“Intégrer l’équipe de France pour les championnats d’Europe serait magnifique”, Juliette Faligot

Tôt hier matin, Juliette Faligot a retrouvé ses écuries familiales, à Bailleul dans le Nord, après trois semaines de compétition à Vilamoura, au Portugal. La cavalière de trente-cinq ans a accepté de revenir sur la belle performance d’Arqana de Riverland, qui lui a offert une troisième place dans le Grand Prix CSI 4* de dimanche dernier. Elle aborde également l’organisation de son voyage retour, long de 2.100 km et effectué sans étape en raison de l’épizootie de rhinopneumonie équine, la suite sa saison et sa grande motivation à l’idée de porter la veste bleue. Entretien.



Juliette Faligot est ici en selle sur Fénomène des Rêves, six ans, récemment arrivé dans ses écuries.

Juliette Faligot est ici en selle sur Fénomène des Rêves, six ans, récemment arrivé dans ses écuries.

© Collection privée

Vous venez de terminer troisième du Grand Prix CSI 4* de Vilamoura avec Arqana de Riverland (SF, Cornet Obolensky x Diamant de Semilly), une semaine après avoir déjà pris la troisième place d’un Grand Prix CSI 3*. Quelles ont été vos sensations?

Encore une fois, elle m’a tout donné. C’est une jument incroyable. Quand elle entre en piste, elle sait pourquoi elle est là. Au fil des semaines, elle s’est de mieux en mieux comportée. Dimanche, elle a encore incroyablement bien sauté et s’est encore montrée bien fraîche après trois semaines de concours durant lesquelles elle a confirmé sa régularité (le couple s’est classé dans quatre épreuves sur huit et n’a guère manqué que son premier Grand Prix CSI 3* de l’année, concédant treize points, ndlr). Tout cela est positif pour la suite. 

Quel bilan tirez-vous de vos trois semaines de compétition avec les quatre autres chevaux que vous avez emmenés: Chanel de la Ronelle (SF, Tip Top de la Ronelle x C-Indoctro), Bélino de la Romaine (SF, Ogrion des Champs x Véloce de Favi), Fénomène des Rêves (SF, Sioux du Godion x Calvaro) et Fairly d’Iscla CDL (SF, Con Air x Le Tot de Semilly)? 

Chanel, qui était déjà dans mes écuries l’an passé, n’a pas très bien débuté sa saison, mais elle s’était légèrement blessée au dos avant de partir, donc je pense qu’elle n’était pas encore à 100% physiquement. Bélino est un cheval que je viens juste de récupérer. Cette série de concours m’a donc permis de le découvrir. Fénomène des Rêves, six ans, vient également d’intégrer mes écuries, donc ces trois semaines m’ont permis d’avancer avec lui. Enfin Fairly, également âgée de six ans, est une jument que je monte depuis 2020. Compte tenu de la crise sanitaire, nous avions sauté peu de parcours. Au Portugal, elle s’est montrée très performante et régulière. Sur huit parcours, elle s’est classée six fois. Elle est particulièrement compétitive, très respectueuse et montre beaucoup de sang. Je ne peux pas encore dire jusqu’où elle ira, ni juger ses moyens, mais ce qu’elle fera, elle le fera bien. 

Vous venez de rentrer chez vous, à Bailleul, dans le Nord (interview réalisée hier matin, ndlr). Compte tenu de l’épizootie de rhinopneumonie équine, comment avez-vous organisé ce voyage depuis le Portugal? Et quelles mesures avez-vous prises à votre retour dans vos écuries, bien qu’il n’y ait officiellement eu aucun cas à Vilamoura?

