“Un virage s’est opéré dans ma carrière”, Julien Anquetin

Tout juste rentré de la première étape scandinave de la Coupe du monde Longines avec une huitième place à la clé en compagnie de Blood Diamond du Pont, Julien Anquetin a déjà les yeux rivés sur les prochaines semaines. Actuellement à la tête d’une écurie prometteuse et de qualité, le Normand s’autorise à rêver de la finale du circuit indoor et d’un avenir radieux. Pour cause, à vingt-neuf ans, le cavalier entend désormais se concentrer sur les grands concours internationaux. Il se confie sur ses objectifs et sa vie de jeune athlète.        



Vous venez tout juste de terminer huitième du Grand Prix Coupe du monde Longines d’Oslo. Ce n’est pas votre premier classement dans ce genre d’épreuve mais c’est le premier de Blood Diamond du Pont (SF, Diamant de Semilly x Arpège Pierreville), déjà vainqueur vendredi de la première épreuve majeure. Comment avez-vous vécu cette épreuve visiblement sélective?  
Je suis allé à Oslo en étant très concentré. Cette étape était vraiment importante puisqu’elle allait déterminer la suite de ma saison. Il me fallait être performant pour espérer continuer à participer à ce circuit et obtenir des sélections pour les prochaines étapes. Mon cheval a répondu présent donc je suis très content et soulagé. Je devrais normalement aller à Vérone. Je ne peux pas dire que tous mes objectifs ont été atteints puisqu’il m’aurait fallu gagner, mais le contrat est rempli, c’est le principal! 

Blood Diamond du Pont, qui s’est imposé comme votre cheval de tête ces derniers mois, s’est montré très régulier. Quels sont vos objectifs avec lui? Est-il à vendre?  
Il a disputé pas mal de CSI 5*, se montrant assez régulier. Il avait déjà participé à une étape de la Coupe du monde (en février 2020 à Göteborg, ndlr), mais n’avait pas sauté le Grands Prix. Je ne suis pas étonné qu’il ait réussi, car il est vraiment en forme. Je sais que je peux compter sur lui. Il a remporté l’épreuve majeure du premier jour, annonçant d’entrée de jeu la couleur quant à sa forme du moment.  J’aimerais maintenant continuer à courir les étapes de la Coupe du monde avec lui et aller le plus loin possible évidemment. Je ne peux pas dire qu’il n’est pas à vendre, car tous les chevaux ont un prix. Si une offre réellement intéressante se présente, nous y réfléchirons, mais ce n’est pas notre priorité. 

Vous aviez débuté en Coupe du monde en 2016 et 2017, et aviez pu y goûter à nouveau début 2020. Quel est votre plan pour cet hiver? En avez-vous fait un objectif tôt dans la saison?  
C’est un circuit que j’affectionne beaucoup alors oui, c’était vraiment l’un de mes objectifs. J’aimerais continuer à participer aux étapes et être performant donc j’ai fait en sorte d’arriver en forme à Oslo pour performer et me faire une place dans les prochaines sélections. 

Qu’aimez-vous dans ce circuit?  
J’aime les concours indoor en général et l’ambiance qui y règne. À cette période de l’année, de nombreux cavaliers s’en vont concourir en Espagne ou au Portugal, à l’extérieur. Moi, je préfère grandement me plonger dans les compétitions indoor. De plus, le circuit Coupe du monde est vraiment particulier. Mes chevaux s’y sentent bien et moi aussi. 

Visez-vous la finale de Leipzig?  
J’ai obtenu un bon résultat dès la première étape. Celle-ci devait déterminer la suite de mon programme. Maintenant que je suis lancé, j’aimerais évidemment y prendre part, mais il ne faut pas trop s’avancer. Si j’ai la chance de participer à d’autres étapes et d’y performer, je serais extrêmement motivé pour affronter la finale. 

Quelle étape rêvez-vous de gagner? Lyon? Bordeaux? Une autre?  
Toutes les étapes sont belles, mais je rêve particulièrement de gagner celle de Londres. C’est un concours chargé d’histoire et, rien que pour cela, j’aimerais déjà y participer. Ce serait incroyable. La période à laquelle il a lieu, avec cette ambiance de Noël, le rend également unique, c’est très symbolique.



