“J’ai été amenée à réfléchir sur beaucoup d’éléments, ma façon de faire et comment je souhaite mener ma vie”, Gwendolen Fer

Comment se porte Romantic Love, votre cheval de tête ? 

Franchement, il est en plein forme ! Comme tout le monde le sait, c’est le doyen de l’épreuve. Mais encore ce matin sur la piste (entretien réalisé le 14 juillet, ndlr), il avait une sacrée énergie ! Tant que je le verrai comme ça, je continuerai. Ça ne lui demande pas beaucoup d’effort au quotidien. Romantic s’économise énormément et peut avoir un travail léger. Il a aussi du sang naturel donc il n’a pas besoin d’énormément de galop pour ce type d’épreuve. Il tient sur la longue durée grâce à son mode de vie et son comportement. C’est un tout, Romantic est un cheval hors normes.  

Romantic Love a maintenant dix-huit ans. Comment va s’organiser son année 2023 ?  

C’est lui qui me le dira ! Je n’ai pas d’objectifs précis avec lui. Je veux me faire plaisir. Enfin, je ne pourrai pas juste me faire plaisir, il faudra aussi que j’aille chercher une victoire à chaque fois. Cela ne nous ressemblera, ni à lui et ni à moi, de seulement concourir pour faire de la figuration. Tant que je vois qu’il a envie, qu’il saute dans le camion pour aller en concours, qu’il a toujours autant d’allant pour aller sur un cross, nous continuerons. Il est difficile de savoir quand arrêter ces chevaux. À chaque fois, je me demande si je ne devrais pas le stopper, le faire avant le concours de trop. D’un autre côté, il montre qu’il en a tellement envie. Alors je pense que ce n’est pas encore le moment. Après Jardy, il courra le Grand National du Pin (du 18 au 23 août, ndlr.). Ensuite, il aura certainement fini sa saison et après, Inch Allah. On verra. 

Pour la relève, vous apparaissez dans des épreuves CCI 3 et 4* ou en Grand National avec d’autres chevaux dont Enigmatik Fidjis (AA, Jalienny, AA x Fusain du Defey, AA). Qu’ambitionnez-vous pour lui  ? 

J’ai des grandes ambitions avec ce cheval. Nous avons connu un début de saison mitigé. Après mon arrêt pour ma grossesse, il a fallu du temps pour que nous nous retrouvions tous les deux. Nous avons encore des points de détail à régler. Il n’a que neuf ans donc ce n’est pas grave mais il ne faut pas oublier qu’il a une demi-saison en moins que les autres chevaux. Je ne l’avais pas anticipé, que ce soit avec lui ou avec ma jument de huit ans, Fashion Fonroy (SF, Huppydam des Horts x Quick Star) en qui je crois beaucoup également. Ils ont besoin de prendre leur temps cette année. J’aimerais bien finir la saison avec un CCI 4*-L pour Enigmatik. Je ne sais pas encore si cela sera Lignières ou Boekelo. Avant cela, je pense qu’il courra le CCI 3*-L de Saulieu. Cela fait deux ans qu’il n’a pas pris part à un 3* long donc j’aimerais qu’il en refasse un pour se remettre sur ce format-là avant de l’engager dans un 4* long. Je crois beaucoup en Enigmatik; avec lui, j’ai envie de renouer avec les 5*. 

Qu’en est-il de Fashion Fonroy ?  

Comme pour Enigmatik, Fashion a manqué de concours. J’ai recommencé la saison de compétitions comme s’ils avaient fini la première. J’aurais peut-être dû y aller plus progressivement mais ce n’est pas grave, il faut savoir les écouter et prendre le temps. Nous l’avons donc redescendue de niveau. Elle a refait une Pro 4 et un 3*. De toutes façons, ce sont eux qui me disent comment évoluer et progresser au fur et à mesure des concours. L’ambition reste de renouer avec l’équipe de France, les 4 et 5*. Des épreuves comme Badminton ou Luhmühlen me font envie. J’adore cette adrénaline que l’on ressent sur le cross, c’est ce qui me donne le désir de continuer sur ces belles épreuves.

“Cette nouvelle génération de chevaux a quelque chose de spécial qui va me ramener en équipe de France”

Vous avez aussi un piquet rempli de jeunes chevaux de cinq, six, sept ou huit ans, avec lesquels vous évoluez dans des épreuves qui leurs sont réservées. Quels sont vos objectifs avec eux ? 

