Face à la rhinopneumonie, quelles précautions prendre pour protéger les chevaux?

Prévention, isolement, symptômes, gestes barrières, etc. Alors qu’un épizootie de rhinopneumonie équine de type EHV-1 frappe l’Europe, comment les cavaliers, soigneurs et propriétaires doivent-ils se comporter pour ne pas risquer de contaminer leurs chevaux? Comment réagir lorsqu’un équidé est testé positif dans ses écuries? Le Dr Christel Marcillaud-Pitel, directrice du réseau d’épidémiosurveillance des maladies équines, livre des conseils ô combien essentiels en cette période si angoissante.



Quelle sont les différences entre la rhinopneumonie et la gourme ou la grippe, par exemple? 

La rhinopneumonie équine ou herpèsvirose HEV-1 partage de nombreux symptômes avec la gourme ou la grippe, excepté pour les symptômes neurologiques. Cependant, on la différencie la grippe grâce à l’absence de signes oculaires (sécrétions) et à un abattement plus marqué. Quant à la gourme, elle peut provoquer des abcès, mandibulaires et rétropharyngiens, sous l’auge, par exemple. 

Comment se transmet la rhinopneumonie?

Les humains, les autres mammifères et les insectes peuvent-ils être des vecteurs du virus? Les humains et les chiens peuvent effectivement transmettre le virus. Les mains humaines, ainsi que les nez et les pattes de nos compagnons quadrupèdes peuvent se retrouver en contact avec des sécrétions et disséminer le virus partout où ils passent. Pour ce qui est des insectes, c’est peu probable même si aucune n’étude n’a encore été réalisée à ce sujet. 

Quels sont les bons gestes à adopter en cas de suspicion de contamination? 

Dans le cas où un cheval présenterait un état de santé suspect, il est impératif de l’isoler loin des chevaux sains, autant que faire se peut. Il faut impérativement contacter son vétérinaire pour effectuer un premier examen et des prélèvements afin de rechercher la présence d’un agent pathogène (facteur capable d’engendrer une lésion ou de causer une maladie chez les animaux ou les plantes, ndlr). Il faut veiller à limiter au maximum les mouvements de chevaux au sein de sa structure, comme en dehors, afin d’endiguer le plus possible le processus de contagion. Pour suivre au plus près l’état de santé de son cheval durant la période d’incubation de la maladie, qui s’étend de sept à dix jours environ, il est recommandé de prendre la température de l’animal une et deux fois par jour. L’hyperthermie, ou fièvre, peut être un signe précurseur de la défense de l’organisme contre une maladie. 

Que faire lorsque la contamination est avérée? 

Il faut maintenir le ou les chevaux atteints à l’isolement et stopper tout flux dans et hors de la structure, ou au moins essayer de les limiter au strict nécessaire dans le cas où l’isolement ne pourrait pas être strict. Comme en phase de suspicion, il est recommandé de prendre la température du ou des animaux concernés. Lorsque les soins doivent être prodigués à l’ensemble des chevaux, dans le cas où il n’est pas possible de définir une équipe ou du personnel en charge des animaux malades, il faut commencer par les chevaux sains et les poulinières, ce qui permet de limiter au maximum la propagation du virus. 

L’isolement des chevaux est-il efficace si les premiers symptômes se sont déjà déclarés? 

Si les symptômes sont repérés rapidement, oui, il peut être efficace. Si l’on repère du jetage ou des sécrétions nasales, il faut immédiatement isoler l’animal. Il peut être trop tard pour ses voisins d’écurie ou ceux installés dans les boxes en face du sien si l’allée est étroite mais cela évitera que le virus se dissémine dans toute l’écurie. C’est une maladie très contagieuse, surtout de nez à nez. Avec une réaction rapide, et un isolement des voisins, considérés comme cas contact, ainsi que de ceux qui partageraient du matériel avec le sujet malade (matériel de travail, seaux, etc.), on peut contenir l’épidémie.



Attention aux vêtements et chaussures

 Dr Christel Marcillaud-Pitel, directrice du réseau d’épidémiosurveillance des maladies équines (RESPE).

Dr Christel Marcillaud-Pitel, directrice du réseau d’épidémiosurveillance des maladies équines (RESPE).

© Thierry Houyel/Calvados

Est-il nécessaire de désinfecter ses chaussures et vêtements? 

La rhinopneumonie se propage essentiellement par les sécrétions d’un cheval malade et par projection. Des agents pathogènes peuvent se retrouver sur les vêtements et chaussures. Il est donc fortement recommandé de ne pas s’occuper d’un cheval sain avec des vêtements et des chaussures qui auraient pu être en contact avec les chevaux malades. Dans l’idéal, des pédiluves doivent être mis en place dans les zones d’isolement ou, a minima, des moyens pour pouvoir désinfecter ses chaussures. 

Si un cheval est infecté, doit-on décontaminer toutes les écuries ou seulement l’endroit où il était?

Il faut désinfecter l’intégralité des locaux et créer un vide sanitaire avant toute réintroduction d’un cheval infecté. Ce protocole ne se limite pas seulement aux locaux. Il s’applique aussi aux camions ou vans, partout où des chevaux peuvent se trouver après infection.

Que faire si l’on doit déplacer d’une écurie à une autre? Quelles précautions mettre en place?

Il est absolument impératif de limiter au maximum les déplacements de chevaux en cas de suspicion et de complètement stopper les déplacements en cas de contamination avérée. S’il y a un risque de contact avec un cheval qui revient de Valence ou de gros concours ayant eu lieu ces dernières semaines, il est recommandé de prendre un certain nombre de précautions: prise de température, éviter les contacts avec les autres chevaux, nettoyer le matériel, désinfecter ses mains, ainsi que le véhicule. En cas de location du véhicule, une désinfection doit être effectuée avant et après le transport du ou des chevaux. Il est également conseillé de se renseigner précisément auprès de l’écurie de destination.

Est-il possible d’utiliser le même matériel pour deux chevaux? 

Le matériel doit être rigoureusement désinfecté. Autant que possible, il est conseillé d’utiliser du matériel à usage unique ou réserver du matériel pour chaque cheval contaminé.

Comment prévenir les herpèsviroses?

Ce sont des mesures classiques de prévention: ne pas partager son seau avec un autre cheval en concours, éviter ou limiter les contacts d’autres cavaliers ou visiteurs avec son cheval car les mains des humains peuvent transporter la maladie et bien se renseigner sur les éventuels chevaux qui arrivent aux écuries. Il n’y a malheureusement rien de plus à faire. 

Des chevaux peuvent-ils être immunisés contre ce virus? 

Il n’y a pas de résistance particulière, la seule qui peut être efficace reste la vaccination.

Le test PCR est-il assez fiable pour détecter l’infection?

C’est la grande question. Tout dépend de quand le test est effectué par rapport à l’infection et comment il est fait (PCR, prélèvements sanguins ou autres). En début d’excrétion, action par laquelle les déchets de l’organisme sont rejetés en dehors et en cas de symptômes neurologiques, la charge virale est très faible, donc il faut des tests très précis. En phase ascendante de l’infection, la grande majorité des tests reste efficace pour détecter la maladie.