L’étape que nous devions effectuer près de Biarritz a été annulée; nous avons appris la semaine dernière qu’il n’était plus possible de s’y arrêter. Compte tenu de ce changement de programme, j’ai fait venir mon cavalier maison pour que nous ayons un troisième chauffeur. Et nous avons décidé d’effectuer tout le trajet d’une seule traite, ce qui n’était pas une mince affaire, car nous avions plus de 2.100 kilomètres à parcourir. Nous avons mis vingt-neuf heures à rentrer. Vu la longueur du trajet, avec les vétérinaires sur place, nous avons fait perfuser les chevaux avant de partir, afin de les réhydrater. Nous avons laissé les cathéters en place au cas où nous aurions eu besoin de les perfuser à nouveau, ce que nous n’avons pas à faire car ils ont bien bu et mangé. Nous nous sommes arrêtés régulièrement pour contrôler qu’ils allaient bien. Nous avons également reçu des consignes, et Sophie Dubourg (directrice technique nationale, ndlr) nous a transmis le contact du vétérinaire de l’équipe de France (Jérôme Thévenot, ndlr), dont nous n’avons heureusement pas eu besoin.

Nous avons essayé de faire au mieux et tout s’est bien passé. Trouver des étapes à la dernière minute, sans savoir qui s’y est arrêté, quand et comment… Je ne voulais pas prendre le risque de contaminer mes chevaux lors d’une étape. En tout cas, nous avons eu la chance de pouvoir terminer notre tournée au Portugal, où il n’y a pas eu de cas de rhino. Je remercie d’ailleurs António Moura, organisateur du concours de Vilamoura, grâce à qui nous avons pu continuer à concourir en toute sécurité, dans notre bulle, sans accepter de nouveaux chevaux.

À la maison, il est assez facile d’isoler les chevaux que nous avons ramenés, puisque nous avons une écurie dans un corps de ferme situé à l’écart. Nous avions donc prévu d’y placer nos cinq chevaux par précaution. Nous sommes arrivés à 5h30 ce matin et mon vétérinaire est tout de suite venu prendre leur température et les ausculter, vérifier qu’ils tous étaient bien hydratés, et enlever les cathéters. Pour l’instant, je touche du bois, tout va bien. 

 



“Nous allons évoluer un peu à tâtons”

Avec Arqana de Riverland, Juliette Faligot a connu une belle fin de saison 2020.

Avec Arqana de Riverland, Juliette Faligot a connu une belle fin de saison 2020.

© Sportfot

Comment se dessine la suite de votre saison, une fois que les compétitions auront repris? 

L’arrêt des compétitions perturbe un peu mes plans puisque je devais normalement enchaîner sur deux semaines de concours à Vejer de la Frontera, ce qui n’est plus possible. Mes objectifs à court terme sont le championnat de France Pro Élite (prévu du 22 au 25 avril à Marnes-la-Coquette, ndlr) puis le CSIO 3* du Touquet (du 6 au 9 mai, ndlr). Il faudra trouver un concours d’ici-là, peut-être l’Hubside Jumping de Saint-Tropez, mais nous n’avons pris aucune décision à ce sujet pour le moment. Nous allons devoir nous adapter pour construire un programme fiable avant ces deux échéances. Nous sommes proches de la Belgique, ce qui pourrait nous simplifier les choses. Pour autant, on ne sait pas si le CSI 2* de Bonheiden (qui a perdu une étoile, ndlr) aura lieu début avril comme prévu. Il y a également un CSI 2* programmé début avril à Sancourt, pas loin de chez nous, qui peut être une option. Nous allons y aller un peu à tâtons, en fonction de ce qui sera maintenu à la reprise. J’ai eu la chance de pouvoir remettre en route mes chevaux correctement. Si tout reprend comme prévu début avril, cela nous laisse trois semaines de repos, ce qui était prévu à notre retour. Cela ne chamboule pas totalement notre programme. 

Avec Arqana de Riverland, vous faites partie des couples qui se sont révélés en 2020. Quel bilan tirez-vous de cette saison, marquée par les bouleversements liés à la pandémie de Covid-19?

