“La note minimale requise pour être sélectionné pour les Européens sera de 68%”, Muriel Leonardi
Mi-juin, la Fédération équestre internationale (FEI) a officialisé l’organisation à Budapest des championnats d’Europe de dressage pour toutes les catégories Jeunes entre le 9 et le 30 août. Muriel Leonardi, sélectionneuse de l’équipe de France de dressage Jeunes Cavaliers, Juniors, Enfants et Poneys, confirme la présence de cavaliers français en Hongrie et dévoile les critères de sélections des tricolores qui feront le voyage, tout en insistant sur le fait que ces championnats restent “au conditionnel” et qu’aujourd’hui, l’objectif est “de faire au mieux pour rattraper le temps perdu.”
La France enverra-t-elle des cavaliers en Hongrie pour les championnats d'Europe Poneys, Enfants, Juniors et Jeunes Cavaliers?
Oui, nous enverrons des cavaliers. Dans la mesure du possible, nous présenterons une équipe de France dans toutes les catégories.
Comment allez-vous sélectionner ces cavaliers et quels sont les minimas requis ?
Certains couples ont déjà fait trois ou quatre concours en début d’année, notamment lors des tournées des As du Mans et Nice, et de l’international du Mans en février. Je vais déjà prendre en compte ces résultats. Ensuite, deux concours sont organisés, la semaine prochaine à Mâcon (en Saône-et-Loire, du 2 au 7 juillet ndlr) et un autre à Pompadour (en Corrèze, du 17 au 19 juillet ndlr). L’idée est de publier une présélection de six ou sept couples après le concours de Mâcon. À l’issue du week-end de compétition à Pompadour, nous officialiserons la sélection définitive des quatre cavaliers sélectionnés par catégories. La note minimale requise pour être sélectionné est de 68%. Ces cavaliers resteront sur place pour un regroupement le lundi, où nous retravaillerons des points spécifiques liés aux reprises qu’ils auront déroulé. Le vétérinaire sera également présent à Mâcon et à Pompadour pour faire un bilan complet de tous les chevaux.
Ces couples ne manqueront-ils pas d’entraînement ?
Parmi les plus jeunes couples, certains risquent de concourir aux championnats d’Europe alors qu’ils n’auront jamais participé à une compétition internationale. Cependant, je ne pense pas être la seule dans ce cas-là, cela sera pareil dans d’autres pays. C’est une année particulière, il faut savoir s’adapter. Nos cavaliers manqueront de compétitions, c’est pour cela nous leur demandons de participer à deux concours en amont, d’abord à Mâcon puis quinze jours après à Pompadour. Après, s’ils veulent refaire d’autres concours, c’est avec plaisir. Les Jeunes Cavaliers sont nombreux à s’entraîner à l’étranger et auront un traitement un peu à part. Leur faire traverser les frontières plusieurs fois est compliqué. Ils doivent donc participer à au moins un concours en France et viennent d’ailleurs tous à Mâcon. Nous leur demandons de participer à une deuxième compétition de leur choix, proche de chez eux. Ils sont notamment plusieurs à vouloir concourir à Hagen (du 16 au 19 juillet en Allemagne, ndlr).
Avez-vous déjà quelques couples sur lesquels compter ?
C’est compliqué à dire pour le moment. Chez les Jeunes Cavaliers, tous les couples sont plutôt confirmés. De plus, pour certains, cette saison est leur dernière, donc c’est évident qu’ils ont de l’expérience sur ces reprises. Je dirais que c’est la catégorie la plus expérimentée actuellement. Concernant les Juniors, j’ai quelques duos qui ont concouru en début d’année et qui ont un peu d’expérience. Il y a également d’autres couples, avec des jeunes chevaux, qui arrivent sur le circuit et que je n’ai pas eu l’occasion de trop voir pour l’instant.
Qu’en est-il d’Enora de Vienne, meilleure française et quinzième lors de la Reprise Libre en Musique des championnats d’Europe Poneys de Strzegom l’an passé ?
Elle est passée à cheval, et j’ai d’ailleurs réussi à travailler avec elle par Messenger pendant le confinement. Elle a un nouveau jeune cheval, avec du potentiel. Il n’est pas encore prêt et commence les changements de pied. Elle devrait pouvoir aborder le niveau Juniors en fin d’année. Elle est toujours dans les rangs, mais sa présence en équipe de France sera sûrement pour l’année prochaine.
“C’est incroyable que les championnats d’Europe Poneys soient organisés”
Quelles sont les raisons qui feraient que la France n’envoie finalement pas de cavaliers pour ces championnats ?
Pour l’instant, les championnats d’Europe sont programmés, on nous a demandé si nous y allions et nous avons immédiatement répondu présent. Nous restons sur cette ligne-là et avons tout organisé dans l’intention de nous y rendre, même s’il y a des risques que cela change. Pour l’instant, tous les voyants sont au vert, mais si jamais il y a des problèmes sanitaires, nous verrons en temps et en heure. Par contre, si la Hongrie remet en place une quarantaine obligatoire comme ce fut le cas avant qu’elle ne rouvre ses frontières, il est certain que nous n’irons pas car cela serait trop contraignant.
