“Rêver des JO de Paris 2024 serait très ambitieux de ma part”, Camille Condé-Ferreira

Le week-end dernier, le CSI 3* de Cabourg Classic a vu Camille Condé-Ferreira se classer dans sept des neuf épreuves qu’elle a disputées. Cinquième du Prix Pays d’Auge Sotheby’s International Realty à 1,50m samedi et treizième du Grand Prix CWD de la ville de Cabourg à 1,50m dimanche avec Bassano de Nantuel, son cheval de tête, elle a également fini deux fois deuxième à 1,35m et 1,40m dans les Prix Volte et Seaver avec Air Force Gem. La jeune Francilienne, ravie de l’évolution de son partenariat avec le haras de Clarbec, de la famille Mégret, évoque son bon début de saison et son piquet de chevaux prometteurs.



Entre Égérie du Val du Geer (sBs, Toulon x Kashmir van Schuttershof, Carioca de Riverland (SF, Epsom Gesmeray x For Pleasure), Bassano de Nantuel (SF, Baloubet du Rouet x Calypso d’Herbiers) et Corrado du Moulin (Holst, Berlin x Landadel), vous disposez de plusieurs bons chevaux, qui commencent à performer en CSI 3*. Quels sont vos objectifs avec eux?

Ils diffèrent d’un cheval à l’autre. L’objectif général est de les faire progresser le plus possible pour les emmener le plus haut possible. Par exemple, avec Bassano, j’aimerais vraiment performer correctement en CSI 3* et 4* et pourquoi pas participer à des CSIO 3* ou 4*, ce qui serait super bien!

Vous avez récemment terminé quatrième d’une Vitesse à 1,50m au CSI 3* d’Opglabbeek avec Corrado du Moulin. Comment va-t-il? Pour quelle raison ne vous a-t-il pas accompagnée à Cabourg?

Corrado va super bien. Nous sommes très contents de sa performance à Opglabbeek, où il a été génial. Il s’est vraiment donné! C’était la cinquième fois depuis le début de l’année qu’il performait dans des épreuves de vitesse. Au fur et à mesure, nous nous sommes rendu compte qu’il était aussi doué pour ces épreuves que pour les Grands Prix. Quoi qu’il en soit, Corrado est vraiment mon cheval de cœur alors je prends beaucoup de plaisir à concourir et performer avec lui. La semaine prochaine (entretien réalisé vendredi dernier à Cabourg, ndlr), nous l’avons engagé au CSI 2* de Deauville, et espérons pouvoir disputer le CSIO 3* de Deauville (organisé par GRANDPRIX Events, ndlr) à la fin du mois. D’une manière générale, nous faisons en sorte de ne pas engager Bassano et Corrado dans les mêmes concours afin de disposer de deux piquets de chevaux performants et cohérents.

Jusqu’où espérez-vous aller avec des deux étalons du haras de Clarbec?

Bassano et Corrado sont mes deux chevaux de tête. Viser les CSI 5* à court terme, ce serait beaucoup nous demander. Avec l’un comme l’autre, j’ai envie de réussir de beaux parcours et d’obtenir de bons classements. Et par-dessus tout, je veux que ces chevaux, comme les autres que j’ai la chance de monter, soient heureux de rentrer en piste. 

Comme je l’ai dit, Corrado est un mon cheval de cœur. Je le monte depuis trois ans et je me suis beaucoup attachée à lui. J’attends d’ailleurs un poulain de lui cette année. Nous élevons des chevaux pour le plaisir, sans forcément chercher les meilleurs croisements même si nous essayons quand même de le faire avec un minimum de logique.

Camille Condé-Ferreira et Corrado du Moulin à Deauville Classic en août 2021

Camille Condé-Ferreira et Corrado du Moulin à Deauville Classic en août 2021

© PixelsEvents



“L’apport de Michel Cizeron nous permet de progresser tous ensemble”

Camille Condé-Ferreira et Flash du Puits à Cabourg Classic

Camille Condé-Ferreira et Flash du Puits à Cabourg Classic

© PixelsEvents

Vous travaillez avec Geneviève Mégret depuis 2015. Comment évolue votre relation et comment organisez-vous votre temps de travail?

