Comment choisir le bon étalon pour sa jument?

Aujourd’hui plus que jamais, les éleveurs ont accès à une multitude d’étalons issus de divers stud-books et pays lorsqu’ils cherchent un reproducteur à associer à leur jument. Dans ce contexte, comment peut-on effectuer le meilleur croisement possible? Depuis plusieurs années, des outils d’aide aux croisements, permettant parfois d’objectiver les observations empiriques, et en tout cas d’affiner sa sélection, sont à la disposition de ceux qui doivent faire ce type de choix.



En France, les trois quarts des éleveurs disposent seulement d’une ou deux juments dédiées à la reproduction, selon les chiffres de 2021 publiés par l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE). Il est donc d’autant plus crucial pour eux de faire le bon choix d’étalons au sein d’une offre pléthorique. Pour cela, certains souhaitent absolument voir les reproducteurs “en vrai”, que cela soit lors d’épreuves sportives ou de présentations comme le très attendu Salon des étalons de sport de Saint-Lô. D’autres s’intéressent surtout aux performances réalisées en compétitions. Une analyse détaillée de la conformation, des allures, de la génétique ou encore de la technique de saut – s’il s’agit de faire naître un poulain destiné au saut d’obstacles ou au concours complet, par exemple – de la future mère semble en revanche être une base faisant consensus, les éleveurs devant également identifier clairement leurs buts en faisant saillir leurs juments.



Objectiver ses critères de sélection

Lorsque vient le temps du choix de l’étalon à proprement parler, il existe plusieurs écoles: certains vont chercher à compenser les points faibles de leurs poulinières, quand d’autres préfèreront chercher avant tout à renforcer leurs qualités. En parallèle de ceux qui fonctionnent au coup de cœur, certains s’inscrivent dans une démarche d’élevage beaucoup plus jalonnée. Quelle que soit leur approche, les éleveurs disposent de plusieurs outils les aidant à déterminer les meilleurs croisements possibles avec leurs juments. On pense, bien sûr, d’emblée aux indices génétiques et de performances, mis au point et publiés depuis plusieurs décennies par l’IFCE, mais il ne s’agit pas des seuls instruments existants. Aussi, le Stud-book Selle Français a mis en ligne en 2020 le site étalonsf.fr, qui regroupe notamment des fiches dédiées aux performances des produits et aux caractères transmissibles par les étalons approuvés à reproduire dans la race. “Notre objectif est de proposer des outils qui puissent aider les éleveurs dans leurs choix en apportant des éléments objectifs sur les grandes caractéristiques de production des étalons”, indique Benoît Chaigne, directeur technique de l’association nationale de race.



Les fiches du Stud-book Selle Français, une aide précieuse

La fiche des performances de la production, éditée pour les reproducteurs ayant au moins cinquante produits en compétition en saut d’obstacles ou vingt-cinq en concours complet, affiche avant tout la répartition de la production de l’étalon par niveaux d’indice. “C’est intéressant, car on sait par exemple que 2% des chevaux obtiennent un indice de 140. Si un étalon voit 6% de ses produits atteindre ce score, il est donc trois fois meilleur que la moyenne, alors même que 94% de sa production a un indice inférieur”, appuie Benoît Chaigne. Ces informations sont complétées par un classement des étalons établi “sur la base de l’indice minimum ou moyen des meilleurs 25% de leurs produits, deux données assez originales”. L’âge moyen des descendants français des reproducteurs est également pris en compte pour établir des groupes, dans lesquels les sires sont ensuite classés en quatre catégories. 

Sur la fiche des caractères transmissibles d’un étalon, on retrouve seize critères de jugement au modèle, aux allures ainsi qu’au saut en liberté, et pour chacun de ceux-ci, il est indiqué si les produits du reproducteur évalués par le Stud-book sont supérieurs, inférieurs ou dans la moyenne de la population pour les qualités recherchées. “Comme lorsque l’on utilise les indices génétiques et de performance, il faut ici vraiment prêter attention au coefficient de détermination, car si l’on considère un étalon comme améliorateur sur un critère, mais que l’on n’a pas vu beaucoup de ses produits ou que sa famille n’est pas trop renseignée, l’incertitude est quand même grande”, prévient Benoît Chaigne. “Par ailleurs, on peut, par exemple, savoir que les produits d’un étalon ont des dos d’une qualité supérieure à la moyenne, mais on ne sait pas si leurs dos sont plutôt longs, courts, creux ou carpés… C’est le prochain volet sur lequel nous travaillons actuellement.”



Le nouveau PAX

Lancé il y a huit ans, le programme d’aide au croisement du Groupe France Élevage (GFE), baptisé PAX, a été modernisé pour donner le PAX Express et le Nouveau PAX, toujours disponibles en ligne sur le site du collectif. “Nous avons une commission interne entièrement dédiée à la caractérisation des étalons des points de vue de la morphologie, des allures, de la technique, du caractère, de la production, etc.”, explique Brice Elvezi, directeur du GFE. “Elle actualise chaque année les fiches de nos reproducteurs, qui sont réalisées à partir des caractéristiques propres et de celles transmises, dès lors que nous connaissons la production de l’étalon.” Avec le PAX Express, accessible à tous, l’éleveur peut choisir deux étalons parmi les quatre-vingts distribués par le collectif, puis est ensuite invité à décrire sa jument selon onze critères liés à sa conformation ou encore sa manière de sauter. Dès qu’il a évalué sa jument sur trois de ces onze caractéristiques, une jauge de compatibilité apparaît avec les reproducteurs choisis, qui évolue en fonction des informations renseignées. “Ce programme aide à vérifier rapidement et simplement les avantages et les risques d’un projet d’accouplement”, indique Brice Elvezi. 

Concernant le Nouveau PAX, accessible via une simple inscription, il est nécessaire pour l’éleveur d’enregistrer puis de caractériser sa ou ses jument(s). S’il en éprouve le besoin, il peut solliciter l’aide du GFE en envoyant plusieurs photos prises au modèle ainsi que quelques vidéos pour observer les allures et la technique de saut. Il pourra ensuite choisir dix étalons distribués par le collectif pour déterminer lequel sera le mieux adapté à sa poulinière, mais aussi s’appuyer sur des propositions faites par l’algorithme du Nouveau PAX. “Une fois que l’on a saisi ses juments et qu’elles sont enregistrées, on peut s’amuser à les comparer avec le dernier étalon arrivé au catalogue, par exemple, pour savoir laquelle conviendra le mieux à Apardi (KWPN, Corland x Kannan), par exemple, ou encore Jet des Forêts (SF, Untouchable x Calvaro), le tout récent champion de France des trois ans”, décrit Brice Elvezi, illustrant l’usage du PAX inversé, une fonctionnalité très utile pour les éleveurs ayant un cheptel de poulinières important. Par ailleurs, les conseils de croisements peuvent ensuite être approfondis avec le PAX Graphique, schématisant la compatibilité des parents sélectionnés en illustrant la probabilité de la valeur médiane de chaque caractéristique.

Cet article est paru dans le dernier numéro du magazine GRANDPRIX.