Nimmerdor, l'étalon néerlandais du siècle

En 1975, lors de la session d’approbation du KPWN à Zuidlaren, tout près de Groningue, au nord des Pays-Bas, un mâle de trois ans est présenté à la longe d’un jeune éleveur qui se plie pour la première fois à cet exercice. Ce jeune cheval n’est autre que Nimmerdor (KWPN, Farn x Koridon, Ps) et l’homme qui est à ses côtés se nomme Wiepke van de Lageweg. Chacun jouera un rôle essentiel dans la carrière de l’autre. Nimmerdor est à l’origine de VDL Stud, l’un des plus glorieux haras de sport du monde. Il est aussi le père de Heartbreaker, le grand-père de Kannan (KWPN, Voltaire) et l’arrière-grand-père de Cornet Obolensky (ex-Windows van het Costersveld, BWP, Clinton x Heartbreaker).

Nimmerdor est né chez J.A. Dijkstra à Woudsend, un village bordé de lacs et de canaux situé dans la province de la Frise, toujours au nord des Pays-Bas, à seulement trente kilomètres au sud de Bears, où se développera VDL Stud. Il arrive dans la vie de Wiepke van de Lageweg alors que celui-ci lance son élevage. “Nimmerdor est le premier étalon que j’ai acheté. Enfin le deuxième, puisque j’en avais acquis un l’année précédente qui n’était pas assez bon. Je voulais un mâle qui ait quelque chose de plus que les autres. Je n’oublierai jamais la première fois que je l’ai vu… J’ai tout de suite su qu’il était unique. Je débutais tout juste, alors je ne connaissais personne dans le monde de l’élevage. J’ai tout de suite voulu l’acheter et l’ai fait. Au début, il me rapportait moins que ce qu’il me coûtait, mais je ne voulais pas le vendre. Il devait rester! Par la suite, j’ai toujours recherché ce sentiment. Si je ne ressentais pas cela chez les étalons, je ne les achetais pas”, se souvient le fondateur du haras. 

Il y a trente-huit ans, Nimmerdor a été l’un des premiers étalons à briller sur les terrains de concours, tout d’abord avec le regretté Néerlandais Bert Romp, mort accidentellement début octobre, puis sous la selle de son compatriote Albert Voorn, avec lequel il a notamment pris part à la finale de la Coupe du monde en 1984 à Göteborg. Les deux hommes étaient alors installés dans les écuries du grand cavalier et entraîneur Henk Nooren. “Nimmerdor est le premier cheval qui m’a permis de performer au plus haut niveau”, se rappelle Albert Voorn, vice-champion olympique en 2000 à Sydney avec l’incroyable Lando (DWB, Lancier x Raimondo). “Je ne l’ai pas vu commettre beaucoup de fautes durant sa carrière. À l’époque, j’étais jeune et je manquais d’expérience. S’il était encore en vie aujourd’hui et si je pouvais le remonter, nous aurions sûrement une place en équipe nationale. Il serait un vrai champion!”

RESPECT, STYLE ET AMPLITUDE. 

Wiepke van de Lageweg ne dirait pas autre chose: “À cette époque, il n’y avait pas beaucoup d’étalons en compétition, mais je voulais que Nimmerdor aille le plus haut possible. Il a été présélectionné pour les Jeux olympiques de Los Angeles en 1984, mais il n’a pas pu y aller pour diverses raisons et parce que j’avais trop peur de le perdre. Aujourd’hui, tout a changé: nous entraînons tous nos étalons dans l’espoir qu’ils deviennent de grands champions. À la fin de sa carrière sportive, il a passé toute sa retraite chez nous, jusqu’à sa mort”, à l’âge de trente et un ans, en avril 2003. Propriétaire de l’étalon Iowa (KWPN, Libero H x Nimmerdor), Bernard Le Courtois, qui a suivi la carrière de Nimmerdor en tant que journaliste et éleveur, se souvient qu’il “combinait respect et style. Il avait aussi l’amplitude nécessaire pour s’illustrer en Grands Prix internationaux et Coupes des nations. Il avait une très bonne technique des antérieurs, mais ne sautait jamais très haut. Il n’avait pas de coup de garrot.” 