“Ice Cube est exceptionnel, il n’y a pas d’autre mot”

Z Ice Cube, en qui Julien Anquetin fonde de grands espoirs.

Z Ice Cube, en qui Julien Anquetin fonde de grands espoirs.

© Scoopdyga

À Oslo, vous avez également monté Z Ice Cube (Z, Brillante x Casco), âgé de huit ans. Quels espoirs fondez-vous en lui?  
Je fonde de grands espoirs en lui. Ice Cube est exceptionnel, il n’y a pas d’autre mot. Il ne faut surtout pas oublier qu’il n’a que huit ans mais il est déjà si compétitif. Il saute toutes les épreuves avec une facilité déconcertante. Je m’efforce de garder à l’esprit son jeune âge mais il rend tout très simple. Pour moi, il a tout: il est doté d’un potentiel hors norme et il est déjà extrêmement mature. Il est assurément mon meilleur cheval de huit ans, et je mise beaucoup sur lui. 

Gravity of Greenhill (BWP, Nabab de Rêve x Conterno-Grande), votre cheval de tête, n’a participé qu’à cinq concours, à de petites épreuves depuis février 2021. Dans quel état de forme est-il aujourd’hui?  
Gravity s’est blessé quand l’épizootie de rhinopneumonie a frappé notre secteur (en mars 2021, ndlr). Ce n’était pas très grave mais cela nous a obligés à le mettre au repos. Il participe ce week-end Au CSI 4* de Saint-Lô. Il arrive à la fin de sa période de remise en route et va pouvoir recommencer à sauter normalement. J’espère qu’il pourra renouer avec la Coupe du monde et sauter des Grands Prix d’ici la fin de l’année. En tout cas, j’ai bon espoir.  

S’il revient à son meilleur niveau, vous disposeriez de deux chevaux de Grands Prix, ce qui serait plus facile pour se qualifier en finale!  
C’est sûr. Blood Diamond est vraiment au point et se montre très compétitif. Gravity était également très performant au plus haut niveau (le hongre de quinze ans avait notamment remporté le Grand Prix du CSI 3* d’Oldenburg en 2019 et s’était classé septième du Grand Prix CSI 5*-W de Göteborg en 2020, ndlr) alors cela me ferait deux très bons partenaires pour performer à ce niveau. Ce serait vraiment bien. Nous verrons comment les choses évoluent. 

Sur quels autres chevaux pouvez-vous compter?  
En dehors de ces trois-là, je peux compter sur Baya du Ter (SF, Kannan x Poor Boy), une super jument pour participer aux épreuves de vitesse jusqu’à 1,50m. Elle est vraiment très compétitive et régulière à ce niveau d’épreuve. J’ai également Cesus de Fougnard (SF, Dollar dela Pierre x Calvaro). À neuf ans, il a déjà sauté quelques Grands Prix CSI 4* (notamment en juillet à Grimaud, finissant cinquième, ndlr) et un Grand Prix CSI 5* (au Longines Paris Eiffel Jumping, qu’il avait conclu avec huit points, ndlr). Pour moi, il est de la même trempe qu’Ice Cube. Il fait partie de ces chevaux d’avenir en qui je crois vraiment beaucoup. Il est capable de tout sauter. Je compte vraiment sur lui pour les Grands Prix l’an prochain. Sans oublier Ivizi (KWPN), qui performe jusqu’à 1,50m à huit ans seulement. Je dois prendre le temps de le former sans précipiter les choses mais c’est un très bon cheval. Tout comme Ice Cube et Cesus, je compte sur lui pour l’avenir. Je dispose d’un piquet très prometteur, ce qui est vraiment rassurant pour l’avenir. 

