Aline d’Helby, la délicate princesse blonde d’Éric Février

Avec sa belle robe alezane et ses crins aux reflets dorés, Aline d’Helby, protégée d’Éric Février, n’a pas encore connu autant de succès que l’inoubliable tube du regretté Christophe. Pour autant, sa régularité et sa récente deuxième place dans le Grand National du Mans ont braqué les projecteurs sur elle. Cette puissante jument est issue d’une mère aux origines inconnues, une particularité qui détonne mais ne change en rien la qualité de cette fille de Kouros d’Helby. Sous l’œil attentif de son co-naisseur, propriétaire et cavalier, cette délicate princesse blonde trace sa route, tant dans le sport qu’à l’élevage, où sa production fait déjà parler d’elle. Portrait.



© Collection privée

“J’attends simplement qu’on m’autorise à aller sauter plus haut. La jument est prête pour tout faire”, lance avec détermination Éric Février au sujet d’Aline d’Helby. Sans faire de bruit, cette délicate princesse blonde”, comme la qualifie son cavalier, propriétaire et co-naisseur, franchit un à un les échelons vers le très haut niveau. À l’occasion de la dernière étape du Grand National, le 15 novembre au Pôle européen du cheval, près du Mans, la fille de Kouros d’Helby a offert à son pilote une belle deuxième place, à l’issue de deux parcours parfaits. Pourtant, c’est un terrain où elle est souvent agacée. Le vendredi, elle était très calme et hyper chaude en piste. Et le dimanche, avec la tempête, nous avons mis un temps infini à aller au concours. Elle était un peu sur les nerfs, mais j’ai pris le temps de la sortir deux fois. Ensuite, elle était encore un peu chaude mais quand elle est comme ça, c’est un taureau: elle ne veut pas toucher la moindre barre”, sourit le pilote, ancien cavalier du haras d’Helby, qu’il a quitté en début d’année.

Avant d’atteindre un tel niveau, Aline d’Helby a fait ses gammes, comme beaucoup de chevaux, sur le Cycle classique de la Société hippique française. À quatre ans, l’alezane a évolué sous les selles de Victor Laudet et Pierre Rozzonelli, avant de rejoindre Ludovic Rias pour deux parcours à cinq ans. Puis, Charles Hubert Chiché, alors employé pour aider Éric Février à gérer la soixantaine de chevaux de sport de l’élevage d’Helby, a pris le relais. “Elle montrait beaucoup de sang. Elle était aussi très sensible, de façon générale, tant à pied qu’en selle. Et automatiquement, qui dit jument près du sang, dit jument très respectueuse. C’était sa première qualité”, se souvient le cavalier de Loire-Atlantique. “Comme elle débordait d’énergie, Aline poussait toujours vers l’avant. Il fallait contrôler cet excès de générosité. Elle avait beaucoup de poussée, donc il fallait essayer de verticaliser ses trajectoires de saut. Naturellement, c’est aussi ce qui fait qu’elle peut aujourd’hui sauter des épreuves à 1,50m”, reprend Charles Hubert Chiché, qui salue le travail effectué par Éric Février. “Éric l’a bien dressée. Il fallait laisser à Aline l’impression qu’elle était indépendante, tout en parvenant à la contrôler. L’autre jour, au Mans, le couple s’est promené, aussi bien techniquement qu’en termes de moyens.”

© Collection privée



Des origines qui détonnent

Aline sous la selle de Charles Hubert Chiché lors de la finale du Cycle classique des cinq ans, en 2015 à Fontainebleau.

Aline sous la selle de Charles Hubert Chiché lors de la finale du Cycle classique des cinq ans, en 2015 à Fontainebleau.

