“Je retire beaucoup de positif de cette expérience, sans occulter ce qui aurait pu être meilleur”, Corentin Pottier

Pendant la remise des prix de la Reprise Libre en Musique du CDIO 5* de Rotterdam, Corentin Pottier a fait le bilan de son expérience néerlandaise avec Gotilas du Feuillard, son fils de Totilas. Septième du Spécial avec 69,979% dans le Spécial, le couple a participé à la quatrième place de la France dans la Coupe des nations. L’occasion de revenir également sur la vidéo d’une internaute qui a particulièrement interpellé le cavalier.



Quel est votre analyse du Grand Prix Spécial du CDIO 5* de Rotterdam, que vous avez conclu avec 69,979% sur Gotilas du Feuillard (KWPN, Totilas x Ferro) ?  

Dans l’ensemble, je pense que nous aurions encore une fois aimé faire mieux, il y a eu trois fautes qui nous coûtent cher. Il y a toutefois eu tellement de bonnes choses, que le plus important est de retenir cela, de le garder en tête et de capitaliser dessus pour la suite. Malgré les fautes, prendre part à une remise des prix à Rotterdam pour ma toute première Coupe des nations à l’étranger est génial. J’en retire beaucoup de positif, sans occulter ce qui aurait pu être meilleur. 

Quelles ont été les fautes commises ? 

Gotilas a anticipé le piaffer dans le pas rassemblé, ce qui coûte cher. Il y a eu une interruption dans la ligne de changements de pied aux temps qui est arrivée parce que je n’ai pas monté cette ligne comme j’aurais dû. L’entrée du dernier piaffer et le piaffer en lui-même ont été très difficiles. Normalement, il s’agit du point fort du cheval, il faudra que j’analyse plus en détails ce qu’il s’est passé avec la vidéo. Pour le moment, je ne sais pas vraiment analyser cette faute. C’est bête, car outre la ligne des temps, les fautes sont inhabituelles et coûtent cher. La même reprise sans faute aurait pu déboucher sur une quatrième place. 

Vous avez montré beaucoup d’enthousiasme lors de la remise des prix du Grand Prix Spécial et encouragé le public à faire du bruit. Comment était-ce ? 

Je suis encore un jeune cavalier, mais il faut profiter de chaque moment car on ne sait jamais de quoi le futur sera fait. L’équitation étant un sport individuel qui se pratique à deux, nous sommes dépendants de l’état de santé de sa monture. Quand nous avons la chance d’être dans un grand événement tel que celui-ci avec un public aussi incroyable que celui des Pays-Bas, il faut en profiter. Si nous n’en profitons pas ici, nous ne le ferons jamais. Monter ici, c’est magique ! 

Sur quels détails aimeriez-vous encore progresser ? 

La progression a été paradoxalement assez constante depuis le début d’année, même si les notes ne sont pas en constante évolution. Si on regarde individuellement les notes de passage, d’appuyers au trot et au galop, tout a augmenté. Mon cheval est encore jeune donc la probabilité que les fautes arrivent va tendre à diminuer, mais est toujours assez élevée. Je ne vais pas faire plus de reprises ou dérouler davantage le Grand Prix aux écuries pour autant. Je continue à travailler sur ce qui va bien et tenter de grapiller des points un peu partout. In fine, quand la technique s’améliore, la probabilité de commettre des fautes baisse. Il faudra donc miser sur cela et continuer de travailler. Il y a treize mois, Gotilas n’avait encore jamais pris part à un Grand Prix. En être ici aujourd’hui est génial ! Nous ne sommes pas au bout, mais c’est un joli chemin que nous empruntons ensemble. Un véritable changement s’opère et je suis heureux que cela se produise.



“La critique positive est rare”

Quel est votre bilan concernant votre saison jusqu’ici ?

La saison a été assez chargée. Nous avons bien joué le jeu avec Gotilas, l’expérience que nous avons engrangée nous a beaucoup faits progresser. Honnêtement, la stratégie a été très bien menée, notamment avec les deux semaines à Hagen puis Rotterdam… Cela a été très enrichissant. Il ne faut pas oublier que nous sommes cavaliers de concours mais aussi entrepreneurs, jardiniers, palefreniers… Nous avons toutes les casquettes et le fait de partir deux semaines implique de l’organisation. Cela permet de se concentrer uniquement sur le sport. Nous avons une équipe importante à la maison, que je remercie beaucoup car c’est grâce à elle que nous pouvons nous permettre de participer à ces excursions qui ont été positives pour le cheval comme pour moi.