Oui, cela fait un moment, ce qui est très positif à mes yeux. Depuis à peu près un an, Michel Cizeron (technicien expérimenté, ndlr) vient aussi nous épauler afin que nous ne nous installions pas dans un certain confort. Il est important d’avoir une autre vision, même si nous travaillons très bien avec Geneviève. L’apport de Michel nous aide et nous permet de progresser tous ensemble. Mon temps de travail dépend totalement des semaines et des concours. En ce moment, j’ai dix chevaux du haras de Clarbec chez moi, en Seine-et-Marne, ce qui fait que je me rends un petit peu moins souvent à Clarbec (le haras est situé dans le petit village éponyme, dans le pays d’Auge, ndlr). Nos deux équipes travaillent très bien, donc toute l’organisation roule facilement. 

Outre Bassano, Corrado, Égérie, Carioca et Air Force, quels chevaux de la famille Mégret vous sont-ils confiés? Et sur quels critères sont-ils sélectionnés ?

Pour les chevaux d’âge, je citerai Varenta GEM (SF, Allegreto x Royal Feu). Et il y a plusieurs jeunes dont l’étalon Goldeneye GEM (SF, Cicero x For Pleasure), en qui nous croyons énormément et qui réussit une saison remarquable. Il a notamment gagné les trois épreuves au chronomètre du Cycle classique des chevaux de six ans que nous avons courues, ce qui nous a fait vraiment plaisir.

Concernant la sélection, les jeunes sont d’abord essayés par Franck Bourny (cavalier jeunes chevaux du haras de Clarbec, qui monte aussi quelques chevaux d’âge ndlr). En fonction de nos impressions et affinités, nous nous partageons les chevaux, quitte à nous les échanger quand nous le jugeons nécessaire. Le but est de bien les former, les faire progresser et les amener au plus haut niveau possible. Naturellement, les décisions sont partagées avec la famille Mégret. 

En plus du haras de Clarbec, qui sont vos autres propriétaires? Sur quels autres chevaux pouvez-vous compter pour le sport à moyen terme?

Je travaille depuis peu avec Ohlala Sellerie, pour la sellerie et les équipements, mais aussi parce que j’ai une jument qui m’est confiée, Dolce EDS (SF, Kannan x Experio), en qui je crois beaucoup. Elle est un peu tardive mais très agréable. Par ailleurs, j’ai pas mal de chevaux en copropriété avec Nicolas Gravet, dont Flash du Puits (SF, Mylord Carthago x Rosire), qui s’illustre sur le circuit des sept ans. Nous collaborons depuis plusieurs années. Nous avons acheté Flash à trois ans, et il nous a toujours surpris. À six ans, il a été très bon. Cette saison, il a très bien redémarré. Nous avons connu un petit passage à vide, mais davantage par ma faute que la sienne. Je crois également beaucoup en lui. Même si ce n’est sûrement pas le cheval qui a le plus de moyens, il a toujours envie de faire plaisir et de bien faire. Avec Nicolas, nous avons également acheté Firts d’Amour (SF, President x Kannan), un mâle de sept ans vraiment tardif mais génial qui était jusqu’à présent monté par un de mes cavaliers. 

Et je n’oublie pas ma jument, la première de notre élevage familial, Freestyle de John (SF, Élan de la Cour x Hurlevent de Breka), qui a sauté son premier Grand Prix Top 7 (à 1,35m, ndlr) mi-mai à Pernay et qui nous surprend de jour en jour. Nous sommes super heureux d’avoir fait naître cette jument. C’est un vrai bonheur pour nous, parce qu’en plus de montrer de belles choses, c’est un amour. Nous sommes tous très attachés à elle.

À plus long terme, quels sont vos objectifs? Avez-vous les Jeux olympiques de Paris 2024 dans un coin de la tête ou vous projetez-vous plutôt vers ceux de 2028 et 2032?

Nous rêvons tous des CSI 5*, des Jeux olympiques, des championnats du monde et d’Europe, c’est sûr. Cependant, je suis réaliste. J’ai encore beaucoup de chemin à faire avant d’arriver là. J’aimerais réussir en CSI 3*, puis 4* et 5* mais chaque chose en son temps. Rêver des JO de Paris serait très ambitieux de ma part. Je ne m’estime pas prête. En 2024, qui plus est en France, l’encadrement fédéral va favoriser des couples très réguliers et qui ont beaucoup d’expérience. De ce fait, je ne pense pas avoir ma place.



