Harrie Smolders, l'efficacité et la discrétion en étendard

Lauréat d'une ribambelle de Grands Prix CSI 5* en l'espace de quatre ans, Harrie Smolders, médaillé d’argent individuel des championnats d’Europe Longines de Göteborg, a vécu une remarquable ascension ces dernières années. Aux rênes des exceptionnels Don VHP Z, Zinius, Cas 2 et Colinn, le Néerlandais de quarante ans embrasse avec bonheur la meilleure phase de sa carrière. Portrait d'un ancien numéro un mondial.



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Harrie Smolders est né le 10 mai 1980 à Lage Mierde, un village néerlandais situé à quelques kilomètres de la frontière belge. Le jeune garçon effectue ses premiers pas entouré de sa sœur, cavalière de deux ans son aînée, et de parents agriculteurs. Passionné de chevaux, son père en élève pour son plaisir. Harrie se met en selle pour la première fois à huit ans, en famille. Smurf, son attachant poney, vole ainsi la vedette au football, sport roi aux Pays-Bas comme dans de nombreux pays. Petit à petit, Harrie prend goût à ce sport. Il se lance en compétition en saut d’obstacles, mais aussi en concours complet et en dressage. Alors qu’il n’a que dix-huit ans, le jeune homme saisit l’opportunité d’achever sa formation chez Johan Heins, double champion d’Europe en 1977 à Vienne avec Seven Valleys, médaillé d’argent par équipes et quatrième en individuel des Mondiaux de 1978 à Aix-la-Chapelle avec Pandur Z (NWP, Posthoorn x Hassan), et bientôt entraîneur national couronné de succès aux Jeux olympiques de Sydney en 2000, avec l’or et l’argent individuels de Jeroen Dubbeldam et Albert Voorn. Chez son maître, le jeune homme acquiert un niveau sérieux, participe à ses premiers CSI Juniors et 2*, notamment avec la jolie Odessa JH (Old, Grannus x Azur), et ne tarde pas à intégrer l’équipe nationale. Vingtième des championnats d’Europe Jeunes Cavaliers de Hartpury en 2000, puis médaillé de bronze par équipes l’année suivante à Gijón avec Liverpool, il s’illustre par son aisance. “La première fois que je l’ai vu en piste, il venait d’intégrer notre équipe Jeunes Cavaliers, tandis que moi je montais encore en compétition… Bref, ça ne date pas d’hier! Et Harrie impressionnait déjà par son grand talent”, se rappelle Rob Ehrens, l’actuel chef d’équipe des Vestes orange. 



AXEL VERLOOY ,UNE AFFAIRE QUI DURE.

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En 2002, Harrie Smolders quitte les écuries de Johan Heins et se présente chez Axel Verlooy, le patron d’EuroHorse, une structure commerciale fondée à Grobbendonk en Belgique. En quête d’un nouveau talent, l’ancien “Diable rouge” accepte sans hésitation. “Harrie monte très proprement, très calmement, et fait preuve d’un très bon niveau de dressage. C’est un cavalier complet!”, loue son nouveau patron. Quelques mois après son arrivée, Harrie rencontre Exquis Oliver Q (KWPN, Quattro B x Maykel), qui lui permet de performer à 1,45m. Au fil des concours, les barres s’élèvent et les hauts lieux se rapprochent. De fait, à vingt-cinq ans, il participe à ses premiers CSI 5*… avec une impressionnante sérénité. “Évidemment, pour apprendre, je regardais avec attention les meilleurs cavaliers, comme Ludger Beerbaum ou John Whitaker, mais je vivais tout ça presque normalement! Je les respecte et les admire beaucoup, mais depuis mon enfance, je n’ai jamais été obsédé ni vraiment impressionné par quoi que ce soit. J’ai grandi comme ça”, analyse-t-il.

Exquis Walnut de Muze (BWP, Nabab de Rêve x Chin Chin), Riovanna (KWPN, Animo x Jasper) et Powerfee (KWPN, Fedor x Erdball) rejoignent Oliver Q et commencent à enchaîner les CSI 5*. Au terme d’une saison 2009 ponctuée d’excellents résultats, Harrie et Walnut sont sélectionnés pour les Européens de Windsor, leurs premiers championnats Seniors. Les Bataves se classent alors quatrièmes, et le cavalier trente-septième en individuel. L’impétueuse Regina (Z, Rex Z x Savoy Hanover) fait à son tour son apparition dans le piquet du Néerlandais. Régulièrement présent dans les plus beaux concours, celui-ci ne tarde pas à devenir une tête d’affiche. Pour autant, en 2010, les Jeux équestres mondiaux de Lexington se soldent par une trente-neuvième place individuelle et un fiasco collectif. Pour les médailles, il devra encore attendre. Deux ans plus tard, le bel Emerald (BWP, Diamant de Semilly x Carthago) fait son entrée dans la cour des grands. Impressionnant techniquement et doté d’un modèle attirant, l’étalon ne tarde pas à faire ses preuves, se classant dans bon nombre de Grands Prix en 2013, remportant ceux du CSI 2* de Vilamoura et du CSI3* de Lanaken, et terminant deuxième en CSI 4* à d’Anvers. Le génial Emerald est bientôt rejoint par Don VHP (Z, Diamant de Semilly x Voltaire), confié par la famille américaine Coulter. “Ce n’est pas un cheval très rapide, mais il est vraiment bon”, décrit son nouveau pilote. “Sa plus grande qualité est son mental. Même sur les parcours les plus difficiles, il donne toujours le meilleur de lui-même. Il est très régulier et a une chouette personnalité.” Don VHP Z ne cesse alors de se bonifier, concluant 2014 avec de fort bons résultats. 