À cette époque, le fondateur de VDL Stud achète de nombreuses juments du Holstein, dont Shoraya (Ladykiller, Ps x Aldato), née chez Benno Hoff, à l’origine de l’une des souches principales de la maison. Croisée à plusieurs reprises à Nimmerdor, elle engendre notamment le KWPN NAldato, performant jusqu’à 1,60m avec le Néerlandais Emile Hendrix, Dhelia, compétitive jusqu’à 1,50m, et Zancara, qui donne elle-même naissance à trois étalons performeurs du KWPN: VDL Bubalu (Baloubet du Rouet), vice-champion olympique par équipes en 2012 à Londres et champion du monde par équipes en 2014 avec Jur Vrieling, VDL Montreal (C-Indoctro), valorisé jusqu’en CSIO par le même Jur Vrieling, et VDL Pessoa (Animo), également performant à ce niveau sous la selle du Brésilien Vitor Alves Teixeira. Hyazinthe (Holst, Ladykiller, Ps x Fasching) a, elle aussi, donné de très bons poulains de Nimmerdor au haras, dont Ahorn (KWPN), qui a accompli sa carrière internationale avec le Néerlandais Roelof Bril avant de connaître une belle trajectoire à l’élevage (lire encadré). 

Parmi les autres fils de Nimmerdor nés chez VDL, citons Glendale (KPWN, Nimmerdor et Silja par Marco Polo), grand-père maternel du célébrissime étalon de dressage Totilas (KWPN, Gribaldi, Trak), double médaillé d’or aux championnats d’Europe de Windsor en 2009 puis vainqueur de la finale de la Coupe du monde et triple médaillé d’or des Jeux équestres mondiaux de Lexington en 2010 avec le Néerlandais Edward Gal. “Nous continuons d’utiliser la semence congelée de Nimmerdor de temps en temps. Récemment encore, deux de ses filles ont été sacrées championnes des deux et trois ans aux Pays-Bas. Sa descendance est vraiment excellente. Il transmet à ses produits son caractère, son amplitude et son physique. De plus, ce sont des chevaux très sains”, vante Wiepke van de Lageweg.

On retrouve l’empreinte de Nimmerdor dans le pedigree de nombreux étalons stationnés à Bears: Arezzo (KWPN, Chin Chin x Heartbreaker), Baltic (KWPN, Quincy x Jus de Pomme), Comfortuna (KWPN, Berlin x Nimmerdor), Dakar (KWPN, Cardento x Nimmerdor), Dallas (BWP, Douglas x Heartbreaker), Etoulon (KWPN, Toulon x Sable Rose), Freeman (KWPN, Emmerton x Chin Chin), Gisborne (KWPN, Quamikase des Forêts x Goodtimes), Glenfiddich (KWPN, Bacardi x Corrado I), Global (KWPN, Chin Chin x Heartbreaker), Goodluck (KWPN, Baltic x Cassini I), Goodyear (AES, Indorado x Cardento), Grand Slam (KWPN, Cardento x Heartbreaker), Hampshire (KWPN, Arezzo x CIndoctro), Harley (ex-Ursel, KWPN, Heartbreaker x Carthago), Insider (KWPN, Etoulon x Corland), Jardonnay (KWPN, Kannan x C-Indoctro), Jenssen (BWP, Harley x Quamikase des Forêts), Johnnie Walker (KWPN, Zapatero x Mermus R), Karaldo (KWPN, Harley x Chin Chin), Kingsland (KWPN, Arezzo x Silvio II), Kobalt (KWPN, Modesto x Calido I), Kordon (KWPN, Glenfiddich x Kreator), Pommerol de Muze (BWP, Emerald van’t Ruytershof x Kannan), Quasimodo van de Molendreef (BWP, Heartbreaker x Lys de Darmen) et Quebec (NRPS, Quabri de l’Isle x Come On). "Il est clair que le sang de Nimmerdor est très présent chez nos étalons, mais ce n’est pas forcément voulu. Notre fonctionnement est simple: s’ils sont bons ils restent, sinon ils partent”, argue le fondateur du haras. 