“Plus jeune, je me fixais l’objectif d’évoluer en CSI 5* à dix-huit ans”

On sait que la transition vers le haut niveau en Jeunes et l’élite en Seniors est difficile et qu’elle dépend aussi beaucoup des chevaux. Comment jugez-vous votre parcours ces dernières années? Ne vous impatientez-vous pas parfois devant les difficultés et le fait que d’autres cavaliers plus jeunes que vous concourent régulièrement en CSI 4* et 5*?

Il est vrai que la transition est brutale après les Jeunes Cavaliers. Après avoir été suivis et gérés avec un cadre et un circuit dédié, on se retrouve un peu lâchés dans le vide (même si les CSI U25, encore trop peu nombreux, sont là pour limiter cet effet, ndlr). Je pense avoir vécu un an et demi de battement, où il ne se passait pas grand-chose, le temps de me reconstruire un piquet. Cela coïncide aussi avec le moment où j’ai davantage collaboré avec la famille Mégret, et récupéré des chevaux comme Vahiné de Favi (SF, Number One d’Iso SFA x Rif du Crocq, AA) ou Bassano. J’avais besoin de me mettre en route avec eux et de bien les connaître avant d’espérer sauter plus haut, et je ne suis pas arrivée au bout! Pour autant, je pense que nous ne sommes pas trop mal débrouillés parce que nous formons une équipe et que nous ne sommes pas trop loin de la vérité.

Plus jeune, je me fixais l’objectif d’évoluer en CSI 5* à dix-huit ans, puis de participer à tous les plus beaux concours de la planète. Et je me suis vite rendu à l’évidence que ce n’est pas si facile que cela! Chacun avance à son rythme. Moi, je n’envie personne, je suis très contente de ce que je fais, de ce que nous faisons tous ensemble et des chevaux que j’ai la chance de monter. Par exemple, Bassano et Corrado, qui sautent maintenant 1,50 m, c’est moi qui les ai emmenés jusque-là, grâce à ce travail d’équipe, et cela me rend heureuse. Si d’autres cavaliers évoluent plus vite que moi, tant mieux pour eux. Me concernant, je ne cours pas après tous les plus beaux concours, je ne suis pas encore prête.

En dehors du sport, qu’est-ce qui contribue à votre équilibre?

J’ai la chance d’avoir une famille très présente. Chez nous, c’est une mini ferme, très nature: nous avons tous nos petits animaux, avec lesquels j’aime passer du temps. J’aime bien aussi sortir de temps en temps avec des amis pour un resto ou des parties de karting, mais j’ai quand même beaucoup la tête dans le sport, alors avoir toute ma famille autour de moi est hyper important.

Avez-vous voté à l’élection présidentielle? Vous intéressez-vous à la campagne pour les législatives?

Oui j’ai voté parce que c’est important d’exprimer ce qu’on pense dans les urnes, mais ce n’est pas quelque chose qui m’intéresse énormément.

Que vous inspire le monde qui vous entoure, et notamment les débats au sujet du bien-être animal?

C’est un sujet très sensible, très délicat. Il y a beaucoup d’amalgames autour des chevaux. Il y a quelques jours, la dernière compagne de L214 (montrant un chien harnaché et embouché en le comparant à un cheval, ndlr) a totalement sorti une chose de son contexte. Le problème est qu’on parle souvent de ce qui ne va pas, mais jamais de tout ce qui va. C’est dommage de mettre en avant cette partie-là sachant que nos chevaux sont hyper heureux dans leur immense majorité. Tous ceux que j’emmène en concours sont heureux d’y aller. Ils vivent pour cela, ils préfèrent être sur un terrain de concours que dans un paddock. J’ai des chevaux qui sont dingues de la piste, ils aiment ce sport. Je pense que ces amalgames sont le fait de gens qui ne connaissent pas grand-chose à notre univers. C’est dommage parce que cela donne de notre sport une mauvaise image, et une image vraiment éloignée de la réalité.

Que peut-on vous souhaiter?

Beaucoup de bonheur! De pouvoir continuer à évoluer avec mes chevaux et de réussir. À quel niveau? On verra bien, mais de réussir!