques: températures, précipitations, taux d’humidité, vents, risques d’ouragans, etc. Et si l’on regarde les données des cinq années précédentes, les conditions sont 10% plus défavorables en 2018 que la normale, ce qui est considérable. Et nous continuons à surveiller l’évolution de jour en jour.”