“Une fédération liberticide, dictatoriale et anti-démocratique”, Stephan Conter
Qualifiant la Fédération équestre internationale de “liberticide, dictatoriale et anti-démocratique” et même “nuisible pour la communauté équestre et le développement de nos activités à tous”, Stephan Conter exprime “une incompréhension totale qui interpelle et ne peut rester sans réaction” et en appelle à une mobilisation pour contester les règles encadrant les engagements en CSI 2* et 3*, et notamment l’obligation pour les organisateurs de respecter des quotas de cavaliers invités en vertu de leur classement mondial et de sélections nationales (voir le tableau à la fin de l’article). Dans sa lettre ouverte, le président fondateur des écuries Stephex n’y va pas avec le dos de la cuillère vis-à-vis de son compatriote, Ingmar de Vos, président de la FEI. Ambiance…
“Chers amis cavaliers, entraîneurs, organisateurs et sponsors,
Comme je l’ai déjà fait à nombreuses reprises, au travers de contacts individuels, plus larges, formels ou plus informels dans le passé, je souhaite, au travers de ce courrier, partager à nouveau avec vous mon étonnement, mon incompréhension et ma volonté d’opposition active face aux décisions que la Fédération équestre internationale, ou plutôt son président (Ingmar de Vos, ndlr), nous impose au travers des règles encadrant les engagements applicables aux CSI 2* et 3* et ce afin de faire bouger les lignes et bloquer des décisions que j’ose qualifier de totalement incompréhensibles, dénuées de sens, anti-démocratiques et, plus grave encore, profondément nuisibles à notre sport, sa prospérité, son développement mais aussi pour la liberté de fonctionnement de tous les acteurs: cavaliers, organisateurs, entraîneurs et sponsors.
Il y a quelques années, nous nous en souvenons tous, la FEI a réussi à imposer à travers un apparent vote démocratique des règles, à deux vitesses, pour les organisateurs de CSI 5* (il évoque ici les règles dérogatoires très contestables accordées aux promoteurs de la Global Champions League dans le cadre d’un protocole d’accord frappé du secret le plus total, ndlr) réduisant la liberté d’action de chacun et la concurrence saine entre tous, favorisant certains au détriment d’autres, en mettant lors du vote sur le même pied d’égalité l’Allemagne, la Belgique, la France et les Pays-Bas avec le Botswana, le Zimbabwe, Honolulu (Hawaï n’a pas de fédération nationale, mais est rattaché aux États-Unis, ndlr) ou les îles Fidji (qui n’ont pas de fédération nationale, au contraire des Îles Vierges, entre autres, ndlr) afin de s’assurer d’avoir avec certitude la majorité des votes pour confirmer sa décision personnelle lors de l’assemblée générale.
Je m’étais longuement exprimé sur cette question et cette approche scandaleuse ainsi que ses conséquences. Cette approche est dénuée de sens et animée d’une volonté incompréhensible et malsaine car elle crée en parallèle des nouvelles règles, des systèmes d’exception pour certains, des règles spécifiques autorisant certains à faire ce que la communauté des autres organisateurs n’était plus autorisée à faire. Je ne vais pas revenir sur cet épisode qui a marqué les esprits de chacun, ces décisions ayant déjà fait couler beaucoup d’encre. Et, sur ce sujet des CSI 5*, après de nombreuses discussions et oppositions de notre part, il est à noter qu’un accord est intervenu sur le principe du “60/20/20” (60% de cavaliers invités dans l’ordre décroissant du classement mondial Longines, 20% sélectionnés par la fédération nationale du pays hôte du concours et 20% à la discrétion des organisateurs, ndlr).