Vous formez également pas mal de jeunes, vous participez au Grand National, vous honorez des sélections en équipe de France et concourez en CSI 5*. Au-delà des nécessités économiques, cela contribue-t-il à une forme d'équilibre?  
Oui, je forme pas mal de jeunes. Par exemple, j’ai quatre chevaux de six ans, mais je ne suis que très rarement présent sur le circuit de la Société hippique française. Et cette année, je n’ai participé à aucun gros concours national de type Grand National. Un virage s’est opéré dans ma carrière. J’ai décidé de privilégier les internationaux. Si je dois choisir entre un Grand National ou un CSI 2*, je privilégierai désormais cette seconde option. Même si nos concours locaux sont extrêmement formateurs et d’une grande qualité, il faut parfois faire des choix pour avancer.
Aujourd’hui, mon objectif est d’atteindre le plus haut niveau. Pour cela, il faut gagner des places au classement mondial Longines (Julien est actuellement cent quatre-vingt-douzième, ndlr) donc être performant en CSI. J’arrive à un moment de ma carrière où je dois me battre et faire assez rapidement mes preuves quand on me donne la chance de participer à un concours comme celui d’Oslo. Si je ne réussis pas, ce n’est pas mon classement mondial qui me permettra d’accéder à ce type d’événements mais la confiance que l’encadrement fédéral m’accorde en me donnant ma chance. C’est une décision que j’ai prise cette année et que j’assume. Cela n’a pas été très simple avec la blessure de Gravity mais je commence à rebondir et j’entends pouvoir profiter d’un piquet fourni et opérationnel dans les prochains mois.



“Il est vraiment nécessaire de sortir parfois la tête du guidon et prendre l’air”

Julien Anquetin pourra également compter sur Cesus de Fougnard dans les prochains mois.

Julien Anquetin pourra également compter sur Cesus de Fougnard dans les prochains mois.

© Scoopdyga

Un athlète de vingt-neuf ans qui gère sa propre structure vit-il la même jeunesse qu’une personne normale?  
Je pense que cela dépend de ce que comment chacun définit la normalité! Je sors avec mes amis, j’ai une vie sociale, je fais d’autres activités. Il est vrai qu’avoir sa propre structure demande une très grande organisation, mais je m’en sors plutôt bien dans l’ensemble. J’ai forcément dû faire des sacrifices. Lorsqu’une fête d’anniversaire a lieu le samedi, par exemple, je sais que je ne pourrai pas y être parce que je suis très souvent en concours… sauf si l’on me prévient vraiment à l’avance! La plupart de mes amis sont issus du milieu équestre, ce qui est logique puisque nous partageons des centres d’intérêts, mais cela ne nous empêche pas de nous amuser. Ce week-end, par exemple, j’étais à Oslo avec Edward Levy qui est un de mes meilleurs amis. Nous pouvons passer un week-end vraiment génial ensemble, même en dehors de la compétition. Bien que j’aie dû faire des sacrifices, je me sens très heureux et épanoui dans mon système. Je pratique un métier de rêve, je vis de ma passion et voyage partout dans le monde grâce à cela. Je suis vraiment chanceux. 

Lorsque vous décrochez du boulot et des concours, que faites-vous?  
On ne décroche jamais réellement de ce métier. Nous rentrons parfois très tard le dimanche soir et devons être opérationnels le lendemain matin. Pour ma part, je quitte généralement les écuries vers 17h ce qui me laisse du temps à consacrer à autre chose. Je n’ai pas d’autre grande passion que le cheval, et je ne pratique pas d’autre sport de manière régulière. Cependant, j’aime sortir, tester de nouvelles activités, aller au restaurant. Il est vraiment nécessaire de sortir la tête du guidon parfois, prendre l’air et voir autre chose que des chevaux et des concours. Pour être performant, on ne peut pas faire tout le temps la même chose. Il faut se vider la tête et vivre d’autres expériences. C’est en tout cas ma philosophie. 

En dehors des chevaux, sur qui pouvez-vous compter au quotidien?  
Au quotidien, dans mon entourage, les chevaux ne sont jamais bien loin! Ma famille est un vrai pilier, mais elle baigne dans le milieu équestre depuis toujours! Comme je l’ai dit, la quasi-totalité de mes amis sont également issus de ce milieu. Pour autant, lorsque nous nous voyons en dehors du cadre professionnel, il est vraiment très rare que nous parlions de nos amis à quatre pattes! Nous avons tant d’autres à nous raconter. 

Que peut-on vous souhaiter pour les mois et années à venir?  
De réussir! Dans un premier temps, j’aimerais performer en Coupe du monde. Je pense que mon piquet ne va que se renforcer au fil des semaines alors je dois en profiter. Le résultat obtenu ce week-end n’est pas un hasard. Je travaille dur chaque jour et je savais que nous en étions capables. C’est une belle récompense et j’espère continuer en ce sens, pourquoi pas jusqu’à la finale!