© Scoopdyga

À cinq ans, Aline accomplit une bonne saison, signant treize sans-faute en seize parcours, avant de prendre part à la Grande Semaine de l’élevage. À Fontainebleau, la belle blonde termine deuxième du championnat réservé aux chevaux… des autres stud-books. En effet, même si son père Kouros d’Helby (ISO 161, Narcos II x Laudanum), ancien cheval de tête d’Éric Février, est bien inscrit et approuvé au Selle Français, la mère d’Aline, Hermine, n’a aucune origine connue. La protégée du Breton est donc affublée des lettres OC, pour origines constatées. Cela n’enlève rien aux qualités de l’alezane de dix ans, mais a de quoi intriguer. “Hermine n’a aucune origine. Je l’ai achetée à un boucher chevalin”, lâche Éric Février, qui dément les quelques rumeurs naissantes sur un possible lien avec Aferco (ISO 168, SF, Laudanum x Incitatus). À vrai dire, c’est surtout la ressemblance frappante avec l’une de ses anciennes montures qui a poussé Éric à sauver Hermine. “Elle me fait beaucoup penser à Quool*DPL (ISO 146, SF, Laudanum x As du Beaumanoir), propre sœur de l’étalon Raspail (ISO 182), que j’ai montée jusqu’à ses sept ans. Je n’attendais rien du tout d’elle. Je l’ai acquise jeune. Ensuite, je l’ai fait sauter en liberté et je n’ai jamais vu un cheval sauter aussi bien de ma vie. Nous l’avons débourrée et l’avons fait sauter sous la selle. Elle montrait toujours les mêmes qualités.” Suffisant, donc, pour convaincre Éric de vouer sa jument – qui ne pouvait pas concourir – à une carrière de reproductrice. Et la suite lui a donné raison.

Avant de donner Aline, au début des années 2000, Hermine a produit Nanou et Olympe de la Baie, toutes deux issues du Selle Français Glory du Banco (ISO 128, SF, Le Tot de Semilly x Elf III), respectivement créditées d’ISO 131 et 152. “J’ai vendu Nanou à Romain Bourdon après son débourrage. Par la suite, elle s’est illustrée jusqu’à 1,50m en Espagne. Puis j’ai cédé Olympe à des amis pour un petit prix et elle a, entre autres, remporté le Derby de Dinard avec Yannick Gaillot”, détaille le naisseur. Ont suivi les OC Paddington (Damiro L), Salto d’Helby (ISO 129, Flirt d’Helby) et Tornade d’Helby (ISO 143, Ivor d’Helby), avant le savant mariage avec Kouros. Croisée au performant étalon, dont la mère, Briseis d’Helby, a notamment produit le bouillonnant Quickly de Kreisker (ISO 183, SF, Diamant de Semilly), Hermine donne naissance à Urvil d’Helby (ISO 136), champion de France à quatre ans sous la selle de Manuel Thierry, puis Voyou d’Helby, crédité d’un ISO 128 et labellisé SHF à Fontainebleau, en 2013, sous la selle du Nordiste Alexis Deroubaix. 

En 2010, naît finalement Aline d’Helby, pour le compte de l’élevage d’Helby et d’Éric Février. Issue du même croisement que ses aînés, l’alezane tape dans l’œil de ses naisseurs. “Elle était très belle, pleine de sang, avec un coup de saut fabuleux. Aline était pleine de souplesse, très typée Laudanum et avait beaucoup de caractère”, se remémore Marie Trihan, fille du regretté Albert Lamotte, fondateur de l’élevage. “Ce sont des choses qui se sont déjà vues, mais aujourd’hui, avec le travail de sélection génétique accompli par tous les éleveurs, le fait qu’une jument sans origine arrive à produire de bons chevaux est atypique”, ajoute Charles Hubert Chiché. 

Récupérée à six ans par Éric Février pour poursuivre sa formation vers le haut niveau, l’alezane n’avait rien perdu de son caractère. “C’est une vraie princesse blonde”, avoue son cavalier. “Elle est très sanguine, sur l’œil, et à l’affût de tout ce qui se passe. Elle est hyper sensible et veut toujours trop en faire. Face à un obstacle d’1m, si vous la laissez faire, elle sautera 1,50m à chaque fois. C’est un peu moins vrai aujourd’hui, parce qu’elle se calme avec l’âge. Mais durant ses jeunes années, il fallait la gérer et faire en sorte qu’elle soit moins virulente en concours.”

Hermine, la mère OI d’Aline, est ici suitée de Tornade d’Helby.

Hermine, la mère OI d’Aline, est ici suitée de Tornade d’Helby.

