DANS LE RÉTRO: “Personne n'aurait parié sur moi!”, Simone Blum

GRANDPRIX ressort ses archives! Redécouvrez l'interview de la championne du monde de saut d'obstacles en titre, quelques semaines après son sacre à Tryon en 2018. // Médaillée d’or individuelle et de bronze par équipes aux rênes de son exceptionnelle Alice, Simone Blum a sans aucun doute vécu la plus belle semaine de sa carrière fin septembre aux Jeux équestres mondiaux de Tryon. Pur produit de la méritocratie, ayant fait ses armes sur le circuit des Coupes des nations Longines, la jeune Allemande a déjà marqué l’histoire.



Pendant l'été 2018, vous avez été sacrée championne du monde avec votre fabuleuse Alice (DSP, Askari x Landrebell). Avec un mois de recul, quel bilan en tirez-vous? 

L'année 2018 a été remplie de succès pour nous, notamment grâce à mon titre. Nous sommes très heureux! Ces Jeux équestres mondiaux ont été incroyables. Nous avons survolé tous les parcours, et Alice a sauté de façon fantastique. Pour couronner le tout, je me suis mariée avec mon compagnon (Hans- Günter Goskowitz, qui est également son entraîneur, ndlr) mi-octobre. Cela a été une semaine pleine d’émotions, c’était parfait. Depuis notre retour de Tryon, nous avons profité d’une petite pause, et nous reprendrons la compétition très prochainement. 

À quel point votre victoire vous a-t-elle surprise? 

Je savais qu’Alice était capable de sauter absolument tous les parcours. C’est une jument extraordinaire, et nous avons une équipe géniale derrière nous. En vérité, j’étais déjà très heureuse d’être sélectionnée pour ces JEM. J’y suis allée dans le but de prendre de l’expérience puisque c’était mes premiers championnats. Je voulais simplement monter du mieux possible! Jour après jour, nous sommes remontées au classement général, et ma jument sautait de mieux en mieux. Après notre médaille de bronze par équipes, j’ai eu un super sentiment, et je commençais à espérer davantage pour l’individuel. Même si ma carrière à très haut niveau n’a démarré que mi-2017, j’ai déjà été championne d’Allemagne à deux reprises, j’ai gagné le Grand Prix Longines du CSI 5* de Lausanne, ainsi qu’une épreuve au CSI 5*-W de Stuttgart. Pour autant, c’étaient mes premiers championnats, donc il est sûr que personne n’aurait parié sur moi! C’était simplement mon jour. 

Qu’est-ce que votre titre a changé dans votre vie de cavalière et dans votre vie personnelle? 

Je suis beaucoup plus sollicitée, notamment par les médias! (rires) C’est d’ailleurs un peu stressant, d’autant plus que j’étais aussi en pleine préparation de mon mariage ces dernières semaines. Ce titre va servir de vitrine pour notre écurie et nous permettre de développer nos contacts et relations dans le secteur, ce qui est très important pour nous. Nous avons agrandi notre propre structure en mars dernier, et les gens vont désormais s’y intéresser davantage. Hans-Guünter est également un excellent entraîneur, et je suis sûre que de nouveaux clients voudront travailler avec lui.

Vous avez dû recevoir beaucoup de messages de félicitations. Lequel vous a le plus touché? 

J’en ai reçu beaucoup, effectivement! Mon compte Facebook en était rempli. (rires) Mon groom m’a notamment laissé un très joli message. On m’a également offert un superbe montage vidéo, qui retrace notre histoire depuis le début. Quand je la regarderai dans quelques années, j’en aurais encore des frissons. C’était vraiment beaucoup d’émotions. 

Vous êtes devenue la deuxième cavalière de l’histoire à décrocher le titre mondial en saut d’obstacles, après la Canadienne Gail Greenough en 1986. Même si cette discipline est mixte, donc en accord avec l’idéal féministe, en tirez-vous une fierté particulière? 