Parmi les autres fils étalons de Nimmerdor, on ne peut pas occulter Aram (KWPN, mère par Uppercut, Ps), le père de De Sjiem (KWPN, mère par Wahtamin, Ps), sacré champion olympique en 2000 à Sydney et vainqueur du Grand Prix d’Aix-la-Chapelle l’année suivante avec le Néerlandais Jeroen Dubbeldam, ni Hamlet (KWPN, mère par Notaris), le père du légendaire Hickstead (KWPN, mère par Ekstein), médaillé d’or individuel aux JO de 2008 à Hong Kong et de bronze aux JEM de Lexington et lauréat, lui aussi, du Grand Prix d’Aix avec le Canadien Éric Lamaze. Citons encore Goodtimes (KWPN, mère par Caletto I), père de Lorenzo (KWPN, mère par Zoogedacht), classé à 1,60m avec l’Américaine Anne Kursinski, Obelix R (KWPN, mère par Purioso), avec sa compatriote Lisa Deslauriers, Londontimes (KWPN, mère par Le Mexico), avec le Néerlandais Kevin Olsmeyer, Lenie (KWPN, mère par Beaujolais), avec l’Égyptien Karim Elzoghby, et Kris Kentaur (KWPN, mère par Burggraaf), avec le Néerlandais Piet Raijmakers.

HEARTBREAKER, LE FILS PRODIGE.

Mentionnons aussi Wellington (KWPN, mère par Lucky Boy, Ps), qui a effectué sa carrière internationale sous la selle du Belge – alors Néerlandais – Jos Lansink et qui a laissé Jerome (KWPN, mère par Rigoletto), excellent avec l’Irlandais Cameron Hanley et le Britannique Tim Stockdale, VDL Jupiter (KWPN, mère par Ronald), avec l’Ukrainien Ulrich Kirchhoff et le Néerlandais Jur Vrieling, ainsi que les étalons VDL Glennridge (KWPN, mère par Silvano) et Emilion (KWPN, mère par Farnese). “Emilion et Glennridge ont été deux des meilleurs chevaux de ma carrière. Ils avaient quelque chose de très spécial. Avec Emilion, j’ai notamment remporté le Grand Prix Coupe du monde de Millstreet en 1995. Les fils et petits-fils de Nimmerdor étaient très guerriers et avaient tous un mental très solide”, se souvient Ulrich Kirchhoff, double champion olympique avec l’Allemagne en 1996 à Atlanta sur Jus de Pomme (Primo des Bruyères x Garitchou, AA) et cavalier attitré de VDL Stud pendant dix ans. Si Glennridge a surtout laissé Niko IV (KWPN, mère par Triton), classé en Coupe du monde avec le Britannique Ben Maher, Emilion présente une très belle et large production, parmi laquelle on retiendra particulièrement la géniale Seldana di Campalto (KWPN, mère par Almé Star), vice-championne d’Europe par équipes en 2009 à Windsor avec l’Italien Natale Chiaudani puis vice-championne du monde individuelle en 2010 à Lexington avec le Saoudien Abdullah al-Sharbatly.

