DANS LE RÉTRO: George Oduro, l’ostéopathe aux doigts de fée

Ostéopathe de légende, George Oduro a prouvé à de nombreuses reprises son indéniable talent. Les plus grands cavaliers de saut d’obstacles de la planète, dont Meredith Michaels-Beerbaum, Edwina Tops-Alexander, Rolf-Göran Bengtsson ou encore Scott Brash se disputent ses mains en or. Portrait d’un magicien. Cet article d'archive est paru dans le magazine GRANDPRIX Hors-série n°18, en juillet 2018.



L’ostéopathe exerce aussi ses talents sur les humains, à l’image ici de Roger Yves Bost, massé quelques minutes avant d’entrer en piste lors de la finale mondiale des Coupes des nationsLongines, en 2017 à Barcelone

L’ostéopathe exerce aussi ses talents sur les humains, à l’image ici de Roger Yves Bost, massé quelques minutes avant d’entrer en piste lors de la finale mondiale des Coupes des nationsLongines, en 2017 à Barcelone

© Queymon McLoughlin/ GPTV

Participer aux Jeux olympiques sans George Oduro à ses côtés ? Pour certains cavaliers, ce serait tout bonnement inconcevable. L’ostéopathe allemand est présent lors de presque tous les grands rendez-vous et autres CSI 5 *. Il est même devenu le “numéro un mondial” dans ce domaine. Doux, gentil et jovial, il peut paraître légèrement effacé lorsqu’il s’agit de parler de lui. Il se transforme pourtant dès qu’il touche son patient, concentré tout entier à sa tâche, sensible et attentif. Muscles, tendons, ligaments, il passe tout le corps au scanner de ses mains. Le cheval le suit du coin de l’œil, soucieux du moindre de ses mouvements. Enfin, le déclic. L’équidé se détend et accepte le soin qu’on lui propose. Cet instant émouvant n’a pas de prix. C’est pour cela que George est devenu vétérinaire puis ostéopathe, au terme d’un cursus mené en Grande-Bretagne. Sous les paumes de ses mains, un équidé peut se métamorphoser en quelques minutes après des manipulations pouvant pourtant sembler anodines.
Sacrée championne du monde par équipes en 2010 avec Lambrasco (Holst, Libero H x Coriolan ), la cavalière allemande Janne Friederike Meyer Zimmermann connaît bien l’ostéopathe, ce dernier vivant depuis quinze ans à proximité de ses parents, établis à Hambourg. Elle se souvient d’une expérience qui l’a marquée alors qu’elle déplorait un cheval boiteux dans ses écuries de Friedrichshulde: “Notre vétérinaire soupçonnait que le garrot du cheval était la cause du problème. Pour nous éviter de lourds examens, il nous a conseillé de faire appel à George. Notre ami est arrivé, a regardé le cheval, puis il a effectué une très légère pression du bout du pouce sur le garrot, du moins c’est ce qu’il m’a semblé. Il s’est écarté du cheval puis m’a dit : “C’est bon”. J’ai ri et lui ai demandé s’il était sérieux. Il m’a affirmé que oui. Honnêtement, je n’y croyais pas. Pourtant, le lendemain, miracle ! Le cheval trottait et galopait en longe sans aucun problème. Le surlendemain, il était monté et ne souffrait plus du tout. Oui, George Oduro est un vrai magicien !
Ses qualités, l’homme les exerce depuis trente-sept ans, ce qui fait de lui un témoin privilégié de l’évolution des équidés de sport. “Aujourd’hui, les éleveurs produisent des chevaux avec beaucoup de sang, ce qui les rend rapides et capables de tourner très vite. Beaucoup sont aussi très puissants. Cela nous oblige à faire très attention à leur corps. Autrefois, ils étaient faits comme des éléphants, si bien qu’ils pouvaient sauter des Grands Prix à six ans. De nos jours, ils sont très doux et fluides, comme du coton, avec des ligaments et tendons vraiment faibles, ce qui les rend incapables de se confronter à de grandes épreuves avant neuf ans au minimum. Leur corps n’étant pas assez développé, il faut prendre son temps avec eux”, a déclaré l’intéressé dans un passionnant entretien accordé à Jenny Abrahamsson et publié en 2017 sur World of Show Jumping.



“Quand on prend soin d’athlètes de classe mondiale, il faut être vraiment dévoué à son travail

L’ostéopathe aurait déjà soigné quelque cinquante mille chevaux, enregistrant dans sa mémoire chacune de ses interventions ! Et les cracks comme Shutterfly (Han, Silvio I x Forrest, Ps), champion d’Europe et triple vainqueur de la finale de la Coupe du monde avec l’Allemande Meredith Michaels-Beerbaum, l’étalon Casall (Holst, Caretino x Lavall I), vainqueur d’une vingtaine d’épreuves à 1,60m au cours de sa magnifique carrière avec le Suédois Rolf-Göran Bengtsson, Hello Sanctos van het Gravenhof (sBs, Quasimodo van de Molendreef x Nabab de Rêve), champion olympiques et d’Europe par équipes et lauréat de l’incroyable Grand Chelem réunissant les Grands Prix d’Aix-la-Chapelle, Genève et Calgary avec le Britannique Scott Brash, Nino des Buissonnets (Kannan x Narcos II), champion olympique avec le Suisse Steve Guerdat, ou encore Lintea Tequila (Holst, Campbell x Corrado II), victorieuse des Grands Prix CSI5* de Miami et Doha avec l’Australienne Edwina Tops-Alexander, ne sont pas les seuls chanceux à profiter de l’expertise de George. Ainsi, cavaliers et grooms apprécient également de pouvoir être soulagés d’un mal de dos ou d’une nuque bloquée grâce à ses mains talentueuses.
Parcourant le monde au gré des concours, toujours attentif au bien-être des athlètes, George est donc très demandé. De fait, il s’avère souvent difficile de planifier un rendez-vous avec cet ostéopathe aux doigts de fée. “Nous recevons chaque semaine la visite d’une physiothérapeute. Elle est excellente et connaît bien la réputation de George. Si elle a une question face à une situation, elle sait qu’elle pourra toujours compter sur l’expertise de George pour résoudre le problème”, illustre Janne Friederike Meyer-Zimmermann. Si l’on n’a pas la chance de le croiser au détour d’un concours, reste alors la solution du regroupement. “Parfois, nous nous rassemblons à plusieurs cavaliers d’une même zone afin de réduire les déplacements. Si l’un de nous sait que George est de passage, nous sautons tous de joie! ”, sourit l’Allemande.
Ayant fêté ses soixante-quatre ans le 17 juillet, l’homme parvient à un âge où beaucoup de ses contemporains commencent à lever le pied. Pour autant, estimant que sa succession n’est pas encore assurée, il continue à arpenter les stades et écuries, tout en essayant de former sa relève. “Pour être honnête, la plupart de mes étudiants sont un peu paresseux. Ils voudraient exercer ce métier mais en travaillant seulement de 8h00 à 17h00 cinq jours par semaine, ce qui est impossible”, assure-t-il. “En concours, je commence la plupart du temps à 6h00 pour passer voir les chevaux, puis je les regarde s’échauffer et concourir pendant la journée. Et je les examine à nouveau après la dernière épreuve, ce qui peut me conduire à finir ma journée à minuit, voire au-delà. Quand on prend soin d’athlètes de classe mondiale, il faut être vraiment dévoué à son travail”, conclut-il. Gageons qu’il finira par se trouver un digne successeur.

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