“Gotilas peut être le genre de cheval qui marque une vie”, Corentin Pottier

Si Corentin Pottier espérait faire sa rentrée post-confinement le week-end passé à l’occasion du Grand National de Chaintré, ses plans ont toutefois été contrariés à cause d’un pneu crevé à une centaine de kilomètres de l’arrivée. Diplômé en Master 2 de Contrôle Financier à l’Université Paris Dauphine, celui qui s’épanouit au sein des écuries Pamfou Dressage prend ce coup du sort avec philosophie et conserve son enthousiasme pour la suite. Pour cause, il devrait prochainement aborder le Grand Prix avec Gotilas du Feuillard, qu’il estime grandement. Entretien avec le talentueux français de vingt-sept ans.



Comment avez-vous vécu le confinement au sein des installations de Pamfou Dressage ? 

Je crois que le confinement a été malheureusement très dur à vivre pour beaucoup gens. De notre côté, j’ai presque un peu honte de le dire, mais cette période a été assez agréable étant donné que nous disposons de grands espaces extérieurs et que nous étions au contact de nos chevaux au quotidien. Nous avons pu travailler et prendre le temps de faire des choses qui sont impossibles le reste de l’année. Il n’aurait toutefois pas fallu que cela dure encore trop longtemps. 

N’avez-vous pas trop rongé votre frein pendant ces longs mois ? 

Comme je le disais, la structure est vraiment grande et nous avons toujours quelque chose à y faire, comme par exemple la construction d’un marcheur, des travaux divers et variés… Nous avons aussi fait un potager, comme beaucoup de gens je crois (rires) ! Nous avons pu nous occuper assez aisément. Il était bien sûr frustrant de ne pas pouvoir s’investir dans une partie de notre métier qu’est la compétition, mais j’ai pris les choses avec un certain recul. Certes, nous ne pouvions pas concourir, c’est dommage, mais il y avait des choses plus graves et importantes à cette période. Des gens ont été confrontés à la pandémie de façon bien plus directe. Le compétiteur répondra donc qu’il aurait préféré concourir, l’humain que c’était ainsi et qu’il fallait vivre avec. 

La compétition a repris à Chaintré la semaine passée avec le Grand National. Alors que vous étiez initialement engagé, vous n’avez pas pu vous y rendre. Pourquoi ? 

Nous n’avons pas eu beaucoup de chance… Alors que nous étions fous de joie à l’idée de nous rendre à ce concours, un pneu de notre poids lourd a explosé sur l’autoroute, à une centaine de kilomètres de l’arrivée. Heureusement, nos chevaux sont adorables et le personnel de dépannage a été très performant et agréable. Cela aurait pu mal se finir. Le camion est donc en réparation, nous ne pourrons ainsi pas nous rendre à Pompadour. Bien sûr, c’est décevant, mais les conséquences sont moindres, compte tenu de la catastrophe qui aurait pu se produire. Notre rentrée est donc reportée, c’est embêtant et il ne s’agit pas du milieu de saison 2020 dont nous rêvions, mais c’est ainsi.



“Le dressage connaît une certaine forme d'effervescence”

Comment se compose votre piquet de chevaux, dont Gotilas du Feuillard, le fils de l’illustre Totilas âgé de neuf ans, semble être le cheval de tête ?   

Gotilas est en effet mon premier cheval et il est engagé dans le championnat de France Pro 2, à Vierzon. D’ici là, je vais toucher du bois ! J’espère que nous pourrons grimper une marche et débuter le Grand Prix avant la fin de la saison, car il maitrise déjà tous les mouvements. Sur le papier, la cour des grands se dessine plutôt bien et je suis assez serein. Je crois n’avoir jamais monté un cheval d’une telle qualité. Il est peut-être un peu tôt pour le dire, mais je pense que Gotilas peut être le genre de cheval qui marque une vie. Il a des qualités techniques évidentes, mais aussi un mental hors du commun. Il a énormément de cœur et une envie de bien faire à toute épreuve. Honnêtement, il a tout pour réussir ! Il a déjà prouvé par le passé qu’il était un candidat sérieux avec sa septième place dans la qualificative du championnat du monde Jeunes Chevaux d’Ermelo (où il a conclu la grande finale réservée aux quinze meilleurs chevaux du monde à la douzième place, ndlr) et son titre de champion de France à sept ans. Il a par ailleurs été très performant en début d’année sur le Petit Tour. Désormais, il lui reste à confirmer au niveau supérieur, mais j’ai vraiment confiance en lui. J’ai par ailleurs la chance de compter sur une propriétaire, Françoise Bourgeois, qui nous suit depuis de nombreuses années et avec laquelle nous avons acheté Vicomte de Reyves il y a quatre ans. Il est désormais âgé de sept ans et après trois bonnes années de travail, j’attends désormais beaucoup de lui. Il est très attachant et a également beaucoup de points forts techniquement. Avec Pamfou, nous investissons également régulièrement dans de nombreux très jeunes chevaux. Nous en avons quelques-uns de trois ans, un cinq ans, d’autres d’un an…   

À la suite de cette période de stagnation mondiale, la reprise du commerce a-t-elle pu s’enclencher ?   

De ce point de vue, la période a été très compliquée pendant le confinement. Les gens avaient bien sûr des préoccupations autres. Dès la sortie de cette phase, le commerce a pu reprendre et on sent que les gens ont envie d’acquérir un ou des chevaux. Cela a redistribué les cartes, que ce soit positivement ou négativement : sans pouvoir monter pendant trois mois, certains se sont rendus compte que l’équitation ne leur manquait pas vraiment, tandis que pour d’autres, l’idée auparavant latente d’acheter un cheval s’est confirmée et cela a accéléré leur prise de décision. En ce qui concerne le commerce international, cela est encore compliqué avec certains pays. Nous travaillons notamment beaucoup avec les États-Unis, avec qui les échanges sont toujours bloqués pour l’heure. Quoi qu’il en soit, les périodes d’incertitudes ne sont jamais bonnes en économie et se révèlent peu propices à la consommation. Toutefois, on note une tendance à la hausse des pays dans lesquels la première vague du virus est derrière nous.   

Le week-end passé à Chaintré, neuf couples dont huit français ont dépassé les 70% dans le Grand Prix ce qui est inédit. Le dressage français est-il sur la bonne voie pour côtoyer les sommets ?  

Je n’ai pas suivi cela de très près, mais j’imagine qu’il n’y avait aucun inconnu parmi ces couples. Je pense toutefois que l’on peut dire que le niveau du dressage français s’améliore globalement. La motivation et le professionnalisme se sont accrus et nous assistons à une certaine forme d’effervescence pour cette discipline. Il s’agit en tout cas d’un bon révélateur du travail effectué ces dernières années par tous les cavaliers français ces dernières années. C’est de très bon augure pour les prochains Jeux olympiques et cela donne espoir.