© Collection privée



L’avenir se conjuguera aussi à l’élevage

Déjà classée à 1,50m à huit ans, Aline d’Helby est désormais rodée aux belles épreuves. “Nous avons vécu plein de tours à quatre points que nous aurions dû boucler sans faute, mais ce n’était jamais la faute de la jument. C’était simplement moi qui l’avait mal montée”, concède modestement Éric Février. Après sa deuxième place dans le Grand National du Mans, puis son neuvième rang dans le Grand Prix Pro 1 à 1,45m de Saint-Lô il y a huit jours, le Breton, qui a préféré abandonner devant le dernier obstacle hier dans un nouveau Grand Prix à 1,45m disputé au Centre de promotion de l’élevage, est disposé à aller le plus loin possible avec sa protégée. “J’ai dit à Henk Nooren et Thierry Pomel (respectivement formateur et sélectionneur de l’équipe de France, ndlr), que je me tenais prêt s’ils souhaitaient m’envoyer quelque part. Aline concourt régulièrement, elle n’est pas du tout fatiguée. Elle est même en pleine santé! De plus, je suis désormais installé à mon compte, avec un piquet d’une dizaine de chevaux, et quelqu’un pour m’aider. Si je dois partir plusieurs jours en concours, je peux donc me libérer”, explique le pilote.

D’ailleurs, Aline d’Helby n’est pas à vendre. Si elle doit passer au niveau supérieur, elle le fera avec son fidèle cavalier, et personne d’autre. Toutefois, Éric Février compte préserver sa puissante alezane. “Parmi mes chevaux, Aline est la plus prédisposée à aller vite”, analyse ce dernier. “Mais c’est aussi celle que je protège le plus. Je ne prends jamais tous les risques avec elle. Une unique épreuve ne représente pas sa carrière.

Sa carrière d’athlète, Aline la mène de front avec celle de reproductrice. Si ses derniers résultats sportifs ont été marquants, ses deux produits l’ont été tout autant cette saison. Ainsi, le SF Gus d’Helby, son premier poulain, par Ivor d’Helby (ISO 145, SF, Count Ivor x Double Espoir), était en tête du classement SHF des chevaux de quatre ans, avant de terminer vingt-troisième de la finale et d’être labellisé Très Bon, début à Fontainebleau. L’autre fils d’Aline, Helby, est sans doute celui qui a fait le plus de bruit ces derniers jours. Avec ses papiers OC, ce bel alezan issu de Volcan d’Helby (ISO 126, SF, Kouros d’Helby x Cantus) a remporté avec brio la dernière qualificative des mâles de trois ans qui s’est tenue il y a deux semaines à Saint-Lô, ses performances au saut en liberté et au saut monté ayant été créditées des excellentes notes de 17 et 18,25. Helby est toujours à moi. Il était OC à cause d’Aline, mais le Stud-book a validé son inscription au Selle Français dès le 18 novembre compte tenu de ses notes. Il partira au testage dans quinze jours et sera présent en février à Saint-Lô”, précise Marie Trihan. “Helby a la tête de son père, mais tout le corps de sa mère. Il a vraiment la souplesse et l’équilibre naturel qui viennent de son grand-père, Kouros. J’ai aussi conservé la propre sœur d’Aline, Folie d’Helby, qui a participé à la finale des cinq ans à Fontainebleau. Tous les produits de cette lignée possèdent un vrai coup de saut, de la force et une grande intelligence de la barre.” Des qualités que vante aussi Charles Hubert Chiché: Tous les poulains d’Hermine ont été performants, y compris ceux qui ne sautent qu’1,30m. Comme elle produit des chevaux sensibles et près du sang, ils sont respectueux et se comportent bien.”

Éric Février peut être fier de sa souche. “Élever pour faire comme les autres ne m’intéresse pas. Au contraire, je vise la rareté. Et surtout, ne pas m’éloigner du Selle Français. Les sangs étrangers, ce n’est pas trop mon truc”, assume le quinquagénaire. Gageons désormais que cette Aline d’Éric Février connaisse autant de succès que celle du regretté Christophe, qui a tant crié pour qu’elle revienne…

Deuxième fils d’Aline, Helby a remporté la qualificative des mâles de trois ans qui s’est tenue il y a deux semaines à Saint-Lô, obtenant 17 au saut en liberté et 18,25 au saut monté.

Deuxième fils d’Aline, Helby a remporté la qualificative des mâles de trois ans qui s’est tenue il y a deux semaines à Saint-Lô, obtenant 17 au saut en liberté et 18,25 au saut monté.

© Les Garennes



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