Le KWPN Heartbreaker, aujourd’hui âgé de vingt-neuf ans, est sans aucun doute le plus célèbre fils de Nimmerdor. Installé à seulement dix kilomètres de VDL Stud, son naisseur P.S. Koopmans achète à Wiepke van de Lageweg sa mère, Bacarole (KWPN, Silvano x Uppercut, Ps), qui attend alors un poulain de Nimmerdor, lequel naît d’ailleurs à Bears. La même année, P.S. Koopmans fait également naître High Valley (KWPN, Ahorn x Conte), brillant jusqu’à 1,60m avec Jos Lansink. Acquis par Henk Nijhof, Heartbreaker n’est pas présenté à l’approbation du KWPN, l’étalonnier considérant que trop de descendants de Nimmerdor y sont inscrits. Il l’oriente vers le stud-book voisin BWP, où il est agréé. Heartbreaker passe ses premières années en Belgique, où il devient un incroyable cheval de saut. Finaliste des Mondiaux Jeunes Chevaux de Lanaken à six et sept ans, il accomplit ensuite une belle carrière au plus haut niveau avec le Néerlandais Peter Geerink. “Heartbreaker était comme Nimmerdor. Il avait une belle tête, avec une longue encolure bien orientée, mais sa ligne dorsale était assez courte”, se rappelle Bernard Le Courtois. 

À l’élevage, Heartbreaker engendre plus de cent produits ayant évolué dans des épreuves à 1,60m, ce qui est prodigieux. Pour la famille Nijhof, qui exploite sa carrière depuis toujours, le bai est un don du ciel! “Son modèle, son respect, sa rapidité et sa bravoure ont fait de Heartbreaker un étalon hors du commun. Il aurait pu avoir une meilleure carrière sportive, mais il fait sans aucun doute partie des dix ou quinze meilleurs reproducteurs du monde. Il s’associe parfaitement avec les juments un peu lourdes. C’est pourquoi il a tant apporté à l’élevage belge, lui permettant de produire des chevaux plus modernes. Il transmet à la fois son mental et sa rapidité. Bien sûr, il a aussi des points faibles: il ne transmet pas de taille et il faut parfois tempérer l’impatience de ses produits sous la selle”, décrit Henk Nijhof Jr. Grâce aux nouvelles techniques d’élevage, dont l’injection intra-cytoplasmique de spermatozoïde (ICSI), Heartbreaker pourra continuer à produire dans les années à venir.

Tout aussi performant en tant que père de mères, le beau et bouillonnant Heartbreaker a souvent “marié” ses filles au très énergique Clinton (Holst, Corrado I x Masetto), un croisement à l’origine de bon nombre de champions. “Au début, beaucoup d’éleveurs étaient sceptiques à ce sujet. En réalité, Clinton et Heartbreaker compensent très bien leurs défauts et qualités réciproques. De fait, les chevaux issus de la lignée de Corrado manquent parfois de volonté, mais ont beaucoup de moyens. À l’inverse, les produits de Heartbreaker manquent parfois de moyens mais jamais de courage. J’ai vite remarqué que cela fonctionnait vraiment bien”, se rappelle Henk Nijhof Jr.

CORNET OBOLENSKY, CE GÉNIAL ARRIÈRE-PETIT-FILS.

L’exceptionnel Cornet Obolensky, sacré champion d’Europe par équipes en 2011 avec l’Allemand Marco Kutscher et lui-même père d’une ribambelle de cracks (lire encadré), n’est pas le seul exemple de réussite de ce croisement. Citons d’abord ASB Conquistador (BWP, ex-Bush van de Heffinck), très performant sous la selle de l’Américain Karl Cook et du Français Éric Navet, mais aussi père d’Oaks Redwood (AWHA, mère par Verdi) et Yandoo Oaks Constellation (AWHA, mère par Jalisco B), grands artisans de la sixième place de l’Australie aux JEM de Tryon avec Billy Raymont et Jamie Kermond. Citons son propre frère, l’étalon Utrillo van de Heffinck, bien valorisé par le Français Walter Lapertot. Mentionnons aussi Via Volo van de Molendreef (BWP), très grande gagnante avec l’Américaine Beezie Madden, l’étalon Cordess 2 (KWPN), classé jusqu’à 1,60m avec les Allemands Philipp Weishaupt et Christian Kukuk, l’étalon Darlon van Groenhove (BWP), performant à cette même hauteur avec le regretté Vénézuélien Andres Rodriguez et l’Américaine Clémentine Goutal, la jeune Ebolensky (KWPN), en passe d’accéder au très haut niveau avec le Britannique Matthew Sampson, ou encore Chaiton F (Z), septième du dernier Mondial des cinq ans. Selon Henk Nijhof Jr., “Heartbreaker aurait représenté un réel atout pour le Holstein (stud-book où il n’a jamais été approuvé, ndlr). Du point de vue de l’élevage, il reste le meilleur fils de Nimmerdor. À vingt-neuf ans, il est en très grande forme. Il pourrait même se présenter à l’approbation demain sans aucun souci!”

