En 2020, la Covid-19 a bel et bien frappé tous les acteurs de la filière équine

En 2020, la France a connu une récession massive, avec un recul historique de l’ordre de 8% de son produit intérieur brut. La filière “cheval”, comme de nombreuses branches de l’économie nationale, a été très fortement impactée par la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19. Cette pandémie a nécessité des modifications dans les comportements sociaux (distanciation physique, confinements, couvre-feu). L’État a demandé à l’IFCE de coordonner une analyse sur les effets de la pandémie sur le secteur “cheval”. Le Comité de filière, qui représente les différents segments de ce secteur riche d’une grande diversité, a travaillé à` cette synthèse et à une premier rapport d’étape publié hier.



La filière équine, comme de nombreuses branches de l’économie nationale a été très fortement impactée par cette crise de la Covid-19. L’Institut français du cheval et de l’équitation a coordonné une analyse commanditée par l’État sur les effets de la pandémie actuelle sur le secteur “cheval”. “La commande est intervenue très vite après le début du premier confinement. Dès le 25 mars 2020, le ministère de l’Agriculture avait indiqué son souhait que l’IFCE coordonne un rapport sur l’impact de la Covid sur la filière cheval. L’ensemble des acteurs s’est très rapidement mobilisé. C’est bien cela qui a été important dans cette crise: tous les acteurs se sont mobilisés pour répondre rapidement aux besoins de poursuite d’activités. Dès le 21 mars, par exemple, un premier protocole a été mis en place pour la poursuite des activités de reproduction. Ensuite, dès le 11 mai, les courses ont pu reprendre avec un protocole drastique, puis progressivement, les activités sportives professionnelles, les activités Jeunes Chevaux, puis les activités amateurs”, introduit Guillaume Blanc, directeur de l’accompagnement à la filière équine au sein de l’Institut français du cheval et de l’équitation.
Trois principaux points se dégagent de cette étude commanditée par l’État. “En premier lieu, le premier confinement a été perçu de façon très lourde par toutes les activités arrêtées, avec des pertes d’activités et de revenus de l’ordre de 80% dans certains secteurs. En deuxième lieu, l’été et l’automne ont été vécus comme une embellie, avec une forte reprise d’activités à tous les niveaux: dans les courses et les compétitions sportives en termes de nombre de chevaux présents, en termes de ventes également, et en termes de prospective, c’est-à-dire que tout le monde est reparti de façon très positive. Jusqu’à l’automne, on a même remarqué que les licenciés en Fédération française d’équitation étaient plus importants que l’année précédente (contrairement à tous les autres sports, ndlr), sûrement du fait qu’il s’agisse d’une activité distanciée par nature. En troisième lieu, le deuxième confinement a positionné la filière face à une pandémie de longue durée, ce qui s’est traduit par une forte baisse d’activité et surtout un manque flagrant de perspective d’avenir.”



Le sport toujours dans l’attente de la reprise des compétitions non professionnelles

Concernant le sport, la Fédération française d’équitation a chiffré la baisse des activités de compétition. Le tableau ci-joint montre des baisses “directes” de l’ordre de 40% avec 700.000 engagés en épreuves en moins soit 20,6 millions d’euros de perte. Cela ne prend pas en compte les pertes induites en termes de billetterie, d’exposition commerciale et de restauration générés en année normale par ces 700.000 partants. En outre, l’ensemble des circuits de sélection nationaux et internationaux a également été impacté: pas d’organisation de Jeux olympiques et paralympiques, peu de championnats continentaux ou nationaux. En ce qui concerne les départs en épreuves, l’année 2020 a été principalement marquée par une baisse importante sur les circuits Club, Poney et Amateur. L’autre tableau montre qu’on a compté 22% d’équidés en moins sur les circuits, impactant de fait le marché du poney et du cheval de sport et de loisir, des équidés à faible valeur ajoutée pour leurs producteurs. Les circuits club (-62%) et poneys (-56%) sont les plus touchés, mais le circuit amateur a perdu près de la moitié de ses participants (-49%)…

La période estivale a été plutôt positive avec les vacances des Français sur le territoire national. Cela s’est traduit par une forte reprise des licences à l’automne avec 210 000 licenciés mi-octobre, soit une croissance de près de 10%. “Cette dynamique positive, particulièrement marquée comparée aux autres sports, en lien avec de fortes actions de communication de la FFE et les besoins des consommateurs d’avoir des activités en extérieur, a été balayée par le second confinement. De plus, les animations généralement organisées à l’automne à l’attention des nouveaux adhérents n’ont pas pu avoir lieu et de nombreuses incertitudes pèsent sur l’accueil de l’ensemble des profils dans les établissements équestres. Depuis la mise en place des restrictions sanitaires, l’accueil a été différencié par publics et certaines préfectures ont appliqués des mesures plus restrictives. Sans oublier la réouverture des circuits de compétitions Amateur. Ces derniers conditionnent à la fois l’activité des établissements équestres, mais également le marché majoritaire que sont les équidés d’amateurs. Ce marché est à faible plus-value pour les producteurs. Aussi, les semaines ou les mois pendant lesquels les équidés resteront à la charge de leurs producteurs pourraient entraîner un déséquilibre structurel du marché du cheval en France, qui aura des impacts sur le long terme”, analyse l’IFCE. La FFE a estimé une baisse de 25% de son budget annuel du fait de la crise.

