"Le cheval fait partie de la culture des Anglais", Camille Audo

En 2019, la dresseuse française Camille Audo participait avec son cheval Behroez aux championnats d’Europe Jeune Cavaliers de San Giovanni in Marignano, où l’équipe de France a décroché une belle sixième place. La même année, le couple s'offrait également un titre de vice-champions de France Jeunes Cavaliers. Il y a deux ans, la cavalière de vingt-et-un ans a décidé d’aller s’installer en Angleterre, dans les écuries de la dresseuse britannique Sarah Millis, l’ancienne propriétaire de Behroez. À l’occasion de la reprise de la saison internationale en France, Camille Audo nous parle de son expérience de cavalière expatriée et de ses objectifs.



Où avez-vous passé le confinement et qu’est-ce que cette période vous a apporté ? 

J’ai passé le confinement en Angleterre. Pour moi, cette période a été plutôt positive car je pouvais toujours me rendre aux écuries pour m’entrainer, j’ai donc vraiment eu le temps de travailler sans avoir la pression des concours. Cela m’a permis d’améliorer certaines choses qui n’allaient pas. 

Quand et pourquoi avez-vous décidé de vous expatrier en Angleterre ? 

Je suis arrivée en Angleterre, dans les écuries de Sarah Millis, en septembre 2018. J’ai décidé de partir parce que je souhaitais apprendre l’anglais, ce qui est important dans le milieu des chevaux et particulièrement du dressage. J’admirais également beaucoup la manière de monter des Anglais et je voulais aller apprendre avec eux. Il est forcément plus compliqué de se déplacer sur les concours qui se tiennent en France, en Belgique ou en Allemagne, car il faut réserver le ferry ou le train, ce qui représente plus d’organisation et de moyens. Mais ce n’est pas une grosse contrainte, d’autant plus que je ne me déplace que pour des concours internationaux et je participe aux nationaux en Angleterre, hormis pour ceux que je suis obligée de faire en France dans le cadre de sélections. 

Avez-vous remarqué des différences dans la manière de s’entraîner des deux côtés de la Manche ? 

Je ne dirais pas qu’il y a plus de différences entre la France et l’Angleterre qu’entre deux entraîneurs ou cavaliers d’un même pays. Chacun a sa manière de faire et tout le monde s’y prend plus ou moins différemment. Ce que j’ai remarqué chez les Anglais, c’est plutôt la manière générale d’approcher le cheval qui semble faire partie de leur culture. Le cheval est vraiment placé au centre de tout et les Anglais font vraiment très attention à eux. C’est aussi le cas en France, mais ici, si vous parlez à quelqu’un d’équitation et de dressage, cela paraîtra tout à fait naturel et familier. 

Pensez-vous que le Brexit puisse avoir un impact sur votre situation de cavalière française basée en Angleterre ?

Je ne pense pas que cela ait réellement un impact. Cela nécessitera seulement encore plus de préparation pour se déplacer avec les chevaux, mais ça ne devrait pas poser trop de problèmes. 

Avec la reprise de la saison en France, pourrez reprendre la compétition en même temps que les autres cavaliers français ? 

C’est la grande question… J’espère pouvoir aller à Macon début juillet mais tout dépendra de si l’on nous laisse traverser la Manche ou non. Ici en Angleterre, la saison devrait également reprendre début juillet. Nous avons déjà la possibilité de louer des carrières pour aller s’entraîner dans les même conditions qu’en concours. 

Que pensez-vous de la gestion de la pandémie par le gouvernement britannique ? 

Je pense que cela a été géré différemment de la France et que la réaction du gouvernement britannique a été un peu tardive. Nous aurions pu être mis en quarantaine plus tôt afin d’en limiter les conséquences et de ne pas être en décalage avec les autre pays comme c’est le cas actuellement. En revanche, je pense que les consignes sont mieux respectées au Royaume-Uni qu’en France. Ici, le gouvernement a demandé à la population de se confiner, sans qu’il ait besoin d’attestations pour contrôler, les gens le font d’eux-mêmes.

 Quelles conséquences cela va-t-il avoir sur la filière équine en Grande-Bretagne ?

Je pense que la situation est plus ou moins la même qu’en France. Les écuries de propriétaires qui ont des chevaux en pension et dont les clients n’ont pas d’autre choix que de payer pour leur cheval vont s’en sortir. Mais pour les clubs, c’est plus compliqué. Je pense que beaucoup de chevaux vont être mis en vente dans les mois qui viennent. 

Vous avez participé à vos premiers championnats d’Europe en 2019, où vous avez obtenu une quinzième place en individuels et une sixième place par équipe. Quels enseignements tirez-vous de cette première expérience en vue de prochaines grosses échéances ? 

C’était une super expérience, d’autant plus que cela ne faisait que trois mois que je montais le cheval qui m’accompagnait, Behroez (KWPN, United x Gribaldi). Il y avait une très bonne ambiance au sein de l’équipe et nous nous entendions tous bien. Bien sûr, la pression était présente, mais c’était positif. Ces premiers championnats d’Europe m’ont justement appris qu'il est important pour moi de savoir doser la pression. L’état d’esprit dans lequel j’étais lors de ces championnats était bénéfique car j’avais tout juste assez de pression pour être concentrée et je dois essayer de retrouver cela à chaque fois pour bien monter. 

Pouvez-vous nous parler de votre cheval de tête Behroez ? 

C’est un cheval immense (1m90 au garrot), mais cela ne se ressent pas en selle, il se monte comme un cheval de taille "normale". Il adore travailler et il prend son rôle très au sérieux, ce qui rend tout plus facile. Nous nous entendons très bien ! 

Behroez a quatorze ans aujourd’hui, préparez-vous d'ores et déjà son successeur pour dans quelques années ? 

Pas encore, mais c’est quelque chose auquel je vais devoir commencer à penser. J’ai actuellement deux chevaux : Behroez et une jument que j’ai mise au travail avec Sarah (Millis) dans le but de la vendre pour justement me permettre d’acquérir le potentiel successeur de Behroez. 

Vous avez créé votre entreprise, Unity Dressage… 

Unity Dressage est en effet le nom de ma société qui est en développement. Le logo et le nom sont déposés et je pourrai m’en servir pour acheter et vendre des chevaux et trouver des sponsors. Unity est également l’affixe que j’ai acheté en vue de faire un petit peu d’élevage si j’ai un jour une bonne jument qui s’y prête. 

Quels sont vos objectifs à court terme ? 

Tout dépendra de l’évolution de la situation sanitaire, mais ce serait de participer aux championnats d’Europe Jeunes cavaliers. L’année prochaine, j’aimerais commencer les épreuves du circuit international réservé aux moins de vingt-cinq ans, toujours avec Behroez, pour voir où cela nous mène, et pourquoi pas participer aux championnats d’Europe dans cette catégorie. 

Et à long terme ? 

Ce serait d’avoir ma propre structure et de faire du commerce tout en continuant à monter à haut niveau.