“Je n’avais jamais monté un cheval aussi prometteur qu’Émir du Chanu”, Marie Demonte

Le week-end dernier, le sourire de Marie Demonte a illuminé le stade équestre du Grand Parquet en clôture de la Grande Semaine de Fontainebleau lorsque celle-ci a imposé son agile Émir du Chanu dans la finale nationale des chevaux de sept ans. Après le départ de sa fidèle complice Vega de la Roche de ses écuries, la cavalière mise à présent sur l’avenir et fonde de solides espoirs en ce fils d’Air Jordan, qui évolue sous sa selle depuis le début d’année.



Quel bilan tirez-vous de cette Grande Semaine, et notamment de la finale nationale des chevaux de sept ans? 

C’était un beau championnat avec cent quarante partants, ce qui était une première. J’étais un peu inquiète après la Chasse, car mon cheval, qui ne fait pas partie des plus rapides, s’est retrouvé à la dix-neuvième place. Je venais pour le faire gagner, je ne voulais pas qu’il termine deuxième ou troisième. Il nous fallait alors remonter pas mal de places. Cela s’est fait petit à petit: nous avons d’abord atteint la cinquième position, puis la deuxième, avant de remporter l’épreuve finale. Pour moi, ce n’est que du bonheur! Trois de mes chevaux concouraient dans cette catégorie. Eau Vive de Béliard (SF, Upsilon x Diamant de Semilly) a bien sauté, mais elle a conclu avec deux parcours à quatre points. Après avoir un peu manqué de chance dans la Chasse avec Odiljo (BWP, Joop 111 x Darco), j’ai réussi un sans-faute, mais cela n’a pas suffi pour nous qualifier en finale.

Que représente pour vous le titre de champion de France d’Émir du Chanu (SF, Air Jordan x Papillon Rouge)?

J’avais déjà décroché ce titre il y a neuf ans avec Rhune d’Euskadi et il est vrai que c’est un tremplin pour les chevaux. C’est d’autant plus intéressant qu’Émir est un étalon. Cette victoire lui offre donc une belle pub. C’est également une source de motivation pour ses propriétaires. Guy Belooussoff croit en Émir depuis ses trois ans.  Celui-ci s’est toujours illustré lors des finales de Fontainebleau, pour finalement conclure par une victoire à sept ans, la plus prestigieuse pour un jeune cheval. On ne peut qu’être satisfait.

Quelles qualités appréciez-vous chez lui?

C’est un cheval très souple, doté d’une très bonne tête et de beaucoup de moyens. Il montre également une excellente technique de saut. Pour le moment, je ne lui ai trouvé aucun défaut. J’ai monté de nombreux chevaux, mais jamais aucun d’une telle qualité. Il est vraiment facile à monter. D’ailleurs, je n’emploie qu’un filet simple. Pour moi, il est parfait. Cette saison, il a terminé sans faute presque toutes les épreuves du circuit Top 7 de la Fédération française d’équitation auxquelles il a participé. Dans le but de le préparer pour la Grande Semaine, je l’ai également emmené dans quelques beaux concours, dont ceux de Valence et Grimaud, dans le cadre de l’Hubside Jumping, afin qu’il participe à des épreuves à 1,40m et 1,45m aux côtés de chevaux plus expérimentés. Il était prêt et cette victoire est une belle récompense de notre travail.



“L'objectif est qu'Émir me permette de participer aux Jeux olympiques de Paris en 2024”

L’autre événement de votre semaine a été le départ de votre jument de tête, Vega de la Roche (SF, Diamant de Semilly x Baloubet du Rouet), de vos écuries…

Effectivement. Cette semaine a été un peu difficile sentimentalement, car Vega a été vendue. Elle a quitté les écuries jeudi et nous étions tous très tristes car c’est une histoire de cinq ans qui se termine. Cependant, nous savons qu’elle est partie dans une belle maison, où elle sera bien accueillie (chez le Mexicain Federico Fernández, ndlr). La victoire d’Émir est en quelque sorte une consolation, même si je peux bien sûr toujours compter sur Las Vegas van de Paddenborre, Machester, ainsi que les chevaux de huit ans qui composent mon piquet. Perdre ma jument de tête après une année formidable, puis gagner la finale des sept ans avec un crack, c'était un peu comme si Émir me disait: “Je suis là pour prendre le relais et je ne te laisserai pas au bord de la route”.

Quelles ambitions nourrissez-vous avec lui?

J’aimerais qu’il me permette de participer aux Jeux olympiques de Paris en 2024, c’est l’objectif qui a été fixé. Pour cela, nous allons le faire évoluer progressivement à huit ans, et le faire s’aguerrir un peu à neuf ans. J’espère qu’il sera prêt à dix ans. Je sais que je peux compter sur son mental exceptionnel.

Quelle place occupe la formation de jeunes chevaux au sein de votre système?

Je suis issue d’une famille sans grands moyens financiers pour acheter des chevaux. Mes parents en ont fait naître un ou deux que j’ai pu former et qui m’ont permis d’évoluer d’année en année. Lorsqu’on n’est pas connu, on parvient à progresser dans le sport en se faisant confier des jeunes. C’est ainsi que je me suis forgée. Cela permet aussi de développer un lien et une complicité formidable avec eux. C’est toujours le cas aujourd’hui même si je ne les monte plus systématiquement en concours. À partir de six ans ou sept ans, on peut commencer à les emmener dans de beaux concours et participer à de belles tournées.

Au cours de cette Grande Semaine de Fontainebleau, avez-vous trouvé le temps de suivre les résultats de l’équipe de France aux championnats d'Europe?

Bien sûr! Olivier Robert, mon ex-mari, est là-bas: je l’ai eu au téléphone tous les jours et j’ai suivi leurs performances. Évidemment, nous sommes déçus qu’ils aient terminé sixièmes par équipes, mais le cheval de Pénélope Leprevost (GFE Excalibur de la Tour Vidal, ndlr) est très jeune. J’ai lu les interviewes qu’elle a donnés et elle est ravie, car il était superbe. Certes, Pénélope a du métier, mais on ne peut pas faire des miracles. Les chevaux n’ont pas l’expérience des grands championnats et nous sortons d’une année de pandémie, sans Coupe des nations. Quel Filou, le cheval de Mathieu Billot, a commis une petite faute, mais il ne s’agit que de détails à régler. Quant à Olivier, il a livré une merveilleuse prestation. J’ai également trouvé que les réflexions de Kevin Staut à l’issue du championnat n'étaient pas valables uniquement pour les cavaliers de l'équipe, mais pour tout le monde. Pour pouvoir participer à des concours, nous devons sans cesse prouver que nous avons notre place par des performances. Or, pour apprendre et progresser, les chevaux ont parfois besoin de faire des parcours en étant plus relâchés. Il faut que nous poussions la réflexion entre nous pour parvenir à faire évoluer nos chevaux au mieux.