“J’ai perdu cette finale comme un con”, Gilles Bertran de Balanda revient sur la finale de la Coupe du monde de 1981

Durant tout l’été, GRANDPRIX vous fera revivre des victoires et des défaites fondatrices de grandes carrières et qui ont marqué l’histoire des sports équestres. Cette semaine, Gilles Bertran de Balanda revient sur sa victoire manquée en finale de la Coupe du monde, en 1981 à Birmingham, qu’il a disputée avec le légendaire étalon Galoubet A.



Le dimanche 26 avril 1981, au National Exhibition Center de Birmingham, tous les espoirs sont permis pour Gilles Bertran de Balanda et Galoubet A, en tête au moment d’aborder la troisième journée de compétition de la finale de la Coupe du monde. Après une faute en première manche, l’erreur n’est toutefois plus permise dans la seconde. Mais voilà, on a beau avoir le “meilleur cheval de saut d’obstacles au monde du moment”, dixit Bill Steinkraus, cavalier américain médaillé d’or aux Jeux olympiques de Mexico en 1968 et consultant pour ABC lors de cette finale, le sport peut parfois être cruel.  

Face à “la crème de l’Europe” selon ABC, à savoir le Britannique Harvey Smith ou encore le jeune Gilles Bertran de Balanda, alors âgé de trente et un ans, se dressent les Américains Melanie Smith, Michael Matz et Donald Cheska, représentant pour la première fois son pays et complètement inconnu au Royaume-Uni, comme ose l’avouer Bill Flemming pour ABC. Le parcours est décrit comme suit par Roland Merlin, journaliste au Monde à l’époque: “Le tracé à la première vue humaine était de ceux qui distillent l’émotion: douze obstacles très étoffés, énormes, nécessitant quinze efforts, un triple fait pour les chevaux ayant tendance à arracher les rênes.”

Le début de parcours se déroule bien pour le couple français, qui franchit le double placé en numéro 5 “comme s’il n’y avait rien à sauter”, selon les commentateurs d’ABC. Le fils d’Almé gratifie le public de ses fameuses et impressionnantes ruades, comme à son habitude. Les commentaires sont d’ailleurs élogieux sur la qualité de l’étalon, âgé seulement de neuf ans et arrivé dans les écuries du catalan en 1977 après avoir été repéré dans un concours Jeunes Chevaux. Arrive le fameux triple placé en 10, composé d’un vertical, suivi à une foulée de barres de Spa puis à deux foulées d’un large oxer de sortie. Hélas, celui-ci va anéantir les espoirs d’une victoire française. L’étalon bai semble ne pas prendre la mesure de la triple-barre: ses postérieurs s’emmêlent et la faute est inévitable. “Une tragédie”, osent les commentateurs d’ABC. Après un gros effort pour sortir du triple, Gilles tourne court pour l’obstacle suivant, à nouveau défendu par des barres de Spa. Galoubet prend son appel de loin et retombe complètement dans les barres… Son cavalier parvient à récupérer ses rênes et à franchir le dernier obstacle sans faute, mais avec deux fautes lors de cet ultime parcours, le titre qui lui semblait promis lui échappe irrémédiablement.

En février dernier, dans le numéro 116 de GRANDPRIX Heroes, Gilles de Balanda est revenu sur cette erreur qui lui a coûté la victoire: “J’ai vraiment perdu cette finale comme un con. Pressé par le temps, j’ai commis une bêtise technique en tournant trop court, et j’ai renversé les trois derniers obstacles (un obstacle en première manche et les obstacles 10b et 11 au second tour, ndlr). Je n’avais pas pris assez d’informations et j’ai perdu mon sang-froid. C’est le sport, et je n’ai pas été assez bon. Cela n’en demeure pas moins frustrant car la victoire me tendait littéralement les bras…” Le retour au paddock fut une douche froide pour le cavalier… “Jamais en sortant de piste je n’avais ressenti à ce point cette impression que le monde s’écroulait sur moi. J’aurais voulu m’enterrer dans un trou et ne jamais en sortir.” 



“Le pire souvenir de ma carrière”, Gilles Bertran de Balanda

Dans son compte-rendu publié par Le Monde le 29 avril 1981, Roland Merlin écrit d’ailleurs que “la victoire a été l’apanage de la sagesse, de la temporisation, une vertu qui n’est pas spécialement française, de la régularité enfin. «Calme en avant droit», répétait inlassablement à ses disciples l’un des plus illustres cavaliers-écuyers français du dix-neuvième siècle, le général L’Hotte. C’est pour avoir appliqué ce conseil, cette exhortation bien connue de son maître à sauter, Bertalan de Némethy, que le jeune Michael Matz, premier cavalier d’outre-Atlantique, a pu obtenir le titre de champion de la Coupe du monde, troisième édition, devant des tribunes archicombles (et le prince Philippe, président de la Fédération équestre internationale de 1964 à 1986, ndlr), malgré la tempête de neige qui s’est abattue soudainement sur le Middlewest.” 

Si “cette épreuve m’a foutu en l’air quelques jours, elle m’a heureusement fait mûrir”, estime Gilles  de BalandaCe “cauchemar, le pire souvenir de ma carrière”, a été suivi – mais aussi précédé – de nombreux succès. Le Français a notamment remporté un titre mondial par équipes dès l’année suivante à Dublin. Gilles et Galoubet avaient également fini cinquièmes de ces Mondiaux en individuel. “Un premier titre par équipes marque les esprits. C’était un très beau championnat et cela reste l’un de mes plus beaux souvenirs”, estime d’ailleurs le Catalan. Comme quoi le beau temps vient toujours après la pluie.

 

Revivez ci-dessous le parcours de Gilles Bertran de Balanda et Galoubet A