LA FEI NE PEUT RIEN CONTRE LES ABUS AU MOYEN-ORIENT ?
Alors que des mesures ont été prises pour assurer le bien-être et la sécurité des chevaux pendant les courses, la monture d’un cavalier d’endurance émirati a dû être euthanasiée à la suite de fractures des canons survenues durant l’Al-Reef Cup, à Abu Dhabi. Cependant, comme la course s’est déroulée sous la bannière de la fédération nationale des Émirats arabes unis, la FEI assure ne rien pouvoir faire…
Tout a commencé la semaine dernière. Sur la page Facebook 'Clean Endurance', une source anonyme a affirmé que trois chevaux étaient décédés pendant l’Al-Reef Cup, une course de 120 km qui s’est tenue le 1er février dernier à Abu Dhabi. Rien ne permettait de corroborer cette information jusqu’à la publication sur les réseaux sociaux de deux photos, des captures d’écran du Dubaï Racing TV live stream qui a retransmis la course sur internet. Sur la première, un cheval bai commence à tomber dans le sable profond. Sur la seconde, le même cheval, dont les antérieurs ont les canons fracturés, se dérobe tandis que coureurs et véhicules de sécurité continuent leur route.
Formellement identifié sur les photos par l’entraîneur australien Jay Randle, le cheval s’appelle Splitters Creek Bundy. Anciennement sous selle australienne, le hongre de douze ans avait été vendu aux Émirats arabes unis en 2010. 'Bundy était un cheval très solide, avec un excellent squelette et une bonne constitution', a affirmé Jay Randle à Horse-Canada.com. 'Il était un peu têtu parfois, mais aussi très attachant. Il était énergique et agréable à monter. Il avait un caractère original, et était aimé de nombreux cavaliers.'
Lors des trois dernières courses internationales auxquelles il avait participé, avec les Émiratis Majid Suhail al-Marri et Mansour Saeed Mohamed al-Faresi, et avec l’Iranienne Maryam Mohamed Mothanna, en 2013 et 2014, il avait été disqualifié pour boiterie. Selon Pippa Cuckson, la journaliste du Daily Telegraph spécialiste des dérives de l’endurance, Slippers Creek Bundy était cette fois monté par Humaid Matar Eid Juma al-Falasi, un jeune Émirati de seize ans déjà sanctionné plusieurs fois pour manquement aux règles de la Fédération équestre internationale…
Aucune sanction possible ?
Face à ce dramatique incident, tandis que la fédération émiratie se refuse à tout commentaire – et à toute sanctions ? – la même FEI affirme son impuissance, malgré la flagrante violation de ses règles, puisqu’il s’agissait d’une course nationale et non internationale. Les règles les plus récentes, entrées en vigueur le 1er août 2014 (lire ici), visent notamment à réduire la vitesse sur le sable profond et à assurer suffisamment de courbes et de pentes sur le parcours afin de freiner naturellement les chevaux.
Par ailleurs, on peut légitimement s’interroger sur le caractère national de cette course, qui empêcherait la FEI de sanctionner les manquements à ses règles. Selon le site Epona.tv, cette Al-Reef Cup a en effet accueilli trente-six cavaliers étrangers. Or, depuis 2013, la FEI limite à quinze, issus de moins de quatre fédérations étrangères différentes, le quota de concurrents étrangers admis dans un concours national, sous peine de sanctions financières et sportives (lire ici). À défaut de pouvoir sanctionner directement les responsables de ce nouvel incident grave, l’instance internationale pourrait donc juridiquement requalifier cette course d’internationale et diligenter sa propre enquête.
La frilosité – le laxisme? – s’explique peut-être par l’identité du propriétaire du cheval, Seeh Al Salam Endurance Stable, une écurie détenue par… le cheikh Hamdane ben Rashid al-Maktoum, un membre de la pléthorique famille régnante de Dubaï, le principal émirat. En décembre 2014, un délégué de la fédération des Émirats arabes unis avait demandé, sans succès, à l’assemblée générale de la FEI d’annuler la règle sur le conflit d’intérêts, adoptée en juin dernier. Cette règle semble plus que jamais nécessaire dans une région du monde où les organisateurs de courses, les sponsors et les meilleurs concurrents sont souvent issus des mêmes familles...
