Transport des chevaux, des usages en mutation

Le marché du transport équin se porte bien à l’heure actuelle en France et semble avoir trouvé son public, au regard de la foule toujours plus dense qui se presse dans les allées des halls accueillant les stands réservés aux sociétés de transports lors des différents rendez-vous équestres de l’Hexagone. Achète-t-on de la même manière qu’hier ? Un acheteur fera-t-il ses choix de la même façon demain? Le point en chiffres avec des lecteurs. 



Un panel de sept cent quarante-cinq lecteurs français ou francophones a répondu au sondage publié en ligne en octobre 2022 sur les habitudes de consommation des transports pour chevaux mis en place par GRANDPRIX et Horse Development, spécialiste de l’étude de marché dans la filière équine. Les sondés sont à large majorité propriétaires d’un ou deux chevaux, pratiquants de saut d’obstacles, cavaliers de bons niveaux et assidus (montant à cheval plus de trois fois par semaine), et évoluant en compétition Amateurs.

Parmi notre panel de sondés propriétaires d’un moyen de transport (qui correspond à 66 % des votants), 68 % le sont d’un van et, en grande majorité (78%), d’un van deux places. Quant aux professionnels, ils sont plus nombreux à être équipés d’un camion poids lourd (PL) ou d’un camion véhicule léger (VL). Le van est souvent le premier moyen de transport imaginé par les propriétaires pour conduire leur cheval chez le vétérinaire, en concours ou encore pour partir en randonnée. Facile à stocker

dans une écurie, moins cher qu’un VL, un van s’attache et se détache rapidement, permettant au cavalier d’utiliser son véhicule tracteur sans nécessairement se déplacer avec un lourd engin consommant beaucoup. Ceci étant dit, le VL offre généralement une conduite très agréable car proche de celle d’une voiture classique et, à son instar, peut souvent se conduire avec le seul permis B. Le VL a aussi l’avantage de généralement convenir davantage aux chevaux délicats durant le transport. «Je n’avais pas de véhicule tracteur adapté et je me sentais intimidée par la conduite avec une grosse remorque, j’ai donc préféré le VL car il me correspondait mieux », commente Léa, une des lectrices ayant répondu au sondage. « Mais à mon sens, il n’y a pas de raisons d’opposer les vans aux VL car chacun a ses avantages. En outre, les deux décotent peu, ce qui per- met une revente facile en cas d’évolution de ses besoins. » 



Pour quels usages

Le public interrogé étant majoritairement compétiteur, on retrouve les déplacements pour partir en concours en première place de l’usage d’un transport. Viennent ensuite les urgences vétérinaires, les allers-retours pour s’entraîner dans une autre structure, les voyages pour randonner ou partir en vacances, les déplacements concernant l’élevage et le commerce et, enfin, le transport d’objets volumineux liés ou non à l’équitation. «L’utilisation pour urgence vétérinaire n’est pas si fréquente que cela», remarque Benoît. «C’est davantage par anticipation que l’on prévoit ce genre de déplacements car c’est la hantise de tout cavalier. Personnellement, j’utilise ponctuellement le van de mon voisin pour déplacer mes chevaux d’une pâture à l’autre.» «J’ai été assez surprise de la fréquence avec laquelle j’utilisais mon nouveau VL», relève Émeline. «J’embarque rapidement mon cheval et tout aussi rapide- ment nos affaires, et je m’accorde beaucoup plus de sorties. C’est un vrai bénéfice, je ne regrette pas mon achat.» Si c’est plus anecdotique, plusieurs lecteurs ont également fait part de leur usage d’un van ou VL pour transporter meubles, foin et nourriture pour chevaux. «J’aide pour les déménagements et je me constitue souvent de plus grosses réserves de nourriture pour un meilleur prix. Je me déculpabilise aussi un peu avec cela, car je trouve que je n’utilise pas assez mon van...», commente Juliette.

La fréquence d’usage des propriétaires de van, VL ou PL est de plusieurs fois par mois pour la majorité des sondés (56%). Le reste du pourcentage se répartit comme tel : 15% utilisent leur moyen de transport une fois par mois, 13% plusieurs fois par semaine, 10% de manière aléatoire, 5% moins d’une fois par mois et, enfin, 1% quasiment tous les jours. Cette utilisation se traduit ensuite en kilométrage: 33% des propriétaires ayant répondu au sondage parcourent entre 1 000 et 5 000 km par an, 23% ne savent pas et/ou ne calculent pas, 21% roulent entre 5000 et 10000km, 11% moins de 1000km, 9% se situent entre 10000 et 20000km et, enfin, 4% cumulent plus de 20000km par an. «Je fais partie des gens qui ne prêtent pas attention au kilométrage spécifique du transport équin car je tracte un van ne nécessitant ni contrôle technique, ni un contrôle régulier de son moteur. Néanmoins, je sais qu’il est préférable de connaître son kilométrage pour estimer à l’avance les réparations du véhicule ou pour une question d’assurance», introduit Romain.

