Les recommandations face à l’épizootie de grippe équine

Dans un contexte de circulation importante de la grippe équine ces dernières semaines en Europe, et en France depuis une quinzaine de jours, de nombreux foyers recensés dans des centres d’entraînement et écuries de Trotteurs et d’un premier cas confirmé chez un cheval de galop, la cellule de crise du Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine s’est réunie avant-hier afin d’effectuer un état des lieux de la situation vis-à-vis de la grippe sur le territoire français et définir les recommandations à suivre.



Mesures de prévention générales

Sur le terrain, deux catégories de chevaux constituent un risque épidémiologique. Il y a d’abord les chevaux des foyers confirmés: des équidés, vaccinés ou non, malades, présentant toux, jetage et fièvre. Ces animaux sont porteurs d’une grande quantité de virus et le diffusent largement par les sécrétions respiratoires (gouttelettes projetées lors de la toux, jetage). Ils restent excréteurs du virus pendant environ trois semaines, donc ils doivent rester isolés pendant cette période. Et il y a les chevaux vaccinés ayant été en contact avec le virus mais qui ne présentent aucun symptôme. Ceux-ci peuvent être porteurs du virus “au bout du nez”. Les quantités émises sont réduites et les animaux sont contagieux sur une période plus courte. Cependant, ces animaux cliniquement sains peuvent être un vecteur important de la maladie par contact direct lors d’épizootie telle que celle d’aujourd’hui. Des mesures de précaution doivent également leur être appliquées. Le matériel de manière générale (soins, travail, alimentation, abreuvement, etc.), les véhicules de transport et le personnel (mains, vêtements, etc.) peuvent aussi transporter de façon indirecte le virus et contribuer de façon significative à la propagation de la maladie.



Pour les foyers confirmés ou suspicieux

En cas de foyer confirmé, il faut isoler les animaux positifs, arrêter les mouvements de chevaux dans et hors de la structure, suivre la température de ces animaux pendant au moins une semaine (période d’incubation), autant que possible deux fois par jour, désinfecter le matériel ou utiliser du matériel à usage unique, mettre en place des pédiluves devant les zones infectées (les désinfectants virucides usuels sont actifs contre le virus), désinfecter les locaux et effectuer un vide sanitaire avant toute réintroduction d’animal dans un local infecté, désinfecter les vans et camions de transport, avant et après chaque déplacement, limiter le contact des chevaux infectés uniquement au personnel responsable des soins, mettre en place un circuit de soins (débuter par les lots d’animaux sains pour terminer par les chevaux suspects et atteints), utiliser du matériel différent pour chaque lot d’animaux, réaliser les soins entre les différents lots par des personnes différents ou à défaut changer de tenue entre les différents lots. Des prélèvements réguliers (écouvillons nasopharyngés) peuvent être mis en place pour suivre l’excrétion du virus, et donc la contagiosité, au sein d’un effectif. Ces mesures de prévention doivent continuer d’être appliquées a minima vingt et un jours après constat du dernier symptôme de grippe.

En cas de suspicion, constat de symptômes respiratoires, et/ou de contact possible lors de rassemblement ayant accueilli des équidés en provenance des foyers concernés, il faut isoler, autant que faire se peut, les chevaux suspects, limiter des mouvements de chevaux dans et hors de la structure, isoler pour quarantaine les chevaux en provenance des sites infectés ou suspects, suivre la température de ces animaux pendant au moins une semaine (période d’incubation), autant que possible deux fois par jour, contacter son vétérinaire pour qu’il examine les chevaux suspects, en particulier ceux présentant de l’hyperthermie, du jetage, des œdèmes des membres et procède à des prélèvements (écouvillon nasopharyngé) si nécessaire, pour rechercher la présence du virus.



Lors de rassemblements

En tant qu’organisateur, il faut s’assurer de la bonne santé des chevaux arrivant sur les lieux du rassemblement. Il est vivement recommandé de mettre en place un protocole sanitaire avec un vétérinaire, mentionnant notamment les obligations vaccinales pour accéder au rassemblement.

La vaccination contre la grippe est obligatoire pour un rassemblement, et un rappel de moins de six mois peut être imposé. Une autre option consiste à demander la réalisation d’un test de dépistage de la grippe avec l’obtention d’un résultat négatif datant de moins de deux jours. Pour les tests de dépistage, il convient d’utiliser des tests ayant fait l’objet d’une validation rigoureuse (sensibilité terrain, spécificité, détectabilité) et de façon appropriée dans l’évolution de la maladie chez un équidé atteint. En effet, pour les chevaux vaccinés, la quantité de virus retrouvés au “bout du nez” est moindre, en particulier en début et en fin d’apparition des symptômes. Il faut évidemment s’assurer qu’aucun cheval provenant d’un foyer avéré ne se rende sur les lieux du rassemblement, mais aussi nettoyer et désinfecter les boxes avant, entre et après chaque mouvement de chevaux, mettre à disposition des points d’eau afin que les cavaliers ou soigneurs puissent s’approvisionner en eau individuellement, communiquer largement et imposer aux participants, comme au public, en particulier les enfants, le respect de pratiques préventives pour limiter le contact direct et indirect entre chevaux, notamment via les mains, le matériel, les bottes, etc. Le RESPE préconise aussi de ne pas maintenir l’organisation d’un rassemblement en cas de cheval malade ou suspect au sein de l’établissement accueillant le rassemblement

