“J’espère pouvoir franchir le cap du plus haut niveau cette année”, Romain Dreyfus

Alors qu’il vient de passer plusieurs semaines à Vilamoura pour lancer sa saison, Romain Dreyfus compte bien mettre toutes les chances de son côté pour atteindre le haut niveau cette année, et y figurer plus durablement. Installé au haras de Saint-Estève près d’Aix-en-Provence, le Tricolore de vingt-sept ans sait qu’il peut compter sur un solide piquet de chevaux pour l’y emmener et un entourage présent pour l’épauler.



Le 6 mars, vous avez terminé à la troisième place du Grand Prix 3* à 1,50m de Vilamoura avec Big Brother (KWPN, Untouchable 27 x Gran Corrado). Quel a été votre sentiment en sortie de piste?

En un mot: ravi. Le parcours était assez délicat et il y avait très peu de sans faute au début. J’ai eu la chance de passer en fin d’épreuve, ce qui m’a permis de voir les tours précédents et d’anticiper les passages compliqués. J’ai gardé en tête d’essayer de faire de mon mieux, sans me mettre dans le rouge, car Big Brother (KWPN, Untouchable 27 x Gran Corrado) n’est pas un cheval avec lequel j’ai participé à beaucoup de barrages et je ne le connais pas tellement sur ce type d’épreuve. J’ai donc préféré assurer le sans faute en serrant au maximum mes courbes pour viser le podium, et ça a payé.

Que retenez-vous de ces trois semaines de tournée au Portugal, de mi-février à début mars?

La tournée à Vilamoura me permet de lancer mon début de saison, de découvrir mes nouveaux chevaux et de mettre en route les plus aguerris afin qu’ils soient prêts pour le programme que nous nous sommes fixés. Ce qui est super, c’est qu’il est possible de déclasser ses chevaux dans certaines épreuves. Cela est très intéressant car il y a du “hors concours” tout au long de l’événement, ce qui permet de mieux nous adapter à la forme de nos chevaux.

Pouvez-vous présenter votre piquet de chevaux?

Je n’ai pas beaucoup de jeunes chevaux, seulement une jument de sept ans, Jicera D. S. (sBs, Ideale van de Nachtegaele x Cicero Z), dont nous venons de faire l’acquisition avec ses propriétaires. Elle est très peu sortie en concours et manque encore d’expérience mais nous en sommes très satisfaits car elle a bien performé en étant de nombreuses fois sans faute. Elle a très bien sauté, et comme elle nous a donné entière satisfaction, nous avons décidé conjointement avec ses propriétaires, qu’elle ne participerait pas à la finale. J’ai également une jument de huit ans propriété de Philippe Prévost, Elifiria de Fondcombe (SF, Con Air x Tinka’s Boy). C’est assez amusant car elle ressemble beaucoup à sa mère, la jument de Marie Pellegrin (Boréale de Fondcombe), au niveau du caractère. C’est une très bonne jument qui a profité de deux mois de vacances et qui est donc rentrée très peu de temps avant la tournée. Elle a donc repris avec de petites épreuves pour une remise en route en douceur. Très respectueuse et avec beaucoup de moyens, c’est une jument d’avenir qui sera capable de sauter des Grands Prix d’ici la fin de saison. J’ai aussi une jument de vitesse, Camelia Sauvage (SF, Jacomina Sauvage x Stew Boy). Elle est très rapide et a terminé première et deuxième de deux épreuves à 1,30m.
Concernant mes chevaux de tête, je peux compter sur Fernando, Calife et Big Brother. Je n’ai pas fait courir de Grand Prix à Fernando van het Posthuis (KWPN, Nabab de Rêve x Indoctro) car je souhaitais mettre les deux autres en avant. J’ai Calife du Nevez (SF, Tinka’s Boy x Papillon Rouge) depuis qu’il a cinq ans. Il est respectueux et possède de gros moyens. Avec lui, j’y suis allé pas à pas car il a toute la qualité pour sauter de grosses épreuves mais il a fallu d’abord le construire et l’attendre car il était très tardif. C’est un cheval en qui je fonde beaucoup d’espoir. J’ai également Big Brother, très expérimenté, mais qu’il faut ménager en raison de sa santé et de son âge. Il sera mon cheval de Grand Prix cette année aux côtés de Calife. 

Pensez-vous que l’un d’entre eux pourrait prendre la suite de votre regrettée Niara d’Elsemdam (Z, Nabab de Rêve x Ciel d’Espoir)?

Oui, Calife, sans problème! Il a autant de qualités que Niara, voire plus de moyens. Niara était une jument extraordinaire avec une énergie que je n’ai jamais retrouvé chez un autre cheval et une envie de gagner à toute épreuve. Calife a largement le potentiel pour la remplacer.

Après cette première échéance, quels seront vos prochains objectifs pour 2022?

Ce sont mes chevaux qui me le diront. J’aimerais vraiment viser le championnat de France de Fontainebleau avec Calife, tout en essayant de courir le 4* en même temps avec Big Brother et Fernando. Je mise beaucoup là-dessus et je donnerai mon maximum pour atteindre cet objectif, qui pourra m’ouvrir les portes des beaux concours. 

Quelle est votre plus grande ambition?

