En dressage, les étalons “made in France” confirment leurs qualités
Habituellement tenue à Saumur, la Grande Semaine de dressage a quitté les Pays-de-la-Loire cette année pour poser ses valises à Fontainebleau fin septembre, en raison de la crise liée à la Covid-19, qui a d’ailleurs eu raison de l’unité de l’événement puisque le championnat d’élevage France Dressage a finalement pris la direction du Boulerie Jump du Mans. Cette édition 2020 atypique a couronné les meilleurs chevaux de la discipline, mais a aussi confirmé la domination de deux étalons issus de l’élevage tricolore: Don Juan de Hus et Quaterborld du Payrol.
Au nombre total de 585, les jeunes chevaux présents à la Grande Semaine de dressage SHF ont une fois de plus illustré le brassage des meilleurs étalons d’Europe. On a retrouvé, pour n’en citer que quelques-uns, le nom du vicechampion olympique et champion du monde Damon Hill (Westph, Donnerhall x Rubinstein I), du vice-champion du monde des sept ans Governor (KWPN, Totilas x Jazz), du finaliste de la Coupe du monde Blue Hors Zack (KWPN, Rousseau x Jazz), des membres de l’équipe d’Allemagne Escolar (Westph, Estobar*NRW x Fuerst Piccolo) et Franziskus (Han, Fidertanz x Alabaster) ou encore celui de Negro (KWPN, Ferro x Fariant), bien connu pour être le père de l’illustre Valegro (KWPN, d’une mère par Gershwin), ancien crack de Charlotte Dujardin. Pourtant, avec le grand nombre de produits engagés, ce sont bien Don Juan de Hus (KWPN, Jazz x Krack C) et Quaterbold du Payrol (Old, Quarterback x Donnerschwee) qui ont terminé en tête des reproducteurs les plus représentés et dont les produits ont obtenu les meilleurs classements. Bien que la facilité d’accès à leurs semences n’y soit évidemment pas étrangère, et que ni l’un ni l’autre ne soient nés en France, le succès de ces deux étalons est indiscutablement estampillé “made in France”.
Tragiquement disparu d’une maladie foudroyante en 2017 à l’âge de neuf ans, Don Juan de Hus n’aura, certes, jamais connu la carrière sportive à laquelle il semblait tant promis, mais sa carrière de reproducteur, elle, se poursuit, et avec succès. Le fils de Jazz (KWPN, Cocktail x Ulster), sacré champion des quatre ans en 2012 et sixième des championnats du monde des cinq ans l’année suivante avec Jessica Michel-Botton, a aligné pas moins de treize produits cette année, contre onze l’année dernière: Moncler de My (CDP, d’une mère par Fuego), Guardian de Saint Val (SF, d’une mère par Florencio 2), Damour de Maison Rouge (Han, d’une mère par San Amour), Dina Sunsation (Han, d’une mère par Lauries Crusador), Fabio de Hus (Han, d’une mère par Wanderbrusch II), Graphite des Aulnes (SF, d’une mère par Alabaster), Fortune Carrée de Hus (Han, d’une mère par Rubin Royal), Ezperanza Désir (SF, d’une mère par Alabaster), Darling Flower (Han, d’une mère par Rotspon), Jedai de Massa (CPD, d’une mère par Galopin de la Font), Freya des Paluds (Han, d’une mère par Relevant), Elton Juan du Lavoir (OC, d’une mère par Welt Hit II) et Gris Noir*ENE-HN (SF, Soliman x Don Juan de Hus). Déjà meilleur père des éditions 2016, 2017, 2018 et 2019 avec plus de 250 produits enregistrés au SIRE, le KWPN né chez J.M. Koopman n’a depuis longtemps plus à prouver sa capacité à transmettre sa qualité de locomotion hors norme ou sa propension à améliorer celle des juments auxquelles il est croisé. Année après année, le défunt crack du haras de Hus semble devenir un véritable chef de race à la française. Calcul fait, l’alezan a placé sept de ses fils et filles dans les dix premières places des différents championnats: Fabio de Hus et Guardian de Saint Val ont respectivement terminé quatrième et sixième des quatre ans, Jedai de Massa, Darling Flower et Esperanza Desir ont fini médaillé d’argent, quatrième et septième des six ans, Freyda des Paluds a obtenu la troisième place du Critérium Cycle libre première année des quatre ans, et Elton Juan du Lavoir la huitième du Critérium Cycle libre deuxième année des six ans.
