Le sabot au coeur des passions

On ne va pas le cacher, le sujet est brûlant. Avec près de trois mille cinq cents réponses enregistrées, le sondage en ligne de GRANDPRIX sur le thème du sabot et de la ferrure a suscité un enthousiasme certain. L’objet de cet article n’est pas de départager les différentes techniques, faute de consensus scientifique en la matière, mais plutôt d’en discuter à travers le prisme des expériences de chacun.



Un pied nu bien paré est capable de beaucoup plus de prouesses qu’on ne le croit.

Un pied nu bien paré est capable de beaucoup plus de prouesses qu’on ne le croit.

© Gwennaël Cadet

Il y a encore peu de temps, ferrer était la norme. Les poneys, les chevaux à la retraite, les poulinières et les chevaux au pré allaient pieds nus, tandis que les chevaux au travail - plus ou moins intensif - étaient systématiquement ferrés. Depuis une petite vingtaine d’années, avec l’essor de la communication nationale et internationale, de plus en plus de voix s’élèvent pour nuancer cette habitude acquise au fil des siècles. Très relayé par les sites axés sur le pied nu, le sondage sur le thème du sabot et de la ferrure initié début mars par GRANDPRIX a recueilli les réponses et motivations de près de trois mille cinq cents personnes. Parmi les montures des internautes ayant répondu au questionnaire, 76,5 % des chevaux ferrés sont des compétiteurs, tandis que 53 % des compétiteurs ne sont jamais ferrés. En outre, 16 % des chevaux de loisir sont ferrés et seulement 5 % des chevaux de randonnée. Enfin, près de deux tiers des chevaux équipés de ferrures spéciales évoluent en compétition. Prêts à croiser - ou pas - le fer ? En piste ! 

Quelques lecteurs sont fermes sur leur position. “Le déferrage n’est pas fait pour des chevaux au box, qui travaillent, mais bel et bien pour les chevaux en vacances et au pré“, assure Pierre. À l’inverse, “le fer est une abomination qui devrait être bannie à vie“, déclare Amal. Cependant, la grande majorité tempère ses propos et appelle à une discussion dans le calme entre tous les intervenants. “Il faudrait ne pas prôner une seule bonne pratique et que les personnes “pour” ou “contre” ne soient pas fermées à l’avis contraire… On rentre toujours dans des débats stériles car ce sujet est beaucoup trop soutenu par des extrémistes d’un côté ou de l’autre. Cela n’encourage pas les personnes n’ayant pas d’avis à se poser des questions et choisir ce qui est le mieux pour leur cheval, et non ce que certains pensent être le mieux pour tous“, avance Claire. “Humble amatrice, je ne suis ni pro-pied nu ni pro-ferrure. Chacun devrait être libre de faire ses choix, sans être jugé. La “guerre” qui existe entre podologie équine et maréchalerie est malheureuse et pousse certains propriétaires à faire des choix au détriment de leurs chevaux, afin d’être tranquilles et ne pas se faire harceler pour un passage aux fers ou aux pieds nus“, souligne une lectrice. “La discussion est difficile, chaque professionnel est convaincu d’avoir raison dans ses choix, alors que cela n’est pas si simple“, enchérit Benoît. “Je pense que le ferrage est une pratique qui gagne à être remise en question. Je ne suis pas pour déferrer à tout prix. Néanmoins, je suis convaincue que beaucoup de chevaux ferrés n’en ont aucun besoin“, commente pour sa part une autre lectrice. Angélique émet un avis tout aussi mesuré : “J’ai tenté avec l’aide d’une podologue de laisser mes chevaux pieds nus pendant deux ans. Finalement, voyant les difficultés de mes chevaux à se déplacer, j’ai décidé de les ferrer. Ce sont eux qui décident de leur confort.“

Le conflit actuel s’appréhende également à l’étranger. “Je suis du Québec et je déplore qu’il y ait une guerre entre maréchaux-ferrants et pareurs. Certes, elle existe ici aussi, mais elle est beaucoup moins forte qu’en Europe. Pour ma part, je suis pareuse et n’ai rien contre les fers. J’en ai déjà posés, mais si je peux me passer d’en mettre, effectivement, je le fais. J’ai d’autres alternatives à ma disposition. Un cheval naissant pieds nus, pourquoi ne pas l’aider dès sa naissance à développer des pieds forts et lui laisser vivre sa vie sans une prothèse métallique qui est inutile dans plusieurs cas ? Les gens font ferrer leurs équidés parce qu’ils ne se posent même plus la question de savoir s’ils en ont vraiment besoin“, conclut France.