Grâce à l’excellence de sa descendance belge, Heartbreaker a été nommé Ambassadeur du BWP en 2007. En outre, on lui connaît une trentaine de fils étalons éprouvés au moins à 1,55m. Parmi eux figurent Harley VDL, père de Charly Chaplin S (KWPN, mère par Burggraaf), classé à 1,60m avec l’Irlandais Darragh Kenny, Arlando (KWPN, mère par Animo), avec Roelof Bril, et Doloris (KWPN, mère par Capiletto), à peine moins performante avec le Mexicain Santiago Lambre. On citera évidemment Quasimodo van de Molendreef (BWP, mère par Lys de Darmen), valorisé à haut niveau par David Jobertie et père de Comte d’Arsouilles (BWP, mère par Apache du Forest), partenaire olympique de l’Ukrainien Oleksandr Onyshchenko, et surtout de Hello Sanctos van het Gravenhof (sBs, mère par Nabab de Rêve), qui s’est construit l’un des plus beaux palmarès de la décennie avec le Britannique Scott Brash. On mentionnera aussi le BWP Action Breaker, propre frère de Quasimodo, performant jusqu’au plus haut niveau avec l’Espagnol Sergio Álvarez Moya et père de Dobra de Porceyo (CDE, mère par Indorado), classée à 1,60m avec l’Américaine Schuyler Riley, Fixdesign Funke van’t Heike (BWP, mère par Grandeur), avec l’Italienne Giulia Martinengo Marquet, ou encore de Just do it R (CDE, mère par Baloubet du Rouet), très performant à 1,55m avec le Français Pierre-Alain Mortier.

Parmi les fils de Heartbreaker figure aussi Padinus (KWPN, mère par Grannus), qui a donné Admara 2 (KWPN, mère par Murano), très grand gagnant et cinquième des JEM de Tryon avec le Colombien Carlos Enrique López Lizarazo, Edinus (KWPN, mère par Colombus), très bon à 1,60m avec le Néerlandais Marc Houtzager, Aristoteles V (KWPN, mère par Lux), encore meilleur avec l’Américain Jonathan McCrea, Argos (KWPN, mère par Concorde), classé à 1,60m avec le Brésilien Doda de Miranda, Dante (KWPN, mère par Mr. Blue), avec le Néerlandais Vincent Voorn, Wonder Why (KWPN, mère par Sandstone Laurin), avec le Britannique Spencer Roe, ou encore Atlantis T (KWPN, mère par Guidam), avec le Canadien Brian Morton. Sans oublier Orlando van de Heffinck (KWPN, mère par Darco), brillant sous la selle du Belge Dirk Demeersman et de l’Irlandais Darragh Kerins, et père d’Ohlala (SWB, mère par Cardento), géniale sous la selle de l’Américaine Lauren Hough, Boomerang (KWPN, mère par Lux), très bon avec Ben Maher, Milano (SWB, mère par Pomme Royal), meilleur encore avec l’Américaine Mandy Porter, ou encore de Giljandro van den Bosrand (BWP, mère par Clinton), performant avec l’Ukrainien René Tebbel, le Danois Andreas Schou et le Suédois Henrik von Eckermann. Pour autant, le meilleur de tous les fils étalons de Heartbreaker reste le génial Toulon (BWP, mère par Jokinal de Bornival), dernier crack du regretté Français Hubert Bourdy, auquel il a notamment offert le Grand Prix CSI5* de São Paulo, se classant également deuxième de celui du Masters de Calgary. Le bai a déjà produit plus de soixante chevaux ayant évolué à 1,60m! 

