La der de Qanaï du Tipi et l’émotion de Marie-Pierre Péroteau à Fontainebleau
Remises en raison de la pandémie de Covid-19, les CEI de Fontainebleau, se déroulant traditionnellement fin mars, se tiennent ce week-end pour le plus grand bonheur des amateurs d’endurance. L’épreuve majeure de la compétition, labellisée 3*, s’est déroulée hier. Cent-soixante kilomètres au cœur de la forêt bellifontaine attendaient les couples, représentant neuf nations. Finalement, Marie-Pierre Péroteau a célébré une victoire pleine d’émotion, pour sa dernière course avec Qanaï du Tipi. Le couple a devancé de quinze minutes Camille Garbet et Mélody Théolissat, respectivement en selle sur Baltika d’Aurabelle et Wala de Jalima.
Il fallait se lever tôt et pour assister vendredi matin au départ des trente-neuf concurrents au départ de la dixième édition de la CEI 3* 160km de Fontainebleau, un événement initié en 2011 par l’association Grand Parquet Endurance. Il y avait là de sérieux concurrents, dont la récente championne de France Pauline Théolissat, et neuf nations représentées. À 6h15 précises sur le terrain militaire de la Salamandre, jouxtant le stade équestre du Grand Parquet, et alors que le jour n’était pas encore levé, tous se sont élancés à l’assaut de la première des cinq boucles qui les attendaient – 38, 37, 38, 25 puis 22km pour terminer.
Toujours dans le groupe de tête et leader dès la deuxième boucle, d’abord en compagnie de Géraldine Brault, associée à Gronwel Assan, puis en solitaire dès la troisième, Marie-Pierre Péroteau s’est imposée avec son fidèle Qanaï du Tipi, seize ans. Une victoire pleine d’émotion pour l’Alsacienne puisque son expérimenté gris participait à sa dernière épreuve de ce niveau. Le hongre Pur-sang Arabe a rejoint Marie-Pierre à trois ans et n’a connu aucun autre cavalier depuis! Alors que les deux complices ont compté jusqu’à vingt-cinq minutes d’avance sur leurs concurrents, ils se sont présentés à l’ultime contrôle vétérinaire avec quinze minutes de marge. Arrivés à 17h26, Qanaï a prouvé qu’il était encore en pleine forme. La moyenne du couple sur l’ensemble de l’épreuve s’est établie à 19,53 km/h, avec une pointe à 20,6 km/h sur la deuxième boucle.
“Il est toujours délicat de mettre un terme à la carrière d’un cheval, mais je préfère le faire sur quelque chose de bien”, a déclaré la cavalière. “Le cheval connaît très bien cette piste. Il a fini plusieurs fois sur le podium et déjà remporté une épreuve de 160km. Nous voulions l’engager dans une course qu’il aimait pour la dernière. Nous avions choisi Florac il y a trois semaines mais cela ne s’est pas passé comme nous l’avions prévu (la course a été annulée en raison des intempéries, ndlr)! Je ne voulais pas revenir à Fontainebleau car je m’en suis lassée, mais lui aime cette piste alors nous avons fait l’effort. Pour être honnête, je préfère ne pas courir seule, mais j’évolue toujours en solitaire avec lui. Pourtant, ni lui ni moi n’aimons la solitude! Il faut beaucoup de mental pour réussir cela. Je n’ai pas eu l’impression d’aller vite. La moyenne de la première boucle était de 18,8 km/h, alors qu’il me semble que j’étais aux alentours des 20 km/h quand j’avais gagné en 2015. Nous étions deux en tête, cela fonctionnait bien et les chevaux s’entendaient bien. Je me voyais bien partie pour passer la journée ainsi. Désormais, Qanaï sera encore monté. Je ne peux pas le mettre directement au pré, sinon il passerait ses journées à attendre à la barrière. Cela dit, il apprécie d’y rester avec les copains. Peut-être aura-t-il encore droit à quelques courses, s’il en a envie, mais pas de ce niveau. Il a seize ans, je veux le préserver. J’ai d’autres chevaux qui arrivent, mais pas de ce niveau. Et quand on en a eu un comme Qanaï, il n’est pas facile de lui trouver un successeur. C’est vraiment une belle histoire.”
