“J’ai eu raison de ne jamais baisser les bras”, Julia Krajewski

La médaillée d’or olympique de concours complet, Julia Krajewski, s’est confiée aux équipes du CHIO d’Aix-la-Chapelle sur son parcours, l’égalité entre les genres dans les sports équestres, son goût pour la formation... Désormais tournée vers 2022, la championne de concours complet a présenté ses nouvelles ambitions.



Six mois se sont écoulés depuis votre victoire olympique. Qu’est-ce qui a changé depuis? 

C’est tout simplement merveilleux. Je réalise que j’ai touché beaucoup de personnes avec mon histoire, ponctuée de hauts et de bas. Cela m’a vraiment rassurée. J’ai eu raison de ne jamais baisser les bras. 

Vous avez mentionné des bas, quels sont-ils ? 

Oui, il y en a eu beaucoup. Mais je dirais que si je n’avais pas vécu ces moments difficiles, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui. J’ai appris que les choses peuvent s’améliorer. Quoi qu’il arrive, je ne perds jamais ma motivation, parce que j’aime vraiment mon travail et j’aime ce que je fais. 

Vous êtes la première femme à avoir remporté l’or olympique dans votre discipline. Cela rend-t-il votre performance encore plus spéciale ? 

Je n’étais pas au courant de cela auparavant. Une fois, Bettina Hoy a été très proche de remporter l’or olympique. Plusieurs femmes sont déjà montées sur la plus haute marche du podium aux championnats d’Europe et du monde. Il était donc temps qu’une femme triomphe aux Jeux olympiques. Dans les sports équestres, les femmes n’ont pas vraiment de désavantage par rapport aux hommes, l’égalité est devenue depuis longtemps une réalité. C’est une thématique qui s’inscrit dans l’air du temps, notamment dans le sport. 

Cette victoire peut être un facteur de motivation pour les jeunes filles… 

Absolument, notre sport ainsi que la victoire olympique sont universels. De nos jours, il existe encore des régions du monde où il y a de plus grandes inégalités homme-femme que dans notre pays. Peut-être que mon succès à Tokyo donnera envie à une fille de se battre même si le chemin est difficile. C’est agréable de pouvoir donner un peu d’inspiration. 



“Je dois désormais me focaliser sur la prochaine échéance”

Sentez-vous davantage de pression depuis ce succès ?

Bien sûr, je suis davantage attendue désormais. Quand je participe à un petit concours n’importe où, je suis toujours annoncée comme la médaillée d’or olympique. Ainsi, les spectateurs ont toujours de grandes attentes. J’arrive toutefois à ne pas me rajouter de pression par rapport à ce qui est attendu. 

Avez-vous eu le temps de savourer cette victoire olympique ? 

Généralement, j’ai du mal à m’attarder sur le moment. J’ai vraiment accompli un énorme exploit, mais je dois désormais me focaliser sur la prochaine échéance. 

Après les interviews données à Tokyo, l’ancien sélectionneur national, Hans Melzer, a déclaré que vous aviez le talent d’un présentateur télé…

Oui, cela m’a fait rire. Il faut savoir que cela n’a pas toujours été le cas. Quand j’étais plus jeune, je n’osais même pas appeler le secrétariat de concours pour confirmer ma participation. À l’école, je préférais passer des examens écrits plutôt que de faire une présentation orale. Être à l’aise en parlant avec d’autres personnes n’est pas quelque chose de naturel pour moi. J’ai dû apprendre au fil du temps. 



“J’ai toujours su qu’Amande était très spéciale”

Comment définiriez-vous Amande de B’Neville, votre partenaire olympique ? 

Mandy, comme nous l’appelons chez nous, est une jument incroyable. Elle ne se voit pas comme une princesse, mais plus encore. Comme une reine peut-être. C’est ainsi qu’elle vit au quotidien. Lorsque nous la manipulons, il y a des choses qu’elle aime et d’autres qu’elle ne supporte pas. C’est donc à mon époux et à moi de trouver des compromis. 

Est-elle une élève modèle à l’entrainement ? 

Elle est toujours très motivée, elle a tendance à beaucoup s’impliquer. Elle a toujours été comme ça. Le saut d’obstacles s’est toujours bien passé, mais pour la partie dressage, je dois toujours lui demander de fournir un peu moins d’effort. 

Quand avez-vous réalisé qu’elle avait un tel potentiel ?

J’ai toujours su qu’elle était très spéciale, mais il a fallu beaucoup de temps pour freiner son énergie excessive. L’exploit que nous avons réalisé à Tokyo est une sorte de chef-d’œuvre, une période lors de laquelle tout s’enchaîne parfaitement. Ce n’est absolument pas prévisible ! 

Qu’est-ce qui vous fascine dans l’entrainement des chevaux ?

Voir comment les jeunes chevaux se développent me passionne. Quand je travaille avec eux, je ressens plus rapidement de la satisfaction. Lorsque nous attendons un très haut niveau ensemble, il s’agit d’affiner davantage certains détails et certains mouvements. Ce sont souvent d’infimes nuances qui n’apportent pas vraiment le même sentiment de réussite qu’avec les jeunes chevaux. 

Vous êtes dispensez également vos conseils à des cavaliers. Qu’est-ce qui vous plaît particulièrement dans cet exercice ?  

Je trouve que travailler avec de jeunes cavaliers est très intéressant et instructif pour moi. Devoir trouver une solution à un problème me donne de l’inspiration pour ma propre équitation. 

Quel conseil donnez-vous aux jeunes cavaliers ? 

Il est très important d’être ouvert aux critiques et aux suggestions d’amélioration. La volonté personnelle de toujours vouloir s’améliorer est pour moi un prérequis fondamental pour réussir. 

Comment une médaillée d’or olympique se détend ? 

Idéalement avec un bon livre, sur le canapé. J’aime lire des romans historiques. Lorsque j’arrive à prendre quelques jours de repos, j’en profite pour découvrir de nouveaux endroits dans le monde. 

Quels sont vos objectifs sportifs désormais ? 

J’en ai encore beaucoup. Il y a quelques compétitions 5* auxquelles j’aimerais participer. L’objectif pour la saison 2022 est clairement les championnats du monde en Italie au mois de septembre. Je pense que je ne manquerai jamais de motivation. Il y a encore tellement de choses que je souhaite faire. 

Répéter votre victoire de 2018 au CHIO d’Aix-la-Chapelle en fait-elle partie ? 

Bien sûr, le CHIO d’Aix-la-Chapelle est chaque année un moment fort. Je n’oublierai jamais le moment où je suis rentrée sur cette piste en tant que vainqueur (avec Chipmunk FRH, depuis passé sous la selle de Michael Jung, ndlr). J’aimerais vraiment revivre ce sentiment.