Une rentrée sous le signe de l’affluence dans les centres équestres

Un mois et demi après la rentrée, GRANDPRIX a sondé les impressions de responsables de centres équestres et poney-clubs à travers toute la France quant à leur situation économique en cette année qui a été si difficile pour eux. Après la très grande inquiétude liée aux mesures de confinement prises au printemps pour endiguer la pandémie de Covid-19, le moral semble revenu à un très bon niveau.



L’équitation présente la troisième plus grande fédération sportive de France en termes de nombre de licenciés. Comme à peu près toute les activités à travers le pays, sportives ou non d’ailleurs, elle souffre de la crise sanitaire et économique que traverse le monde. Le confinement de deux mois décrété au printemps par le Gouvernement pour endiguer la pandémie de Covid-19 a été ravageur pour les structures équestres accueillant du public. Fin juin 2020, Frédéric Bouix, délégué général de la FFE, avait avancé des chiffres inquiétants dans un entretien accordé à Le Cheval: “On va faire entre -4 et -5 % donc un delta de l’ordre de 7 %, soit, sur 600 000 licences, entre 40 et 45 000 licences perdues. En chiffre d’affaires, on va perdre entre 25 et 30 %. De 41 millions d’euros, le chiffre d’affaires passera à une trentaine de millions d’euros.”

Qu’en est-il aujourd’hui, un mois et demi après la rentrée? En ce début d’automne, GRANDPRIX a souhaité prendre la température des centres équestres aux quatre coins du pays. Ont-ils globalement survécu à la crise? Les inscriptions et renouvellements de licences opérés à la rentrée ont-ils répondu à leurs attentes? Sont-ils confiants dans l’avenir? La réponse est globalement positive. Témoignages.

Jean-Maurice Collette, directeur du centre équestre de La Courneuve (Seine-Saint-Denis)

“Nous avons débuté les inscriptions mi-juin, juste après le déconfinement. Cela a été compliqué car nous avons certes rouvert, mais en respectant les mesures sanitaires. Il n’y a donc pas d’accompagnateurs, un parking à l’extérieur de la structure, et pas d’accès au secrétariat. Nous avons mis en place un système par courriel, ce qui a pas mal compliqué les choses. Et puis, les gens ont forcément été secoués par la crise. Les inscriptions sont venues petit à petit, nous avons organisé des portes ouvertes le 30 août, puis participé au Forum des associations début septembre, et à nouveau proposé trois autres journées de portes ouvertes en septembre. Cela a bien fonctionné. Les inscriptions continuent d’ailleurs ce mois-ci. Nous avions comptabilisé 1.200 licences en 2019, et cette années nous sommes à un peu plus de 1.100. Certains clients ont été refroidis financièrement parlant. De fait, pour s’inscrire, il faut s’engager sur l’année, avec des prélèvements mensuels. Certes, nous avons quasiment pu rattraper toutes les heures “perdues” pendant le confinement – sur 11.000 heures “dues”, il nous en reste “seulement” 3.600 à rattraper – mais les gens restent un peu frileux. On se maintient, mais la perte n’est pas négligeable. Il y a beaucoup de nouveaux, les cours débutants sont pleins. En revanche, nous avons perdu des réinscriptions. L’équitation est un sport de nature, de plein air, donc même si les gens ont peur du virus, nous sommes moins touchés.”



Martin Moreaux, instructeur et gérant du centre équestre de Figeac (Lot)

“Nous sommes contents de la rentrée. Depuis 2016, on suit une progression constante. Cette année, cette progression a été au rendez-vous. Nous avons vendu cent soixante-dix heures de cours, pour environ cent trente licenciés, dont un certain nombre prend plusieurs cours par semaine. Nous avons rajouté des créneaux, aussi parce que nous avons limité le nombre d’élèves par cours à neuf – avant c’était douze – et on est quand même plein! On sent les gens confiants. Ce qui a dû aidé, c’est que nous avons rattrapé l’intégralité des heures qui n’ont pas pu être honorées pendant le confinement. Tous les moniteurs des centres avec lesquels je discute sont tout aussi satisfaits de leur rentrée.”

Stephanie Dubreuil, directrice du centre équestre du Mesnil-David à Illois (Seine-Maritime)

“J’ai repris le club il y a trois ans dans un état catastrophique. Il n’y avait même pas quarante licenciés! L’an dernier, nous avions remonté la pente, atteignant soixante-cinq. Et cette année, la progression continue. C’est même notre meilleure rentrée! Je pense que les gens sont demandeurs: ils ont envie de se faire plaisir, et ils sont rassurés par le fait que l’équitation est un sport de plein air.”