CES MAUVAISES EXPÉRIENCES QUI ÉCŒURENT 

L’arrivée de nouveaux pratiquants dans le soin des sabots a causé quelques remous. Si les maréchaux s’inquiètent d’une concurrence déloyale et de dégâts engendrés chez les animaux, les particuliers tâtonnent face à une offre de praticiens aux CV fleuris mais non certifiés, avec les problèmes que l’on imagine. “Il faut faire attention avec les podologues“, déclare Marjorie. “En dix ans, j’ai fait appel une fois à un podologue et ce fut une catastrophe. Mon cheval a déclaré une inflammation des tendons et des talons juste après avoir été paré et il est resté dans l’inconfort pendant des mois. Bien choisir son professionnel est primordial. Jusqu’ici, je n’ai eu aucun soucis avec mes différents maréchaux.“ Cette critique est appuyée par un autre lecteur. “Les pareurs ou podologues équins sont un vrai problème. En dix ans de gérance d’une écurie de propriétaires, j’en ai vu passer six et aucun n’a eu de résultats positifs à moyen ou long termes. Par exemple, un cheval ne pouvait même plus se lever pendant trois jours suivant un parage tellement il avait mal… Cela dit, la plupart des maréchaux ne savent pas non plus parer correctement. Nous avons maintenant deux maréchaux qui savent vraiment parer et aussi très bien ferrer. Pour rester objective, je me dois d’ailleurs de préciser que j’ai vu passer une vingtaine de maréchaux, dont seulement deux ferrent correctement à mon goût.“ Les critiques contre les podologues continuent de pleuvoir : “Trop de pseudo-podologues ou pareurs sans réelle formation causent des dégâts aux pieds“ ; “Les podologues équins sont dangereux pour les chevaux car, dans la majorité des cas, il faut faire intervenir un vétérinaire ou un maréchal pour rectifier les boiteries déclenchées suite à leurs passages.“ S’il est important de tenir compte d’une mauvaise expérience, il faut néanmoins se poser quelques questions avant de la classer comme telle : quelle est la formation et l’expérience du podologue ou maréchal ? Les douleurs engendrées par le passage du praticien sont-elles causées par une erreur technique ou… sont-elles plutôt révélées par ce dernier ?



LES FORMATIONS EN QUESTION

Un cheval pied nu doit être sensibilisé à plusieurs types de sol pour s’y sentir à l’aise.

Un cheval pied nu doit être sensibilisé à plusieurs types de sol pour s’y sentir à l’aise.

© Goran Horvat/Pixabay

Réformer les formations des professionnels du sabot fait consensus auprès de tous les participants. “Les conflits entre maréchaux et podologues ne sont pas constructifs pour le bien-être du cheval. Nous devrions plutôt encadrer la formation du podologue, comme celle du maréchal. Un cursus spécifique et reconnu pour la podologie équine devrait être mis en place. Il y a de très bons professionnels dans chaque courant, mais aussi de très mauvais qui salissent la profession d’hommes de cheval“, prône une lectrice attentive. 

Maréchal-ferrant spécialisé dans l’orthopédie et la pathologie du pied équin, Denis Leveillard a été président de la Fédération européenne des associations de maréchaux-ferrants (EFFA), puis président honoraire de l’Union française des maréchaux (UFM). Membre du jury de plusieurs concours en France et à l’étranger, il consacre son temps à la formation continue des maréchaux. “Les savoirs diffèrent d’un maître de formation à l’autre“, commence-t-il. “Par exemple, certains jeunes maréchaux continuent à apprendre qu’il faut maintenir le cheval dans l’angle idéal, y compris pour les “mal-formés”, alors qu’il faut garder la flexion naturelle et ne pas forcer la nature. J’insiste : qu’il y ait une activité intensive ou non, il est primordial de conserver le bon aplomb, c’est-à-dire celui propre au cheval, et à chacun de ses membres ! Les idées subjectives ont la vie dure. Si certains formateurs prêchent toujours ce genre de théories qui n’ont pas de base scientifique et pour lesquelles l’expérience nous apprend qu’elles ne fonctionnent pas, je pense – et j’espère ! – que de plus en plus de formateurs comprennent où est l’intérêt du cheval. Même si la profession a évolué, en collaboration avec les vétérinaires, vers des connaissances scientifiques, beaucoup d’entre nous restent encore attachés à une tradition issue d’un savoir empirique, acquis au fil des ans. L’EFFA, à laquelle adhère l’UFM, tente de centraliser le savoir et de promouvoir un niveau minimum pour le maréchal-ferrant européen. Pour ma part, je souhaiterais que l’installation d’un maréchal-ferrant soit sanctionnée par un diplôme plus important que le Certificat d’aptitude professionnelle agricole (CAPA) de maréchal-ferrant actuel, trop basique à mon goût.“ 

