Valentin Pacaud succède à Audrey Teixidor au haras de Talma

Parmi les changements marquants d’écuries, l’arrivée de Valentin Pacaud au haras de Talma ne passe pas inaperçu. Celui qui a mené la toute bonne Garance de Vains (SF, Diamant de Semilly x Ogano Sitte) au titre de vice-championne du monde des chevaux de six ans, dimanche dernier à Lanaken, en Belgique, succède à Audrey Teixidor. Valentin, âgé de vingt-six ans, dispose déjà d’une solide expérience en tant que cavalier professionnel, du fait de ses nombreuses expériences passées, faisant de lui l’un des formateurs les plus en vue ces dernières années.

Originaire de La Rochelle, il débute sa formation chez Vincent Blanchard, avant d’accepter dans la foulée un premier emploi chez Jérôme Gachignard. “J’ai débuté en bas de l’échelle, comme tout le monde. J’étais groom et avais quelques chevaux au travail à la maison. Un élément perturbateur est venu jouer en ma faveur. Jérôme s’est sectionné le tendon d’Achille, ce qui l’a contraint au repos forcé durant six mois. J’ai donc pris le relais et commencé à monter des jeunes sur le Cycle classique, dans les épreuves de Formation. J’ai aussi pris en charge ses chevaux de tête, afin de les garder en condition. C’est ainsi que j’ai donc débuté à 1,35m. Pour l’anecdote, j’ai pu vivre ces premières expériences avec Ushuaia d’Aureil (SF, Nartago x Limbo), rebaptisée Golden Wave, qui a concouru jusqu’en Grands Prix CSI 5* par la suite avec la Britannique Louise Saywell, et Great Miracle (BWP, Shindler de Muze x Mr. Blue), compétitif jusqu’en Grands Prix 2*. ‘Le malheur des uns fait le bonheur des autres’, comme dit le dicton.”

“Au bout de deux ans, je suis parti en Allemagne, chez la famille Krieg”, reprend Valentin. “À l’époque, Niklas concourait en Coupe du monde et venait de gagner l’étape de Leipzig en selle sur Carella V (Holst, Clearway x Concerto II). Mon travail consistait à le seconder en montant principalement des chevaux de sept et huit ans en épreuves nationales, avant qu’il ne les récupère pour les CSI. Le système reposait sur un nombre restreint de chevaux sélectionnés sur leur qualité, appartenant pour la plupart à de gros investisseurs suisses. Je n’avais aucune pression du résultat en concours, ce qui m’a permis de prendre confiance en moi. C’était aussi un système très allemand, donc très exigeant et rigoureux. J’ai considérablement amélioré mon équitation et appris en matière de gestion d’une écurie de concours. Sincèrement, je ne me voyais pas partir de là-bas pour n’importe quoi. On m’a proposé de revenir travailler en France, pour Marc Dilasser. Une telle opportunité ne se refuse pas. Pendant deux ans et demi, j’ai assuré la formation de ses jeunes chevaux. C’est ainsi que j’ai couru mes premières finales nationales du Cycle classique de Fontainebleau, avec Chamann Has (SF, Mylord Carthago x Socrate de Chivré) et Émir du Fresne (SF, Bisquet Balou C x Hélios de la Cour II), entre autres”, explique celui qui a participé aux débuts de Folie de Nantuel (SF, Luidam x Diamant de Semilly), propre sœur de l’étalon vedette Candy de Nantuel*GFE.

“Beaucoup de Français devraient se rendre au moins une fois à Lanaken”, Valentin Pacaud

“J’ai ensuite vécu trois saisons en tant que cavalier de concours à l’élevage de Vains. Du fait de leurs obligations professionnelles dans l’Est, Christian Bihl et sa famille m’ont laissé beaucoup d’autonomie dans la gestion des chevaux, âgés de quatre à huit ans. Maxime Letellier, mon cavalier maison, me prêtait main forte au quotidien dans le travail de la trentaine de chevaux du haras. Ainsi, j’ai pu disputer mes premiers Mondiaux à Lanaken en 2021 avant d’y retourner cette année avec Héroïne de Vains (SF, Diamant de Semilly x Allegreto) sur laquelle j’ai fini troisième de la Consolante du championnat des cinq ans, Heidi de Vains (SF, Kannan x Obéron du Moulin), douzième du championnat des femelles de cinq ans à Fontainebleau et labellisée Excellents, et Garance de Vains”, dont la troisième mère n’est autre que Sixtine de Vains (alias Sarena, SF, Calvaro x Damoiseau d’Or), grande gagnante internationale avec le Suisse Pius Schwizer puis le Britannique Ben Maher.

À propos de Lanaken, Valentin Pacaud estime que “beaucoup de Français devraient s’y rendre au moins une fois pour s’imprégner de l’organisation, de l’atmosphère et autres. les parcours sont ultra modernes, aux cotes et très techniques. Les paddocks sont assez petits: tout se fait à main gauche, y compris les sauts de détente. Le double sans-faute rapide est nécessaire pour espérer se hisser en finale. C’est très formateur, mais il faut des chevaux précoces et avancés dans le travail car c’est l’antichambre du grand sport.”