Grâce aux résultats du sondage, on peut justement avancer que seuls 33% des propriétaires de vans effectuent un entretien annuel de leur remorque, contre 96% pour les propriétaires de VL et, étonnement, 89% – donc moins que pour les VL – pour les propriétaires de PL. « On oublie assez vite que le van nécessite des points d’entretien», expose Karine. « C’est un concessionnaire qui m’a appris à gérer ces vérifications, à savoir s’assurer du bon fonctionnement des feux de signalisation, de la pression des pneus (et d’en avoir un ou deux de secours!), de la bonne et libre utilisation des freins, de jeter un œil régulièrement au plancher et au châssis, et, enfin, de graisser tout ce qui est “graissable”, en particulier la roue jockey et les pistons du timon du van. » 

 17% des sondés déclarent vouloir reporter leur achat en raison du contexte économique




Premier achat ou renouvellement ?

Concernant les 66 % de propriétaires moyens de transport, 46% d’entre eux ont effectué un achat (de van, de VL ou de PL) récemment, à savoir entre un an et cinq ans. Pour 23%, l’achat remonte entre cinq et dix ans, 14% ont acheté leur véhicule cette année, et 10% ont effectué un achat il y a dix à quinze ans. Dès lors, la majorité des véhicules en circulation semblent être relativement jeunes, contrairement à l’âge moyen des véhicules particuliers non équestres en France, qui se situe autour de douze ans. En sus, tous acheteurs confondus, la part d’un achat d’occasion est légèrement plus élevée (57 %) que celle du neuf (43 %).

Le sondage en ligne mis en place par GRANDPRIX et Horse Development a également permis de connaître le budget moyen dépensé par les acheteurs en fonction de chaque véhicule. Étant donné que seuls 17% des sondés déclarent vouloir reporter leur achat en raison du contexte économique actuel (inflation générale et hausse du prix de l’essence), cela laisse à penser que ce budget était planifié et sécurisé de longue date. Ainsi, on peut relever qu’un budget consacré aux vans se situe entre 5 000 et 10 000 euros pour 51 % des acheteurs interrogés ; 29 % ont, quant à eux, déboursé moins de 5000 euros pour leur achat et 15% ont eu un budget compris entre 10 000 et 20 000 euros. Au-delà de 20000 euros, la part est très minoritaire (1 à 2%). Ces prix se distinguent naturelle- ment entre les différents types de véhicules (voir graphique page suivante).

«On oublie souvent que le terme poids lourd désigne légalement tout véhicule qui dépasse 3500kg en poids total autorisé en charge (PTAC), ce qui le rapproche du poids maximum des VL sur cet aspect. Néanmoins, dans la vie courante, on va plus souvent utiliser le terme poids lourd pour évoquer une semi-remorque permettant d’embarquer six à sept chevaux et qui est, dès lors, davantage destinée aux professionnels», remarque Alexandre à ce sujet.

Sur un autre plan, on note que la part de primo-accédants et la part d’acheteurs renouvellant leur véhicule se partagent le marché de manière quasi identique. Dans 40 % des cas d’achat de renouvellement, c’est le changement de besoins qui en a été le déclencheur avec, par exemple, l’achat d’un second ou troisième cheval. Vient ensuite le besoin de changement en fonction d’une usure ou d’un kilométrage trop im- portant (30% des cas). Toujours selon notre sondage, le renouvellement d’un véhicule correspond à une nécessité accrue de sécurité dans 21 % des cas. Ce chiffre peut étonner de prime abord puisque les cavaliers misent souvent en premier sur la sécurité, ce qui peut également se traduire par l’importance du choix des marques dans l’acte d’achat, mais il est sans doute à mettre en relation avec la confiance gagnée avec l’ancien véhicule. Dans 12% des cas, on retrouve un achat poussé par un attrait d’innovation, puis à 6% par rapport à une offre promotionnelle attractive. Enfin, seulement 6% des cas d’achat de renouvellement résultent d’une panne ou d’une casse sur l’ancien moyen de transport. «Les promotions sont un beaucoup de pouce quand il s’agit de racheter mais, en effet, vu le prix à débourser au final, elles n’ont pas la même influence que sur un achat plaisir au budget à deux chiffres. Néanmoins, les belles promotions amènent à furieusement réfléchir... J’en suis la preuve vivante car j’ai tout récemment été convaincue d’acheter lors du salon du cheval du CHI Longines d’Equita Lyon! À noter toutefois que le concessionnaire a apporté un argument de poids en offrant à mon cheval une autre manière d’embarquer», rapporte Marie.