Trouver un bon maître d’apprentissage est la clé, comme le souligne Marie-Aude, maréchal-ferrant depuis cinq ans. “Mes maîtres d’apprentissage m’ont formée à deux parages, à celui dit d’herbage, pour le cheval laissé pied-nu, et au parage pré-ferrage. Il faut savoir qu’on ne peut pas parer pareillement dans ces deux cas de figure. Dans le second, par exemple, il ne faut pas que la fourchette soit trop grosse sinon elle va se retrouver trop près des éponges (dernier tronçon du fer, ndlr) et empêcher un bon curage. Au contraire, un parage d’herbage va laisser la part belle à cette dernière.“

Face à ces savoirs disparates, certains maréchaux effectuent eux-mêmes des recherches. “Quand je me suis installé il y a dix ans, j’ai tout de suite fait face à des chevaux dits à problèmes : fourbus, naviculaires ou à pieds faibles“, analyse Gwennaël Cadet. “J’ai appliqué ce qu’on m’avait enseigné mais je me suis vite rendu compte que ce n’était pas une franche réussite. Bilingue anglais, je me suis renseigné sur la maréchalerie anglosaxonne et notamment l’Equine Podiatry, qui suit de très près les dernières recherches vétérinaires. Convaincu par cette approche conjointe entre maréchaux, vétérinaires et chercheurs, j’ai davantage orienté ma profession vers la podologie équine. À l’étranger, selon les cas, la podologie équine est soit réglementée et assimilée à la maréchalerie, soit complètement séparée et dépendante d’un système éducatif privé délivrant des diplômes garants d’un bagage de connaissances et d’aptitudes techniques. Depuis une vingtaine d’années, en France, il existe des professionnels du parage - pareurs, pédicures et podologues - ne provenant ni de la médecine vétérinaire, ni de la maréchalerie. Ces spécialistes répondent à une clientèle croissante ayant choisi de gérer et d’améliorer la santé des pieds sans utiliser des fers métalliques rigides et en adoptant une approche plus holistique. Toutefois en France, à l’heure actuelle, seuls les vétérinaires et maréchaux-ferrants diplômés sont autorisés à effectuer le parage des sabots de l’équidé - ceci étant considéré comme un acte de médecine. Afin de légaliser cette profession naissante et d’harmoniser le niveau et les connaissances des podologues équins, je pense qu’une formation reconnue par l’État serait un grand pas en avant. C’est par ailleurs en suivant cet objectif que je suis enseignant à l’Institut français de podologie équine (IFPE), première école française de podologie équine qui travaille pour la reconnaissance - via un titre du répertoire national des certifications professionnelles (RCNP) de niveau 3 (équivalent bac +2) - de la profession comme une branche évolutive et distincte du métier traditionnel de maréchal-ferrant. La pratique de la podologie équine est complémentaire de la maréchalerie et de la médecine vétérinaire équine.“

Ce défaut de formation sur les sabots peut aussi, hélas, se retrouver dans cette profession. “Actuellement vétérinaire canine et équine, j’ai eu un module sur la biomécanique des pieds au cours de ma formation“, décrit Justine, propriétaire de deux chevaux. “Nous apprenons le rôle des ferrures orthopédiques, thérapeutiques, et comment corriger telle pathologie… mais toujours avec des fers. Le pied nu n’étant jamais pris en compte, il est difficile de conseiller ses patients sur ce dernier. Je trouve que nous sommes en retard sur ce sujet si l’on se compare aux pays étrangers, notamment aux États-Unis. À mon sens, les méthodes de parage dit physiologique, que les podologues européens et américains intègrent à leurs pratiques, devraient être davantage diffusées en France. Pour ma part, j’ai suivi une formation parallèle axée sur le pied nu et mon œil est désormais exercé à voir un pied que je considère comme plus sain. Nous devrions nous ouvrir davantage à la podologie équine et la considérer dans nos modules vétérinaires à l’avenir.“ 

POUR QUEL ENVIRONNEMENT ? 

