“Pour les championnats d’Europe, il reste à savoir si nous serons prêts à temps car il y a du beau monde”, Cédric Hurel

Vous avez terminé septième du Grand Prix 4* le 12 mars à Vejer de la Frontera avec Fantasio Floreval Z, comment s’est déroulée cette épreuve?

C’était ma première semaine à Vejer, j’enchaine la deuxième en ce moment (entretien réalisé le 16 mars, ndlr). C’était la première compétition en extérieur de la saison pour Fantasio Floreval Z (Z, Florian de la Vie x Clinton), puisqu’en début d’année il a concouru à Bordeaux et à Opglabbeek. Nous sommes venus ici pour qu’il puisse bien s’habituer au terrain en herbe. Le concours s’est plutôt bien déroulé ; il a signé des parcours sans-faute dans la 1,50m du jeudi et du vendrediet n’a écopé que de quatre points au barrage du Grand Prix. C’est donc de bon augure, il est de plus en plus à l’aise sur la piste. Nous avons signé un bon premier parcours dimanche. Pour le barrage j’ai commis une erreur. Je n’ai pas fait une détente assez longue, il s’est un peu restreint dans le galop, j’ai voulu l’enclencher plutôt que d’attendre donc voilà ce qu’il s’est passé pour ce malheureux quatre points.

Après Bordeaux, Opglabbeek et Royan, pourquoi avoir pris la décision de prendre la route vers l’Espagne?

J’ai suivi tout simplement suivi les directives qu’Henk Nooren (sélectionneur de l’équipe de France de saut d’obstacles, ndlr) m’a demandé de bien préparer mon cheval sur l’herbe dès le début de saison. C’est l’avantage ici à Vejer de la Frontera. Fantasio n’a pas couru à Royan, il a eu une pause avant de partir avec moi en Espagne. J’ai également emmené J (KWPN, Montender x Mr Blue), qui n’a jamais concouru sur herbe, c’est l’occasion pour qu’il engrange de l’expérience. Il est sorti d’une épreuve à 1,45m comptant pour le classement mondial avec quatre points samedi donc c’est plutôt bien. J’ai aussi Castor d’Hem (SF, Ready Boy des Forêts ‘HN’ x Richebourg) avec moi.

Vous avez débuté 2023 par une participation au Jumping de Bordeaux, que retenez-vous de cette expérience? Comment décririez-vous votre début de saison?

Je pense que je n’étais pas assez préparé pour le CSI 5*-W de Bordeaux, même si le premier jour s’est bien déroulé. C’était ma première étape de la Coupe du monde. Mon expérience à ce niveau est limitée, je n’avais pas concouru depuis décembre, si ce n’est une épreuve à 1,35m la semaine d’avant… Cependant, j’ai pu voir que mon cheval et moi étions capable d’affronter ces épreuves à 1,60m en indoor. Même si je jette l’éponge, je suis arrivée en fin de parcours avec deux fautes avant d’abandonner, afin de le garder un peu plus prêt pour le Grand Prix dominical où nous sortons avec huit points. Ce parcours était assez difficile, voire plus délicat que l’étape de la Coupe du monde. Ce sont de gros parcours, sur lesquels on se remet vite le pied à l’étrier. Même si j’aurais préféré faire moins de points, je pense qu’un score de huit points reste honorable. De plus, Fantasio met toujours un peu de temps à s’enclencher comme il faut en début de saison. Cela a été le cas l’année dernière, donc commencer par Bordeaux ne nous a pas facilité la tâche, même si nous nous en sommes sortis. À Opglabbeek, c’était un peu la même chose ; quatre points le jeudi et un sans-faute dans la 1,50m du vendredi. Dans le Grand Prix, j’ai travaillé la fin du parcours. Le début de saison s’est enclenché plus rapidement qu’en 2022. 2021 n’était pas comparable parce qu’il y avait la rhinopneumonie et je n’étais pas au même niveau.

Pourquoi ne pas participer au Saut Hermès? Avez-vous dans le viseur la saison extérieure?

