Les para-dresseurs français composent avec le confinement

Comme les autres sports équestres, le para-dressage doit faire face à la pandémie de Covid-19 qui a contraint le monde à s’arrêter depuis le début du mois de mars. Pour les para-athlètes français, monter à cheval en cette période n’est pas toujours chose aisée. Face aux problèmes de santé publique, les compétiteurs parviennent toutefois à relativiser.



Ici aux Jeux équestres mondiaux de Tryon, Vladimir Vinchon est l'un des seuls de l'équipe de France à pouvoir encore monter à cheval.

Ici aux Jeux équestres mondiaux de Tryon, Vladimir Vinchon est l'un des seuls de l'équipe de France à pouvoir encore monter à cheval.

© Scoopdyga

Depuis le 17 mars, la France est plongée en confinement en raison de l'épidémie mondiale de Covid-19. Pour une bonne partie des cavaliers de haut-niveau, dont le rythme de vie est résumé par le travail aux écuries et les concours, la situation ne diffère pas franchement de la normale, si ce n’est l’absence de compétitions. Pour les athlètes souffrant de handicap et évoluant en para-dressage, la situation est un poil différente et ces derniers doivent s’adapter plus que les autres. “La plupart des para-dresseurs sont loin de leurs chevaux, qui sont confiés aux bons soins des exploitants des structures. Souvent, ces personnes-là sont aussi les entraîneurs et les cavaliers des chevaux pour les grades I II III, donc il n’y a pas de problème, sauf pour un ou deux cas où les chevaux sont dans un entretien minimum”, note Fanny Delaval, conseillère technique nationale de l'équipe de France. “C’est évidemment l'un des gros désavantages pour les personnes en situation de handicap qui pratiquent du sport, en particulier l'équitation“, déplore Adib El Sarakby, originaire du Nigéria et membre de l’équipe de France de para-dressage. “Nous n’avons pas toujours la possibilité d’intégrer des écuries classiques pour pouvoir monter à cheval et cela demande toujours une organisation spéciale. Pour ma part, ma monture Walk of Fame est chez ma coach (aux écuries de la Champagne, à Traînou, à vingt-cinq kilomètres au nord-est d’Orléans, ndlr).“ 

Installé au Lion d’Angers, Vladimir Vinchon est l'un des rares à pouvoir continuer d’entraîner ses deux montures, Fidertanz For Rosi et Tarantino Fleuri, confirmant que “très peu de para-dresseurs ont pu continuer à monter à cheval.“ Cloé Mislin, membre de l’équipe de France, peut elle aussi continuer de pratiquer son sport mais d’une façon un peu différente. Gérante d’un centre équestre, la cavalière de Don Caruso entretient ses chevaux d’école. “Je sais que mon cheval est très bien là où il est, donc je suis tout à fait sereine de ce côté, mais il me manque énormément.“



“La priorité numéro un est la santé”

Le staff de l'équipe de France, ici représenté par le sélectionneur Philippe Célerier aux côtés de Cloé Mislin, continue d'être en contact avec ses cavaliers.

Le staff de l'équipe de France, ici représenté par le sélectionneur Philippe Célerier aux côtés de Cloé Mislin, continue d'être en contact avec ses cavaliers.

© Scoopdyga

Malgré l’absence de compétitions et le fait, pour un bon nombre, de ne plus pouvoir monter à cheval comme ils en ont l’habitude, les para-dresseurs s’occupent autrement pendant le confinement. “Habituellement, il m’arrive de laisser de côté l’entretien physique par manque de temps. Avec le confinement, je peux m’adonner à quelques exercices, notamment de cardio. Le confinement me permet aussi de passer beaucoup plus de temps avec ma famille et c’est très appréciable”, détaille Vladimir Vinchon, qui a représenté l'équipe de France de nombreuses fois lors de grandes échéances. Si Cloé Mislin continue de prendre soin des pensionnaires de ses écuries à Flaxlanden, près de Mulhouse dans le Haut-Rhin, Adib El Sarakby occupe son temps entre son travail et des exercices physiques. “J’ai repris le travail la semaine dernière, en tant que prestataire pour un groupe de luxe, en temps partiel. À côté de ça, je fais de l’activité sportive chez moi. J’essaie de maintenir mon poids de forme et de faire un peu de gainage. J’ai l’avantage de vivre à la campagne avec cinq milles mètres carrés de terrain, donc j’ai de quoi m’amuser!”, développe le trentenaire. 

Alors que les centres équestres pourraient commencer à rouvrir leurs portes au mois de mai, date annoncée par le gouvernement pour amorcer le déconfinement en France, les para-dresseurs sont inquiets par la situation actuelle et la crise que traverse le monde. “Je me serais bien passé de cette période-là, surtout par rapport à mes proches et ma famille”, poursuit Adib El Sarakby. “Il y a aussi beaucoup de gens sur le front. J’ai moi-même de la famille dans le milieu hospitalier et ils voient de tout. C’est très compliqué.” À son tour, Cloé Mislin rappelle l’ampleur de la crise. “Comme pour beaucoup d’autres structures, la situation est compliquée à gérer pour notre centre équestre au niveau financier. En plus de cela, nous sommes dans un département particulièrement touché par la maladie. Cela affecte le moral. La priorité numéro un est la santé. Les objectifs sportifs restent pour l’instant secondaires.” 



Préparer l’avenir

Malgré ces temps particuliers, les para-dresseurs tricolores restent des sportifs, mordus de compétition. Dans un coin de leur tête, tous gardent à l'esprit leurs objectifs malgré le climat pesant et anxiogène du moment. Comme les Jeux olympiques, les Jeux paralympiques n’auront pas lieu avant l’été 2021. Avançant dans le flou, vers un avenir qui reste incertain, l’équipe fédérale de para-dressage reste en contact avec ses cavaliers, confinés aux quatre coins de l’Hexagone. “Nous arrivons à avoir un suivi de travail notamment par la vidéo”, raconte Philippe Célérier, sélectionneur de l’équipe de France de para-dressage. “Mais pour les cavaliers qui n’ont pas accès à leurs chevaux, il est certain qu’un important travail de remise en route sera à prévoir.” Et Fanny Delaval d’ajouter : “Nous sommes en train de réfléchir à un plan de reprise mais nous attendons les retours du ministère. Notre Directrice technique nationale, Sophie Dubourg, nous a demandé de remplir des tableaux afin d’indiquer quels étaient les besoins de nos cavaliers, dans un premier temps en termes de déplacements.” 

Et si tous approuvent la décision du Comité international olympique de repousser l’échéance paralympique de Tokyo à 2021, la préparation pour l’événement se met en place petit à petit. Le staff fédéral espère pouvoir reproduire le même calendrier que celui qui était prévu cette année, en participant à trois concours internationaux au printemps. Dès octobre, et si la situation sanitaire le permet, des Master class seront organisées au parc équestre de Lamotte-Beuvron. Ces stages se composeront de deux journées d'entraînement puis d’une notation par un juge international lors du troisième jour de rassemblement. Mais avant Tokyo, Fanny Delaval espère pouvoir regrouper ses troupes dès cet automne, notamment pour les championnats de France, qui devraient se tenir dans le cadre du concours Pro Élite de dressage à Saint Lô, les 6, 7 et 8 novembre prochains. “Les cavaliers sont toujours très motivés pour le championnat”, sourit la Normande. “Cela leur permet aussi de monter avec plus de visibilité et d’être inclus dans un beau concours comme celui-là.”