“J’ai privilégié le projet sportif sur l’argent”, Philippe Guerdat

On l’a appris hier soir, Philippe Guerdat a été nommé sélectionneur national de l’équipe brésilienne de saut d’obstacles. Deux mois après la fin anticipée de son contrat avec la Fédération française d’équitation, le technicien suisse n’a donc pas tardé à rebondir. Sollicité par plusieurs nations, il assure avoir choisi celle dont le projet sportif le séduisait le plus. Cette année, il aura pour objectif principal de qualifier les Auriverdes pour les Jeux olympiques de Tokyo 2020. Depuis Oliva, où il entame sa tournée de repérage des cavaliers et chevaux dont il a les responsabilité, le Jurassien a répondu aux questions de GRANDPRIX.



Quelle est la genèse de cette nouvelle collaboration? Et pourquoi avoir choisi le Brésil plutôt qu’une autre nation ou un autre projet?
J’avais déjà été sollicité auparavant, mais là nous avons pu en discuter plus sérieusement. L’initiative est venue de Pedro Veniss (leader de cette équipe depuis trois ans, ndlr), qui en a discuté avec Rodrigo Pessoa, et les choses se sont faites assez naturellement. J’ai reçu plusieurs offres et comme j’avais le choix, j’ai privilégié le projet sportif sur l’argent. Je ne voulais pas m’engager pour de riches cavaliers amateurs ni pour une équipe qui évoluerait en Division 2 européenne, par exemple, ce qui m’aurait forcément moins motivé. J’en ai discuté avec mon fils Steve, qui m’a encouragé dans cette voie, en me rappelant que le Brésil disposait de très bons cavaliers et de chevaux. Franchement, c’est une très belle opportunité.
De plus, la mission est un peu moins lourde qu’en France. Presque tous les meilleurs cavaliers sont stationnés en Belgique (à l’exception notable de Pedro Veniss, établi non loin de Barcelone, ndlr) et je ne serai pas présent toutes les semaines en concours. Tout cela va me permettre de mener une vie à côté et de pouvoir faire autre chose. D’ailleurs, j’ai absolument souhaité que Pedro Paulo Lacerda (directeur du saut d’obstacles à la Confédération équestre brésilienne, ndlr) reste chef d’équipe. C’est un homme que j’apprécie beaucoup depuis que je le côtoie et avec lequel je suis ravi de travailler en tandem, d’autant que je parle pas mal de langues, mais pas encore le portugais!
 
Jusqu’à quand court votre contrat?
Nous nous sommes donné pour première échéance les Jeux panaméricains de Lima. Si jamais le Brésil ne se qualifie pas pour les Jeux olympiques de Tokyo, ce que je n’espère évidemment pas, je partirai. Et si le Brésil se qualifie, alors nous discuterons en temps voulu de la suite.
 


“Je veux me concentrer sur ce nouveau poste”


Même si le Brésil a de bonnes chances de se qualifier, il y aura tout de même une solide concurrence à Lima, entre le Canada, la Colombie, le Mexique, l’Argentine, le Chili et le Venezuela, a priori en lice pour les trois places en jeu…
Oh non, ce ne sera pas simple. Je connais trop le sport pour savoir que rien n’est acquis du tout. Je dispose de très bons cavaliers et chevaux. Si je parviens à bien les coacher et à établir les bons programmes pour chaque couple, je pense que nous pouvons y parvenir. À Lima, les épreuves seront cotées entre 1,50m et 1,55m, ce qui est un peu inférieur aux parcours des championnats d’Europe. En tout cas, oui, il y aura de la concurrence et il faudra se battre.
 
Sur combien de couples allez-vous vous appuyer pour relever ce défi?
Pour le moment, je vais partir avec une dizaine de cavaliers établis en Europe, puis élargir le jeu si nécessaire. Je pars également au Brésil dans quelques semaines pour rencontrer les bons cavaliers installés là-bas. Je ne pense pas que l’un d’eux puisse entrer en ligne de compte dès cette année pour les championnats. Pour autant, il y a un concours important (le CSI 2*-W de São Paulo), qui se tient d’ailleurs pendant la finale de la Coupe du monde (à Göteborg, où son fils Steve aura de vraies chances de succès, ndlr), donc il est important que j’y sois. Il est tout à fait possible que j’y repère quelques très bons chevaux et cavaliers, qui auraient l’intention de venir concourir en Europe.
Cette année, le Brésil disputera trois Coupes des nations de Division 1 européenne: La Baule, Saint-Gall et Geesteren. Je ferai sûrement tourner un peu les effectifs, tout en gardant comme principal objectif de préparer au mieux les Jeux panaméricains. Je me suis déjà plongé à fond dans les programmes. Et puis j’ai un rêve dans un coin de la tête: offrir à Rodrigo Pessoa une dernière sélection dans l’équipe brésilienne aux JO, qu’on lui a un peu volée à Rio. C’est encore loin, mais ce serait beau. C’est mon côté affectif!
 
Cumulerez-vous cette mission avec d’autres activités?
Non, je veux me concentrer sur ce nouveau poste. Je pourrais donner des coups de main de temps en temps à tel ou tel cavalier dont je me sens proche, mais je ne veux m’engager dans rien d’autre de sérieux.