L’univers du cheval est à analyser avant de ferrer : la qualité de sa corne, ses aplombs, ses défauts physiques, son âge, son alimentation, son lieu de vie, sa discipline sportive et son intensité, ainsi que les terrains sur lesquels il évolue. “Associer systématiquement cheval qui travaille et cheval ferré est excessif à mon goût“, nuance Denis Leveillard. “Proportionnellement, il y a trop de chevaux ferrés par rapport à leurs réels besoins. Le fer sert à protéger la corne du sabot contre une usure excessive et contre l’agression d’un sol abrasif, des cailloux, du goudron, etc. Le but est d’apporter du confort au cheval et non de le ferrer à tout prix !“ Lorsqu’il est question de sorties en extérieur, le terrain est au cœur des réflexions. “Vivant actuellement près de la mer, sur un terrain sableux, j’ai déferré mes propres chevaux, ne considérant pas que le fer était ici nécessaire“, explique Marie-Aude. “Néanmoins, si je suis amenée à évoluer sur des terrains durs, il faudra que j’habitue mes chevaux à des sols moins tendres, afin que leurs pieds s’aguerrissent. Si votre cheval n’a pas la possibilité d’évoluer quotidiennement sur un terrain varié et si vous souhaitez sortir malgré tout sur terrain dur (abrasif, cailloux ou autre), il vous faudra protéger le pied à l’aide d’une ferrure ou d’une hipposandale.“ Outre l’environnement se pose le problème de l’accompagnement. “Il est difficile de trouver un maréchal qui veuille bien tenter avec nous l’aventure pied nu“, commente Nahel. “Ne pouvant être formés ou suivis, nous choisissons de ferrer par défaut. Mieux vaut un bon ferrage qu’un mauvais parage.“

Depuis quelques mois, Julien Épaillard enchaîne les victoires et grandes performances avec des chevaux déferrés, dont l’excellente Toupie de la Roque.

Depuis quelques mois, Julien Épaillard enchaîne les victoires et grandes performances avec des chevaux déferrés, dont l’excellente Toupie de la Roque.

© Scoopdyga



QUELLE IMPLICATION DE LA PART DU PROPRIÉTAIRE ?

La ferrure classique se différencie de la ferrure spécifique, qui corrige un problème. “Le ferrage orthopédique est uniquement destiné au poulain“, débute Denis Leveillard. “Il sert à rectifier un aplomb quand cela est nécessaire et encore possible. Une fois le cheval adulte, l’aplomb est définitif et devra être respecté comme tel dans le parage et la ferrure. Dans le cas d’entorses, de problèmes osseux ou encore articulaires, on peut utiliser des fers thérapeutiques pour soulager le cheval. Je pense notamment au cas le plus extrême, la fourbure, qui peut être soulagée avec un fer en M, ouvert en pince. Un fer thérapeutique doit être envisagé comme une solution temporaire, la normalité étant de retrouver ensuite l’aplomb naturel du cheval, avec ou sans fers. La correction d’une pathologie va automatiquement surcharger un autre endroit, le prescripteur - vétérinaire ou maréchal-ferrant - doit en avoir pleinement conscience.“ 

En outre, un fer peut être bénéfique… mais seulement à condition d’être bien posé. “La ferrure peut, selon le type de fer, permettre de gérer l’accroche ou le glissement du pied sur le sol. La pose d’un fer peut néanmoins se révéler nuisible si le parage précédemment effectué n’est pas celui qui correspond à l’animal et à sa conformation car le cheval ne pourra pas naturellement modifier celui-ci par l’usure naturelle possible en l’absence de fer. La ferrure métallique empêche la distorsion verticale du sabot dans ses parties postérieures ; si cela est considéré comme un inconvénient par certains, il n’a jamais pu être démontré que c’était nuisible à la santé du membre.“ Enfin, certains maréchaux serreraient trop les éponges pour éviter que les chevaux se déferrent rapidement au pré. “À force, cela serre les talons (encastèle le pied, ndlr) et rétracte la fourchette… C’est donc à éviter“, commente Marie-Aude. “Il faut aussi savoir que les clous fraîchement posés n’ont pas encore totalement adhéré à la corne. Mieux vaut donc éviter la boue et son effet ventouse dans les quelques heures qui suivent le ferrage.“

