“L’objectif majeur reste les Jeux olympiques, que j’espère voir maintenus”, Jérome Guery

Jérome Guéry n’a presque pas eu le temps de retrouver sa Belgique au retour d’une première tournée à Oliva qu’il s’apprête déjà à filer au Sunshine Tour de Vejer de la Frontera pour y retrouver ses meilleurs chevaux. Trente-sixième meilleur cavalier au monde selon la hiérarchie publiée par la Fédération équestre internationale, le jeune quadragénaire aimerait une stabilisation de la situation sanitaire pour que le sport reprenne ses droits. Il espère notamment s’envoler aux Jeux olympiques de Tokyo cet été ou défendre l’or par équipes décroché aux Européens Longines de Rotterdam il y a deux ans. Sans pour autant oublier de préparer sa prometteuse relève… 



Aujourd'hui âgé de quinze ans, Quel Homme de Hus est toujours le meilleur cheval de Jérome Guéry.

Aujourd'hui âgé de quinze ans, Quel Homme de Hus est toujours le meilleur cheval de Jérome Guéry.

© Sportfot

Vous avez passé le début de l'année au Mediterranean Equestrian Tour d'Oliva, en Espagne, où vous avez concouru avec différentes montures. Quel bilan tirez-vous de cette première étape de la saison ? 

Comme j'en ai l'habitude chaque année, j'aime énormément me rendre aux tournées d'Oliva et du Sunshine Tour, à Vejer de la Frontera. Les concours à Oliva ont commencé en janvier, et j'y ai principalement amené des jeunes chevaux, qui ont déjà au moins huit ans, mais qui sont encore peu encore expérimentés pour le grand sport. Le bilan est très positif, les chevaux ont très bien sauté. La souche de Flora (de Mariposa, ndlr) a en particulier brillé à Oliva, c'était une excellente mise en route pour ces chevaux (Nestor et Nora de Mariposa, deux petits-fils de la regrettée championne olympique par équipes, ndlr). La saison a donc très bien commencé, tout cela est de très bonne augure pour la suite, mais ce n'est qu'un début. J'ai maintenant hâte de retourner en CSI 5* et que tout cela reprenne dans la sérénité. 

Vous prenez maintenant la route du Sunshine Tour de Vejer de la Frontera. Qu'attendez-vous de cette tournée ?

Je suis rentré une semaine et je repars directement avec des chevaux un peu plus expérimentés au Sunshine Tour, pour trois semaines de concours également. Je vais y emmener des chevaux déjà plus aguerris, tels que Quel Homme de Hus, BCO Milton Z, Diego et deux nouvelles montures qui m'y rejoindront. L'objectif principal de Vejer est pour moi de remettre en route mes chevaux. Je n'ai en effet pas fait de saison indoor, les derniers concours avec mes bons chevaux remontent à l’Hubside Jumping de Grimaud (qui s’est conclu en octobre, ndlr). Depuis, ils n'ont plus beaucoup sauté. J'utilise donc ces tournées d'Oliva et de Vejer pour les remettre en route, mais je tiens à les ménager, bien qu’ils doivent être prêts pour les concours suivants. Le but est qu'ils concluent le Sunshine Tour dans la meilleure forme physique possible, afin qu’ils soient prêts à prendre part à des échéances plus importantes. La gestion des chevaux sur ce genre de tournée est donc capitale, mais c'est quelque chose que j'aime et qui fait réellement partie de mon organisation.

Compte tenu de la situation sanitaire actuelle, le maire de Vejer de la Frontera a exprimé une grande méfiance quant à la tenue de ce concours, qui accueille des cavaliers de plus de quarante nationalités différentes. Comprenez-vous cette appréhension ?

Je pense que la situation sanitaire créée de la peur et de l'angoisse chez tout le monde, et je peux concevoir que les habitants de Vejer soient un peu inquiets qu’un événement qui accueille autant de monde ait lieu. Mais comme à Oliva, le Sunshine Tour a mis en place des règles très strictes et le nombre de personnes sur le site est très limité : un groom par cavalier, et tous doivent présenter un test négatif rentrer sur le site. De plus, les restaurants sont fermés. C'est sûr que la crise de la Covid-19 perturbe beaucoup de choses, mais je suis heureux que des événements comme celui-ci soient maintenus pour nous permettre de continuer à avancer. Je suis en faveur de cette optique : aller de l'avant avec bien sûr des règles sanitaires pour la protection de chacun. Mais on ne peut pas continuer à supprimer les événements, sinon on va connaître une année semblable à la dernière. J'espère vraiment qu'il y aura plus de concours cette année, que le vaccin va soulager les esprits et que les choses pourront revenir à la normale le plus rapidement possible. 



“Je prépare les Jeux depuis deux, voire trois ans avec Quel Homme”

Vous avez très récemment annoncé que votre étalon Quel Homme de Hus était désormais disponible à la production. Quelles sont ses principales qualités ? Connaissez-vous sa production ? 