Ainsi, le chapitre de Vains se conclut de la plus belle des manières pour Valentin, avec le titre de vice-championne du monde des six ans de Garance. “C’est une vraie dame, très sanguine et ultra rapide, qui se donne toujours pour son cavalier. Je n’ai pas voulu lui demander encore plus en finale, surtout à 1,40m. Et cela a payé. Pour la petite histoire, j’ai récupéré Garance au travail à cinq ans. Nous avons bouclé onze sans-faute en quatorze parcours et terminé quinzième à Fontainebleau grâce à un triple sans-faute. Cette année, elle a réussi treize sans-faute sur seize, s’est classée deuxième du Grand Prix national des six ans organisé à La Haye-Pesnel, avant de conclure sa saison à Lanaken. Elle restera l’un des chevaux m’ayant le plus marqué au haras du Fougeray. Les produits de Saga des Nauves (SF, Dollar dela Pierre x Chenu du Plessis), à savoir Destinée de Vains (SF, Untouchable 27, vendue depuis à Charlotte Mordasini et Mark McAuley, ndlr), Épisode de Vains (SF, Vagabond de la Pomme) et Gattaca de Vains (SF, Kannan), m’ont également marqué, car précoces et très qualiteux. Je n’oublie pas non plus Fahrenheit de Vains (SF, Cornet Obolensky x Qredo de Paulstra), parti chez Gregory Wathelet durant l’été. Pour moi, il a été jugé trop rapidement en France, du fait de sa tardivité. Outre son magnifique modèle, il a un énorme galop. C’est l’un des chevaux ayant le plus de moyens que j’aie pu monter. Il est à construire, mais je suis certain qu’on entendra parler de lui.”

Valentin laisse sa place à Victor Cherré et s’en va donc rejoindre l’équipe du haras de Talma de Michel Guiot, éleveur, étalonnier et président de la Société hippique française. “Quitter Vains n’a pas été une décision facile mais je suis jeune et j’ai besoin d’engranger de l’expérience, en sachant que mon but à terme serait de m’installer. J’aurai davantage de chevaux de sept et huit ans à valoriser chez Michel Guiot. C’est un nouveau challenge pour moi, mais je ne perdrai pas tous mes points de repère pour autant. Frédéric David, dont je sollicite l’appui technique depuis plusieurs années, viendra me faire travailler là-bas”, conclut-il.

Audrey Teixidor et Xavier Gounon à leur compte

De son côté, Audrey Teixidor et son compagnon, Xavier Gounon, tous les deux cavaliers à Talma, ont décidé de franchir ce cap de l’installation. “Nous avions vraiment envie de créer de notre entreprise. En prenant cette décision, nous savons que tout est à reconstruire. Nous repartons de zéro. C’est aussi un gros challenge pour nous, mais nous sommes motivés”, explique la cavalière, forte de ses expériences aux haras des M, de Villers et de Talma. “Notre cible de départ sera les jeunes. au fur et à mesure, nous espérons que des chevaux plus expérimentés nous rejoindrons”, poursuit celle qui fut récompensée du titre de meilleure préparatrice de jeunes chevaux en 2019. Le couple bénéficie des installations complètes de Pauline Henry, situées à Piffonds, dans l’Yonne. “La proximité de Fontainebleau et de l’Île-de-France nous est apparue comme une bonne solution afin de développer notre activité.”Leur souhait est de structurer leur activité autour de la valorisation et du commerce tout en proposant en parallèle leurs services de coaching. “Sur place, nous avons la possibilité de faire travailler une bonne vingtaine de chevaux.” Il faut dire qu’Audrey a été à bonne école à Talma. « Cela faisait sept ans que j’étais chez Michel. Quand je suis arrivée, je concourais à 1,35m. Et à mon départ, j’ai franchi le cap des épreuves à 1,50m. Michel est un mordu d’élevage et de génétique. C’est ce qui le passionne. Évidemment, nous échangions beaucoup quant à l’évolution des chevaux, mais au quotidien, il me laissait gérer l’organisation de l’écurie de concours. J’ai donc pu monter beaucoup de chevaux. Les quatre premières années, j’avais une vingtaine de chevaux de quatre à six ans à valoriser. Ensuite, Michel m’a confié des chevaux plus âgés, comme Baloubet de Talma (SF, Baloubet du Rouet x Cento), classé en CSI 3* à Roeser, au Luxembourg, et Cocaïne de Talma, sa propre sœur, avec laquelle j’ai fini en gagnant le Grand Prix CSI 1* de Sancourt, en juin dernier. J’ai aussi une pensé pour Cocktail de Talma, leur propre frère, et Chagall de Toscane (SF, Norton d’Éole x Opium de Talma), deux étalons extraordinaires, mais je les ai montés moins longtemps que Baloubet et Cocaïne. Avec ces deux-là, je peux dire que j’ai parcouru un bon bout de chemin. Au départ, le défi était de taille, car Cocaïne était très sensible. Il m’a fallu la comprendre puis me faire comprendre, pour obtenir ce que j’espérais d’elle. Quant à Baloubet, j’ai conscience que ce cheval, très délicat également, m’a vraiment fait passer un cap. Je lui en suis très reconnaissante. Obtenir leur complicité a été la plus belle gratification que l’on pouvait m’offrir”, se remémore la jeune entrepreneuse.