“À Pratoni, Canakine s’est baladé”, Héloïse le Guern

Tout juste rentrée de Pratoni del Vivaro, où elle a participé à son premier CCIO 4*-S, Héloïse le Guern n’a pas à rougir de sa performance. Associée à son beau gris Canakine du Sudre, la jeune femme de vingt-quatre ans est revenue d’Italie avec une honorable seizième place en individuel. Victime d’une lourde chute lors des championnats du monde des chevaux de sept ans l’an passé, au Lion d’Angers, l’amazone semble totalement remise sur pieds et motivée à se faire une place parmi les cadors de la discipline. Retour sur sa première expérience avec l’équipe de France et ses ambitions futures.  



Depuis combien de temps avez-vous Canakine du Sudre (Z, Felton du Mont, ex-Charles de Gaulle x Duc du Murier)??Comment se sont déroulés vos débuts ?  

J’ai eu Canakine fin 2018. Il a toujours été assez simple et avançait petit à petit, à son rythme. Nous avons surtout dû travailler le dressage.  

Pour le cross, il a fallu en faire un ou deux pour comprendre comment il fonctionnait et trouver l’embouchure qui lui convenait mais ça a été assez rapide. À l’obstacle, il était déjà très à l’aise mais nous avons eu un peu de mal à passer le cap des 1,30m et des épreuves Pro Élite. Il n’y avait pas de catastrophe mais nous faisions facilement huit points. Je n’avais jamais vraiment enchaîné ces hauteurs et lui non plus. Auparavant, lors d’épreuves Pro 3 et CSI 3*, nous ne sortions que rarement avec une barre. Le fait de monter en épreuve nous a tous les deux un peu perturbés mais nous commençons à obtenir quelques sans-faute. Les choses vont bien. Il a vraiment progressé sur le dressage même si nous cherchons toujours à nous améliorer. Lors du cross, il est génial et très courageux, il fait toujours de son mieux. 

Comment s’est-il comporté à Pratoni del Vivaro, le week-end dernier?? 

Il n’était pas au meilleur de sa forme le mercredi à cause des deux jours de transport. Le lendemain, lors de notre séance, il allait mieux mais était toujours un peu trop calme. Le vendredi, lorsqu’il a fallu dérouler, il était comme à son habitude, un peu chaud, mais je le préfère comme ça (le couple est sorti du rectangle avec 30.9 points de pénalité, ndlr).  

Il a été super sur le cross. Il est parti très gaillard et était assez rapide même si nous avons perdu quelques secondes dans les combinaisons et les endroits avec peu de galopade (le couple n’a écopé que de 3.6 points de temps, ndlr). Le terrain était assez vallonné, ce qui est fatiguant, et nous n’avions encore jamais fourni un tel effort physique. Même si c’était un format court, nous n’avions jusqu’à présent effectué que deux CCI 3*-L et un CCI 4*-S sur des terrains plats (en concours complet, les épreuves internationales sont divisées en deux catégories, courtes et longues. Ainsi, un CCI 3* peut être plus ou moins difficile en fonction de sa longueur, -S ou –L, ndlr).   

Lors du test de saut d’obstacles, il était à nouveau plein d’énergie! La veille, déjà, au retour du cross, il était encore surexcité, ce qui n’est pas normal après un tel effort! Il s’est ensuite détendu et a passé la visite véto sans problème. Il a bien sauté, nous avons juste commis une faute à l’entrée du double parce qu’il s’est reculé. On pense que c’est à cause des caméras qui étaient dans l’axe de l’obstacle puisque la distance était correcte et il n’y avait pas lieu à faire faute. Nous n’avons pas trop compris, c’était une petite hésitation. Je n’ai pas non plus réagi assez rapidement parce que je ne m’y attendais pas. Si j’avais remis la jambe, il aurait décollé. C’est dommage, il a été un peu timide sur cette combinaison mais s’est bien reconcentré par la suite pour terminer le tour.  