Jon Chirumberro, moniteur et gérant de l’écurie de Toulos à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne)

“Je suis ravi de notre rentrée! Nous étions assez inquiets, et nous avons finalement eu une bonne surprise. Nous avons environ quatre-vingts licenciés. Depuis la rentrée, j’ai comptabilisé 15-20% d’heures de cours de plus que l’an dernier. Je constate qu’il a y pas mal de jeunes qui reviennent à l’équitation après avoir arrêté de pratiquer durant plusieurs années, ainsi que des adultes débutants. C’est comme la vague d’immobilier qui voit des gens de la ville acheter une maison de campagne: l’équitation se déroule au grand air, les gens sont séduits car ils se sentent plus sécurisés. Mes collègues dans le coin sont aussi très agréablement surpris.”

Pascal Gidon, gérant des écuries de la Gare à Saint-Martin-d’Audouville (Manche)

“La rentrée s’est très bien passée. Déjà, la saison estivale a été géniale, avec 15 à 20 % de fréquentation en plus que l’an passé. C’est simple, les balades sur la plage n’ont pas arrêté une seconde! Pour la rentrée, nous sommes dans la même marge de progression. Nous comptabilisons cent soixante-dix licenciés, toutes disciplines confondues: cours d’équitation du baby-poney (trois ans) au Galop 7, équitation western, attelage, randonnée. Depuis quelques années déjà, l’équitation se démarquait par rapport à d’autres fédération sportives. C’est une activité d’extérieur, très ludique et variée, garantissant qui plus est une bonne distanciation sociale. Je pense que cela attire les gens, et que les parents préfèrent emmener leurs enfants monter à poney dans ces conditions que de les enfermer dans une salle bondée sans fenêtre, par exemple. 

Sophie Viallet, enseignante et propriétaire du centre équestre de Wambrechies (Nord)

“Nous sommes ravis de cette rentrée. En plus de tous mes clients qui ont répondu présent cette année, j’en ai de nombreux nouveaux! Toutes les activités que nous proposons, poney-club, dressage, saut d’obstacles, horse-ball, sont sollicitées. Ce qui nous fait environ cent cinquante licenciés. J’ai le sentiment qu’avec tout ce qui s’est passé, les parents privilégient vraiment les sports de plein air.”



Les centres équestres, tout du moins ceux qui ont survécu aux ravages du confinement, heureusement nombreux, sont globalement très satisfaits de cette rentrée, qui dépasse largement leurs espérances. Un mot pour finir de Frédéric Bouix, délégué général de la FFE, qui décortique la recette de ce succès: “La rentrée est clairement positive. Il s’agit là d’un constat tiré de nos échanges avec de nombreux clubs, mais aussi avec les présidents des comités régionaux et départementaux. Ceci se traduit positivement en nombre de licences comptabilisées: on est à six semaines de la rentrée donc il est encore un peu tôt pour donner une tendance, mais nous aurons une bonne visibilité sur le millésime 2020-2021 d’ici un mois et demi. La FFE est d’autant plus satisfaite que cette progression du nombre de licenciés se situe tant au niveau des primo-licenciés que de celui des renouvellements. Ce paysage s’explique par plusieurs raisons. Nous avons mis en place un plan de communication inédit à la sortie du confinement (spots télévisuels pour faire découvrir les attraits de l’équitation, publications dans la presse quotidienne adossées à l’opération «Tous à cheval» en septembre, communication axée sur le tourisme équestre dès fin juin en misant sur le fait que les Français allaient essentiellement rester en France pour leurs congés estivaux… En outre, nous avons accordé des dotations importantes aux départements qui ont ainsi pu relayer le plan de communication national dans les médias locaux et proposer des bons de parrainage, par exemple. Il y a aussi eu plusieurs opérations spéciales de solidarité dédiées aux familles de soignants. Ceci ajouté au fait que les gens ont clairement besoin de grand air et de nature, ce à quoi correspond idéalement l’équitation, et aux initiatives prises par la grande majorité des dirigeants de centres équestres pour faire en sorte de rattraper l’ensemble des séances non données pendant le confinement… Nous demeurons vigilants mais il y a de quoi être confiant en l’avenir.”