Ceci étant, la présidence de la FEI, se cachant de nouveau derrière cette sacrosainte assemblée générale, sans consultation des acteurs expérimentés et de poids, sans consultation du terrain et octroyant à une toute petite fédération comptant cent athlètes le même poids qu’une fédération de centaines milliers d’athlètes, a remis le couvert ce début d’année en lançant de nouvelles règles pour les CSI 2* et 3*, pensant que tout le monde s’était bien endormi – grande stratégie politique que de jouer la montre pour passer en catimini – et laisserait faire docilement. Ce nouveau système est purement inacceptable. Je ne comprends absolument pas son fondement, sa logique, ses motivations. Je vois simplement qu’il est nuisible aux acteurs de notre sport, vous, chers amis cavaliers, entraîneurs, sponsors et organisateurs, et que la seule motivation derrière tout cela est une volonté malsaine de contrôle. Ces règles auront des impacts majeurs sur notre flexibilité, notre liberté entrepreneuriale, notre prospérité et notre développement en générant un désintérêt progressif pour notre sport.
Les organisateurs peuvent mettre en place des concours grâce à des sponsors, des soutiens financiers. Ces sponsors, c’est tout à fait normal, souhaitent obtenir un retour, être récompensés notamment au travers de places de départ que l’organisateur leur octroie (il s’agit là d’une manière de décrire le concept de pay-cards, officiellement interdit par les règlements de la FEI, ndlr). Dans le même ordre d’idée, les organisateurs utilisent les concours aussi dans le cadre d’un projet global d’entreprise où la liberté d’invitation des clients est aussi très importante, au-delà des aspects promotionnels et de soutien de notre sport. Le nouveau système casse totalement cette possibilité. Comment donc encore être attractif pour un sponsor ou pour un organisateur?
De leur côté, les cavaliers ne peuvent plus choisir là où ils concourent. Ceux qui veulent “s’offrir”, en tant que semi-professionnels, une belle compétition dans un endroit “mythique ” ou plus luxueux, plus spécial comme un tour en Espagne, Dinard ou encore Knokke-Le Zoute, ne pourront plus le faire car le choix sera réduit par “la matrice décisionnelle” de la FEI. En effet, comme il le fait pour ses vacances, les restaurants ou les hôtels qu’il souhaite fréquenter, chacun doit pouvoir définir le budget qu’il souhaite dépenser. Certains choisiront, pour des raisons tout à fait respectables, de s’offrir des vacances plus raisonnables et d’autres plus luxueuses (hôtels cinq étoiles, restaurants). Ceci fait partie des libertés individuelles, du choix individuel de dépenser comme on l’entend. Il est inconcevable que cette liberté individuelle dans la sphère privée – comme les vacances, par exemple – ne puisse être appliquée dans notre sport où chacun peut choisir des concours plus luxueux et d’autres moins étant donné que le choix est grand et diversifié puisqu’il y a quand même entre cinq et dix CSI 2* et 3* par semaine dédiés à un large public d’amateurs, semi-professionnels et professionnels. La liberté de choix existe donc très largement. Alors il n’y a aucune raison de créer des restrictions de choix basées sur des règles technocratiques et donc allant à l’encontre des libertés individuelles. De plus, un cavalier qui serait sélectionné pour un CSI 5* organisant en même temps des CSI 2* et/ou 3* ne pourra plus réunir ses clients en un seul lieu et week-end pour y faire prospérer ses affaires, entraîner ses clients en un seul lieu ou encore venir avec son épouse ou époux.
Enfin, pour les entraîneurs, comment réunir et bien s’occuper de tous ses clients si l’un doit aller le même week-end à Budapest, l’autre à Prague, l’autre à Bourg-en-Bresse et le dernier à Liège? Cette perte de liberté totale crée une équation impossible et in fine l’impossibilité de fonctionner et donc la fin de son activité.
Bref, en quelques mots et exemples, nous sommes tous conscients qu’il est de notre devoir, pour nous-même, notre sport et sa prospérité de s’opposer formellement à ces nouvelles règles. Aussi, je vous invite à signer une grande pétition que nous remettrons à la FEI pour faire changer ce système incompréhensible, insensé et nuisible.”