Au championnat d’élevage France Dressage du Mans cette année aussi, Don Juan de Hus a dominé son sujet avec les victoires de Don Amour Waverley (Old, Don Juan de Hus x Sandro Hit) dans le Critérium des trois ans et Vicomte de Hus (Old, Vivaldi x Don Juan de Hus) dans le championnat des trois ans mâles montés. Cavalière du regretté prodige, Jessica Michel-Botton suit avec attention sa production: “À la Grande Semaine, je n’ai pas le temps de voir grand-chose, même si j’essaie de suivre les produits de Don Juan en France comme en Europe. D’une manière globale, je pense qu’il a apporté énormément à l’élevage. Au haras de Hus, nous l’avons utilisé sur toutes les juments possibles et il a toujours été améliorateur. Ses produits absorbent parfois les caractéristiques de son père Jazz, ce que lui n’avait pas ou que j’ai peut-être réussi à gérer. Lors de l’approbation de Don Juan, je me souviens que beaucoup ont eu peur de ce que le croisement entre Jazz et Krack C (KWPN, Flemmingh x Beaujolais) pouvait donner! Certains produits de descendants de Don Juan sont faciles, et d’autres sont plus sensibles. Ce sont toujours des chevaux qui veulent bien faire mais qui doivent être bien formés et à qui l’on doit montrer le chemin afin qu’ils prennent confiance. Après, ils donnent tout! Par ailleurs, il se marie très bien avec la jumenterie de Sandro Hit (Old, Sandro Song x Ramino).”
QUATERBOLD TIRE SON ÉPINGLE DU JEU
Si le prolifique Don Juan de Hus domine l’élevage tricolore, Quaterbold du Payrol réussit visiblement à tirer son épingle du jeu et à se démarquer. Le sympathique fils de Quaterback (DSP, Quaterman I x Branderburger), né chez Gerd Sosath, puis découvert par Céline Chabay et Dirk Längle avant qu’il ne soit valorisé par Alizée Roussel, s’est illustré par sept produits, soit deux de moins que l’année dernière. Citons Muschamp Quelle Classe (Old, d’une mère par Herzuf), Qualico (Rhein, d’une mère par Don Vino), Qashmere du Ritz (Old, d’une mère par Rondeo), Quara’Boum (Old, d’une mère par Lauries Crusador), Quaterstein du Payrol (Old, d’une mère par Wolkenstein II), Firstlove d’une Gosse (SF, d’une mère par Clown du Chesnay) et Quasharelle de Valdi (Old, d’une mère par Royal Diamond). Un nombre de représentants, certes, quasi moitié inférieur à Don Juan de Hus, mais pour autant largement plus conséquent que la kyrielle d’autres étalons représentés… Champion de France des six ans en 2015 et engagé la même année aux championnats du monde, sixième du championnat de France Petit Tour en 2018 et dix-neuf fois premier sur quarante-sept départs en compétition, l’étalon de onze ans, qui compte 118 produits enregistrés au SIRE, a placé quatre descendants dans les dix premières places des différents championnats: Muschamp Quelle Classe, vice-championne de France des quatre ans, Quasharelle de Valdi, deuxième du Critérium Cycle libre deuxième année des six ans, Quara’Boum et Quaterstein du Payrol, respectivement troisième et dixième du Critérium Cycle libre troisième année des six ans.
“Quaterbold avait déjà fait ses preuves en tant que père sur le circuit France Dressage depuis 2013, comptant tous les ans des produits classés dans les quatre premiers du championnat de France des foals”, se réjouit Céline Chabay, propriétaire de l’étalon. “Il a régulièrement été représenté sur les podiums, avec notamment Queiros du Payrol (Old, d’une mère par For Edition), troisième du championnat de France des foals en 2014, Qir Royal du Payrol (Old, d’une mère par Wolkenstein II), champion de France des foals en 2015, Quensington de Valdi (Old, d’une mère par De Niro), vice-champion de France des foals en 2017, etc. Nous attendions avec impatience de voir ses produits plus âgés pour confirmer les qualités présentées aux modèle et allures. Cette année, il a été bien représenté sur le circuit SHF avec des résultats d’un très bon niveau, à la fois sur les épreuves Amateur et Pro. Il tient donc ses promesses en produisant des chevaux de qualité pour le sport, pratiques et avec un vrai potentiel.” Ces réussites confortent évidemment Céline Chabay dans son choix. “Nous avons acheté Quaterbold lorsqu’il avait deux ans. Il avait une très bonne lignée maternelle – sa mère est la sœur utérine de l’étalon Stedinger (Old, Sandro Hit x Landadel). À cette époque, son père Quaterback s’était révélé comme un vrai phénomène, et c’était une belle opportunité de ramener du sang de cet étalon en France. Il a rejoint le piquet de chevaux d’Alizée Roussel à l’âge de cinq ans et ont tous les deux très vite capté l’intérêt du public. Quaterbold est un étalon vraiment charismatique, avec beaucoup de présence et de vrais points forts : une belle génétique et une vraie solidité, avec une excellente constitution. En plus, il est gentil et talentueux! Le fait qu’il soit stationné en France, disponible facilement et monté par une cavalière française a créé une certaine proximité. Ses premières générations de poulains ont beaucoup plu et les retours des éleveurs ont été très vite positifs, ce qui a contribué à développer sa notoriété. Nous sommes un petit haras, accessibles, et essayons d’être les plus arrangeants et transparents possible pour nos clients, d’autant que nous élevons nous-mêmes. Cela nous a permis de gagner la confiance des éleveurs au fil du temps, ce qui compte aussi beaucoup.” Bref, en dressage aussi, le “made in France” peut faire recette!
Cet article est paru dans le dernier numéro du magazine GRANDPRIX (n°121).