Quels sont les chevaux qui pourraient épauler Gotilas dans le futur ?

Nous avons plusieurs chevaux, que nous travaillons et que nous avons envie de mener au plus haut niveau. Généralement, nous achetons des poulains entre trois jours et six mois, puis les construisons petit à petit à la maison pour qu’un jour ils puissent participer à ces épreuves. Nous prenons le temps qu’il faut avec une véritable politique d’investissement sur le long terme. Grâce à cela, nous avons toujours des chevaux qui arrivent. Nous essayons toujours d’avoir trois ou quatre coups d’avance et j’espère que la relève sera aussi bonne que Gotilas. 

Récemment, une internaute a publié sur Tiktok une vidéo dans laquelle elle montre l’une de vos reprises à Compiègne. Elle commente que la justesse des mouvements n’est pas suffisamment récompensée, comme cela est le cas dans votre prestation selon elle, au profit des allures très expressives. L’avez-vous vue et qu’en avez-vous pensé ? 

Oui, je l’ai vue ! Je dois dire que ce qui m’a interpellé dans cette vidéo, ce n’est pas tellement la partie qui concerne les points. Ce sont des discussions de fond à mener, mais ce qui m’a le plus marqué, ce sont les commentaires si positifs de gens qui ne me connaissent pas ou qui ne sont pas français et qui ont juste vu le Grand prix ou le Spécial de Compiègne. Ils se sont dit que c’était bien, que l’équitation était belle… ça c’est génial ! Je l’ai vue quelques jours après Compiègne et j’ai dû regarder la vidéo dix fois. Pas pour flatter mon égo, mais il faut être tout à fait honnête, les moins bonnes choses sont plus souvent mises en avant que les bonnes. Lorsque quelqu’un prend la peine de faire un montage pour dire que telle ou telle chose était bien pour cette raison, je trouve ça génial. C’est rare d’avoir des gens qui sont enfin dans la critique positive en disant, “regardez, c’est peut-être vers ça ce vers quoi il faut tendre”. J’ai trouvé l’initiative super et je l’en remercie parce que cela fait plaisir et c’est un débat intéressant.

Pensez-vous comme elle que les notes ne récompensent pas suffisamment la bonne exécution des mouvements mais plutôt des allures impressionnantes ? 

Selon moi, ce ne sont pas deux choses à opposer. L’un peut aller avec l’autre mais ce que j’essaie de transmettre à mes élèves et que j’essaie de réaliser quand je monte mes chevaux, c’est l’envie de montrer une équitation propre, facile pour le cheval et qui va dans le “bon sens”. Être dans cette quête ne veut pour autant pas dire que je ne cherche pas plus d’allures et d’expression. Si je veux monter sur un podium ici, il faut davantage d’allures démonstratives. Il donc faut se demander comment une base technique juste peut amener à développer les allures du cheval. C’est vraiment important, car monter des chevaux extravagants, qui ne sont pas justes techniquement ne m’intéresse pas. Je préfère détricoter et revenir à des choses basiques. Quand la base est acquise et ancrée, nous pouvons chercher plus loin. En travaillant un cheval, nous posons une brique après l’autre et créons les fondations d’une maison. Une maison peut avoir la plus belle façade, si la fondation n’est pas correcte, elle finira par s’écrouler. Les fautes me touchent peut-être moins que d’autres. Je me dis que c’est peut-être parce que quelque chose dans la construction qui n’a pas été assez travaillé ou bien acquis. Par exemple, en travaillant une ligne de changements de pied aux temps, je ne vais pas m’amuser à la refaire des centaines de fois mais plutô travailler la qualité du galop, la rectitude, la réaction aux jambes. Revenir aux bases, en somme ! Lorsque les bases seront saines, alors cela peut fonctionner et il n’y a plus de fautes sur les changements de pieds au temps !