Comment vont les différents cavaliers de l’équipe de France Jeunes ?
Je pense que le moral est plutôt bon. Nous sommes restés en contact avec eux pendant tout le confinement, notamment par mail pour les tenir informés de la situation, car tout a été d’abord annulé. Dès que nous avons eu l’information par la Fédération équestre internationale (FEI) que les championnats d’Europe risquaient d’avoir lieu, nous leur avons envoyé un mail, en leur précisant également que Mâcon allait sans doute aussi se maintenir. Nous leur avons demandé de continuer à s’entraîner. Dès que la tenue des championnats d’Europe a été officialisée, nous avons dû attendre les annonces du gouvernement pour pouvoir organiser le concours à Mâcon. À partir de ce moment, nous avons immédiatement conçu un plan d’attaque. Quand nous voyons le nombre de participants la semaine prochaine, ils sont tous entraînés, parce qu’ils sont quand même présents en nombre ! Je pense qu’ils sont tous ravis et enchantés de ce maintien des championnats. Je dois avouer que, lorsque j’ai reçu le mail de la FEI me disant que la Hongrie récupérait les championnats pour toutes les catégories, et notamment les poneys, c’était presque incroyable. Strzegom (qui devait accueillir les championnats d’Europe Poneys, ndlr) a été le premier championnat annulé. La Hongrie n’a jamais annulé les championnats de dressage Enfants et moins de vingt-cinq ans, donc nous avions l’espoir qu’ils reprennent les deux autres catégories (chevaux, les Juniors et les Jeunes Cavaliers ndlr). Je ne pensais pas qu’ils organiseraient les championnats Poneys également. L’organisateur de Strzegom a laissé entendre un Master Européen du Poney, mais nous n’avions pas eu beaucoup d’informations par la suite. C’est vraiment super pour les Jeunes de pouvoir concourir, notamment pour les cavaliers à Poneys, pour qui c’est parfois la dernière saison. Les championnats de France à Lamotte-Beuvron ont déjà été annulés, alors avoir un championnat d’Europe c’est génial pour eux.
Les avez-vous conseillé sur des points d’amélioration techniques ?
Non, les cavaliers ont pour la plupart chacun leur entraîneur. J’ai surtout été en contact avec eux ainsi que les parents, qui m’ont tenu au courant de ce qu’ils faisaient. Tout a semblé continuer sur sa lancée correctement.
“Le virtuel crée une nouvelle manière de travailler”
Le confinement a été une période propice à la réflexion sur notre mode de vie actuelle et nous a permis de nous recentrer sur l’essentiel. Qu’attendez-vous du monde d’après, notamment pour le dressage ?
Au vu la distance avec certains de mes clients, je me suis aperçue que j’ai beaucoup fait travailler mes clients et des jeunes par internet, notamment grâce aux nouvelles technologies. Cela fonctionne plutôt bien et j’ai pu continuer à entraîner. Même avec la fin du confinement, cela continue. Au lieu d’aller passer un week-end à l’autre bout de la France, je les fais travailler toutes les semaines par visioconférence. Cette période a permis le développement de ces technologies. Il y a également eu des concours virtuels… Le virtuel a vraiment ouvert une nouvelle manière travailler.
Dans une interview publiée la semaine passée, Odile van Doorn a déclaré que “C’est respecter le cheval que de lui donner la possibilité de faire du sport. Je pense que la compétition est une façon de valider que l’on travaille dans le bon sens , car un cheval de compétition ne doit pas être présenté en mauvais état, c’est à dire boiteux, dopé etc… Je pense que le respect du cheval peut passer par la pratique de la compétition parce qu’elle valide que ce qu’on lui demande est justifié techniquement”. Partagez-vous ce point de vue ?
Oui bien sûr, il est possible de faire de la compétition tout en étant dans le bien-être et le respect du cheval. Les règlements ont évolué et s’améliorent d’années en années. C’est-à-dire qu’on va de plus en plus vers le bien-être du cheval, notamment sur le rectangle. Les juges sont très sensibilisés à ce sujet, tout comme les officiels et les cavaliers. Tout avance vraiment dans ce sens-là.
Justine Ludot est depuis peu la nouvelle cavalière maison de Steve Guerdat, numéro un mondial en saut d’obstacles. Est-ce une reconnaissance de l’équitation française ?
Je trouve ça très bien que nos jeunes aillent à l’étranger, dans de grandes écuries. Ils montent très bien, la preuve (rires) ! Beaucoup de jeunes cavaliers sont d’ailleurs basés à l’étranger et cherchent à se perfectionner dans d’autres écuries. Je pense qu’ils y sont accueillis avec plaisir. Le dressage est essentiel pour les chevaux de complet et de saut d’obstacles. Ces cavaliers engagent de plus en plus des entraîneurs de dressage maison, pour faire travailler leurs chevaux et c’est bien de prendre des jeunes, ça leur permet d’avoir une ouverture d’esprit supplémentaire.