En effet, Quel Homme a déjà une belle production qui est néanmoins assez jeune. Il compte plus de soixante produits et on attend à ce jour presque cent quatre-vingt poulains. Les qualités principales de Quel Homme sont bien sûr ses moyens, son respect, ainsi que son mental. Il semble les transmettre aux poulains. Même si les plus âgés ont seulement trois ou quatre ans, on voit déjà en liberté qu'ils montrent beaucoup de similitudes avec Quel Homme : ils ont un bon passage de postérieurs, un bon dos, sont très respectueux, ont un excellent mental et de gros moyens. Bien sûr, ils ont également hérité de l'esprit compétitif de Quel Homme. 

Vous concourez également avec les prometteurs Nestor et Nora de Mariposa (en vidéo ci-dessous). Voyez-vous une véritable ressemblance avec leur mère Ilena de Mariposa, que vous avez montée, ou avec leur grand-mère, la formidable et regrettée Flora de Mariposa ?

Je n'ai jamais monté Flora mais j'ai eu l’occasion de monter Ilena (propriété du haras de Clarbec et passée sous la selle de l’Aquitain Olivier Robert en 2020, ndlr) et Margriet de Mariposa (qui évolue avec Patricia Guéry, l’épouse de Jérome Guéry, jusqu’à 1,45m, ndlr), deux de ses filles que connais bien. Je dois dire que Nora et Nestor sont très différents. Bien qu'ils soient nés d'un transfert d'embryons et qu’ils soient issus d’une double ovulation, qu’ils aient exactement le même âge et le même père, ils sont pourtant très différents. Ils ont cependant en commun un respect incroyable. Nora ressemble beaucoup à Flora, déjà du point de vue de sa robe, mais également compte tenu de ses aptitudes. J'aime visionner les parcours de Flora et je vois beaucoup de similitudes, dont un respect énorme et une volonté incroyable de sauter. Pour le moment, nous avons du mal à évaluer les moyens exacts de Nora, mais nous voyons qu’elle réalise tout avec facilité. Il s’agit de l’une des grandes qualités de Flora : on ne voyait pas toute la force qu’elle avait, mais elle était très appliquée et montrait énormément de volonté et de respect. Nora est une jument guerrière, qui veut toujours bien faire. Nestor est un peu différent. Il a une technique un peu moins classique et montre plus de force, tout en ayant énormément de qualités. Il n’a en revanche pas la même mentalité que Nora, car il faut le soutenir plus et qu’il a moins un tempérament de geuerrier. Je suis très heureux d'avoir cette souche chez moi, je commence à bien connaitre ces produits et je m’estime très chanceux.

Avec quelles montures espérez-vous pouvoir concourir au plus haut niveau cette saison ?

À ce jour, Quel homme est mon premier cheval, celui qui tire l'écurie vers le haut. J'ai beaucoup d'espoir en Milton, qui a désormais dix ans. Il possède énormément de qualités et des qualités considérables, qu’il pourrait peut-être déjà montrer cette année aux championnats d'Europe. Concernant les plus jeunes chevaux, je pense que Nora pourra aussi m'amener loin. Même si on ne peut pas encore jauger sa force, elle a tellement de volonté et de respect que je pense qu'elle pourra être utile dans le futur. 

Avez-vous intégré de nouveaux chevaux à vos écuries ? 

Oui, plusieurs chevaux sont arrivés. Il y en a avec lesquels j'avais pris contact l’année dernière, mais il y a eu une histoire avec le propriétaire mexicain José Alfredo Hernández Ortega (cinq chevaux, dont Bco Milton Z et Diego, s’étaient évaporés dans la nature mi-juin alors qu’ils étaient stationnés au haras belge de Ligny, avant d’être retrouvés en Irlande, ndlr). Je pense que nous verrons Milton et Diego prendre part à de belles compétitions cette saison. Ils ont réintégré mon écurie et vont donc reprendre les concours au Sunshine Tour. Un nouveau cheval va atterrir la semaine prochaine du Mexique et me rejoindra directement à Vejer. Je viens aussi d'investir dans une jument de huit ans avec énormément de potentiel. Je pense que tous ces nouveaux chevaux vont briller cette saison et dans les années à venir. 

Plus globalement, quels sont vos projets pour l'année 2021 ?

Je rentrerai après le Sunshine Tour pour le CSI 5* de Bois-le-Duc et j'espère que la saison reprendra normalement par la suite. Ce sont des concours qui me tiennent à cœur et j'aimerais y réussir une belle performance. Les objectifs en concours extérieurs seront évidemment les CSIO 5* de La Baule, Rome et Aix-la-Chapelle. Bien sûr, l’objectif majeur reste les Jeux olympiques de Tokyo, que j’espère voir maintenus. Je me prépare depuis deux, voire trois ans avec Quel Homme pour cette échéance. Les prochains mois seront consacrés à l’optimisation de sa forme en vue de ce rendez-vous. Je pense également aux championnats d'Europe (de Riesenbeck, chez Ludger Beerbaum, ndlr) qui suivront.