Qanaï présente un palmarès élogieux, comprenant pas moins de huit victoires: la CEI 3* 160km de Fontainebleau à deux reprises, mais également celles de Madine en 2016 et Lignières en 2017, ainsi que les CEI 2* de Saulnot en 2011, Lanaken en 2014 et Compiègne en 2019, sans oublier la CEI 1* de Rouvroy en 2013.
Une dernière boucle à 26,1 km/h pour Mélody Théolissat
On a assisté à un retournement de situation à l’issue de la deuxième boucle puisque Gronwel Assan, sous la selle de Géraldine Brault, qui faisait la course en tête aux côtés de Marie-Pierre, a été retiré de la compétition pour cause de boiterie au contrôle vétérinaire intermédiaire. Élimination également pour Pauline Théolissat et C’Pieraz du Vialaret. Même sanction pour Ludovic Saroul et Ubayan de Préjeurin, remontés à la deuxième position et qui ne sont pas repartis pour la quatrième boucle. Finalement, ils n’ont été que quatorze à terminer sans encombre cette épreuve exigeante et le podium s’est joué au sprint, entre Camille Garbet et Mélody Théolissat. Avantage à la première citée, qui a pris une belle deuxième avec Baltika d’Aurabelle. “La jument a été royale! Nous étions venues pour réussir une belle course et cela a été le cas, alors je suis très contente. Je ne sais pas si j’avais déjà galopé aussi vite!”, a réagi l’amazone avec un grand sourire. De son côté, Mélody a impressionné avec Wala de Jalima. En effet, le couple, huitième avant la cinquième et dernière boucle, a remonté les concurrents un à un et a pu se mêler à la lutte finale. Un beau podium pour cette jument “qui aime revenir de l’arrière. Je ne voulais pas la mettre trop à l’avant lors des premières boucles car elle n’a que huit ans”, argue sa cavalière. Le duo a signé une dernière boucle à 26,1 km/h de moyenne, et est monté en puissance tout au long de la journée pour finir sur une note plus que positive.
Dernière CEI 3* de la saison dans l’Hexagone
Ces CEI étaient initialement programmées les 27 et 28 mars 2020, mais “les annonces de confinement sont tombées, emportant sur son passage notre autorisation, notre motivation, notre abnégation longue de dix ans et notre joie de vous retrouver”, a écrit Gilles Cabardos, président de l’association organisatrice, Grand Parquet Endurance. “Alors nous avons fait ce que nous faisons de mieux tous les ans: nous avons re-serpenté les chemins, redéfini nos parcours, projeté le schéma type d’une organisation potentielle pour octobre 2020”. Ces “quelques hurluberlus qui avaient l’idée et l’ambition [il y a dix ans] d’organiser des épreuves d’endurance dans ce massif exceptionnel de Fontainebleau” ont travaillé d’arrache-pied pour trouver des solutions et mettre sur pied une dixième édition de cette compétition internationale. Malgré tout le protocole sanitaire à respecter, un “field of play” allégé en nombre de personnes autorisées ou encore des podiums restreints aux trois premiers de chaque épreuve, les cavaliers ont été au rendez-vous, dont Laurent Mosti, vainqueur la première année de ce qui n’était alors qu’un CEI 2* avec Psikadelik.
Une compétition bienvenue également quand on se souvient que la précédente CEI 3* de 160km en France, à Florac, avait été annulée le 19 septembre dernier après une seule boucle courue en raison des intempéries dans les Cévennes… Fontainebleau était d’ailleurs de la dernière compétition de ce niveau programmée cette saison dans l’Hexagone, mais les cavaliers ont encore rendez-vous pour une dernière CEI 3* de 160km à Rio Frio, au Portugal, du 27 au 29 novembre.