“Ferrer peut être vu comme une facilité pour le propriétaire afin de ne pas être dépendant d’un terrain“, note Denis Leveillard. “Un cheval pied nu doit être sensibilisé à plusieurs types de sol. Pour cela, les terrains de type Paddock Paradise sont très intéressants. Ils demandent néanmoins un gros travail de manutention et d’entretien, pas toujours possible ni souhaité. Dans le cas d’un pied encore tendre, l’usage d’une hipposandale, bien choisie, est bien sûr intéressant en dépannage pour une sortie en extérieur.“ Naturellement, l’assiduité dans les soins et le recours aux professionnels sont essentiels. “Je note un gros manque de soins chez certains chevaux“, poursuit Marie-Aude. “Je fais parfois face à une clientèle qui ne s’occupe pas des pieds de leurs équidés pendant plusieurs mois, voire des années dans les cas extrêmes. Qu’on pare ou qu’on ferre, la régularité est la clé et il faut prévoir le budget en conséquence à partir du moment où l’on devient propriétaire.“ La régularité “du parage et du ferrage est primordiale“, appuie Denis Leveillard. “Si les allures extrêmes du cheval de course le contraignent à être ferré toutes les quatre semaines, un cheval de loisir sera ferré toutes les six semaines. À ce stade, les aplombs se déforment peu, ou du moins cela reste raisonnable. Il faudra néanmoins ne pas dépasser sept semaines et s’organiser avec son maréchal en fonction de cela. Les bons maréchaux étant débordés et difficiles à réserver, un bon agenda est nécessaire !“ 

DU CHANGEMENT JUSQU’AU PLUS HAUT NIVEAU 

“Ingénieur agronome de formation, je gère en parallèle un petit élevage et je concours en saut d’obstacles jusqu’à 1,30m“, débute Julien, établi en Aquitaine. “Jusqu’ici, la question ne se posait pas : on ferrait les antérieurs pour les premiers concours puis on ferrait les postérieurs une fois que le cheval était plus âgé. Un jour, par manque de moyens, je n’ai ferré que les antérieurs de mon cheval. Entre deux passages du maréchal, j’entretenais moi-même les postérieurs, en m’appuyant sur mon observation des gestes de ce dernier. J’ai rapidement senti une amélioration dans la locomotion du cheval et décidé de mieux me renseigner. Après plusieurs lectures, j’ai sauté le pas de faire appel à une podologue expérimentée. Aller à contre-courant en ne ferrant plus a été très mal vu ! Mon entourage n’a pas manqué de me le faire remarquer et il s’est avéré difficile de garder vaillantes mes nouvelles convictions. J’ai déferré mes chevaux à l’automne, pendant la saison de repos. J’ai revu leur alimentation, notamment les compléments minéraux alimentaires à apporter. Mes chevaux continuent à aller au paddock plusieurs heures par jour, il est important qu’ils marchent. Je fais maintenant appel à ma podologue toutes les cinq semaines et j’entretiens entre temps les biseaux, comme cette dernière me l’a enseigné.“ 

Cité une vingtaine de fois en exemple, Julien Épaillard semble avoir fait forte impression auprès des sondés. Actuellement treizième du classement mondial Longines des cavaliers de saut d’obstacles, le Normand porte haut l’affixe de l’élevage normand de la Roque, situé à quinze kilomètres de Lisieux. “Après avoir essayé le fer de longues années, et avoir été souvent déçu par la maréchalerie traditionnelle, il y a trois ans, j’ai cherché à me documenter sur les pieds nus. Après six mois de réflexion, j’ai testé le déferrage de mes chevaux et je me suis aperçu qu’ils allaient mieux“, avance Michel Hécart, cofondateur du haras avec son épouse Alexandrine et ancien membre de l’équipe de France avec l’étalon Kannan (KWPN, Voltaire x Nimmerdor), récemment disparu, et le crackissime Itot du Château (SF, Le Tot de Semilly x Galoubet A). “Je prends toujours grand soin de mes chevaux et cherche à leur offrir un environnement proche de leurs besoins naturels, notamment une vie souvent à l’extérieur. Leur confort et leur bien-être sont ma priorité. J’ai rapidement vu des effets positifs sur leur locomotion et leur santé. Les chevaux ne se blessent plus et n’ont plus de problème de tendons ou d’articulations. Le vétérinaire intervient peu, désormais. Je ne vois aucune contre-indication à la pratique de notre sport, si ce n’est les terrains en herbe où les chevaux accrochent moins bien. On essaye pour le moment de petites sandales à coller auxquelles fixer des crampons. Sur les terrains en sable, tout se passe parfaitement bien. Julien est un ami et s’est montré intéressé par ma démarche. Il a essayé à son tour de déferrer ses chevaux, ce qui semble très bien lui convenir. Le fait qu’il gagne beaucoup en ce moment met en lumière les pieds nus mais cela ne doit pas être pris comme un gage de performance ! Néanmoins, nous pouvons retenir qu’il est possible de pratiquer le saut d’obstacles de manière intensive tout en conservant des chevaux bien dans leurs pieds.“

Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX n°115 au mois de mars.

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