“Mes propriétaires m’ont énormément soutenu pendant ma convalescence”, Pierre-Alain Mortier

Éloigné des terrains de concours pendant plus d’un an en raison d’une grave blessure aux adducteurs, Pierre-Alain Mortier a pu reprendre la compétition fin février à Royan. Victorieux d’un Grand Prix CSI 1* dès sa rentrée, le Jurassien a encore dû ronger son frein durant l’arrêt imposé par l’épizootie de rhinopneumonie équine, avant se relancer mi-avril à Vichy. Dimanche, il a signé son retour au premier plan en se classant deuxième du Grand National de Barbaste avec son fidèle Just do It R, médaillé d’argent par équipes aux Jeux méditerranéens de 2018.Multitâches, celui qui dirige le sport-études du centre équestre de la Jument verte, à Courlans, site accueillant aussi un beau concours estival, mise sur un piquet de qualité pour retrouver le haut niveau. Et le 28 mars, il a été élu membre du comité fédéral de la Fédération française d’équitation, où il entend mener à bien le programme de la liste Mieux vivre l’équitation, conduite par Serge Lecomte, réélu président la semaine passée. Entretien.



Vous venez de terminer deuxième du Grand National de Barbaste avec Just do It R (CDE, Action Breaker x Baloubet du Rouet). Comment appréhendez-vous la reprise des concours?

De manière générale, je pense que nous sommes tous extrêmement contents de pouvoir retourner en compétition. Les conditions ont l’air de tenir, et nous commençons à pouvoir nous projeter davantage. Ce n’était pas forcément le cas il y a quelques semaines, alors je suis heureux de pouvoir commencer à réellement m’organiser plutôt que de devoir composer au jour le jour. Plus personnellement, je suis très satisfait par mes récentes performances, car je reviens de loin. J’ai dû arrêter la compétition pendant plus d’un an. Durant cette période, je n’ai pas pu monter à cheval du tout, en raison de blessures importantes. J’appréhendais donc un peu la reprise, vu que les derniers parcours de mes chevaux dataient de février 2020. Malgré la crise sanitaire, j’avais tout de même manqué un certain nombre d’événements. Je suis par conséquent ravi de voir que mes chevaux ont répondu présent pour ce retour à la compétition, dont Just do It R, qui a réussi deux sans-faute à Barbaste, terminant troisième du Grand Prix Pro 1 à 1,45m puis deuxième du Grand Prix Pro Élite à 1,50m.

Quels sont vos objectifs sportifs pour cette année?

Le principal est de rattraper le retard que j’ai accumulé en raison de ma convalescence. J’ai disparu de tous les classements, ce qui est frustrant compte tenu de l’excellente saison que j’avais réalisée en 2019. En ce début de saison, j’ai visé les étapes du Grand National. Désormais, ma prochaine échéance est le CSI 4* de Bourg-en-Bresse (du 20 au 23 mai, ndlr). À plus long terme, j’aimerais poursuivre ma progression et participer de nouveau à des CSI 5* ainsi qu’à des CSIO.

Vous avez porté les couleurs de la France à l’occasion de plusieurs Coupes des nations mais aussi des Jeux méditerranéens de Tarragone, en 2018, avec une médaille d’argent collective à la clé. Ambitionnez-vous de retrouver l’équipe tricolore?

À l’heure actuelle, je n’ai aucunement la prétention de participer à des championnats internationaux. Je ne me projette pas à ce point, même si j’ai de très bons chevaux qui assureront la relève de Just Do It dans quelques années. Ma blessure soudaine m’a fait prendre beaucoup de recul et constater que tout projet peut être bouleversé en un rien de temps. À ce jour, ce qui compte pour moi, c’est simplement de me rapprocher de mon niveau d’avant.

Sur quels autres chevaux pouvez-vous compter à présent? Parmi eux, lesquels vous semblent particulièrement prometteurs?

D’abord, je tiens à remercier mes propriétaires qui m’ont énormément soutenu alors que ma blessure m’empêchait de monter. Ils auraient tout à fait pu choisir de confier leurs chevaux à quelqu’un d’autre, y compris à de très bons cavaliers, mais ils m’ont fait confiance, et n’ont pas hésité à laisser leurs chevaux se reposer le temps que j’aille mieux. Grâce à eux, je dispose d’un excellent lot de chevaux de sept ans, dont Easy Star de Talma (SF, Quick Star x Opium de Talma), sur lequel je mise pour le haut niveau d’ici deux ans. De manière générale, tous les chevaux dont je dispose sont particulièrement compétitifs, et l’objectif est que nous avancions au mieux ensemble.