J’en suis très satisfaite car j’estime l’avoir bien finie. J’ai connu quelques Grands Prix pénalisés de quatre points à Canteleu, Deauville ou au Grand National de Villers-Vicomte, ce qui était un peu rageant. Finalement, les sans-faute sont arrivés à point nommé (avec une deuxième dans le Grand Prix CSI 4* de Saint-Lô, suivie d’un tour à quatre points dans la Coupe des nations du CSIO 3* de Vejer de la Frontera, ndlr). Après, organiser un programme s’est avéré compliqué, et cela s’est souvent fait à la dernière minute. Par exemple, lorsque j’ai pu concourir à Grimaud, Thierry Pomel m’a appelé le mardi à 18h pour que je sois sur place le mercredi à 14h pour la visite vétérinaire… alors que j’habite près de Lille! (Rires) Deux heures plus, je suis partie avec les chevaux. Et nous étions très contents de pouvoir disputer quelques beaux concours. Quand l’occasion se présentait, il fallait foncer!

Pensez-vous à l’équipe de France et aux championnats d’Europe de Riesenbeck, en septembre prochain? 

Forcément, cela me trotte dans un coin de ma tête. J’ai eu la chance de courir ma première Coupe des nations en novembre 2020 à Vejer de la Frontera, et ce fut une super expérience. Si je pouvais en vivre pleins d’autres, cela serait avec plaisir, et faire partie de l’équipe aux championnats d’Europe serait magnifique.



“Je dois continuer à travailler et à être performante”

Ici à Grimaud avec Juliette Faligot, Vérité Une Prince a rejoint les écuries de Pénélope Leprevost.

Ici à Grimaud avec Juliette Faligot, Vérité Une Prince a rejoint les écuries de Pénélope Leprevost.

© Sportfot

Vous avez intégré la liste provisoire de la Fédération française d’équitation pour les Jeux de Paris 2024. Cela a-t-il changé quelque chose pour vous? 

Je fais en sorte que non! (Rires) J’ai été très contente de voir mon nom apparaître sur cette liste. Pour autant, elle va évoluer deux fois par an, et 2024 est encore loin, il y a encore de l’eau à couler sous les ponts. J’ai cela en tête, mais je dois continuer à travailler et à être performante. Il ne faut pas s’arrêter à cela.

Pouvez-vous compter sur d’autres chevaux pour épauler Arqana dans les plus belles épreuves? 

Actuellement, pas vraiment. Vérité une Prince (SF, Number One d’Iso*Un Prince x Rosire) a quitté mes écuries pour celles de Pénélope Leprevost, ce qui me prive d’une bonne cartouche. Elle débutait à 1,50m et était performante. J’avais également Appy Days une Prince (SF, Dollar dela Pierre x Clair de B’Neville), qui a été vendue (à onze ans, l’alezane évolue désormais sous la selle du Syrien Shady Ghrayeb, ndlr). Il s’agit maintenant de créer de nouvelles collaborations, former d’autres chevaux, et trouver des propriétaires qui pourraient me faire confiance. Je travaille déjà avec l’élevage de la Ronelle, qui me confie ses jeunes chevaux et Chanel, qui poursuit sa progression, ainsi qu’avec le haras des Princes. Ce sont des jeunes de qualité, mais cela demande du temps.

Effectivement, Vérité Une Prince est désormais associée à Pénélope Leprevost, avec laquelle elle a terminé deuxième d’une épreuve à 1,50m au CSI 5* de Doha. Quel regard portez-vous sur cette nouvelle association?

Il a fallu que Pénélope apprenne à la connaître, car c’est une jument très spéciale. Elle a beaucoup de sang et il faut réussir à la canaliser. Apparemment, elle semble y arriver plutôt bien donc je suis contente. Lorsqu’ils partent, on préfère toujours que ses chevaux réussissent avec leurs nouveaux cavaliers. Cela montre que nous avons fait du bon travail!

Revivez le parcours initial de Juliette Faligot et Arqana de Riverland dans le Grand Prix CSI 4* de Vilamoura, disputé dimanche dernier.