L'occasion, un marché plébiscité et porteur

À l’heure actuelle, l’achat d’occasion truste, voire dépasse l’achat du neuf dans le secteur des transports pour chevaux, où la concurrence est rude entre acheteurs. «Le marché est tendu et les offres d’occasions partent trop vite et laissent peu de temps à la réflexion», critique Marine. «J’ai acheté mon van neuf car il n’y avait aucune annonce d’occasion dans ma région pour un van une place et demie, souvent le plus recherché », appuie Léa. «L’achat d’occasion séduit car il ne nécessite pas de délai de construction, contrairement au neuf, et demande un budget moindre. Cependant, l’écart entre le prix du neuf et de l’occasion a tendance à se réduire, en particulier pour les véhicules récents, qui ne restent jamais longtemps sur le marché», rapporte à propos un concessionnaire. Pour Mélanie, «il y a également un manque de confiance lorsque l’achat se fait entre particuliers: le véhicule est-il fiable et le prix justifié ? » 

Hélas, un achat d’occasion effectué auprès d’un particulier est en effet soumis à des aléas quand il est question d’être certain ou non de l’état du véhicule et de la bonne foi du vendeur. Une partie des achats d’occasion se fait ainsi via des connaissances ou des concessionnaires ayant pu de leur côté faire jouer leur expertise pour communiquer le réel état du véhicule. Les professionnels, quant à eux, se tournent en grande majorité vers un achat de véhicule neuf pour partir sur une page blanche. «Je pense qu’acheter d’occasion n’est pas un critère d’achat nécessaire (en effet, il n’est évoqué que dans 26% des sondés, ndlr)», développe Christelle. «On va surtout regarder la réputation des produits de la marque, lire des avis sur des réseaux sociaux et décortiquer les avantages d’un véhicule d’occasion vis- à-vis d’un neuf. Je connais plusieurs acheteurs qui ont préféré, à prix égal, acheter tel modèle de véhicule d’occasion plutôt qu’un autre neuf mais moins intéressant à leurs yeux. » 

 



La hausse progressive des locations longues et courtes durées

Longtemps minoritaire ou réservée aux longs trajets exceptionnels, la location de courte durée – que ce soit auprès d’un trans- porteur ou d’un particulier – s’invite de plus en plus dans le secteur des moyens de transport pour chevaux. Pallier une absence de véhicule tracteur puissant pour un van, avoir un besoin ponctuel d’une plus grande capacité de place et / ou de poids, ou encore ne pas avoir de frais au quotidien pour les assurances, l’entretien et les éventuelles réparations, nombreuses sont les causes évoquées en faveur de la location. Plusieurs sondés ont fait part de leur facilité à louer un véhicule à proximité quand d’autres ont, au contraire, soulevé un manque criant de possibilités dans leur région. « La proximité est un critère essentiel car elle va permettre de réduire les temps de trajet entre notre domicile et celui du loueur, ce qui est vital lorsque l’on rentre d’une sortie ou d’un concours par exemple, car on est souvent très fatigué, avec le risque d’accident qui s’ensuit. C’est également une question de consommation d’essence : si le loueur est à plus de 50 km, cela commence à chiffrer...», relate Manon.

«Avoir une dizaine de VL à louer facilement autour de chez moi a fortement pesé sur la balance quand la question d’un éventuel achat s’est posée », déclare un lecteur. « Je paye moins de 3000 euros par an pour louer environ une fois par mois un VL de bonne qualité et je n’ai pas à me préoccuper de l’entretien ni à débourser une grosse somme d’un coup. Ainsi, la location ponctuelle me convient parfaitement. » Pour Laurence, il n’était pas question de proximité mais plutôt d’usage sur la durée : « La location n’était pas adaptée à mon cas car je voulais emmener mon cheval sur de longues périodes (notamment pendant les vacances d’été, pour une durée de quatre à cinq semaines).» 

