La Suède définitivement impériale à Tokyo, où la France a rêvé d’or jusqu’au bout

L’équipe suédoise de saut d’obstacles a conquis l’or olympique pour la quatrième fois de son histoire, cet après-midi à Tokyo. Lors d’une finale où tous les scores ont été remis à zéro, puis d’un barrage haletant face aux États-Unis, Henrik von Eckermann, Malin Baryard-Johnsson et Peder Fredricson ont été grandioses avec King Edward, H&M Indiana et H&M All in de Vinck. Les Américains sont en argent, et les Belges en bronze. De son côté, la France a vécu une dernière journée en mode montagnes russes: après deux exceptionnels parcours de Simon Delestre et Mathieu Billot sur Berlux et Quel Filou 13, Pénélope Leprevost a été éliminée en selle sur Vancouver de Lanlore.



Quatre-vingt-dix-sept ans après son dernier triomphe, célébré en 1924, la Suède est redevenue championne olympique de saut d’obstacles, cet après-midi à Tokyo, en clôture du programme des épreuves équestres des Jeux de la XXXII? olympiade de l’ère moderne. Après l’avoir emporté en 1912 à Stockholm, chez elle, puis en 1920 à Anvers et en 1924 à Paris, la grande nation scandinave, qui comptait déjà quarante-deux médailles olympiques équestres avant le début de ces Jeux, n’avait plus gagné que l’argent, et une seule fois, en 2004 à Athènes. À l’époque, Malin Baryard-Johnsson et Peder Fredricson, associés à la géniale Butterfly Flip et au brillant Magic Bengtsson, n’étaient pas encore les stars qu’ils sont aujourd’hui. Si Peter Eriksson, alors en selle sur le brillant étalon Cardento, s’est quelque éloigné du très haut niveau depuis, Rolf-Göran Bengtsson (Mac Kinley), longtemps pilier de cette équipe, est toujours là. À Tokyo, le médaillé d’argent de 2008 a apporté son expérience à un collectif qui n’en manquait déjà pas tant il est toujours présent dans les grands rendez-vous. Et très solide depuis les Jeux de Rio 2016, où Peder et H&M All in de Vinck avaient décroché leur première médaille d’argent individuelle.

Cette constance, la Suède, en argent par équipes aux Européens Longines de 2017 à Göteborg, puis aux Jeux équestres mondiaux de Tryon, au terme d’un barrage perdu face aux États-Unis – tiens, tiens… –, la doit au talent de ses capitaines de route, ainsi qu’à la hargne et la solidité d’Henrik von Eckermann, fils spirituel de Ludger Beerbaum, qui a été de toutes les grandes campagnes depuis 2011. Elle le doit aussi à des chevaux dont la carrière est parfaitement gérée, à commencer par All in, médaillé d’argent individuel pour la seconde fois mercredi, et Indiana, tous deux propriété d’une héritière de l’empire H&M. Sans oublier King Edward, génial crack confié à Henrik par sa compagne, la Suissesse Janika Sprunger, à la faveur de sa grossesse. Enfin, parmi d’autres facteurs, elle la doit à un autre Henrik, nommé Ankarcrona, placé à la tête de l’équipe fin 2016, à seulement trente-sept ans, après une carrière honorable ponctuée par un seul et unique classement en Grand Prix CSIO 5*. Aujourd’hui, ce grand blond à l’allure juvénile est le sélectionneur des nouveaux champions olympiques!

Henrik von Eckermann et King Edward.

Henrik von Eckermann et King Edward.

© Scoopdyga



En quelques secondes, la France est passée de la possibilité de l’or à l’élimination…

Simon Delestre et Berlux.

Simon Delestre et Berlux.

© Scoopdyga

Même si les scores ont été remis à zéro, rien n’a pu empêcher les Vikings de croquer une médaille d’or qu’ils ont amplement méritée, ayant signé seize sans-faute et deux tours à quatre points en dix-huit tours, barrages compris! Cet après-midi, lorsque Malin et Indiana ont fauté sur l’oxer placé au milieu du triple, l’un des obstacles les plus fautifs de ce parcours digne d’une finale olympique, on a craint que le vent tourne pour les « bleu et jaune ». Alors que la France menait la danse de main de maître grâce aux deux parcours renversants de Simon Delestre et Mathieu Billot sur Berlux et Quel Filou 13, pénalisés tous deux d’un point de temps, eux luttaient au coude-à-coude avec la Belgique et les États-Unis.

Lors de la troisième et dernière rotation, les Diables Rouges ont encaissé deux fautes inhabituelles – mais pardonnables sur un parcours si exigeant – de Grégory Wathelet et Nevados S sur le milieu du triple et l’entrée du second double, placé en 12. À cet instant, on s’est dit qu’ils avaient peut-être tout perdu, d’autant qu’on n’a compté “que” quatre points dans la foulée pour McLain Ward et Peder Fredricson, associés à Contagious et All in. Avant le barrage revanche des JEM de 2018, dont on ignorait encore pour quelles médailles il opposerait Américains et Suédois, la France avait en main la possibilité de mettre tout le monde d’accord et de conserver son titre, déjouant quelque peu les pronostics. Baji Koen, la planète équestre et toute la France ont alors les yeux rivés sur Pénélope Leprevost et Vancouver de Lanlore. Hélas, après deux sauts sans histoire, le couple pèche sur l’oxer 3a. Devant l’impossibilité de sortir de ce premier double, la Normande effectue une longue volte, le temps pour le personnel de remonter l’obstacle renversé. Malheureusement, à son retour, Vancouver refuse de le sauter. En quelques secondes, la France est passée de la possibilité de l’or à l’élimination. Si la Fédération équestre internationale souhaitait du “drama” pour ravir les diffuseurs audiovisuels, elle a été servie…

C’est donc pour l’or que les deux meilleures nations du jour se sont affrontées. Lors de cette véritable séance de tirs aux buts, on a assisté à six sans-faute, tous rapides, et la Suède a finalement coiffé au poteau les États-Unis par 122’’9 contre 124’’2. Une issue qui a le mérite d’être conforme à la réalité du sport que ces Jeux ont offert cette semaine, malgré une formule qu’il faudra clairement revoir…

Les résultats

Malin Baryard-Johnsonn et H&M Indiana.

Malin Baryard-Johnsonn et H&M Indiana.

© Scoopdyga