Sébastien Roullier et Johanna Zilberstein
Tout a commencé la semaine dernière. Sur la page Facebook 'Clean Endurance', une source anonyme a affirmé que trois chevaux étaient décédés pendant l’Al-Reef Cup, une course de 120 km qui s’est tenue le 1er février dernier à Abu Dhabi. Rien ne permettait de corroborer cette information jusqu’à la publication sur les réseaux sociaux de deux photos, des captures d’écran du Dubaï Racing TV live stream qui a retransmis la course sur internet. Sur la première, un cheval bai commence à tomber dans le sable profond. Sur la seconde, le même cheval, dont les antérieurs ont les canons fracturés, se dérobe tandis que coureurs et véhicules de sécurité continuent leur route.
Formellement identifié sur les photos par l’entraîneur australien Jay Randle, le cheval s’appelle Splitters Creek Bundy. Anciennement sous selle australienne, le hongre de douze ans avait été vendu aux Émirats arabes unis en 2010. 'Bundy était un cheval très solide, avec un excellent squelette et une bonne constitution', a affirmé Jay Randle à Horse-Canada.com. 'Il était un peu têtu parfois, mais aussi très attachant. Il était énergique et agréable à monter. Il avait un caractère original, et était aimé de nombreux cavaliers.'
Lors des trois dernières courses internationales auxquelles il avait participé, avec les Émiratis Majid Suhail al-Marri et Mansour Saeed Mohamed al-Faresi, et avec l’Iranienne Maryam Mohamed Mothanna, en 2013 et 2014, il avait été disqualifié pour boiterie. Selon Pippa Cuckson, la journaliste du Daily Telegraph spécialiste des dérives de l’endurance, Slippers Creek Bundy était cette fois monté par Humaid Matar Eid Juma al-Falasi, un jeune Émirati de seize ans déjà sanctionné plusieurs fois pour manquement aux règles de la Fédération équestre internationale…
Aucune sanction possible ?
Face à ce dramatique incident, tandis que la fédération émiratie se refuse à tout commentaire – et à toute sanctions ? – la même FEI affirme son impuissance, malgré la flagrante violation de ses règles, puisqu’il s’agissait d’une course nationale et non internationale. Les règles les plus récentes, entrées en vigueur le 1er août 2014 (lire ici), visent notamment à réduire la vitesse sur le sable profond et à assurer suffisamment de courbes et de pentes sur le parcours afin de freiner naturellement les chevaux.
Par ailleurs, on peut légitimement s’interroger sur le caractère national de cette course, qui empêcherait la FEI de sanctionner les manquements à ses règles. Selon le site Epona.tv, cette Al-Reef Cup a en effet accueilli trente-six cavaliers étrangers. Or, depuis 2013, la FEI limite à quinze, issus de moins de quatre fédérations étrangères différentes, le quota de concurrents étrangers admis dans un concours national, sous peine de sanctions financières et sportives (lire ici). À défaut de pouvoir sanctionner directement les responsables de ce nouvel incident grave, l’instance internationale pourrait donc juridiquement requalifier cette course d’internationale et diligenter sa propre enquête.
La frilosité – le laxisme? – s’explique peut-être par l’identité du propriétaire du cheval, Seeh Al Salam Endurance Stable, une écurie détenue par… le cheikh Hamdane ben Rashid al-Maktoum, un membre de la pléthorique famille régnante de Dubaï, le principal émirat. En décembre 2014, un délégué de la fédération des Émirats arabes unis avait demandé, sans succès, à l’assemblée générale de la FEI d’annuler la règle sur le conflit d’intérêts, adoptée en juin dernier. Cette règle semble plus que jamais nécessaire dans une région du monde où les organisateurs de courses, les sponsors et les meilleurs concurrents sont souvent issus des mêmes familles...
Sébastien Roullier et Johanna Zilberstein