C’était un choix de peu concourir en indoor. En février, il y a eu Bordeaux ainsi que Opglabbeek, et j’ai choisi de mettre en route tout le reste de mon piquet de chevaux à Royan, à l’extérieur. Je n’estimais pas nécessaire de retourner à l’intérieur par la suite. Je n’ai même pas demandé à aller au Grand Palais pour ne pas faire le “yoyo” entre les deux. Fantasio reste un cheval assez sensible, surtout au paddock, et je sais qu’au Grand Palais Éphémère, il n’est vraiment pas très grand.

L’an passé, Fantasio Floreval Z a montré une régularité remarquable dans des Grands Prix 3*, 4* et parfois 5*. Quels sont vos objectifs pour cette nouvelle saison?

Essayer de faire mieux ! (rires) J’aimerais concourir plus régulièrement en 5*. Cela fait vingt ans que je suis installé à mon compte, je me suis concentré longtemps sur les jeunes chevaux. Depuis une petite dizaine d’années, je me suis davantage tourné vers des chevaux d’âge à partir de sept ans sur des épreuves jusqu’à 1,50m. Je vais continuer à former des chevaux jusqu’à 1,60m, en m’améliorant aussi, parce que c’est en faisant que l’on progresse. Avec Fantasio, l’objectif serait de participer au plus de CSI 5* possible. Si nous pouvons être performants à ce niveau, pourquoi ne pas viser les Coupes des nations de première ligue. Si tout se passe bien, nous verrons la suite pour les championnats d’Europe, qui se tiennent cette année à Milan. Il reste à savoir si nous serons prêts à temps parce qu’il y a du beau monde à ce niveau-là. J’essaie de faire ma place sans brûler les étapes.

Quels chevaux peuvent épauler Fantasio Floreval Z ? Certains vont-ils pouvoir le relayer en Grands Prix à 1,60m? 

Pour l’instant, je prépare des chevaux de huit ans, nous ne savons pas encore quel est leur potentiel mais ce sont assurément de bons chevaux. Mon cheval J concourt à 1,45m et débutera les épreuves à 1,50m d’ici un mois ou deux et nous verrons ce dont il est capable. Pour l’instant, j’ai un ou deux chevaux fraichement arrivés qui pourront peut-être épauler Fantasio, mais l’écurie tourne bien, il y a des arrivées et des départs. Nous avançons ainsi. L’avantage de concourir à ce niveau est que les demandes pour monter des chevaux s’accélèrent et mon piquet devient de plus en plus intéressant à mesure.

Y a-t-il eu des transferts significatifs récemment dans vos écuries?

Pour l’instant, il n’y a pas encore d’arrivées significatives au sein de l’écurie. En ce qui concerne les départs, j’en ai vendu plusieurs l’année dernière dont Chakira Z (Z, Crown Z x Quidam de Revel), qui court à haut niveau avec un cavalier espagnol (avec Santiago Nuñez Riva, elle s’est placée deuxième du Grand Prix 4* de Vejer de la Frontera dimanche passé, ndlr), et qui a participé à l’étape de la Coupe du monde de La Corogne (avec un score final de quatre points, début décembre, ndlr). Elle a aussi été vice-championne d’Espagne l’année dernière et elle obtenu des classements en 4*. Il y a un autre cheval, California Pie (WESTF, Captain Cooper x Ramiro’s Son), avec qui j’avais commencé à courir des épreuves à 1,50m en septembre 2022, quelques mois après son arrivée. Il a également été vendu et court désormais sous la selle de Darragh Kenny. C’est le système que j’ai mis en place ; ne pas vendre Fantasio pour en profiter, continuer à former d’autres chevaux avec un objectif sportif et à terme commercial. 

“Fantasio est mon cheval de cœur”

Quel avenir envisagez-vous pour Fantasio Floreval Z ? Avez-vous eu des propositions d’achat ? Comptez-vous le conserver?