Pierre-Alain Mortier sur le podium du Grand National de Barbaste

Pierre-Alain Mortier sur le podium du Grand National de Barbaste

© PSV Morel / FFE



“J’ai à cœur de promouvoir le système mis en place par Serge Lecomte”

Parallèlement à votre carrière sportive, vous dirigez le sport-études de la Jument verte, à Courlans dans le Jura. Quels ont été et quels sont les impacts sur vos activités de la double crise sanitaire traversée par la filière équine?

Pour être honnête, je n’ai pas vraiment ressenti d’impact économique sur mon sport-études, car les élèves sont là toute l’année, crise sanitaire ou non. En revanche, l’absence d’échéance nous a troublé, jouant réellement sur le moral des jeunes. Tous viennent pour apprendre, certes, mais ce sont aussi des compétiteurs, alors rester à la maison n’est pas ce qui les motive le plus. Notre principal défi a donc été de les garder motivés. C’est pourquoi nous avons organisé de petits concours internes afin de recréer un semblant de dynamique de compétition. Évidemment, cela n’a pas été simple, mais nous avons fait de notre mieux, avec de la musique, des lots, etc.

En revanche, la crise sanitaire nous a incités à prendre davantage notre temps pour bien travailler les bases, notamment en dressage, ce que nous faisons un peu moins lorsque nous concourons tous les week-ends. Deux de mes élèves ont tout de même pu continuer la compétition puisqu’ils évoluent au niveau professionnel. Concernant la rentrée prochaine, nos effectifs sont presque au complet, mais nous sommes loin de nous reposer sur nos acquis.

Vous organisez également un beau CSI 3* estival, dans le cadre de Rock’n Horses, qui n’a malheureusement pas eu lieu en 2020. Qu’en sera-t-il cette année?

Nous organisons en effet un concours international tous les ans entre juillet et août, dont la particularité est d’être associé à un festival de musique. Hélas, nous avons dû l’annuler l’an dernier compte tenu des restrictions sanitaires. Nous espérons pouvoir le maintenir cette année, mais nous n’avons aucune garantie à ce jour concernant les concerts. Or, nous ne pouvons absolument pas imaginer les abandonner, car ils font tout le charme de ce concours! Nous attendons donc d’en savoir davantage sur les recommandations sanitaires dans le domaine artistique, notamment pour les jauges, la buvette, les conditions d’accueil, etc. Nous espérons pouvoir prendre notre décision dans les prochaines semaines.

Comment vous organisez-vous quotidiennement entre toutes ces activités?

Nous travaillons en famille, ce qui est primordial à mes yeux. Je pense que c’est l’une des clés de nos succès. Chacun a sa place, les rôles sont clairement définis même si chacun touche à tout. Personnellement, je porte les casquettes de cavalier et de coach. Je ne supporte pas la routine, j’aime que les choses bougent.

Fin mars, vous avez été élu au comité fédéral de la Fédération française d’équitation. Pourquoi avez-vous choisi de vous engager de cette manière?

Cet engagement résume assez bien tout ce que j’ai dit précédemment. J’ai plusieurs rôles: celui de compétiteur qui me permet de voir ce qui va bien ou non en concours, celui d’entraîneur qui me donne une expertise en matière d’enseignement, et celui de gérant d’un centre de vacances qui me permet d’être au contact de beaucoup de jeunes cavaliers de niveau Club. Cela me permet d’avoir une vision globale du monde de l’équitation, qui nourrit mon engagement auprès de la FFE.

Quels sujets souhaitez-vous porter et quelles sont vos priorités?

J’aimerais bien sûr apporter mes idées en ce qui concerne les concours de saut d’obstacles, mais je suis particulièrement porté sur le sujet de la formation et de l’accès à l’équitation. La transmission est pour moi un enjeu primordial et passionnant. Plus généralement, j’ai à cœur de promouvoir le système mis en place par Serge Lecomte depuis de nombreuses années, car il fonctionne extrêmement bien à mon avis.