Bien sûr, j’en suis très fière! Pour moi, c’est d’autant plus spécial que j’ai également été la deuxième femme à devenir championne d’Allemagne. C’est toujours un sentiment particulier.



Qu’avez-vous pensé des parcours d’Alan Wade, chef de piste de ces Jeux? 

Il a accompli un travail remarquable! Ses parcours étaient brillants, délicats, difficiles, mais très justes pour les chevaux. Même certains cavaliers individuels, qui n’ont pas la même expérience que d’autres, ont effectué de bons tours et il n’y a pas eu de catastrophe. C’était excellent! Et finalement, je pense que les trois meilleurs couples de la semaine ont été récompensés. 

Avez-vous un modèle? 

Mon idole a toujours été Marcus Ehning. C’était génial de pouvoir évoluer à ses côtés, au sein de la même équipe. C’est un homme très gentil et un cavalier incroyable. 

Vos débuts au plus haut niveau remontent au CSIO 5* de Rotterdam, en juin 2017. Comment cela s’était-il passé? 

Malheureusement, nous avions couru une épreuve de préparation, et Alice s’était légèrement blessée à l’entraînement. Nous avions alors dû déclarer forfait pour la Coupe des nations Longines programmée le lendemain... 

Le grand public vous a découverte en septembre 2017 à l’occasion du CSI 5* de Lausanne, où vous avez triomphé dans le Grand Prix Longines, le premier de votre carrière. Quel souvenir en gardez-vous? 

C’était un moment incroyable! Je ne m’y attendais pas, parce que Bosty (le Français Roger-Yves Bost, deuxième avec Sydney une Prince, ndlr) est un cavalier vraiment très rapide, et je l’avais finalement devancé d’une seconde! C’était un barrage très excitant. Une première victoire dans un Grand Prix CSI 5* est toujours un moment particulier dans la carrière d’un cavalier.

Vous vous êtes grandement aguerrie grâce au circuit de la Coupe des nations Longines, pour lequel vous avez été régulièrement sélectionnée par votre chef d’équipe Otto Becker. Quelle importance donnez-vous à cette série? 

Pour moi, courir par équipes est très important. Nous avons de la chance d’avoir, en Allemagne, un grand nombre de cavaliers très talentueux. Le staff de notre Fédération est composé de personnes géniales, à commencer par Otto Becker, et c’est toujours un plaisir d’être avec eux. Otto est un excellent chef d’équipe. Il ouvre des portes à de jeunes cavaliers et offre une chance à chacun de faire ses preuves. À mon sens, il est essentiel d’avoir un vivier de couples en devenir et de leur donner de l’expérience. En Allemagne, il n’est pas si facile d’accéder à haut niveau, et la Fédération accomplit un travail remarquable. 

Quel regard portez-vous sur la concurrence entre les circuits privés et ces Coupes des nations Longines? 

En ce qui me concerne, pour le moment, je ne peux compter que sur Alice pour disputer les plus grandes épreuves. Par exemple, le Longines Global Champions Tour est un super circuit, mais compte quasiment vingt étapes. Je ne peux donc pas aller partout avec ma jument, car ce serait beaucoup trop éprouvant pour elle, d’autant qu’il faut souvent prendre l’avion ou faire pas mal de route. Les chevaux disputent déjà énormément d’épreuves, et on ne peut pas les soumettre à un rythme trop soutenu. Nous préférons garder Alice dans la meilleure condition physique possible. 

Portez-vous vos montres Longines, gagnées à Lausanne et Tryon?

Elles sont très jolies! Je les ai adorées et les ai offertes. J’en ai donné une à mon mari, qui est aussi mon entraîneur, donc la personne la plus importante de ma carrière et de ma vie personnelle! Sans lui, je n’en serais pas là. Et j’ai offert la seconde à mon père, qui m’a toujours encouragée et qui me soutient désormais en me confiant des chevaux. C’était pour moi très important de pouvoir leur donner quelque chose en retour. 

Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX heroes n°108 en novembre 2018.