L’avenir serait de continuer à performer à ce niveau-là. Je ne compte pas le vendre parce qu’initialement, je l’ai acheté pour ma femme pour sauter des 1,30m. Il s’est avéré que la qualité du cheval était bien supérieure, nous l’avons remarqué au fur et à mesure. C’est un cheval de cœur, que nous aimons énormément. Nous avons souvent des propositions d’achats, le téléphone sonne très régulièrement (rires) malgré le fait qu’il soit âgé de treize ans. Il est encore tout neuf parce qu’il a commencé sa carrière de haut niveau à dix ans. Nous l’avons acheté pendant sa saison des neuf ans, il avait fait jusque-là une cinquantaine de parcours au peu près. Il a pu finir sa croissance tranquillement. L’année dernière a été sa première vraie saison complète de concours, parce qu’en 2020, il y a eu le confinement et en 2021, la rhinopneumonie. Il n’avait fait que des bouts de saison avant ça.

Comment comptez-vous orienter votre saison? Les CSIO seront-ils votre priorité?  

Ça sera en fonction de ce que va me proposer le l’équipe fédérale. J’ai déjà pris part à des CSIO 3*, notamment à Deauville et Lisbonne l’année dernière. À Lisbonne, ça s’était plutôt bien passé, nous avons terminé cinquièmes de la Coupe et quatrième du Grand Prix. Il y a un an et demi à Vejer de la Frontera, nous avons participé à la Coupe des nations, c’était ma première fois en deuxième ligue. Ça ne s’était pas très bien passé, nous avions tous fait quatre points, en revanche, j’avais gagné le Grand Prix CSIO. Si on me propose une nouvelle participation à ce format, je préfèrerais que ce soit en première ligue, pour voir si nous sommes aptes à être performants à ce niveau.

Les championnats d’Europe de Milan pourraient-ils être un objectif?

Ils pourraient l’être en fonction de tout le reste de la saison mais aussi de la régularité de Fantasio. Normalement, il est assez régulier, a l’avantage de signer beaucoup de parcours sans faute dans les Grands Prix, donc s’il va bien, qu’il est en forme et que j’arrive à assurer la pression des Coupes des nations et du schéma pour aller jusqu’aux championnats d’Europe, pourquoi pas. C’est à envisager mais il faut faire sa place, ce n’est pas facile. Il faut prouver sans arrêt que nous pouvons faire partie de l’équipe.

À moins de cinq cent jours du coup d’envoi des Jeux olympiques, sentez-vous une effervescence qui se créée ? Rêvez-vous d’y participer?

C’est toujours dans un coin de la tête en tant qu’athlète. Je suis un amoureux de la compétition donc je nourris toujours ce rêve. Je ne veux pas me focaliser dessus pour n’avoir aucune déception si jamais je n’y participe pas. En tout cas, si les portes s’ouvrent et que nous sommes suffisamment performants, cela peut être envisageable. Pour l’instant, je suis dans le groupe B, nous devons continuer à faire nos preuves régulièrement pour pouvoir peut-être passer en groupe A, gravir les échelons, avancer dans le classement mondial aussi. Je suis dans les cent cinquante meilleurs mondiaux (actuellement cent quarante-huitième, ndlr), ce n’est pas suffisant, et engranger des points avec un seul cheval n’est pas évident. Cela reste dans un coin de ma tête, je pense que tout le monde a un peu ce même rêve de JO, ça parait humain.

Y a-t-il d’autres sports que vous souhaiteriez voir lors des JO?

Pourquoi pas l’athlétisme, parce que c’est en France et vraiment pas loin de chez nous. Cependant, obtenir des billets a l’air compliqué donc il faut se pencher sur la question. Mais bien sûr, si je ne suis pas sélectionné, j’irai voir l’équitation. Il s’agit tout de même d’un évènement à ne pas rater, que l’on soit compétiteur ou non. 

Outre l’équitation, avez-vous d’autres centres d’intérêts?

Non, car je suis pas mal pris avec mon métier. Je tiens une écurie, et même si elle n’est pas très grosse, nous avons quand même dix-huit chevaux, des élèves à faire travailler, une petite partie élevage et nous faisons un peu de commerce, pour laquelle je passe pas mal de temps au téléphone. J’ai également des enfants à m’occuper quand je suis à la maison. Nous sommes souvent en concours assez loin, donc quand nous sommes aux écuries, nous essayons de prendre le temps de faire les choses. Ma fille monte en concours et mon fils joue au tennis donc il y a de quoi s’occuper!