© FFE



Des indicateurs commerciaux inquiétants

Concernant le commerce de chevaux, selon l’Agence française du commerce des équidés (AFCE), le marché a connu un arrêt total pendant le premier confinement car les acheteurs ne pouvaient plus se déplacer pour essayer les chevaux et poneys. “Nous avons assisté à un rebond estival qui a été stoppé par le second confinement, beaucoup plus délétère pour les professionnels, car les éventuels acheteurs n’ont plus de perspective ni sur la reprise des compétitions amateurs, ni sur la possibilité de monter à cheval du fait des incertitudes sur d’éventuels re-confinements.” Les statistiques de changements de cartes d’immatriculation par l’IFCE-SIRE, habituellement utilisées pour suivre les tendances du commerce intérieur, ne peuvent pas être utilisées ici. “En effet, les changements de propriété déclarés au SIRE ont conjoncturellement augmenté du fait de la mise en place de l’aide exceptionnelle aux centres équestres. Les gestionnaires d’établissements équestres devaient justifier de la propriété des équidés pour lesquels ils demandaient l’aide de l’État et beaucoup ont profité de cette occasion pour régulariser leurs documents SIRE”, commente l’IFCE.

L’AFCE, représentant les professionnels du commerce des équidés de sport et loisir, indique que “le marché intérieur a bien fonctionné jusque fin octobre et qu’il est, depuis, presque totalement à l’arrêt. Le marché à l’export a subi la fermeture des frontières. Selon les marchés, européens ou internationaux, les professionnels ont vu leurs ventes baisser de 50 à 80%. Les ventes aux enchères ont élargi leur clientèle du fait de la distanciation imposée, mais sans augmentation du chiffre d’affaires. Selon la SHF, qui a mis en place SHF Market en 2013, “la fréquentation de ce service d’aide à la vente des équidés de ses adhérents croît régulièrement depuis sa création. Cependant en 2020, nous avons pu constater une baisse du nombre d’utilisateurs du site: 89.603 en 2020 contre 99.258 en 2019, soit une baisse de 11% du trafic. Cette baisse est équivalente (-11%) pour le nombre de vues du site: 1.448.311 en 2020 contre 1.636.710 en 2019. Nous avons aussi constaté un repli des utilisateurs “hors France” de -50%.”

L’AFCE a effectué une enquête auprès d’une trentaine d’adhérents, représentant près de 19 millions d’euros de chiffres d’affaires en 2019. Selon eux, “l’année 2020 a été marquée par un recul de 33% sur le marché intérieur, de 54% sur le marché à l’export qu’ils pouvaient atteindre et de 80% sur le marché international hors Union européenne. Lors des deux confinements, les professionnels du commerce ne pouvaient pas recevoir du public et des acheteurs potentiels. Le commerce à destination des acheteurs amateurs, représentant 80% de l’activité des professionnels, a donc cessé pendant ces deux périodes. Or, à l’instar des centres équestres, les professionnels du commerce, ainsi que les éleveurs ont stocké des chevaux sans pouvoir les commercialiser. Ils ont donc dû assumer les charges d’entretien des chevaux, sans pouvoir pour autant l’impacter sur le prix de vente, entraînant ainsi une perte sèche des acteurs du commerce. “L’AFCE et les membres qu’elle représente sont très inquiets quant à l’avenir de leur activité économique, basée principalement sur le commerce sport de loisir, regroupant les chevaux destinés aux cavaliers de niveaux Club et Amateur et/ou les activités d’extérieur. L’évolution de l’épidémie en 2021 reste préoccupante et ne permet pas d’envisager l’avenir économique et financier avec sérénité”, conclut le syndicat.

Les résultats présentés par l’IFCE ne sont encore qu’un rapport d’étape. En effet, l’étude se poursuit cette année, puisque la crise sanitaire est encore loin d’être réglée. “En ce qui concerne la poursuite de cette étude, en 2021, nous allons essayer de produire un nouveau rapport en fonction de l’évolution de la situation, et notamment de la pandémie. Tout d’abord, sur le premier semestre, nous analyserons la résilience de la filière, qui a été relativement impactée en 2020, afin de voir comment elle rebondit. À partir du moment où les conditions sanitaires redeviendront favorables, nous espérons une relance des activités de la filière”, conclut Guillaume Blanc. 

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