Sans faire de bruit, Harrie Smolders poursuit gentiment sa remontée au classement mondial. “Il parvient à performer avec des montures très différentes. C’est un cavalier efficace. En piste, même quand les choses ne tournent pas comme il le souhaite, il arrive toujours à redresser le tir et trouver une solution”, salue ainsi Rob Ehrens. En 2015, après un bon Winter Equestrian Festival en Floride et beau CSIO 5* à Lummen, où il termine deuxième du Grand Prix avec Emerald, le pilote s’adjuge le Grand Prix CSI5* de Shanghai aux rênes de Regina Z. Hélas, la jument de treize ans se blesse quelques mois plus tard, avant de quitter définitivement la compétition à l’été 2016. Excellent lors des Coupes des nations de La Baule et Falsterbo, Emerald semble bien parti pour disputer les championnats d’Europe d’Aix-la-Chapelle. Hélas, le sort en décide autrement... six jours avant l’ouverture des hostilités. “En se roulant dans son box, il s’est tapé contre un mur et s’est fait un petit hématome. La cicatrisation prendra un tout petit peu trop de temps, donc nous ne pouvons pas prendre le risque de l’emmener à Aix”, déclare alors Rob Ehrens.

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UNE PLACE RETROUVÉE CHEZ LES ORANJE.

Au lieu de sombrer, Harrie repart de l’avant et se jette à corps perdu dans la saison indoor. Fin mars 2016 à Göteborg, il termine deuxième de la finale de Coupe du monde avec Emerald, juste derrière Steve Guerdat et Corbinian (Westph, Cornet Obolensky x Pilot). Quelques mois plus tard, il ne manque pas les Jeux olympiques de Rio, mais les Oranje, champions du monde et d’Europe en titre, doivent se contenter d’une modeste septième place, tandis qu’Harrie Smolders finit vingt-septième de la finale individuelle. En dehors des pistes, le champion s’est bâti une existence paisible. Toujours installé à Lage Mierde, son village natal, distant d’une cinquantaine de kilomètres des écuries EuroHorse, il vit entouré de sa compagne Inge, et de ses deux garçons Pim et Siep. Malgré le rythme effréné des concours, le quadragénaire reste attaché à des plaisirs simples et ne se départ jamais de son humilité. “Ma famille et mes amis les plus proches, ceux que je connais depuis tout petit, habitent presque tous autour de chez moi, ce qui me rend la vie plus agréable. Il est clair que ce métier est difficile pour une famille. Quand je m’absente pendant une semaine, c’est dur pour mes proches. D’ailleurs, je mesure ma chance de pouvoir concilier vie professionnelle et vie sociale. Cependant, je ne sais pas combien de temps je tiendrai à ce niveau, parce que cela demande beaucoup d’énergie”, confie-t-il sincèrement. 

L’année 2017 marque une véritable explosion du Hollandais. Jonglant avec Emerald et Don VHP, il opère une moisson ahurissante. Ainsi, rien qu’en Grands Prix CSI 5*, Emerald termine quatrième à Miami et Londres et troisième à Valkenswaard, et se voit déclarer vainqueur à Chantilly, où le couple déroule un splendide double sans-faute qui propulse son cavalier en tête du Longines Global Champions Tour (LGCT)! Don VHP Z, lui, s’affirme comme le cheval le plus régulier du circuit: cinquième à Shanghai, deuxième à Hambourg, cinquième à Rotterdam - où il a également réussi un double sans-faute dans la Coupe des nations, tout comme à Hickstead -, et troisième à Paris. 

Son impeccable feuille de route permet à ce dernier de participer aux championnats d’Europe de Göteborg, mi-août de cette même année. Si les Pays-Bas peinent collectivement, Harrie et Don VHP Z enchaînent les sans-faute du début à la fin. Impériaux, ils s’emparent de l’argent, ne s’inclinant que devant le sang-froid du Suédois Peder Fredricson avec H&M All In de Vinck (sBs, Kashmir van’t Schuttershof x Andiamo). Venue couronner une année de rêve, cette première grande distinction individuelle est suivie d’une double victoire finale dans le LGCT et la Global Champions League, début novembre à Doha. Grâce à sa deuxième place dans le Grand Prix CSI 5* de Rome fin septembre avec Don VHP Z, il n’a même pas eu à attendre la dernière étape pour décrocher le jackpot! Dans les autres épreuves individuelles majeures qu’il a courues, Harrie s’est également classé deuxième à Šamorín, quatrième à Genève et douzième à Londres, avant de s’imposer à Malines avec le surprenant Zinius (KWPN, Nabab de Rêve x Kannan). Sans oublier le triomphe batave lors de la finale de la Coupe des nations Longines, fin septembre à Barcelone, où le double sans-faute de Don VHP tue tout suspens! 

Après avoir réalisé une année 2017 et 2018 incroyables, et s'être habillé du brassard de numéro un mondial pendant de nombreux mois, Harrie Smolders poursuit son bonhomme de chemin. Même si le Néerlandais connaît un peu moins de victoires depuis 

Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX heroes n°104.