Pourtant très présente dans le secteur automobile classique, la notion de location longue durée est encore minoritaire auprès des équitants. «Je ne savais même pas que cela existait!», s’exclame Sandrine. «J’ai toujours connu des gens qui payaient le prix d’achat en une seule fois ou, au pire, en plusieurs fois. » De fait, les résultats du sondage collent à la réaction de Sandrine, car seulement 7% des lecteurs interrogés n’ont pas directement acheté leur van et sont passés par une forme de crédit de location, quand ils sont 18% à avoir fait de même pour un VL. Une location de longue durée se décline en deux versions : soit la classique du me^me nom, LLD, qui permet de louer un véhicule sur une durée définie en contrepartie du versement d’un loyer mensuel, et pour laquelle l’entretien et les réparations du véhicule en cas de panne sont inclus dans le contrat ; soit la location avec option d’achat (LOA) qui permet, comme son nom l’indique, d’acheter le véhicule à moindre coût via une déduction des mensualités versées ou, comme pour la LDD, de rendre le véhicule à la fin du contrat et de se tourner vers un nouveau modèle. La durée de finance- ment d’une LLD ou d’une LOA est souvent plus courte que celle d’un crédit classique et peut dès lors intéresser les personnes qui n’ont pas accès à un prêt bancaire à taux minime. Étant donné la hausse actuelle du taux de crédit, il semblerait que les LLD et LOA intéressent davantage de monde a` l’avenir car 21 % des lecteurs non-propriétaires d’un moyen de transport pour chevaux les envisagent pour leur usage ou achat d’un van dans les six mois, quand 32% les considèrent pour l’usage ou l’achat d’un VL.



Quid des achats à venir ?

Parmi notre panel de sept cent quarante- cinq sondés, la très grande majorité (88%) des non-équipés en moyen de transport souhaiterait l’être, mais seulement 33 % pensent sauter le pas d’un achat dans les six mois à venir. Parmi les raisons évoquées de ce non-achat viennent un manque de budget pour le véhicule désiré, une préférence pour la location occasionnelle, le prêt via un ami, une lacune du permis adéquat ou encore une trop faible capacité de traction du véhicule pour l’achat d’un van. En effet, «l’arrivée des véhicules hybrides ou complètement électriques tend à faire baisser la capacité de traction, à l’heure actuelle moindre que celle procurée par le diesel, ce qui impacte forcément le poids autorisé à tracter», commente un concessionnaire. Et il n’est pas question de passer outre les capacités de traction de son véhicule sous peine d’amende – les contrôles sont d’ailleurs de plus en plus réguliers – et surtout d’accident car le van ne sera pas stable et louvoiera, voire empêchera le véhicule de grimper une simple côte!

Quelles seraient alors les solutions, étant donné que les véhicules diesel sont déclarés interdits dans le Grand Paris dès 2024 puis dans les agglomérations de Grenoble et Lyon à l’horizon 2025 et 2026, afin de lutter contre la pollution de l’air en zone urbaine ? Il semble que les consommateurs habitant en zone urbaine veuillent conserver leur véhicule tracteur aux normes futures mais vont dès lors se tourner vers des vans à capacité moindre et plus légers, quitte à rogner sur la charge utile – qui est la différence entre le PTAC et le poids à vide (PV) – que sont les passagers, les bagages et les équipements du cheval (souvent d’un volume trop important par ailleurs quand il est question de concours). «Les VL et les vans deux places étant indispensables lorsque l’on possède plus d’un seul cheval, je vois mal ce genre de véhicule disparaître!», s’exclame un lecteur. En effet, les lecteurs sondés indiquent être 36 % à vouloir acquérir un VL, et 32% un van deux places. «Peut-être verra- t-on une autre manière de conduire à l’avenir en achetant par exemple un véhicule puissant, mais polluant, exclusivement réservé à la traction et une voiture citadine pour le reste du temps. Quant aux VL et PL, majoritaire- ment diesel, ils seront probablement cantonnés aux régions non soumises aux zones à faibles émissions (ZFE). Je reste confiant quant au futur. Les constructeurs vont sans doute réussir à produire des moteurs hybrides ou électriques puissants qui nous permettront d’utiliser sans restriction nos solides VL et remorques. La France accueille de très belles marques tournées vers le transport équin qui offrent des véhicules robustes et sécuritaires, alors... croisons les doigts!»  

 Seul 33% des propriétaires de vans effectuent un entretien de leur remorque