Revenir avec un classement de son premier CCIO 4* est une belle performance, en êtes-vous fière?  

 Je suis tout de même heureuse. Sans la barre, j’aurai intégré le Top 10 alors c’est forcément un peu rageant mais bon, c’était une super expérience. Les trois tests ont été corrects donc je suis très satisfaite, surtout lorsque je vois qu’il encaisse bien ce genre d’épreuve et que ça ne lui coûte pas trop.  

Avez rencontré une difficulté majeure durant l’un des trois tests??  

 Pas vraiment, il était comme d’habitude. J’avais peut-être un peu plus de pression puisque, en portant la veste de l’équipe de France, on se dit qu’il faut s’appliquer davantage, mais je n’ai pas rencontré de grosses difficultés. Le cross, qui, à la reconnaissance, ne s’avérait pas si compliqué, a tout de même fait pas mal de dégâts. Il n’y a pas eu beaucoup de “maxi” (seulement six, ndlr).  

Comment aviez-vous préparé cette compétition??  

Malgré l’annulation du cross de Pompadour (en raison des conditions météorologiques, ndlr), nous avions pu participer aux tests de dressage et d’obstacles, ce qui a constitué un petit entraînement. Heureusement, ils avaient monté un parcours de cross à Saumur le week-end suivant afin que nous puissions nous entraîner en vue des prochaines échéances, notamment pour les cavaliers se rendant au CCI 5*-L de Badminton (qui a eu lieu début mai, ndlr). Canakine n’a pas besoin d’en voir énormément donc je me suis contentée de galops de mise en condition sur la piste. Pour le reste, j’ai fait comme tout le monde, déroulé la reprise et sauté à la maison.  



“Les plus grandes compétitions restent bien sûr dans un coin de ma tête”

Quelles vont être les prochaines échéances??  

En juin, nous irons en Angleterre, au CCI 4*-L de Bramham. Ce sera notre premier 4*-L. Ils organisent une catégorie appelée championnat du monde des moins de vingt-cinq ans, qui se court sur un format long (la jeune femme n’a encore que vingt-quatre ans, ndlr). Le terrain est vraiment chouette et, l’ambiance anglaise, c’est autre chose. Il y a toujours beaucoup de public, un magnifique château, des terrains, des parcs, un village exposant énorme…  

C’est la prochaine échéance. Avec l’épreuve à laquelle il vient de participer, il devrait être prêt. 

Le CCI 5*-L de Badminton vient de se dérouler. Ce concours fait-il partie de l’un de vos objectifs? 

Ce ne sera pas forcément l’objectif le plus proche, mais c’est une épreuve à laquelle nous avons tous envie de participer. Il faut par contre être certain d’avoir un cheval prêt. Nous allons déjà voir comment Canakine se comporte à Bramham et s’il a le potentiel pour faire plus. Il nous dira si les CCI 4*-L sont sa limite, ou s’il est capable d'aller au-dessus. C’est lui qui nous donnera les indications, mais c’est sûr que c’est un concours que nous rêvons tous de faire au moins une fois dans notre carrière.  

À Pratoni, il s’est baladé, était très bien sur le cross, n’a pas baissé de pied et n’a pas montré d’hésitations donc ça laisse imaginer qu’il n’est pas au bout de ses capacités. Le problème des CCI 5* est qu’il n’existe pas de formats courts. Il pourrait participer à ce genre d’épreuves mais un cross de douze minutes fait vraiment la différence (temps rencontré lors des CCI 5*-L, ndlr). Nous allons déjà pouvoir juger ses capacités et déterminer la suite du programme après le concours de Bramham. Avant de penser aux 5*, il y a des sélections pour les championnats d’Europe et des Coupes des nations qui sont des objectifs atteignables. Les plus grandes compétitions restent bien sûr dans un coin de ma tête mais je pense débuter par un concours plus raisonnable comme le CCI 5*-L de Pau, qui a un terrain moins vallonné et met moins les chevaux à l’effort.