En tant que participant, il ne faut pas emmener de cheval suspect, malade ou qui a été en contact avec un cheval malade ou suspect dans tout type de rassemblement, ne pas se rendre dans un rassemblement lorsqu’un foyer a été avéré dans ce lieu, vérifier les dates de rappels vaccinaux de ses chevaux et envisager avec son vétérinaire la nécessité ou non de les renouveler ou de mettre en place un protocole de vaccination si les équidés ne sont pas vaccinés actuellement. Concernant la grippe, pour les chevaux vaccinés dont le rappel vaccinal date de plus de six mois, un rappel est vivement recommandé. Il faut aussi s’assurer de la propreté des boxes (nettoyage et désinfection avant l’entrée du cheval, puis entre les chevaux), emmener et utiliser exclusivement un matériel unique pour chaque cheval, utiliser un seau unique par cheval pour l’abreuvement sur le lieu du rassemblement remplir les seaux d’eau directement aux robinets, ne pas utiliser les abreuvoirs collectifs, limiter au maximum les contacts avec d’autres chevaux notamment des chevaux issus d’autres effectifs, isoler autant que possible les chevaux dès leur retour sur leur structure d’origine, surveiller leur état général et suivre la température les jours suivants (une dizaine de jours environ), nettoyer et désinfecter le matériel, y compris les vans et moyens de transport, se désinfecter régulièrement les mains, ne pas toucher d’autres chevaux que les siens, empêcher le public de toucher les chevaux pour ne pas créer de contact indirect.

Le virus de la grippe détruit la protection cellulaire (appareil mucociliaire) présente dans l’appareil respiratoire des équidés. Après un passage grippal, les capacités respiratoires de l’animal sont donc réduites, voire très réduites. Il est fortement déconseillé de remettre un équidé au travail dès la disparition des symptômes. En effet, le tapis cellulaire n’est pas reconstitué et l’effort respiratoire lié au travail pourra entraîner des lésions de l’appareil respiratoire, lesquelles pourront occasionner une baisse de performance importante de l’animal, voire causer des dommages irréversibles. Une mise au repos est donc obligatoire, et ce pendant au moins trois semaines. Il est préconisé une semaine de repos par jour de fièvre.



La vaccination

La vaccination est un des piliers de la prévention contre les maladies contagieuses. Elle permet de protéger de manière individuelle l’équidé vacciné en réduisant le risque d’infection et/ou en réduisant la sévérité et la durée des signes cliniques. La vaccination permet également de réduire l’excrétion de l’agent pathogène par l’équidé malade, limitant la transmission de la maladie aux autres équidés. C’est aussi une protection collective: plus le nombre d’équidés vaccinés contre une maladie est important, moins il y a de diffusion de l’agent pathogène et, de fait, plus le risque d’épidémie est faible. En cas de forte circulation de virus ou lors d’épizooties, il peut être recommandé pour des effectifs sains et des animaux en bonne santé, de vacciner ceux qui ne le sont pas et pour ceux déjà vaccinés, de renouveler les rappels si ces derniers datent de plus de six mois. Si la vaccination est fortement recommandée, elle ne se substitue pas aux autres mesures de précaution. Par ailleurs, la protection conférée par le vaccin met plusieurs semaines à s’installer, et doit être entretenue par des rappels réguliers.

Les recommandations suivantes s’appliquent à l’ensemble de la filière, toutes activités confondues (trot, galop, sport, élevage, centres de reproduction, travail, loisirs et autres. Il est conseillé pour les chevaux déjà vaccinés, en bonne santé, n’ayant pas été en contact avec des foyers avérés ou suspects, dont le rappel vaccinal remonte à plus de six mois, de procéder à un rappel. Pour les chevaux non vaccinés et non exposés, n’ayant pas été en contact avec des foyers ou chevaux confirmés ou suspects, une vaccination peut également être envisagée, mais n’aura que peu d’effet en pleine épizootie. En effet, la primo-vaccination nécessitant a minima deux injections à un mois d’intervalle, la protection commencera à être efficace lors de la seconde injection, soit quatre à six semaines après la première injection. Pour les chevaux exposés qui peuvent être en phase d’incubation, la vaccination est déconseillée et n’aurait que peu d’effet ; sur un cheval malade, la première injection risque de n’entraîner aucune réponse immunitaire, voire de déclencher plus rapidement la maladie.