UN PÈRE DE MÈRE EN OR MASSIF 

Non seulement Nimmerdor brille à travers ses fils, mais il est également devenu un excellent père de mères. Issu de sa fille Cemeta, le chef de race Kannan (KWPN, Voltaire) en est certainement le meilleur et plus célèbre exemple. «Wozieta (KWPN, Le Mexico), la grand-mère de Kannan, était une jument très classique. Ses deux filles de Nimmerdor, Cemeta et Nameta, étaient toutes deux très modernes et très volontaires. Cette lignée maternelle apportait déjà une grande qualité de saut, et Nimmerdor y a ajouté de l’énergie. À première vue, Kannan a l’air très tranquille, mais il déborde d’énergie, et il transmet à ses descendants un très bon caractère, du cadre et de la volonté», vante Wobbe Kramer, son naisseur. Performant au plus haut niveau avec Michel Hécart, qui l’a monté aux Européens de 2005 à San Patrignano, Kannan a produit un nombre insensé de champions, particulièrement en France, en Belgique et en Allemagne. Avant de prendre en charge la carrière de reproducteur du grand bai, Arnaud Évain, président du Groupe France élevage, avait déjà été séduit par son grand-père maternel. «Nimmerdor est l’un des premiers étalons étrangers dont nous avons distribué la semence congelée, dès 1986 ou 1987, grâce à Equitechnic. Comme Voltaire, il était en train de devenir un reproducteur de premier plan. Peu de temps après, nous avons commencé à utiliserla semence d’Ahorn, son premierfils disponible en France, dont la semence congelée était de meilleure qualité. Nimmerdor a eu une influence énorme sur l’élevage européen. Selon moi, la force mentale qu’il transmet à sa production reste sa meilleure qualité.» Après De Sjiem et Hickstead, à travers une autre de ses filles Jolanda, le chef de race a laissé un troisième champion olympique, Big Star (KWPN, Quick Star), couronné en 2016 à Rio avec le Britannique Nick Skelton, déjà médaillé d’or par équipes quatre ans auparavant à Londres et vainqueur lui aussi du Grand Prix d’Aix. En tant que père de mères, Nimmerdor compte plus de quatre-vingt-dix chevaux ayant concouru à 1,60m. Et il est aussi l’arrière-grand-père maternel de Sterrehof’s Calimero (KWPN, Quidam de Revel x Libero H), dix-huitième des derniers JEM avec Marc Houtzager. «Je trouve génial de voir à l’œuvre tous ses descendants. Beaucoup d’étalons ont été oubliés, mais Nimmerdor reste très présent dans les pedigrees des champions. Il a vraiment été fantastique, il a tout fait pour moi. S’il était en vie, il saillirait encore de nombreuses juments, car il répond tout à fait aux critères qu’attendent aujourd’hui les éleveurs», s’enthousiasme Wiepke van de Lageweg. «Le saut d’obstacles a beaucoup évolué ces dernière années. Les chevaux doivent être plus intelligents, rapides et agiles. À ce titre, Nimmerdor était en avance sur son époque et, encore aujourd’hui, nous tirons profit des traits qu’il a légués à notre élevage, à commencer par son excellente technique de saut. Le KWPN n’a pas connu d’étalons comme lui ces quinze dernières années», ajoute Wobbe Kramer. «Il figure parmi les étalons qui ont eu le plus d’influence sur les autres studbooks», conclut Bernard Le Courtois.

Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX heroes n°108.