Ma plus grande ambition est d’être régulier au plus haut niveau et que mon écurie fonctionne bien, notamment avec le commerce des jeunes chevaux. 

Romain Dreyfus et Calife du Nevez au CSI 2* de Grimaud en septembre dernier.

Romain Dreyfus et Calife du Nevez au CSI 2* de Grimaud en septembre dernier.

© Sportfot



“Robert Breul m’aide beaucoup en concours et pour la gestion de mes écuries”

Romain Dreyfus et Niara d'Elsemdam Z après avoir remporté le Grand Prix du CSI 4* de Saint Tropez en juin 2019.

Romain Dreyfus et Niara d'Elsemdam Z après avoir remporté le Grand Prix du CSI 4* de Saint Tropez en juin 2019.

© Sportfot

Vous êtes actuellement basé au haras de Saint-Estève, dans les Bouches-du-Rhône. Comment fonctionne votre système?

Nous sommes trois sur la structure avec ma groom Aurélie et ma cavalière maison Justine. Mon écurie compte peu de chevaux, dix-huit au total. J’ai également quelques propriétaires mais de moins en moins car j’ai besoin d’accueillir davantage de jeunes chevaux pour le commerce. Notre activité nécessite un roulement entre les jeunes chevaux, afin qu’ils soient vendus régulièrement. À côté, nous concentrons notre travail sur les chevaux plus âgés pour les emmener au plus haut niveau. Je n’ai pour l’instant pas eu la chance d’y accéder et j’espère pouvoir l’atteindre cette année. 

Avec qui vous entraînez-vous?

Je peux compter sur deux entraîneurs. Robert Breul m’aide beaucoup en concours et pour la gestion de mes écuries. Il est toujours de bons conseils et m’a fait grandir d’un point de vue technique. Pour une partie de mes chevaux, je suis encadré par Éric Muhr, basé à côté de chez moi. C’est lui qui a monté Calife l’année de ses sept ans, je lui avais confié, et nous sommes restés en contact depuis. Nous nous entendons très bien dons nous avons décidé de continuer l’aventure ensemble.

Comment avez-vous mis le pied à l’étrier? Devenir cavalier professionnel était-il une évidence?

C’est un peu atypique. Plus jeune, je faisais beaucoup de sport, et à treize ans, j’ai eu un problème de tendon d’Achille. Mon chirurgien m’a dit de faire une pause pendant quelques années mais m’a laissé le choix entre la natation et l’équitation. C’est là que j’ai décidé d’essayer de me mettre à cheval. Mon grand-père, Jean Vidal, était dans les chevaux de course et de western alors je m’étais dit pourquoi pas.
Je suis assez compétitif dans tout ce que j’entreprends et j’aime aller au bout des choses. L’équitation et la compétition m’ont tout de suite plu. Plus les années avançaient et plus je me disais que c’était ce que je voulais faire. N’étant pas très scolaire, nous avons rapidement pris la décision avec mes parents de me concentrer sur l’équitation et je suis parti travailler chez Jean-Vincent Baracand, dans son écurie de Beauregard (dans la Drôme, ndlr).

Vous êtes un grand fan de sport, dont le ski et le tennis. Trouvez-vous des similitudes avec la pratique de l’équitation?

Beaucoup. Je m’entraîne régulièrement avec un préparateur physique et nous travaillons les sports de combat comme par exemple le karaté. Les appuis et les déplacements latéraux sont des mouvements que je retrouve aussi dans ma pratique à cheval. Je joue également, au tennis, au moins deux fois par semaine, où la gestion du corps avec l’anticipation par le regard tient une place importante. Au ski, le tracé et l’équilibre sont très importants pour la trajectoire et là aussi je fais des liens avec l’équitation.

Avez-vous d’autres hobbies?

Je suis un grand fan de tous sports confondus et j’en pratique un maximum, mais quand je souhaite sortir du cadre de l’écurie, mon échappatoire préféré reste la compagnie de ma famille et de mes amis. Je suis bien entouré et nous sommes très soudés, ce qui est une chance. Dès que je peux, je passe du temps avec mes deux frères qui m’aident beaucoup au quotidien.

2022 est également l’année de l’élection présidentielle. Vous intéressez-vous à la politique? Êtes-vous sensible à certains sujets?

Forcément un peu car cela régit nos vies et a un impact direct sur notre pays. Je dirai même d’autant plus quand nous avons une entreprise, car il faut se tenir au courant de ce qui se passe. Le contexte est compliqué, surtout avec l’actualité du moment. Je suis les informations et les nouvelles ne sont pas bonnes, alors j’essaie de prendre un peu de recul même si le conflit entre l’Ukraine et la Russie occupe nos esprits tous les jours. À Vilamoura, j’ai côtoyé des cavaliers ukrainiens et nous avons eu à cœur de les réconforter et d’être présents pour ceux qui en ressentaient le besoin. Ce n’est pas grand-chose, mais il me semble normal et important d’agir chacun à notre petite échelle dès que cela est possible.

Romain Dreyfus et Big Brother à Equita Lyon, en octobre dernier dans le CSI 2*.

Romain Dreyfus et Big Brother à Equita Lyon, en octobre dernier dans le CSI 2*.

© Sportfot