Je suis en train de restructurer toute mon écurie. Je n’en ai jamais trop parlé, mais avec la perte de ma fille en janvier (le 14 janvier, Charlie “s’est envolée très rapidement après sa naissance”, ndlr), cela n’a pas été facile. J’ai été amenée à réfléchir sur beaucoup d’éléments, sur ma façon de faire et comment je souhaite mener ma vie. Je suis donc en train de faire des changements, en réduisant le nombre de chevaux et en abordant les choses différemment. Je garde uniquement les chevaux sur lesquels je me sens vraiment bien et avec lesquels j’ai envie de performer. J’ai l’impression que cette nouvelle génération de chevaux a vraiment quelque chose de spécial, qui va me ramener en équipe de France. 

Allez-vous pouvoir les conserver ou sont-ils destinés à la commercialisation ? 

Nous avons toujours un équilibre financier à trouver parce que nous avons une structure à entretenir. J’essaye d’avoir moins de chevaux de concours. J’en avais plus de dix-huit à sortir en compétition jusque-là. J’ai aussi beaucoup d’élèves, qui sortent de l’Amateur 4 au 4*. Cela faisait vraiment beaucoup. J’ai envie de changer les choses et de faire perdurer les écuries différemment. J’ai réduit mon piquet de chevaux à une dizaine de montures. Je pense que c’est mieux ainsi. 

Avez-vous en ligne de mire sur le Mondial du Lion, mi-octobre ? 

Le Mondial du Lion me fait envie car ce n’est pas mon terrain fétiche, il l’est plutôt lors des étapes du Grand National ! (rires) L’an dernier, Fashion et Fara des Loges (SF, Diarado x Quartz du Chanu) étaient qualifiées mais il a fallu que je m’arrête. Cette année, j’aimerai vraiment qualifier Galway du Biolay (SF, Canturo x Quaprice Boimargot Quincy). Ce n’est pas fait mais pas encore perdu non plus. Il a eu de la peine à commencer sa saison avec des petites blessures qui ne prenaient pas longtemps, environ trois semaines. À chaque fois que nous le remettions au travail, il se blessait à nouveau. J’ai perdu du temps dans sa progression, mais comme je le disais tout à l’heure, je ne peux pas avancer trop vite non plus. Je veux consolider chaque base. Il fait son premier 2*. Nous verrons comment les choses se profilent. J’adorerais aller au Lion mais je prends un peu de retard avec ce cheval-là. Cependant, j’aimerais vraiment qu’Herun Dujo (SF, Olala de Buissy x Idéal de la Loge), un cheval de six ans que j’aime beaucoup, soit qualifié pour le Lion l’année prochaine. Il me fait penser à Romantic, c’est peut-être pour cela que je l’aime beaucoup. 

“En championnats, il y a de la stratégie et des enjeux différents d’un concours individuel”

Les championnats d’Europe au Haras du Pin se dérouleront dans l’Orne du 9 au 13 août prochain. Croyez-vous à une médaille d’or française face à l’armada britannique ? 

Comme tout le monde, si nous regardons le papier, l’équipe anglaise parait imbattable. Les Français ont l’habitude de ne jamais rien lâcher et l’équipe est belle (Thierry Touzaint a annoncé sa sélection le 10 juillet, ndlr). J’ai envie d’y croire. Je pense d’ailleurs que Thierry n’a jamais eu la médaille d’or en championnat d’Europe. Je pense qu’il a vraiment envie d’aller la chercher. Il a une équipe sur laquelle il peut compter. Pour avoir couru plusieurs autres championnats, ces échéances sont réellement à part, l’ambiance est toute autre car nous sommes vraiment là pour notre nation, nous montons pour une équipe. Il y a de la stratégie et des enjeux différents d’un concours individuel. Parfois, plein de choses se déroulent sans que nous nous y attendions. Cela fait aussi la beauté de ces championnats. Je pense que nous pouvons battre les Britanniques. On ne sait jamais. Nous avons bien vu Yasmin Ingham essuyer un refus à Lexington (avec son champion du monde Banzaï du Loir, en avril 2023, ndlr.) ou Laura Collett faire une barre en trop aux JO (de Tokyo en 2021, avec London 52, ndlr). Tout peut arriver et j’ai envie d’y croire.

Vous y serez la consultante de Kamel Boudra pour commenter les épreuves sur Clipmyhorse.tv. Avez-vous hâte de vivre la compétition de cette manière ? 

C’est vrai, j’y serai d’une façon différente ! Au départ, j’y suis pour mon partenaire Antarès et Kamel m’a effectivement contactée pour être consultante avec lui. Je trouve que c’est sympa. À Pau, je commente souvent le cross et j’apprécie cet exercice. Il est encore plus agréable de le faire avec Kamel. 

Que peut-on vous souhaiter pour la suite ? 

De retrouver des chevaux pour le haut niveau et d’être maman !